mémoires - littérature.
Publié le 28/04/2013
Extrait du document
«
et la stratégie militaire.
Dans la même veine figurent plus tard les Mémoires du Sieur de Pontis, qui a servi dans les armées cinquante-six ans, sous les rois Henri IV, Louis XIII et Louis XIV (posth.
1676) de Louis de Pontis.
Davantage historiques, les
Registres journaux (rédigés entre 1562 et 1598) du magistrat Pierre de L’Estoile, qui mentionnent les événements importants des règnes de Henri III et Henri IV, les Mémoires historiques (1625) de Guillaume de Saulx-Tavannes, les Mémoires
(posth.
1628) de Marguerite de Valois, c’est-à-dire « de qui le peut mieux savoir et de qui a le plus d’intérêt à la vérité de la description […] » ou les Mémoires du Mareschal de Bassompierre contenant l'Histoire de sa vie, et de ce qui s’est fait de plus
remarquable à la Cour de France pendant quelques années (1665), qui ont par leur esprit inspiré le duc de Saint-Simon.
Parmi les autres mémorialistes importants figurent Pierre de Bourdeille, seigneur de Brantôme ( Mémoires, posth.
1665), Agrippa
d’Aubigné ou le duc de Sully qui rédige des Mémoires (1610) davantage économiques et politiques.
Au cours du XVII e siècle, les mémoires deviennent un genre à la mode, chacun veut témoigner de son époque, riche en événements, en intrigues et en secrets.
La Fronde, la vie à la cour du roi Louis XIV sont particulièrement commentées et relatées,
par exemple.
Mais peu à peu se brouille la frontière qui existe entre le mémorialiste annonçant : « Voici ce que j’ai vécu » et l’autobiographe qui promet : « Voici ce que je suis.
».
L’un des meilleurs exemples de cette époque sont les Mémoires (1662)
du duc de La Rochefoucauld qui, à la frontière entre autobiographie et histoire, donne une vision moraliste de son époque.
Beaucoup de mémorialistes des XVII e et XVIII e siècles entendent par ailleurs servir la gloire d’une maison en immortalisant leurs
hauts faits pour leur descendance et, si les Mémoires de la cour de France pour les années 1688 et 1689 (posth.
1731) de Mme de La Fayette retracent encore l’aventure de leur auteur dans l’histoire, d’autres se rapprochent encore plus de
l’autobiographie, imbriquant leur vie privée dans les événements de leur époque.
Ainsi, toujours à la frontière entre l’autobiographique et l’historique figurent les Mémoires de Mademoiselle de Montpensier, petite fille de Henri IV (posth.
1728), les Mémoires sur la cour de France (1692) et les Mémoires secrets de plusieurs grands
princes de la cour (1696) de Madame d’Aulnoy.
De nombreux autres illustres personnages produisent également des Mémoires, comme Françoise de Motteville, première femme de chambre d’Anne d’Autriche, Marie de Nemours, Jean Hérault de
Gourville, l’abbé de Choisy, ou le marquis de Boulainvilliers.
Les exemples les plus remarquables demeurent cependant les Mémoires (posth.
1717) du cardinal de Retz et les Mémoires (posth.
1859) du duc de Saint-Simon.
Tandis que le cardinal de
Retz prévient qu’il met son « nom à la tête de cet ouvrage, pour [l’]obliger davantage [lui]-même à ne diminuer et à ne grossir en rien la vérité », le duc de Saint-Simon explique qu’« écrire l’histoire de son pays et de son temps, c’est repasser dans
son esprit avec beaucoup de réflexion tout ce qu’on a vu, manié, ou su d’original […] c’est se montrer à soi-même pied à pied le néant du monde, de ses craintes, de ses désirs, de ses espérances, de ses disgrâces, de ses fortunes, de ses travaux… ».
Ces deux ouvrages, sommes historiques colossales, sont également reconnus pour leur qualité littéraire, pour leur visée moraliste et leur fine analyse.
À la même époque, l’enthousiasme pour ce genre littéraire fait naître des mémoires de fiction, mettant en scène des illustres personnages imaginaires ou fortement romancés.
Ainsi, le public découvre les Mémoires de la vie de Henriette-Sylvie de
Molière (1672-1674) de Madame de Villedieu ou les Mémoires de Monsieur d’Artagnan (1700) du mousquetaire Gatien de Courtilz de Sandras.
Au XVIII e siècle, les mémoires sur la vie militaire et sur la cour sont toujours en vogue ( Mémoires du comte de Saint-Priest, de Madame du Hausset, de la baronne d’Oberkirch, de Madame Campan, etc.).
Alors que la visée moralisatrice s’intensifie chez
certains auteurs, de nombreux courtisans et personnalités, notamment celles qui fréquentent les salons, prennent la plume pour rédiger leurs mémoires (Charles Pinot Duclos, Pierre Victor de Besenval de Brünstatt, Armand Louis de Gontaut-Biron, le
cardinal du Bernis, Félicité de Genlis, etc.).
Les Mémoires d’un père pour l’éducation des ses enfants (posth.
1804) de Jean-François Marmontel, ou les satiriques Mémoires dans l’affaire Goëzman (1773-1774) de Pierre Augustin Caron de
Beaumarchais sont pour leur part davantage épisodiques, mais d’une grande qualité littéraire.
