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Histoire et Médias

Publié le 30/03/2011

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histoire

Entre l'histoire des « saltimbanques «, conteurs d'histoires et montreurs d'images, officiant sur nos chaînes de radio et de télévision, et celle des historiens, gens d'écrit et de réflexion explicative, le fossé a paru un moment infranchissable. Mais ces dix dernières années, l'évolution, tant des historiens que des médias, aurait rapproché ces deux histoires. Rapproché? Peut-être pas, mais certainement mêlé dans la diversité des genres et des contenus proposés. L'histoire, sujet privilégié de la radio et de la télévision, déborde largement, dans le cadre, des limites assez strictes d'une discipline pratiquée par des gens de métier. Elle relève beaucoup plus de la « sensibilité au passé « (réelle ou supposée par les programmateurs), dont on voit bien les composants : sentiments d'évasion que procure le décalage dans le temps, plaisir que peut susciter l'évocation d'un passé familier ou inconnu, émotion du temps ressuscité. « L'heure de rêver est arrivée... Je ne sais pas si vous êtes comme moi. C'est vrai que je n'ai de véritable plaisir à rêver que sur des histoires vraies. « Au spectacle, l'histoire fournit le décor et le scénario. Elle est faite de destins, individuels ou collectifs, parfaitement ajustables aux thèmes du récit dramatique classique : fatalité et révolte, oppression et justice, affrontements des ambitions et des passions de toutes sortes, portés à leur paroxysme et souvent dénoués par des crises ou des guerres qui ne sont après tout que des meurtres collectifs. L'histoire est propre au récit. Par son caractère chronologique, linéaire, bien sûr, mais surtout parce que son objet est le temps lui-même. L'histoire est maîtresse d'un temps élastique, qu'elle fractionne à son gré : la Révolution française se raconte en un ou dix épisodes. Ses scénarios prédécoupés s'adaptent à une programmation organisée en tranches horaires. Incontestablement, l'histoire est une bonne matière. « Entre 1953 et 1978, les programmes à la télévision dans leur ensemble ont été multipliés par six. Les émissions d'histoire ont été multipliées par vingt et un, soit 3,5 fois plus que l'ensemble des programmes, à l'exclusion des films de fiction «. Les historiens de métier se sont émus de cette rencontre de l'histoire et du spectacle. Dans les années 60, où l'historiographie1 remettait vigoureusement en cause une conception strictement chronologique, événementielle du passé, où les travaux s'attachaient aux évolutions de longue durée et au quotidien des oubliés de l'histoire, il ne paraissait pas, à juste titre, souhaitable que s'imposât avec succès une histoire sinon toujours anecdotique, du moins dramatisée et souvent focalisée sur les seules grandes figures. On se souvient du succès de « La Caméra explore le temps «, de Stellio Lorenzi, Alain Decaux et André Castelot qui, de juin 1956 à mars 1966, a proposé en « dramatique « différents épisodes de l'histoire de France. La télévision était accusée de diffuser une conception limitée, dépassée de l'histoire et, de par sa nature même, d'entretenir de regrettables confusions. La programmation se soucie peu évidemment de cohérence chronologique ou thématique. [...] L'évolution s'est faite dans les années 70. D'abord parce que les genres télévisuels eux-mêmes ont évolué. Le débat s'est imposé dans tous les domaines de la production avec une émission vedette. « Les Dossiers de l'écran «, dont l'histoire a été un thème favori. La formule de la controverse d'experts a marqué l'apparition sur le plateau de personnalités du monde universitaire, les historiens étant plus souvent sollicités que d'autres. Dans la même période, est apparu un autre genre, le film historique de montage, œuvre de journalistes venus des magazines de grand reportage (cf. Grandes batailles du passé, d'Henri de Turenne). Ces reporters lancés dans le passé appliquent à l'histoire des pratiques rodées dans l'exercice quotidien de leur métier. Ils privilégient l'image, le montage rapide. Ils réduisent la part du commentaire qui, traditionnellement, dans le documentaire, corrige les « erreurs « de l'image, au bénéfice de la précision mais au risque d'un didactisme2 pesant. Ils utilisent l'interview comme élément d'information et d'explication, avec tous les dangers de distorsion et de manipulation que permet le montage. Le retentissement du Chagrin et la Pitié3, la polémique et le succès qui suivirent l'interdiction de sa diffusion au petit écran ou incontestablement obligé les historiens (et notamment les historiens du xxe siècle) à s'interroger sur l'usage de l'image et du témoignage, sur la nature des archives audiovisuelles et leur place dans leur discipline, et même à devenir eux-mêmes réalisateurs. Jean-Noël Jeanneney, revue Autrement, n° 88, mars 1987. 1. Historiographie : réflexion sur les méthodes de recherche et d'enseignement de l'histoire. 2. Didactisme : souci d'instruire. 3. Le Chagrin et la Pitié : film réalisé à partir d'images d'archives, portant sur la période de l'Occupation (1940-1945).

