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La liberté est-elle la valeur suprême de la morale ?

Publié le 26/02/2004

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morale

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Analyse du sujet

 

-          Selon le sens commun, est pleinement libre celui qui a la possibilité de réaliser sans aucun obstacle que ce soit, tous ses désirs. Il s’agit donc d’un pouvoir absolu de la liberté capable de se déterminer infiniment (cf. Descartes, Lettre à Mesland, 6 février 1645).

-          Lorsque le terme s’entend comme liberté spécifiquement humaine, ce terme reçoit habituellement des déterminations morales, psychologiques et politiques. La liberté morale serait donc le pouvoir idéalement défini de ne pas subir la contrainte des passions, des inclinations, ou de toute détermination qui ferait de l’homme un simple objet ou un esclave et non un sujet responsable de lui-même et de ses actes.

-          Les inventeurs du régime républicain, les grecs, eurent à défendre leurs cités contre une invasion par l’Empire perse. De cette guerre, la bataille des Thermopyles est demeurées célèbre : trois cents spartiates, pour n’avoir pas fui, périrent en tentant de stopper pendant deux jours l’avancée de dizaines de milliers de soldats ennemis. Sur le lieu de leur mort, leur épitaphe était : « Passant, va dire à Sparte que nous sommes morts d’obéir à ses lois. « Ils ont montré ainsi que le sens du devoir peut-être plus fort que la volonté de vivre ; on peut célébrer leur gloire et leur amour de la liberté, mais on peut déplorer qu’un prétendu devoir les ait envoyés à une mort certaine. S’ils avaient eu le choix, peut-on penser, ils auraient probablement préféré vivre ; le devoir a eu raison de leur bon sens, et de leur libre choix. La contrainte du devoir moral s’oppose-t-elle ainsi toujours à la liberté ?

-           On a vu que la liberté est très complexe à définir en tant que telle (sans qu’elle ne soit qu’illusion). Il s’agira donc ici, à travers l’articulation à la morale, de redéfinir tout au long du développement le concept de liberté pour en découvrir l’essence.

-          Affirmer que la valeur suprême de la morale est la liberté, c’est à la fois supposer que tout l’édifice de la morale est fondée sur la notion de liberté, mais c’est aussi du même coup supposer que la liberté est ce qu’il y a de plus précieux en matière de morale. Or, c’est cette affirmation, en tant qu’elle suppose cette double interprétation, qui doit être ici mise à la question.

-          La morale, en effet, apparaît comme un ensemble de devoirs qui sont autant d’impératifs qui s’imposent à nous de manière à ce qu’ils soient respectés. Or, on peut à juste titre se demander si liberté et devoir moral sont compatibles ou si au contraire la morale en tant que telle subordonne et contraint la liberté. Ce qui doit donc faire l’objet d’un travail précis de définition c’est avant tout la liberté entendue comme valeur suprême. C’est en effet en parvenant à une définition la liberté conforme à son essence que le problème que sous-tend la question pourra trouver réponse.

 

Problématique

 

            La liberté peut-elle être légitimement considéré comme le fondement ultime et la valeur essentielle que la morale a pour but de préserver, de garantir et d’accomplir ? Ne peut-on pas au contraire dénoncer une incompatibilité entre liberté et morale ? A l’inverse, ne peut-on pas appréhender l’interdépendance de la liberté et de la morale de sorte que non seulement la liberté soit la valeur suprême de la morale, mais encore que la morale elle-même soit la valeur suprême de la liberté, c’est-à-dire ce qui lui donne vérité et effectivité ?

morale

« ® A l'épanouissement des penchants s'oppose la contrainte des lois morales.

Dans ces situations où ledevoir et le bonheur s'opposent, la loi morale est limitative de la liberté, puisqu'elle tend à nous empêcherde faire ce que nous voulons.

S'affranchir de la pression de toute loi pour ne suivre que l'anarchie despenchants et des désirs, c'est le vrai bonheur, qui coïncide avec la vraie liberté.® L'homme libre se veut amoral : refusant de se soumettre à la contrainte du devoir, mais aussi refusantde voir en lui-même l'origine de la loi morale, il ne reconnaît comme s'appliquant à lui que la loi du bonheurmaximum.

La plus grande liberté, semble-t-il, est finalement la licence du tyran qui assouvit toutes lespassions contre les autres, s'assurant l'impunité totale que lui offre aux yeux de la justice et de la morale,selon Platon, l'anneau de Gygès qui rendait invisible.® Il est clair que la notion de règle morale emporte avec elle celle de devoir.

Or, comme toutes lesnotions essentielles, celle de devoir est entourée d'équivoques qui en compliquent la compréhension, etqu'il faut commence par réduire.

Chacun entend par règle morale l'idée de ce qui a lieu d'être fait, de cequ'il est nécessaire de fait, par opposition à ce qui est simplement opportun ou contingent.

