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Est-il juste de dire: "Je pense donc je suis" ?

Publié le 07/03/2004

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En effet, dans la mesure où je n'ai pas accès à l'intériorité d'autrui autrement que sur le mode de l'analogie, je n'ai aucun moyen de contrôler ce qu'il me dit. Il peut tout aussi bien dire la vérité que mentir. Le rapport avec autrui repose donc sur un acte de foi. « Et je m'étais ici particulièrement arrêté à faire voir que, s'il y avait de telles machines, qui eussent les organes et la figure d'un singe, ou de quelque autre animal sans raison, nous n'aurions aucun moyen pour reconnaître qu'elles ne seraient pas en tout de même nature que ces animaux ; au lieu que, s'il y en avait qui eussent la ressemblance de nos corps et imitassent autant nos actions que moralement il serait possible, nous aurions toujours deux moyens très certains pour reconnaître qu'elles ne seraient point pour cela de vrais hommes. Dont le premier est que jamais elles ne pourraient user de paroles, ni d'autres signes en les composant, comme nous faisons pour déclarer aux autres nos pensées. Car on peut bien concevoir qu'une machine soit tellement faite qu'elle profère des paroles, et même qu'elle en profère quelques unes à propos des actions corporelles qui causeront quelque changement en ses organes : comme, si on la touche en quelque endroit, qu'elle demande ce qu'on lui veut dire ; si en un autre, qu'elle crie qu'on lui fait mal, et choses semblables ; mais non pas qu'elle les arrange diversement, pou répondre au sens de tout ce qui se dira en sa présence, ainsi que les hommes les plus hébétés peuvent faire. Et le second est que, bien qu'elles fissent plusieurs choses aussi bien, ou peut-être mieux qu'aucun de nous, elles manqueraient infailliblement en quelques autres, par lesquelles on découvrirait qu'elles n'agiraient pas par connaissance, mais seulement par la disposition de leurs organes. Car, au lieu que la raison est un instrument universel, qui peut servir en toutes sortes de rencontres, ces organes ont besoin de quelque particulière disposition pour chaque action particulière ; d'où vient qu'il est moralement impossible qu'il y en ait assez de divers en une machine pour la faire agir en toutes les occurrences de la vie, de même façon que notre raison nous fait agir. » Descartes, « Discours de la méthode », Vième partie. La deuxième difficulté que souligne Bergson, c'est « l'écrasement de la conscience » par le langage : « Non seulement le langage nous fait croire à l'invariabilité de nos sensations mais il nous trompe sur le caractère de la sensation éprouvée.

« « Mais aussitôt après je pris garde que, cependant que je voulais ainsi penser que tout était faux, il fallaitnécessairement que moi, qui pensais, fusse quelque chose.

Et remarquant que cette vérité : je pense donc jesuis, était si ferme et si assurée, que les plus extravagantes suppositions des sceptiques n'étaient pascapables de l'ébranler, je jugeai que je pouvais la recevoir, sans scrupule, pour le premier principe de laphilosophie que je cherchais.

» Il y a un fait qui échappe au doute ; mon existence comme pensée.

Que ce que je pense soit vrai ou faux, jepense.

Et si je pense, je suis.

Le néant ne peut pas penser.

La première certitude que j'ai est donc celle demon existence, mais comme pure pensée, puisque, en toute rigueur, je n'ai pas encore de preuve de l'existencede mon corps.

Quand bien même je nierais que le monde existe, que mon corps existe, que je puisse pensercorrectement, je ne pourrais remettre en cause ce fait : je pense, et par suite, je suis.

La volonté sceptiquede douter de tout, l'idée qu'aucune vérité n'est accessible à l'homme, se brise sur ce fait : je pense.

Voilà leroc, voilà l'argile.

Voilà le point ferme grâce auquel j'échappe à la noyade dans l'océan du doute, par lequel jeretrouverai la terre ferme de la science vraie. La difficulté provient de l'interprétation à donner à ce « je ».

Il n'est pas l'individu concret.