1. Vous résumerez le texte en 185 mots (une marge de 10 % en plus ou en moins est admise). Vous indiquerez, à la fin de votre résumé, le nombre de mots employés. (8 points) 2. Vous expliquerez le sens dans le texte des expressions : — oubliés de l'histoire ; — controverse d'experts. (2 points) 3. L'utilisation de l'histoire par les médias vous paraît-elle bénéfique pour le public, ou risque-t-elle de nuire à une véritable connaissance du passé? (10 points)

histoire

« — oubliés de l'histoire ; — controverse d'experts.

(2 points) 3.

L'utilisation de l'histoire par les médias vous paraît-elle bénéfique pour le public, ou risque-t-elle de nuire à unevéritable connaissance du passé? (10 points) (Polynésie française) Résumé Traditionnellement les historiens de métier s'opposaient à la petite histoire pratiquée à la radio ou à la télévision.Aujourd'hui l'histoire envahit les médias : elle correspond à l'attente d'un public friand d'évasion et amateur devérité.

Dans le mariage entre histoire et spectacle, la toile de fond et les personnages sont historiques, mais lanarration, les sentiments sont romanesques.

L'histoire présente de plus un intérêt pratique : chronologique, elle estétirable à souhait selon les impératifs commerciaux.

Ceci s'oppose évidemment aux exigences méthodologiques deshistoriens, qui, dans les années 60 ont abandonné l'histoire des événements et des grands hommes au profit depériodes plus vastes et des individus anonymes, ce que n'apprécie pas le grand public.

Les années 70 ont vu naîtreun compromis, ainsi un débat d'experts après un film historique ou des montages d'archives qui réduisent la partromanesque par des interviews et de brefs commentaires.

Histoire et télévision ne peuvent plus faire ménage à part,les historiens doivent collaborer en personne à une meilleure connaissance de l'une par l'autre.

(183 mots.) Vocabulaire Oubliés de l'histoire. Il s'agit des individus anonymes sur lesquels nous avons peu de documents mais qui font également l'histoire, enopposition avec les grandes figures historiques qui ont tendance à les éclipser.

On citera les soldats face aux chefsmilitaires, le peuple, les groupes sociaux face aux dirigeants politiques.

C'est à ces oubliés de l'histoire ques'intéressent les historiens des années 60. Controverse d'experts. Il s'agit ici de débats, de discussions de spécialistes qui viennent exposer leurs idées et leurs thèses, commependant le débat suivant la projection du film dans l'émission « Les dossiers de l'écran ». Discussion L'histoire n'est plus l'apanage des spécialistes, elle ne se cantonne plus dans les cours, les conférences et à l'école.Témoins, les étalages des libraires où affluent les romans historiques ou les essais plus difficiles, et les programmesde radio et de télévision riches en émissions tournées vers le passé.

Cette ouverture, cette vulgarisations'accompagnent-elles de compromis intellectuels néfastes à une juste connaissance du passé ? Entre l'Histoiremajuscule et la petite histoire, y aurait-il antinomie ? De « Shoah », montage d'interviews sur les camps de la mortde Claude Lanzmann, diffusé l'été dernier à une heure tardive à la télévision, aux films prétendus burlesques de la 7eCompagniey l'éventail est large...

L'utilisation de l'histoire par les médias est-elle bénéfique ou maléfique? Toutdépend des moyens utilisés et du but recherché. Les médias possèdent de nombreux avantages matériels inhérents à leur définition qui facilitent l'acquisition deconnaissances par rapport à l'enseignement traditionnel de l'histoire.

Citons parmi les principaux : le découpage dusujet, le mode de présentation et la séduction du spectacle. L'historien fait face à de nombreux problèmes méthodologiques quand il choisit d'aborder une période : comment lalimiter, expliquer ce qui précède, annoncer ce qui va suivre sans jouer à bon compte les prophètes, comment lacentrer, autour de quelles figures célèbres ou de quel groupe social anonyme ? Le vulgarisateur, sans acceptionpéjorative, ne s'embarrasse pas de même.

Il a une prédilection pour les héros, les héroïnes; son genre favori est labiographie qui mêle la grande histoire plus ou moins arrangée à la petite avec le récit des amours, l'explication dessentiments, les comparaisons avec les individus contemporains des auditeurs... Le mode de présentation peut également paraître plus attirant : le feuilleton radiodiffusé tel que le pratiquent PierreBellemare et Eve Ruggieri en sont de parfaits exemples.

L'auditeur y retrouve à heure fixe, pour une durée limitéesavamment calculée, ses présentateurs favoris, leur voix, leurs mots d'esprit, leurs explications, leurs centresd'intérêt qui recoupent les siens. Le critère du spectacle constitue l'argument majeur en faveur du cinéma historique.

L'image est ici toute puissante.Le spectateur retrouve ses acteurs favoris, les monstres sacrés d'Hollywood par exemple dans les superproductions(pensons à Richard Burton et à Elisabeth Taylor dans le film « Cléopâtre »), des décors fastueux, des foules defigurants, des scènes connues comme des morceaux de bravoure (le Colosse de Rhodes dans le film du même nom,l'éruption du Vésuve dans « Les derniers jours de Pompéi », le sac de Troie dans « Hélène de Troie », la scène desdix commandements dans le film intitulé de même...).

La lecture n'apporte pas évidemment les mêmes plaisirs.. »

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