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Marcel Proust, Les Plaisirs et les Jours.

Publié le 22/02/2012

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proust
Celui qui est las des chemins de la terre ou qui devine, avant de les avoir tentés, combien ils sont âpres et vulgaires, sera séduit par les pâles routes de la mer, plus dangereuses et plus douces, incertaines et désertes. Tout y est plus mystérieux, jusqu'à ces grandes ombres qui flottent parfois paisiblement sur les champs nus de la mer, sans maisons et sans ombrages, et qui étendent les nuages, ces hameaux célestes, ces vagues ramures. La mer a le charme des choses qui ne se taisent pas la nuit, qui sont pour notre vie inquiète une permission de dormir, une promesse que tout ne va pas s'anéantir, comme la veilleuse des petits enfants qui se sentent moins seuls quand elle brille. Elle n'est pas séparée du ciel comme la terre, est toujours en harmonie avec ses couleurs, s'émeut de ses nuances les plus délicates. Elle rayonne sous le soleil et chaque soir semble mourir avec lui. Et quand il a disparu, elle continue à le regretter, à conserver un peu de son lumineux souvenir, en face de la terre uniformément sombre. C'est le moment de ses reflets mélancoliques et si doux qu'on sent son coeur se fondre en les regardant. Quand la nuit est presque venue et que le ciel est sombre sur la terre noircie, elle luit encore faiblement, on ne sait par quel mystère, par quelque brillante relique du jour enfouie sous les flots. Elle rafraîchit notre imagination parce qu'elle ne fait pas penser à la vie des hommes, mais elle réjouit notre âme, parce qu'elle est, comme elle, aspiration infinie et impuissante, élan sans cesse brisé de chutes, plainte éternelle et douce. Marcel Proust, Les Plaisirs et les Jours.

Vous ferez de ce texte un commentaire composé en montrant par exemple quelle vision personnelle du paysage marin Marcel Proust donne ici par le choix des termes, des images, des rythmes.

Les souvenirs littéraires

Ce sont les souvenirs littéraires qui sont les plus immédiatement évidents.

C'est tout d'abord Baudelaire, que Proust aimait tant, qui est présent ici à deux reprises. La première phrase (e Celui qui est las des chemins de la terre... «) évoque le poème en prose intitulé Le Port (« un port est un séjour charmant pour une âme fatiguée des luttes de la vie... «). La dernière phrase rappelle un sonnet des Fleurs du mal (« la mer est ton miroir, tu contemples ton âme dans le déroulement infini de sa lame «).

 

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