Ce n'est pas Descartes , homme du XVII ième siècle, c'est tout individu pensant qui peut dire « je pense donc je suis », pour peu qu'il refasse, pour lui-même, l'expérience entreprise. Ce « je » est, par définition, désincarné ; tout ce que je peux affirmer, à ce moment, de l'itinéraire cartésien, c'est mon existence comme pensée, puisque, répétons-le, je dois encore, temporairement, nier l'existence ducorps. Les deux conséquences majeures que Descartes tire de sa découverte sont d'une importance cruciale pour l'histoire de la philosophie. v D'une part Descartes montre que la nature de la pensée et celle de la matière sot différentes.

Ce qu'on nomme dualisme : « Je connus de là que j'étais une substance dont toute l'essence ou la nature n'est que de penser [...] En sorte que moi, cad l'âme par laquelle je suis ce que je suis, est entièrement distincte ducorps.

» Le corps, en effet, n'est qu'une portion de matière, ayant une forme, et susceptible de recevoir du mouvement.

La pensée est radicalement différente, c'est la faculté de concevoir, imaginer, sentir, vouloir.Descartes ne nie pas que –en l'homme- il y ait interaction du corps et de la pensée, et il consacrera même un ouvrage, « Les Passions de l'âme » (1649), à ce qu'on nommerait aujourd'hui biologie des passions. Mais il jette grâce au dualisme les bases de la science moderne, en limitant la physique à l'étude de lamatière et de ses propriétés.

Il faut se souvenir qu' Aristote considérait l'étude de l'âme comme le couronnement de la physique, et que Pascal aura à batailler contre l'idée que la « nature a horreur du vide », comme si la matière était animée d'intention. v D'autre part, dans l'expérience du « cogito », du « je pense », je prends conscience de moi-même comme pensée.

Cela amènera notre auteur à identifier pensée et conscience, ce que contestera, outre Leibniz & Spinoza , Freud . Avec le « je pense donc je suis », Descartes place la conscience, le sujet, à la racine de toute connaissance possible.

La conséquence essentielle est le primat de la conscience, et sa différence d'avec la matière.Redonner à l'homme une place dans un univers infini et vide de Dieu, assurer la dignité de la conscience, etjeter les bases de la science moderne, tels sont les objectifs que la métaphysique cartésienne s'est assignée. CRITIQUE DE LA CITATION DE DESCARTES A) Conscience directe & conscience réfléchie. Descartes définit la conscience par la pensée : « Par le nom de pensée, j'entends tout ce qui est en nous detelle sorte que nous en soyons immédiatement conscients .

»Cette définition fait de la pensée l'essence de l'âme.

Si l'âme est une substance pensante, il en résulte qu'ellen'existe que pour autant qu'elle pense : « Je suis, j'existe : cela est certain, mais combien de temps ? A savoir,autant de temps que je pense, car peut-être se pourrait-il faire, si je cessais de penser, que je cesserais enmême temps d'être ou d'exister » (« Deuxième méditation »).

L'âme pense donc toujours : « Vous êtes enpeine de savoir si je n'estime donc point que l'âme pense toujours.

Mais pourquoi ne penserait-elle pastoujours, puisqu'elle est une substance qui pense ? » (5ième réponse).Gassendi, contemporain de Descartes, objecte : «Comment admettre que l'on puisse penser au milieu d'unsommeil léthargique, ou que l'enfannt pense dans le ventre de sa mère ? Pourquoi ne resterait-il de cespensées aucun souvenir ? » Descartes répond : « Quelle merveille y-a-t-il de ce que nous ne nous ressouvenons pas des pensées que nousavons eu dans le ventre de nos mères, ou pendant une léthargie, etc., puisque nous ne nous ressouvenonspas même de plusieurs pensées que nous savons fort bien avoir eues étant adultes, sains & éveillés...

» (idem)Autrement dit, pour Descartes, l'âme pense toujours, mais e garde pas le souvenir de toutes ses pensées.

Pourqu'il y ait souvenir de quelque chose, il faut d'abord que cette chose ait été perçue par notre esprit, que cetteperception ait laissé une trace dans le cerveau (comme un cachet laisse une empreinte dans la cire), quecette trace suscite la réapparition de la chose à la pensée ; enfin, lorsque la chose se présente pour la. »

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