Mais plus quele résultat, la règle donne à voir l'ensemble du déroulement de l'action : elle doit agir, si elle est unerègle, comme un tuteur, comme ce qui nous trace le chemin et nous guide.

Or à quel titre accepter un teltuteur ?® Pour être morale, et non pas simplement une règle, cette dernière ne doit pas être aliénante, en cesens qu'elle doit aider et favoriser l'accomplissement de l'homme dans son humanité, ou plus précisémentdans sa liberté, sans en entraver, de l'extérieur, comme contrainte, le déploiement et l'épanouissement.® Pour être morale donc, une règle doit s'imposer comme juste et comme non aliénante pour la liberté del'homme.

La justice, ou en tout cas la justesse, semble être une condition nécessaire à la définition de larègle comme règle proprement morale.

Car comment une règle définit arbitrairement et contraignant demanière amorale voire immorale certains individus au profit d'autres individus pourraient être direproprement morale ? Il y aurait contradiction avec la nature même de la morale en elle-même.

De la mêmemanière une règle qui s'impose de l'extérieure, comme contrainte ne peut être dite règle morale ; il fautainsi définir le terme de contrainte : elle est, de manière générale, penser comme une restriction de toutordre.

Or, on ne saurait accepter comme morale une règle qui nous contraindrait de l'extérieur et quiréduirait ainsi notre liberté, tant de penser que d'action.

Ne peut donc pas être appelée morale une règlequi s'impose à moi comme contrainte.

Mais cette définition reste encore négative (au sens où l'on ditseulement ce qu'elle n'est pas). II) La liberté ou le fondement de la morale · La mécanique du penchant ® L'anarchie du penchant régnant sur la volonté, l'homme n'a de liberté qu'apparente.

Le penchant,devenu passion exclusive, accapare toute l'action humaine, aux dépens de tout autre penchant ; salogique est celle du toujours plus, et l'homme est finalement esclave de son désir unique, comme lemeurtrier, obsédé par l'idée fixe du meurtre, vit un véritable enfer tant qu'il n'y a pas cédé, et vit le mêmeenfer après avoir cédé.® La loi des penchants est en somme une lutte permanente entre des penchants, qui n'a rien du choixd'un sultan entre deux plaisirs ; on ne peut à la fois se livrer totalement à sa gourmandise et s'y livrertout au long d'une longue vie, l'un empêche l'autre, obligeant à un certain calcul des plaisirs, qui consisteni plus ni moins en une limitation de la liberté du penchant.

Le conflit des penchants est une suitenécessaire d'une telle liberté, et l'illimitation doit se limiter elle-même.® Le penchant loin d'être issu du plus profond de nous-mêmes, est plutôt l'expression de l'emprise de lanature sur nous.

Tous mes désirs sont des lois de la nature ; ils s'imposent à moi plutôt qu'ils ne viennentde moi.

Loin d'être l'expression de mon libre choix, l'accomplissement immédiat de mes désirs estl'abdication de la possibilité de tout choix : c'est l'abandon de cette liberté qui nous élève au-dessus dela bête, pour descendre plus bas que la bête.· Détermination et indétermination de la volonté ® Certes le devoir et le penchant s'opposent l'un à l'autre, mais il faut les renvoyer tous les deux dos àdos, en ce qu'ils cherchent à s'emparer de ma volonté.

La détermination de la volonté, entre devoir etpenchant, se fait toujours par l'extérieur, et non par moi-même.

La véritable liberté s'oppose au devoircomme au penchant, en ce qu'elle doit se tenir en deçà de toute détermination.® Si je cède au désir, je suis prisonnier du désir ; si je me plie au désir, je suis esclave du devoir.

Etrelibre, c'est donc se tenir en retrait de l'un comme de l'autre, c'est demeurer dans l'absolueindétermination.

La liberté de la belle âme, selon l'expression de Hegel, liberté du romantique, consiste encet exercice d'un pouvoir absolu de négation, refus d'être déterminé par autre chose que par soi-même,donc d'être déterminé, et finalement retrait en soi et mépris du monde extérieur.® Un tel retrait en soi-même, s'il semble permettre la moralité en ce qu'il nous retient de toute action,donc de toute action mauvaise, nous fait néanmoins demeurer dans une insatisfaction radicale de toutdésir.

Mais s'abstenir de toute action bonne, et cela, c'est pouvoir devenir immoral.

Loin d'être une libertéabsolue, demeurer dans une telle impuissance est la servitude absolue.

Demeurer dans le pur pouvoir dechoix, c'est se condamner à ne jamais pouvoir choisir.® On comprend en ce sens qu'une règle morale se reconnaît comme telle par la force d'obligation qu'elleinsuffle à notre conscience.

Une règle morale s'impose donc de l'intérieur, du dedans de notre être.

Lacondition pour qu'une règle soit proprement morale est en ce sens l'acceptation même, comme obligationinterne, de cette règle.

Pour autant, la règle morale ne peut être, au risque de détruire toute moralité,absolument subjective.. »

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