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L'intuition est-elle nécessaire à la connaissance de la vérité ?

Publié le 25/03/2011

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   Le sujet est dangereux à cause de l'apparente banalité des concepts employés (vérité, intuition). Pour éviter contre-sens et banalités il faudra :    1. Définir rigoureusement le sens du mot intuition dans le vocabulaire épistémologique. L'intuition n'est ni une connaissance vague, ni un flair, ni un pressentiment de la vérité.    2. Tenir compte des différents types d'intuition possibles (exemple : intuition intellectuelle, intuition sensible, etc.).    3. Noter le caractère extrêmement général du concept de vérité et de la diversité des contenus qu'il peut prendre en fonction des divers champs de son application (exemple : une vérité mathématique n'est pas nécessairement de même type qu'une vérité physique ou logique. En particulier ces différents modèles de vérité n'entretiennent sans doute pas le même rapport à la question de l'intuition).    Enfin il faudra sans doute déterminer le sens du mot connaissance dans l'énoncé du sujet. Certains domaines du savoir ont prétendu se passer de toute forme d'intuition : mais sont-ils encore des connaissances? (Cas de la logique formelle, par exemple.)

« connaissance scientifique de la nature, recommande-t-il de briser le rapport immédiat au monde que constitue notreintuition sensible et de rechercher l'architecture intelligible de l'univers. Il est cependant clair que la connaissance scientifique proprement dite ne saurait rompre tout lien avec l'intuitionsensible puisqu'elle se veut essentiellement expérimentale.

Descartes lui-même, dont on connaît la méfiance àl'égard de la sensibilité, dut reconnaître que la connaissance de la nature ne saurait se passer de toute formed'expérience et il est à noter que, si le progrès scientifique se caractérise d'abord par un renouvellement desthéories, celui-ci n'est possible que par un développement parallèle des techniques d'approche expérimentales del'objet. Certes, l'expérimentation scientifique est très éloignée de la simple expérience naïve ; mais, à travers l'appareillagetechnique et théorique dans lequel elle se produit, elle vise cependant la constitution de faits scientifiques, c'est-à-dire de donnés qui ne peuvent être appréhendés qu'au sein d'une intuition sensible dans laquelle nous retrouvons lacaractéristique réceptivité d'un sujet, en face du dévoilement immédiat de son objet.

Ici encore, les constructionsthéoriques n'ont de sens que dans la mesure où elles permettent de rendre compte d'une réalité intuitionnée.L'intuition sensible semble donc nécessaire à la constitution d'une vérité scientifique. Mais il existe des connaissances simplement théoriques dont la vérité ne dépend d'aucune expérimentation : laconnaissance mathématique et la connaissance logique prétendent énoncer des vérités dont le fondement ne setrouve pas dans une intuition sensible, mais dans la cohérence interne de leurs énoncés ; par là, elles se distinguentradicalement des sciences expérimentales mais constituent-elles une connaissance de la vérité indépendante detoute intuition ? ** * L'histoire des mathématiques et l'histoire de la logique sont parallèles en ce qu'elles se caractérisent par undégagement progressif à l'égard de toute forme d'intuition.

De la géométrie empirique des Égyptiens à l'axiomatiquemoderne, du réalisme logique aristotélicien aux combinatoires modernes, c'est au même recul du rôle de l'intuitionque nous assistons. Essayons de préciser cette double évolution.

Les mathématiques se sont dégagées depuis longtemps de l'emprise del'intuition sensible.

Ce mouvement qui prend naissance dans la pensée grecque, se retrouve dans la compréhensionclassique des mathématiques, telle que nous pouvons la trouver formulée chez Descartes, par exemple.

Mais ce qu'ilfaut noter, c'est qu'un nouveau type d'intuition se trouve placé au premier plan de la philosophie des mathématiques: l'intuition intelligible.

Platon, déjà, faisait de l'objet mathématique une réalité qui ne pouvait se révéler qu'au seulintellect.

Descartes reprendra la tradition platonicienne lorsqu'il fera, de vérités éternelles, des réalités, des anatures simples ».

Ces réalités constituent l'objet spécifique des énoncés mathématiques et c'est l'intuitionintellectuelle, véritable « passivité de l'esprit », qui permet au sujet de les apercevoir.

Kant soulignera le rôle del'imagination dans la construction de cet objet, mais maintiendra le caractère intuitif de toute démarchemathématique en ce qu'il soumettra l'exercice de cette imagination constructrice (et non créatrice) aux cadres apriori de l'espace et du temps révélés par une intuition pure.

Dans toute la compréhension classique desmathématiques, la constitution d'une vérité ne peut donc être pensée en dehors de tout rapport à l'intuition. Il en va de même de la compréhension classique de la logique formelle.

Certes cette logique formelle »se sépare, dèssa naissance, de toute compromission avec l'intuition sensible.

Mais, aussi bien dans la logique d'Aristote que dans lalogique classique, la validité du processus déductif est tout entière dépendante d'un processus d'intuition. Lorsque Aristote dégage les modes concluants du syllogisme, il ne se préoccupe pas de fonder, à l'intérieur du textelogique lui-même, la validité de ces démarches formelles.

Tout au plus propose-t-il une cc démonstration » demodes dérivés par réduction à quelques modes fondamentaux.

Mais la validité de ces modes fondamentaux demeuretout entière suspendue à l'intuition du logicien. De même, la validité des modes stoïciens de syllogisme dépend toute entière de leur « lecture » par un acte intuitifd'intelligence. Ainsi toute l'épistémologie classique demeure-t-elle une épistémologie de la représentation, c'est-à-dire d'unecompréhension de la connaissance toute entière construite sur le schéma de la connaissance-reflet.

Dès lors, laconnaissance de la vérité, ou plutôt de vérités, ne peut plus se passer d'un recours à l'intuition, car il faut bien quel'objet reflété se donne de quelque façon au sujet dans un rapport immédiat ; nécessité résumée par Kant lorsqu'ildéclare : cc De quelque manière et par quelque moyen qu'une connaissance puisse se rapporter à des objets, lemode par lequel elle se rapporte immédiatement aux objets et auquel tend toute pensée comme au but dont elle estle moyen est Y intuition.

» (Critique de la Raison Pure.

Esthétique transcendantale, § 1). * * * L'histoire des mathématiques et de la logique moderne confirme le parallélisme de leur évolution.

Mais ce parallélismesemble bientôt se transformer en une convergence.

L'extrême formalisme de tentatives mathématiques de typeaxiomatique semble indiquer la possibilité d'une réduction des mathématiques à une logique dont la vérité se réduirait. »

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