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Manger, est-ce naturel ?

Publié le 27/02/2008

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Première partie : Comment manger pourrait-il ne relever que de la nature ? Deuxième partie : Du besoin alimentaire au désir Troisième partie : Manger, acte culturel

« va de soi » dans la manière de se tenir à table ; cette remarque s'applique même aux comportements que nous jugeons "élémentaires" ou simplement "raisonnables",comme par exemple de prendre les liquides avec la cuiller uniquement...

» Ces rites ne s'expliquent pas par desconsidérations hygiéniques, jamais signalées avant le milieu du xviiie siècle ; la « rationalisation » des nouvellesmanières de se comporter est toujours postérieure à un « déplacement du seuil de ce qui est ressenti.

commepénible ».

Par exemple, jusqu'au xviie siècle environ, la vue d'une bête tuée et son dépeçage sur la table sont «agréables ou du moins nullement déplaisants » ; puis, on s'efforcera d' « oublier autant que possible qu'un plat deviande a quelque rapport avec un animal mort ».

Aujourd'hui, on se rend à peine compte de sa provenance.

« Lamodification de la tenue à table n'est que l'aspect partiel d'une modification très profonde de la sensibilité et desattitudes humaines.

» L'art de se nourrir, art culturel, est comme le résumé des valeurs d'une culture. Cet art peut même révéler les contradictions d'une culture, ou certains traits idéologiques dont elle n'a pas pleineconscience. Baudrillard, en ce sens, est attentif à une contradiction de la « société de consommation ».

D'une part, celle-ciexclut par principe toute restriction, « libérant le corps dans toutes ses virtualités de satisfactions », « réprouvantla morale répressive des ères puritaines » (cf.

la gourmandise, autrefois l'un des sept péchés capitaux, aujourd'huipéché mignon) ; mais d'autre part, notre culture développe la « mystique de la ligne, la fascination de la minceur » :« dans l'ascèse des régimes alimentaires, se lit la pulsion agressive envers le corps, pulsion « libérée » en mêmetemps que le corps lui-même » (La Société de consommation, p.

223). L'idéologie puritaine, paradoxalement, serait ainsi toujours de rigueur dans une société qu'on dit pourtant centréesur la consommation.

Pourquoi ? « La faim est la faim, mais la faim qui se satisfait avec de la viande cuite, mangée avec fourchette et couteau, estune autre faim que celle qui avale de la chair crue en se servant des mains, des ongles et des dents.

Ce n'est passeulement l'objet de la consommation, c'est aussi le mode de consommation qui est produit par la production...

Laproduction crée donc le consommateur.

» Cette analyse de Marx (Introduction à la critique de l'économie politique,I, 2, a) donne à penser que l'art de consommer en général et l'art de se nourrir en particulier ne peuvent êtreséparés des conditions économiques qui les rendent finalement possibles.

Ce que Norbert Elias constatait sur le plandes usages alimentaires en Occident pourrait être lié au système général des besoins produit par tel système deproduction (cf.

Baudrillard, op.

cit., p.

103). Si l'ascétisme puritain qui dénonçait la jouissance et la consommation, mais valorisait le travail et l'accumulation, apartie liée avec le développement du mode capitaliste de production (thèse de Max Weber), on comprend que l'art occidental de se nourrir conserve les traces de cetteidéologie, lui qui a évolué dans le sens d'un « raffinement », d'une « distanciation » vis-à-vis du corps ; Elias illustrecette modification de la sensibilité, vers le xvne siècle, à travers l'histoire en apparence futile de l'usage de lafourchette ou du couteau... conclusion L'analyse de l'acte de se nourrir est aussi une analyse de la nature de l'homme, qui développe ses potentialités dansdes cultures déterminées.

Il ne faudrait cependant pas oublier que ce développement peut être très limité lorsquel'art de se nourrir se réduit, dans certaines conditions sociales, à un art de ne pas mourir de faim. indications de lecture Rousseau, Discours sur l'origine de l'inégalité, 1753.Norbert Elias, La Civilisation des moeurs, 1939 (Pluriel).C.

Lévi-Strauss, Les Structures élémentaires de la parenté, chap.

V, 1949.J.

Baudrillard, La Société de consommation, 1970 (Idées).. »

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