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LITTÉRATURE DU XX (20)e SIÈCLE

Publié le 18/10/2011

Extrait du document

Tout historien de la littérature sait la difficulté de dresser un bilan, à la fois objectif et exhaustif, de la production littéraire d'une période, voire d'un siècle. Il fut un temps - aujourd'hui heureusement révolu - où 'des notions commodes mais totalement arbitraires permettaient de définir les critères d'accès à une espèce de panthéon littéraire. Parmi eux, au premier chef, la fameuse triade capitoline : le beau, le vrai, le bien. Sous la triple bannière de l'esthétisme, de la vérité et de la moralité, on enrôlait des écrivains que l'époque avait encensés, la leur ou celle du critique d'ailleurs, tant est relative la notion de chef-d'oeuvre.

« titude de respect ennuyé que l'on doit avoir devant les momies dont on déroule pieusement en classe les bandelettes ? De même, et nous arrêterons là, il n'est aucun critique actuellement qui ignore le bouleversement total de notre vision sur Jules Verne.

Celui qu'on a cru un romancier pour la jeunesse se révèle un des écrivains majeurs de son siècle , à la fois témoin de son progrès, reflet de ses préjugés et créateur d'uni­ vers.

Qui parle de Jules Verne dans les manuels de littérature ? On aura donc compris, à la lecture de ces quel­ ques lignes, qu'elles ont été nos options : ouvrir à la littérature tous les champs possibles.

Considérer que Fantômas, Pardaillan ou Lupin font partie intégrante de la production littéraire des années 14- 18, ce n'est pas mépriser ou oublier Apollinaire, Jarry ou les jeunes débutants qui ont nom Gide, Claudel ou Mauriac.

Mentionner des best-sellers de la littérature érotique comme Histoire d'O ou Emmanuelle ce n'est pas les mettre sur le même plan que des fresques comme les Thibault ou les Pas­ quier , c'est simplement témoigner d'une vague - ici,le goût pour les œuvres érotiques- qui n'éton­ nera que les naïfs et les ignorants : Musset, Pierre Louys, Apollinaire n'ont pas dédaigné de tremper leur plume dans le « stupre "• comme on dit et chacun sait qu'un dénommé Baudelaire et un cer­ tain Flaubert ont été, en leur temps , condamnés pour outrage aux bonnes mœurs.

Juger enfin que la Science-Fiction est devenue une littérature majeure, peut-être la dernière aujourd'hui où ·s'est réfugiée la création romanesque, ce n'est pas nier l'existence , pour d'autres moments du siècle, d'éphémères, mais énormes, succès romanesques ceux des Benoit, des Loti ou théâtraux, ceux des Bataille , des Bernstein.

Ainsi notre optique a-t-elle été de n'écarter per­ sonne a priori, dans les limites du moins qui nous étaient assignées.

D'ailleurs, il faut être bien vain ou bien ignorant pour prétendre dresser le bilan définitif d'un siècle qui n'en est encore qu'à ses qua­ tre cinquièmes.

Imagine-t-on un XVIII" siècle s'ar­ rêtant en 1780, sans les Confessions ( 1782-1789) et les Rêveries (1782) de Rousseau, sans Paul et Virgi­ nie ( 1789), sans Chénier surtout (qui écrit à partir de 1785), sans Sade, sans le Mariage de Figaro (1784) ? Et que dire d'un XIx• siècle où ne figure­ raient point pour ainsi dire les Rougon-Macquart (commencés en 1871), où Maupassant n'aurait presque rien écrit, où Jarry n'existerait pas ? De plus, nous n'aurions pas pu faire les mêmes choix en 1950 : nul ne pouvait alors deviner que Gide et Mauriac entreraient après leur mort dans un purgatoire dont on ne voit pas encore la fin, que les Duhamel, Maurois, Romains seraient bien vite oubliés des générations suivantes, qu'A- natole France ne serait plus qu'un nom et un réper­ toire de dictées.

De même , qui aurait pu penser dix ans plus tard, dans les années 60, que notre époque ferait fi de Camus, tout comme la génération de l'après-guerre avait oublié Alain ? Aussi nous ne prétendons pas échapper à de semblables critiques de la part des générations de l'an 2000.

Du moins avons-nous essayé d'allier la prudence à l'exhausti­ vité.

Sans s'interdire une subjectivité sans laquelle on sombre vite dans l'ennui , sans refuser à chacun des auteurs de cette littérature le plaisir (et oui !) de parler des écrivains qu'il aime en espérant que cet amour donnera envie au lecteur de faire leur connaissance .

Le bouleversement des formes sociales, deux conflits mondiaux, le développement des médias , le progrès fulgurant des sciences humaines et la fin d'une frontière nette entre littérature et critique autant de caractéristiques d'un siècle qui aura vu les hommes marcher sur la lune et le retour à la navigation à voile, qui aura appris, avec une indignation teintée d'hypocrisie, l'exis­ tence des camps hitlériens et des goulags sovié­ tiques, qui aura porté au plus haut point l'idée de liberté tout en fermant pudiquement les yeux sur les tortures qui se pratiquent quotidienne­ ment çà et là.

Et par un singulier retour des choses ou des idéologies, au moment où nous écrivons ces lignes , les accents haineux d'un Maurras retrouvent une vigueur que rien ne laissait prévoir, les délires et les fantasmes d'un Jean Lorrain ou d'un Schwob éveillent des échos dans nos sensibilités, des roman­ ciers, parmi nos contemporains, partent sur les traces de Valéry Larbaud, Jarry a donné le ton à tout un pan de notre théâtre-panique, Fantômas et Lupin errent de nouveau dans nos demeures et le surréalisme résonne d'un son encore actuel.

Alors il n'y a de littérature que « rétro " ? Non.

Ce serait une erreur de croire à une espèce de retour cyclique des modes littéraires et des sensibilités.

Il y a sim­ plement- et c'est là où l'on voit l'importance du recul -des œuvres qui sonnent différemment aujourd'hui .

Preuve supplémentaire, s'il en était besoin, que toute littérature est à la fois inséparable de son épo­ que et de celle de son lecteur.

On le savait déjà pour l'histoire.

On ne peut désormais l'ignorer pour le fait littéraire.

Aussi avons-nous accroché nos sub­ divisions aux événements-clés de ce siècle :les deux guerres .

Avant 1914, la litttérature est à un tour­ nant : elle se dégage encore mal du XIX" siècle; entre les deux guerres il y a une explosion des formes poétiques et théâtrales mais la fusée retombe vite, elle n'aura duré que vingt ans.

Depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, nous vivons sous le signe d'Hiroshima et de Freud.

Trois coupures donc, et un aperçu sur une .période qui ne fait que commencer, héritière des événements de 68 et porteuse d'un avenir qui reste encore flou.. »

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