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L'histoire est-elle la résurrection du passé ?

Publié le 18/02/2004

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histoire
Commenter cette pensée de Michelet : « L'histoire est la résurrection du passé ». I. Diverses manières de concevoir et d'écrire l'histoire. Conception de Michelet : évocation intégrale du passé; le faire revivre dans son exacte et nette réalité, avec son mouvement propre et captivant... II. Conditions nécessaires pour réaliser cette conception : 1° Conditions scientifiques : documentation exacte, sens critique, etc. 2° Conditions artistiques : Mais les matériaux ne suffisent pas; il faut l'imagination et la sensibilité pour les animer; il faut la vision du poète pour retrouver sous ces débris ce qui fut humain, ce qui vécut, ce qui palpita, ce qui souffrit; il faut sa puissance créatrice pour les rapprocher, les unir, les organiser, en un mot, pour les animer et les faire revivre (exemples). III. Cependant la représentation du passé ne peut être une résurrection intégrale et sûre : a) Insuffisance des documents, surtout quand il s'agit des origines. b) Lacunes inévitables, même pour les époques les mieux connues.
histoire

« disparues et créer l'illusion de la vie.

C'est en ce sens que l'on a pu dire : « L'Histoire est une résurrection objectivedu passé.

» I.

Connaissance précise et minutieuse du passé Un ouvrage historique doit d'abord s'édifier sur des bases larges et solides.

Aussi le travail de recherche auquel ildonne lieu est-il considérable.

Thiers consacre quinze ans de sa vie à son Histoire du Consulat et de L'Empire.Quarante années furent nécessaires a Michelet pour mener à bien cette Histoire de France qu'il espéraitprimitivement achever en quatre ou six ans.

Le plus souvent la moisson est hors de proportion avec l'effort fourni.Des quarante volumes de Dangeau, Voltaire tirera une quarantaine de pages de son Siècle de Louis XIV.

Au reste,plus encore que l'abondance des documents, ce qui frappe c'est leur diversité.

Témoignages oraux d'abord quandl'ouvrage que l'historien entreprend a trait à une époque presque contemporaine.

Pour Le Siècle de Louis XIV,Voltaire interroge ceux qui furent mêlés aux événements ou leurs proches : Caumartin, Villars, lord Petersborough,les parents de Fouquet et de Mme de Maintenon.

Pour L'Histoire de Charles XII qu'il publie une douzaine d'annéesseulement après la mort du Roi, il s'adresse entre autres au maréchal de Saxe et au roi Stanislas.

A côté de cestémoignages oraux, figurent les mémoires du temps, inédits ou imprimés.

Près de deux cents volumes de cesmémoires, entre autres ceux de Dangeau et de Saint-Simon, furent consultés par Voltaire pour son Siècle de LouisXIV.

Bossuet, pour décrire la bataille de Rocroi, s'inspire étroitement d'une relation des faits de l'aide de camp deCondé : le marquis de la Moussaie.

Michelet, outre les chroniques et les chartes, consulte les oeuvres littéraires etles oeuvres d'art, et étudie jusqu'aux médailles et aux estampes.

Rien ne doit être négligé de ce qui permet derestituer dans sa note juste la physionomie d'une époque. II.

Utilisation objective des sources Une fois que l'historien a pu amasser des documents aussi abondants et aussi divers, il lui reste à les interpréter, àen dégager une peinture aussi conforme que possible à la réalité.

Gela suppose de sa part certaines qualitéspersonnelles.

D'abord l'impartialité.

Il faut, comme l'a dit Fénelon, que «le bon historien ne soit d'aucun temps nid'aucun pays ».

Il ne doit pas s'abandonner à ses sentiments personnels, même les plus nobles et, en toute autrematière, les plus légitimes.

Il doit faire taire son patriotisme et ne pas donner de parti pris le beau rôle à son paysdans les rivalités extérieures.

« Le patriotisme est une vertu, écrit Fustel de Coulanges, l'Histoire est une science ; ilne faut pas les confondre.

