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L'histoire est-elle utile ?

Publié le 27/02/2008

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L'histoire est-elle utile ?

Analyse du sujet

 

-          Le temps est comme un milieu dans lequel nous sommes immergés sans pouvoir en sortir, presque aussi réel que la matière ou l’air de que nous respirons. Pourtant il ne cesse de nous échapper, insaisissable et fuyant comme un furet : nous ne pouvons jamais saisir le temps lui-même. du temps nous est « donné « dès que nous entrons dans la vie, mais c’est aussi une promesse de mort qui nous est faite alors. Du point de vue de notre connaissance, c’est un paradoxe qui définit la condition humaine : exister, c’est vivre dans un horizon à la fous ouvert et fermé par le temps, se tenir dans l’écart entre une disparition (le passé) et un absence (l’avenir). Car si le temps a une direction, on peut toutefois se demander s’il a un sens.

-          En effet, l’on voit très bien à quel point l’attitude qui consiste à toujours vouloir se ressouvenir, à essayer de donner du sens aux conduites et faits passées – de telle sorte que la dimension du présent et de l’avenir en sont abolies – apparaît alors symptomatique des dérives pathologiques d’une recherche de sens du temps.

-          La notion de vie implique d’abord l’épanouissement d’un être selon des fonctions organiques, qu’il s’agisse d’une plante, d’un animal, ou d’un homme. Mais l’existence implique que cette vie soit ordonnée par un horizon d’avenir et de sens, elle désigne la possibilité pour une vie d’être autre chose qu’une survie.

-          L’homme ne se contente pas de vivre au sens où il existe (littéralement il est au dehors) : sa vie consiste dans le fait, et parce qu’il entretient avec le temps un rapport singulier, d’être monde sous le double triple rapport d’un passé, d’un futur et d’un présent toujours fuyant. Que signifie pour l’homme le fait de se retourner sur le passé, comme s’il y avait quelque leçon à tirer des événements passés, comme s’il fallait trouver un sens au devenir actuel, comme s’il fallait pouvoir donner une explication, a posteriori, rétrospectivement, de certaines actions ?

-          De là apparaît semble-t-il la nécessité, ou en tout cas l’utilité de l’histoire. En effet, être utile c’est servir un but, une finalité. Et précisément ce qu’il faut interroger ici c’est si l’histoire (du grec historia, qui signifie recherche, chercher à savoir, rapporter ce qu’on sait) est utile à l’homme, c’est-à-dire si elle est en vue de quelque chose, si elle sert une finalité, et surtout laquelle.

-          C’est donc a fortiori l’essence de l’histoire qui est ici mise à la question : on s’interroge en effet ici sur sa raison d’être en se demandant si elle n’est pas que vain et caduque regard sur le passé, ou si au contraire, parce qu’elle regarde le plus objectivement le passé, elle ne sert pas à comprendre les événements qui sont a priori dépourvus de sens et donc, du même coup, à éclairer le présent lui-même.

 

Problématique

 

            L’histoire, en tant qu’elle porte sur des faits passés qui comme tels ne semblent pas intéresser le présent, est-elle utile, c’est-à-dire sert-elle à quelque chose en ce qui concerne l’appréhension et la compréhension des événements tant passés que présents ? Et, dans cette perspective, à quoi est-elle utile ? Comprenons donc que ce qu’il s’agit ici d’interroger c’est bien le statut de l’histoire.

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« · La dimension explicative de l'histoire est en effet aussi fondatrice de l'histoire comme discipline que sa dimension conservatrice.

On attend effectivement que l'historien soit capable, à partir de sontravail historiographique, de nous expliquer ce qui a conduit à tel fat, à telle guerre : c'estl'explication qui son sens à la discipline.

Car que vaudrait une simple conservation du passé si l'on enavait auparavant pas expliciter la valeur ? · C'est donc l'explication qui donne son sens et sa valeur à l'histoire : elle est ce qui rend digne le passé d'être conserver, qui le rend digne d'être l'objet d'un « devoir de mémoire ».

En effet, oncomprend dès lors qu'expliquer le passé c'est mettre à jour les réalités contextuelles passées, c'estdécomposer les rouages, voire les engrenages, qui ont conduit tel génocide, par exemple, à seproduire.

Or, cette explication vaut aussi pour le présent, comme une sorte de leçon à tirer.

Ladimension conservatrice du passé ne prend donc forme et contenu qu'à travers sa dimensionexplicative. · L'historien ne se contente pas d'énoncer de simples faits, mis bout à bout, il recompose leur liaison intrinsèque, il fait apparaître les mécanismes des événements et les explique avec le reculobjectif nécessaire. · L'explicitation de l'histoire, tout comme la conservation, semble donc engager, à titre de synthèse, la mémoire dans sa dimension forte : l'histoire et la mémoire semblent en effet aller de pair,soit l'histoire est une mémoire solidifiée, soit la mémoire est l'instrument de l'histoire.

