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mais sur les gens qui ont fortune, réputation et mille autres biens.

Publié le 22/10/2012

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mais sur les gens qui ont fortune, réputation et mille autres biens. Gorgias, 484c-486d 2. LA DIALECTIQUE MALADE — ALLÉGORIE DU FILS SUPPOSÉ [SOCRATE-GLAUCON] — S. As-tu réfléchi à l'étendue du mal qui a gagné la dialectique de nos jours ? — G. Quel est-il ? — S. C'est de dérèglement, semble-t-il, qu'elle est entièrement atteinte. — G. Et comment ! — S. Est-ce merveille, à ton avis, que ceux qui la pratiquent en soient atteints, et ne leur trouves-tu pas d'excuses ? — G. En quoi principalement ? — S. Ils sont dans le cas d'un enfant supposé, élevé dans l'opulence, au sein d'une grande et puissante famille et entouré d'une foule de flatteurs, qui, devenu adulte, s'apercevrait qu'il n'est pas le fils de ceux qui se disent ses parents, sans pour autant découvrir ses parents véritables ; te sens-tu capable de deviner en quelle disposition il serait à l'égard de ses flatteurs et de ses parents supposés, d'abord au temps où il ignore le fait de sa supposition, puis à l'époque où il en est instruit ? Ou bien préfères-tu écouter ce que j'en conjecture pour ma part. — G. Je préfère. — S. Je suppose donc qu'il honorerait davantage père, mère et le reste de la famille supposée que les gens qui le flattent, qu'il serait moins indifférent à leurs besoins, moins déréglé dans sa conduite et ses propos envers eux ; que, dans les choses importantes, il leur ferait davantage confiance qu'aux gens qui le flattent, tant qu'il ignorerait la vérité. — G. C'est vraisemblable. — S. Dès qu'il connaîtrait la réalité, je soupçonne que son respect et ses égards envers ses parents se relâcheraient tandis que croîtraient ceux qu'il accorde à ses flatteurs ; il ferait à ceux-ci davantage confiance qu'autrefois, il adopterait leur mode de vie, les fréquenterait au grand jour et, sauf s'il avait une excellente nature, il ne se soucierait plus de son père et de ses parents supposés. — G. C'est bien ce qui se passerait. Mais en quoi cette image s'applique-t-elle aux adeptes de la dialectique ? — S. Voici en quoi : nous avons depuis l'enfance des maximes sur ce qui est juste et beau, nous en avons été nourris comme par des parents, nous nous y soumettons et nous les honorons. — G. C'est exact. — S. Il existe également d'autres pratiques qui s'opposent à ces maximes et qui comportent des jouissances ; elles flattent notre âme et l'attirent ; mais ceux qui ont quelque mesure ne s'en font pas des adeptes, ils respectent les maximes de leurs pères et s'y soumettent. — G. C'est exact. — S. Eh bien, suppose qu'on vienne demander à quelqu'un qui se trouve dans cette disposition ce que c'est que l'honnêteté, qu'il donne la réponse qu'il a apprise du législateur et que l'argument dialectique la réfute ; suppose que la fréquente répétition de cette réfutation le jette dans l'opinion que ceci n'est en rien davantage honnête, et pareillement en ce qui concerne le juste, le bon et tout ce à quoi il accordait le plus de valeur, comment crois-tu qu'il se comportera désormais à l'égard des maximes qu'entraînaient son respect et sa soumission ? — G. Dès lors qu'il n'estimera plus respectables et convenables ces maximes et que d'autre part il n'aura pas trouvé les vraies, est-il vraisemblable qu'il s'adonne à un autre genre de vie que celui qui le séduit ? — G. Non. — S. Tu conviendras donc, je pense, que de réglé qu'il était, il est tombé dans le dérèglement ? — G. Forcément. — S. Ainsi, il n'est rien que de naturel dans l'accident qui arrive à ceux qui se mêlent de dialectique en ces conditions, et, comme je le disais, ils sont grandement excusables. République VII, 537e-539a 3. LES PRÉCAUTIONS À PRENDRE [SOCRATE-GLAUCON] — S. Pour éviter aux gens ce sort pitoyable, ne faut-il pas entourer leur initiation à la dialectique de toutes sortes de précautions ? — G. Assurément. — S. La seule précaution essentielle n'est-elle pas de les empêcher de goûter à la dialectique tant qu'ils sont jeunes ? Car je pense que tu as remarqué que les adolescents, aussitôt qu'ils ont goûté à la dialectique en font un jeu, qu'ils s'en servent toujours pour la controverse, et qu'à l'imitation de ceux qui les ont réfutés, ils réfutent eux-mêmes les autres, heureux comme des jeunes chiens d'user de l'argument pour tirailler et déchirer tous ceux qu'ils approchent. — G. C'est prodigieux ! — S. Réfutant souvent, souvent réfutés, ils ne tardent pas à en venir brusquement à perdre toutes leurs croyances antérieures ; ce qui fait qu'eux-mêmes et tout ce qui touche à la philosophie se trouve discrédité aux yeux des gens. — G. Rien de plus vrai. — S. Plus avancé en âge, on ne consentirait pas à entrer dans ce délire ; on imitera celui qui a l'intention de discuter et d'examiner le vrai, plutôt que celui qui joue et contredit pour le plaisir de jouer, et montrant soi-même plus de mesure, on rendra la pratique plus honorable au lieu de la déconsidérer. — G. C'est juste. — S. Tout ce qui a été dit précédemment ne visait-il pas à cette précaution : n'admettre à la dialectique que des naturels équilibrés et stables, ne pas en ouvrir l'accès, comme on le fait de nos jours, au premier venu et à celui qui est le moins fait pour cela. République VII, 539ad