3. 3 De la Révolution au XIX e siècle
La Révolution française est marquée par la rédaction d’ouvrages dont les regards sur les événements divergent : les Mémoires (posth.
1823) de Madame Roland, l’une des grandes figures des Girondins guillotinée en novembre 1793, côtoient les
Mémoires de Madame la duchesse de Tourzel, gouvernante des enfants de France de 1789 à 1795 et les Mémoires contre-révolutionnaires du monarchiste comte de Rivarol, textes publiés à l’origine dans le Journal politique national. Les Mémoires de
Paul Barras, s’ils couvrent cette période révolutionnaire, s’étendent également sur le Directoire, tandis que les Mémoires (1814) de la marquise de La Rochejaquelein offrent un témoignage capital sur la guerre de Vendée.
L’époque est par ailleurs marquée par des ouvrages plus autobiographiques, comme les Mémoires (1791) de Giovanni Giacomo Casanova, ceux du prince de Ligne ou les Mémoires d’une portraitiste (1835) d’Élisabeth Vigée-Lebrun.
Dans la plus pure tradition mémorialiste, de nombreux proches de Napoléon I er (Commentaires, 1867) rédigent leurs mémoires pour témoigner de la vie de l’empereur, notamment Emmanuel de Las Cases ( le Mémorial de Sainte Hélène, 1823) et le
général Léopold Hugo (le père de Victor Hugo, Mémoires du général Hugo, 1820).
Talleyrand rédige quant à lui à la fin de sa vie les Mémoires du prince de Talleyrand-Perigord (posth.
1891) dans lesquelles il précise qu’il n’« écri[t] pas [ses] mémoires
pour [se] justifier de [ses] fautes mais pour [s]’en accuser et quelquefois [se] défendre.
» René de Chateaubriand, pour sa part, écrit pendant près de trente ans ses Mémoires d'outre-tombe (première édition en volumes 1849-1850), chef d’œuvre
historique, politique, sentimental et poétique.
De nombreux écrivains, un peu partout en Europe, entreprennent également de rédiger leurs mémoires, souvent très autobiographiques, comme Carlo Goldoni ( Mémoires de M.
Goldoni pour servir à
l’histoire de sa vie et celle de son théâtre, en français, 1787), Johann Wolfgang von Goethe ( Poésie et vérité, 1831) ou les Français Stendhal ( Souvenirs d’égotisme, 1832 ; la Vie de Henry Brulard, rédigée en 1835-1836, publiée en 1890), Alexandre
Dumas ( Mes Mémoires, 1852-1856), George Sand ( Histoire de ma vie, 1855) et Victor Hugo ( Choses vues, posth.
1887-1900).
Des musiciens se lancent également dans des ouvrages mi-autobiographiques, mi-théoriques sur leur vie artistique
(Hector Berlioz, Charles Gounod) et beaucoup de personnalités de milieux très différents leur emboîtent le pas, notamment le criminel Lacenaire ( Mémoires, posth. 1836), François Eugène Vidocq ( Mémoires de Vidocq, chef de la police de Sûreté,
jusqu'en 1827, 1828) , Louise Michel ( Mémoires, 1886), les frères Goncourt ( Journal, Mémoires de la vie littéraire, 1887-1896 ).
3. 4 À partir du XXe siècle
Initié au siècle précédent, le déclin du genre s’accentue au XXe siècle.
L’appellation « mémoires », se faisant de plus en plus rare, est régulièrement remplacée par les termes « souvenirs », « journal » ou « vie », ou par des titres plus personnels et
plus caractéristiques de la période dont l’auteur se fait le témoin.
La Belle époque est par exemple décrite dans des ouvrages comme les Pas effacés.
Mémoires (posth.
1923) de Robert de Montesquiou.
Parmi les témoignages de la Première guerre
mondiale figurent des récits historiques romancés (Henri Barbusse, le Feu, Journal d’une escouade, 1916 ; Louis Ferdinand Céline, Carnet du cuirassier Destouches, posth.
1970) qui ouvrent la voie à un nouveau genre de mémoires pendant la
Seconde Guerre mondiale (Pierre Clostermann, le Grand Cirque, 1948 ; Antoine de Saint-Exupéry, Pilote de Guerre, 1942).
En règle générale les personnalités politiques et militaires continuent d’utiliser l’appellation « mémoires » : Mémoires de
guerre (1954-1959) et Mémoires d’espoir (inachevé, 2 tomes, 1958-1972) de Charles de Gaulle ; les différents mémoires de Winston Churchill .
André Malraux a pour sa part rédigé les Antimémoires (1967), pour témoigner d’une façon nouvelle sa
rencontre avec l’histoire.
Pour certains récits, la frontière entre mémoires et autobiographie se brouille cependant toujours davantage et les deux genres finissent par parfois se confondre.
François Mauriac publie les Mémoires intérieurs (1959) et les Nouveaux Mémoires
intérieurs (1965), Simone de Beauvoir les Mémoires d’une jeune fille rangée, Jean-Paul Sartre les Mots.
Le mot mémorial rivalise aussi parfois avec le terme mémoires, notamment dans l’œuvre de Marcel Jouhandeau ( Mémorial, 1948-1958), et celle.
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