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Est-il injuste de désobéir aux lois ?

Publié le 01/01/2004

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La loi, dans les théories du contrat, peut se comprendre et devient nécessaire, en vue d'éviter un état de guerre néfaste et destructeur pour l'homme, mettant sa survie même en péril. Il est donc nécessaire pour tous les citoyens de vivre sous les hospices de la loi et de les respecter. Sans elles, plus de lien civil possible donc plus de société non plus. La justice peut se comprendre alors comme le fait de respecter les lois dans la mesure où c'est le droit, institué par le législateur, qui détermine ce qui est juste ou non de faire. Il serait donc injuste de désobéir à une loi. Pourtant, face à des violations manifestes de la morale ou des droits de l'homme n'est-il pas du devoir de chacun de violer ces lois ? N'est-ce pas ce qu'ont fait les justes ? La question sous-jacente est alors celle de l'ordonnancement du droit et de la morale.

Toute la difficulté de cette question vient du fait que les lois positives, cad les règles en vigueur dans un Etat, constituent précisément le critère grâce auquel les juges, les gouvernants et même les gouvernés y distinguent ce qui est juste de ce qui ne l'est pas. Pour considérer une loi comme inique et pour estimer juste le fait de lui désobéir, il faut adopter des critères de jugement distincts de ceux qui sont proposés par l'ordre juridique en place. On dissocie alors fortement la légalité et la légitimité, comme le fait Rousseau dans le "Contrat social". Toutefois, comment sera choisi le critère grâce auquel on décidera que telle loi ou tel régime sont justes ou illégitimes ? Est-il fourni par la conscience morale ? Mais ses prescriptions varient d'une personne à l'autre. L'enjeu du débat est donc la possibilité de trouver un critère de jugement possédant l'objectivité du droit positif et la légitimité absolue que revêt à nos yeux la voix de notre conscience.

« exemple). D) Des droits universels et immuables. Si le droit est toujours plus ou moins lié à des rapports de forces et si la loi consacre le pouvoir du plus fort, il enrésulte que la légalité ne coïncide pas toujours avec la légitimité (ce qui est juste).

Le droit ne peut donc êtreassimilé à ce qui a été ou à ce qui est et l'exigence du droit ne peut être enfermée dans les lois positives.

Le droitest aussi un idéal qui exprime ce qui doit ou devrait être.

Antigone est là pour nous rappeler que les lois du coeur,qui sont des lois non écrites, sont parfois plus profondes et plus vraies que les lois positives, que les « lois écrites »de la Cité.

Il y a aussi, comme le dit Kant, au-dessus des lois positives qui changent d'un pays à un autre, d'uneépoque à l'autre, des lois non écrites qui sont intemporelles et que les hommes ne peuvent transgresser sansrenoncer à leur humanité.De même, au-dessus des droits positifs particuliers et variables, il y a des droits universels et inaliénables : droit à lavie, à l'éducation, à l'instruction, au travail, à la participation à la vie politique, à la propriété.

Ces droits sontappelés « droits naturels » parce qu'ils tiennent à la nature de l'homme. E) L'idée de droit naturel. L'idée de droit naturel est ancienne.

Elle signifie que la nature des choses ou de l'homme est le fondement originaireoù toutes les conventions trouvent leur légitimité.

Ainsi, la loi positive ou conventionnelle, qui est fixée par lelégislateur, ne peut être juste que dans la mesure où elle est conforme aux principes naturels.

Pour Aristote, la findu droit est le juste.

Or la nature a fixé de justes proportions, de justes rapports entre les choses.

Il revient doncau droit en tant que science de découvrir ces rapports et à l'art juridique de les faire respecter.

Ce respect est, parailleurs, presque acquis puisque la sociabilité naturelle de l'homme l'incline à rechercher le bien commun et donc lejuste.De son côté, Cicéron qui reprend les idées politiques des stoïciens, affirme qu'il y a une loi naturelle, éternelle etimmuable, dont les principes sont les règles de la raison et qui nous porte au bien et nous détourne du mal : « Ilexiste une loi vraie, c'est la raison droite, conforme à la nature, répandue dans tous les êtres, toujours d'accordavec elle-même, éternelle, qui nous porte impérieusement à accomplir notre devoir, nous interdit la fraude et nousen détourne...