» A.

plus forte raison doit-il laisser de côté ses propres passions politiques et ne pasmontrer sous un jour systématiquement défavorable, dans les luttes intestines, tel clan ou tel parti qui lui déplaît.Chez Michelet, l'histoire de la Révolution, comme l'histoire de l'Ancien Régime se ressentent dangereusement de lahaine solide qu'il nourrissait contre le clergé.

Parfois même, le parti pris est conscient et l'historien asservit les faitsà la démonstration d'une thèse, s'en sert pour illustrer et pour accréditer les idées qui lui sont chères.

L'Histoire deCharles XII est inspirée par le souci de montrer que l'esprit de conquêtes n'engendre en définitive que le malheur, etLe Siècle de Louis XIV magnifie par contraste, en la personne du Grand Roi, le despote éclairé, dévoué à laprospérité de son pays.

Et c'est pour ne pas entacher d'ombre ce brillant tableau que Voltaire passe sous silence,en ce dernier ouvrage, la cruelle misère des humbles.

Jusque dans le détail perce son souci de faire de son oeuvreun instrument de combat.

Il suffit de voir comme il s'ingénie, dans le récit de la bataille de Rocroi, à prendre lecontrepied de Bossuet sur le même sujet : bien que le fait soit historique, il omet de nous montrer Condé rendantgrâces au ciel après sa victoire et s'applique à montrer comme autant de conséquences naturelles tout ce queBossuet avait attribué à l'action de la Providence. Beaucoup de penseurs d'aujourd'hui ne croient plus que l'idéal d'objectivité impassible dont les positivistes avaientrêvé, que Fénelon lui-même prônait jadis (« Le bon historien n'est d'aucun temps ni d'aucun pays ») soit réalisable. Dans toute la masse des faits du passé que nous pouvons reconstruire à partir de leurs traces, il nous faut faire unchoix.

Mais comment distinguer le fait historique, le fait important du fait non historique insignifiant ? Seignobos disait que l'on juge de l'importance d'un fait à ses conséquences mais celles-ci à son tour ne seront-elles pasappréciées subjectivement par l'historien? On connaît la boutade de Valéry .

La découverte des propriétés fébrifuges de l'écorce de quinquina au XVII ième serait plus importante que tel traité signé par Louis XIV parce lesconséquences de ce traité sont aujourd'hui effacées tandis que « les régions paludéennes du globe sont de plus en plus visitées… et que la quinine fut peut-être indispensable à la prospection et à l'occupation de toute la terre quiest à mes yeux le fait dominant de notre siècle » (« Variété IV »).

Ce qu'il faut retenir de la boutade de Valéry , c'est qu'il n'y a pas en histoire de signification absolument « objective » d'un fait et que c'est en fonction duprésent que nous donnons à tel ou tel fait passé une signification et une valeur.

Nous autres, hommes du XX ième,nous sommes surtout attentifs dans le passé aux faits économiques, tandis que par exemple les chroniqueurs dumoyen âge voyaient d'abord les faits religieux (le récit du moindre « miracle » était pour eux essentiel).

Aucun historien, prétend-on communément aujourd'hui, ne peut échapper à sa subjectivité.

Michelet , pour écrire son « Histoire de France », voulait oublier l'époque contemporaine, s'interdisait de lire le journal, s'enfermait toute la journée aux Archives.

Cela ne l'a pas empêché d'écrire une histoire à la fois jacobine et romantique, une « épopée lyrique » de la France.

Il a projeté dans son œuvre des valeurs sentimentales, des partialités politiques, si bien qu'on a pu dire que « l'histoire de France de Michelet nous apprend plus de choses sur Michelet lui-même que sur la France » ! Raymond Aron a bien mis en lumière la subjectivité de la connaissance historique.

Pour lui, la réalité historique est « équivoque et inépuisable ».

Valéry dit que l'histoire « justifie ce que l'on veut ».

Dans sa richesse hétéroclite, il y a toujours de quoi justifier n'importe quelle position a priori de l'historien.

L'historien se projette dansl'histoire avec ses valeurs et ses passions.

Il ne saurait survoler l'histoire, la constituer du point de vue de Sirius, caril est homme lui-même, il vit dans l'histoire, il appartient à une époque, à un pays, à une classe sociale.

Il est lui-. »

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