« 40 PLATON PAR LUI-MÊME à ses flatteurs ; il ferait à ceux-ci davantage confiance qu'autrefois, il adopterait leur mode de vie, les fré­ quenterait au grand jour et, sauf s'il avait une excel­ lente nature, il ne se soucierait plus de son père et de ses parents supposés.

-G.

C'est bien ce qui se passerait.

Mais en quoi cette image s'applique-t-elle aux adeptes de la dialectique? -S.

Voici en quoi : nous avons depuis l'enfance des maximes sur ce qui est juste et beau, nous en avons été nourris comme par des parents, nous nous y soumettons et nous les honorons.- G.

C'est exact.- S.

Il existe également d'autres pratiques qui s'opposent à ces maximes et qui comportent des jouissances ; elles flattent notre âme et l'attirent ; mais ceux qui ont quelque mesure ne s'en font pas des adeptes, ils respectent les maximes de leurs pères et s'y soumettent.

- G.

C'est exact.

-S.

Eh bien, suppose qu'on vienne demander à quelqu'un qui se trouve dans cette dis­ position ce que c'est que l'honnêteté, qu'il donne la réponse qu'il a apprise du législateur et que l'argu­ ment dialectique la réfute ; suppose que la fréquente répétition de cette réfutation le jette dans l'opinion que ceci n'est en rien davantage honnête, et pareille­ ment en ce qui concerne le juste, le bon et tout ce à quoi il accordait le plus de valeur, comment crois-tu qu'il se comportera désormais à l'égard des maximes qu'entraînaient son respect et sa soumis­ sion? - G.

Dès lors qu'il n'estimera plus respec­ tables et convenables ces maximes et que d'autre_part il n'aura pas trouvé les vraies, est-il vraisemblable qu'il s'adonne à un autre genre de vie que celui qui le séduit? - G.

Non.

-S.

Tu conviendras donc, je pense, que de réglé qu'il était, il est tombé dans le dérèglement? - G.

Forcément.

- S.

Ainsi, il n'est rien que de naturel dans l'accident qui arrive à ceux qui se mêlent de dialectique en ces conditions, et, comme je le disais, ils sont grandement excusa­ bles.

République VII, 537e-539a. »

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