Quiconque n'obéit pas à cette loi s'ignore lui-même et parce qu'il méprise sa nature d'homme, il subirale plus grand châtiment, même s'il échappe à tout ce qu'on appelle ordinairement supplice.

» (« De la République.»,livre III).

Cette raison s'impose aux hommes : de même qu'ils ne pourront jamais faire que la somme des trois anglesd'un triangle ne soit pas égale à deux droits, ils ne pourront faire que le crime soit juste ou le vol honnête.

Elle seprésente comme une loi transcendante qui a existé bien avant l'apparition des peuples et des sociétés civiles.

Elleest née de l'esprit divin : « ...

la loi n'est pas une invention de l'esprit humain ni un décret des peuples, mais quelquechose d'éternel qui gouverne le monde entier, montrant ce qu'il est sage de prescrire ou d'interdire.

Cette loi [...]est l'esprit de Dieu promulguant des obligations et des défenses également rationnelles.

» (« Des lois », livre II).Cette loi transcendante est la seule et unique source de légitimité.

Mais si elle oblige absolument, elle ne contraintpas pour autant matériellement, ce qui signifie que les hommes peuvent aussi agir sans tenir compte de la raison etde ses prescriptions.

D'où la nécessité des lois positives et de la contraintes qui en assure la validité.

Pour êtrejustes, ces lois doivent être conformes à la loi naturelle. F) La raison seule peut assumer la tâche de fonder le droit. A partir des stoïciens, l'idée de droit naturel repose surtout sur l'affirmation que l'homme est, par nature, un êtredoué de raison.

Mais cette raison a elle-même besoin d'être fondée.

D'où la référence à Dieu.

Celle-ci, présentechez Cicéron, se retrouve dans le thomisme.

Selon Thomas, en effet, « il y a dans les hommes quelque loi naturellequi est une participation à la loi éternelle et d'après laquelle ils discernent le bien et le mal ».

Cette loi estassimilable à la Raison de Dieu.

Constatons aussi que la Déclaration américaine de 1776 fonde les droits de l'hommesur le créateur et que la déclaration de 1789 s'est faite « en présence et sous les auspices de l'Etre suprême» («Préambule »).

En revanche celle de 1948 ne comporte aucune référence transcendante.

Une des caractéristiques del'époque moderne est la subjectivité.

Autrement dit, l'homme n'entend plus recevoir ses normes ou ses lois de lanature des choses (Aristote), ni de Dieu (Cicéron ou Thomas), mais entend les fonder lui-même à partir de sa raisonet de sa volonté.

Or la référence à une transcendance permettait d'affirmer le caractère absolu et intemporel desdroits fondamentaux de l'homme.

Dès lors, la raison peut-elle, seule, assumer cette tâche ? Cet idéal d'autonomien'est, au fond, pensable que si la raison humaine peut transcender tout enracinement historique, s'élever au-dessusde ce qui est, pour garantir la validité de ce qui doit ou devrait être, cad des droits fondamentaux de l'homme.

SelonKant, la raison ne peut être législatrice que pour autant qu'elle soit libre, cad qu'elle transcende tous les intérêtsempiriquement conditionnés, puisque c'est à ces intérêts, somme toute, que son autorité est censée s'imposer.Aussi Kant rapporte-t-il l'exigence du droit, qu'il juge naturelle, non pas à la nature empirique de l'homme mais à sanature suprasensible.

Selon cette nature, qui ne peut être connue théoriquement mais que l'on peut penser commepossible, l'homme est capable de se donner à lui-même des lois qui ne sont pas déterminées par les traditions, lepassé ou les contingences du moment.

Avec ou sans Dieu, seule la référence à une transcendance semble pouvoirfonder le droit. G) L'idée du droit est-elle réalisable pratiquement ? Nous interrogeant sur l'utilité du droit, nous avons identifié son rôle de régulateur des rapports sociaux, dans le but. »

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