L'historieninterprète donc, tout comme l'homme tire parfois les leçons de ses expériences : pourquoi lesconserve-t-il ? Précisément par qu'il a su les expliquer objectivement, prendre le recul nécessaire pourleurs donner du sens et donc leur conférer une valeur de « leçon », et par là un « devoir demémoire ». · L'histoire, parce qu'il est cette synthèse de conservation et d'explication, est l'ennemie de l'oubli. La discipline justifie ainsi ses hypothèses par leur confrontation avec le plus de faits avérés possibles.L'histoire ne peut pas choisir de conserver seulement ce qui l'arrange : précisément parce que sadiscipline requiert explication, et en cela ne prend sens que dans la globalité du passé. II.

L'utilité de l'histoire tient essentiellement à ce qu'elle permet de répondre à notre besoin de donner du sens · L'utilité de l'histoire se figure essentiellement en ce qu'elle témoigne du besoin de donner du sens au passé, ce que la synthèse rend d'ailleurs possible.

L'histoire, au sens étymologique, est une« enquête » (cf.

Thucydide).

Comme les événements que l'historien analyse ont disparu, il se faitalors détective (conservation de preuve et reconstitution explicative des faits) : il reconstitue lesfaits à partir de leurs traces et tente de comprendre comment et pourquoi ils se sont déroulés. · L'enquêteur peut choisir de « se mettre à la place » des personnages du drame.

Pour comprendre un événement, l'historien doit s'y fondre et adopter le point de vue de ses acteurs.

Retrouver leursmobiles et découvrir le sens de leurs actes exige d'entrer en sympathie avec eux. · Et si l'historien sympathise avec toute une période, il adoptera le regard que cette période porte sur elle-même.

En restant extérieur à une époque, on « plaque » souvent un sens sur lesévénements, on s'expose à l'anachronisme : on considèrera par exemple les jacqueries médiévalescomme une préfiguration de la lutte des classes.

Le sens n'est pas ici découvert, mais imposé ;inversement, sympathiser, c'est mettre en lumière un sens immanent au passé. · Pourtant, une époque s'illusionne bien souvent sur elle-même.

L'historien contemporain de l'événement qu'il étudie est parfois trop myope : des péripéties le frappent, alors que les causesessentielles lui échappent.

Vu de trop près, le spectacle de l'histoire est un amas bariolé d'incidentsfortuits, comme le note Tocqueville dans Souvenirs . · Il faut donc se place à distance, réunir patiemment les faits pour ensuite découvrir leur enchaînement.

L'historien détermine les raisons d'un événement, il isole, au sein de la succession, desrelations de consécution.

Le sens de l'histoire émerge d'une longue enquête qui met en évidence leréseau des causes et des conséquences. · La synthèse conservation/explication naît donc du besoin de sens qui fait naître le besoin de l'histoire en tant que telle (et non pas comme simple historiographie).

Cette synthèse est le fruit d'untravail rigoureux et d'un savant dosage de distance et de sympathie pour que le sens du passé sedécouvre progressivement, au fur et à mesure de cette démarche synthétique. · Lorsque le philosophe s'indigne devant le cours de l'histoire, son attitude implique souvent l'espoir d'y déceler un ordre secret.

Ainsi, Kant , dans Idée d'une histoire universelle au point de vue cosmopolitique, établit le constat suivant : l'histoire humaine est apparemment dénué de sens.

Mais il exprime pourtant un espoir que son opuscule tâchera de conforter et de justifier.

L'histoire a un sens,selon lui, elle est en progrès ; mais ce fil conducteur du passé n'est pas évident et c'est à l'historienphilosophe de l'exhiber.

Malgré son aspect sanglant, l'histoire serait en fait globalement orientée versune amélioration continuelle de l'humanité.

Ainsi, se trouverait expliqué l'absurde : les guerres ne sontqu'une partie de la marche vers un mieux général.

Grâce à l'idée de progrès notre premier sentimentd'absurdité se trouve dissipé.

On comprend en ce sens à quel point l'unité l'histoire, du point de vuede l'idée, va de pair avec la notion de sens. · Pour tenter de découvrir un autre ordre dans l'histoire, on peut alors chercher en elle un principe de développement qui ne soit particulier à aucune époque et qui ne tienne pas les atrocités pourautant comme négligeables.

Or, la philosophie hégélienne se propose, dans cette perspective, dedépasser cette conception du progrès : l'histoire n'atteindrait pas son but en dépit des folies. »

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