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Un monde humain sans affrontement est-il pensable ?

Publié le 17/03/2004

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Dans la mesure où la notion d'affrontement évoque immédiatement celle de guerre ou, plus généralement, de conflit violent et destructeur entre deux ennemis, le sujet paraît nous reconduire, en première lecture, à la problématique traditionnelle de la nature humaine d'une part, notamment à la question de savoir si l'homme est naturellement bon ou naturellement méchant, à une réflexion sur l'utopie d'autre part, c'est-à-dire sur la possibilité historique d'un monde sans violence. Et l'équivocité du mot «pensable« dans notre langue, qui signifie à la fois «concevable« et «possible«, appelle une telle réflexion.Or, le terme d'affrontement renvoie également à des formes pacifiques de confrontation entre deux adversaires (compétition ou «rencontre« sportive par exemple) où la lutte n'est pas l'occasion d'une destruction réciproque des antagonistes mais une émulation qui rend l'un et l'autre des deux protagonistes meilleurs et plus forts et qui, les poussant à «se dépasser«, permet d'aboutir le cas échéant à un progrès pour l'espèce humaine tout entière (l'établissement d'un nouveau record sportif, par exemple, qui repousse les limites du corps humain) ? L'affrontement prend ainsi une valeur et une signification positives : de preuve d'agressivité déplorable et nocive chez l'être humain, il devient une condition du progrès général de l'humanité. Pour prendre un autre exemple, les luttes révolutionnaires ne sont-elles pas nécessaires à l'instauration d'un meilleur état de choses pour les hommes, d'une société plus juste et plus heureuse?La question est alors la suivante : un monde humain sans affrontement est-il souhaitable ou désirable? Qu'il soit une donnée de la nature humaine ou un effet de l'histoire, l'affrontement n'est-il pas à ce point constitutif de la réalité humaine, à ce point producteur d'humanité, qu'on ne puisse concevoir ni envisager de monde humain sans affrontement, et qu'un monde humain, s'il pouvait être conçu sans affrontement, ne serait plus un monde vraiment humain, un monde où les hommes mèneraient une vie proprement humaine.Le problème n'est plus ici de savoir s'il est utopique ou non de concevoir et de projeter la réalisation d'un monde où les hommes ne s'affronteraient plus mais de savoir si une telle conception et un tel projet, quelle que soit par ailleurs leur possibilité ou probabilité historique, ont une valeur humaine, représentent une perspective humaine.

  • I – Un but vers lequel on doit tendre
  • II – Un idéal, une utopie
  • III – Positivité de l’affrontement comme construction du monde et de soi

« Introduction : L'affrontement peut se comprendre comme un cas de la violence : Guerres, intrigues, révolutions, duels,mais aussi controverses, querelles d'écoles et de chapelles, conflits idéologiques, etc.

: le monde humain est unmonde dans lequel les hommes ne cessent de s'affronter, individuellement et collectivement, sur tous les terrains.En même temps, devant les maux engendrés par les conflits qui les opposent, les hommes désirent – et imaginent –un monde humain sans affrontement.

Précisément, le projet d'un tel monde n'est-il pas illusion, pure utopie? Aconsidérer, à la façon du Micromégas de Voltaire , le monde des hommes comme il va, dans sa réalité présente et passée, il semble qu'on ne puisse pas penser ce monde autrement que comme un champ de bataille, et que l'idéed'un monde humain sans affrontement ne soit pas autre chose que la fiction d'un monde imaginaire, d'un mondeautre que celui où vivent réellement les hommes.

On peut même se demander si une telle idée a la moindreconsistance et si le désir de paix lui-même est authentique.

Ou s'il est seulement pensable mais non réalisable. Dans la mesure où la notion d'affrontement évoque immédiatement celle de guerre ou, plus généralement, de conflit violent et destructeur entre deux ennemis, le sujet paraît nous reconduire, en première lecture, à laproblématique traditionnelle de la nature humaine d'une part, notamment à la question de savoir si l'homme estnaturellement bon ou naturellement méchant, à une réflexion sur l'utopie d'autre part, c'est-à-dire sur la possibilitéhistorique d'un monde sans violence.

Et l'équivocité du mot «pensable» dans notre langue, qui signifie à la fois«concevable» et «possible», appelle une telle réflexion.

Or, le terme d'affrontement renvoie également à des formespacifiques de confrontation entre deux adversaires (compétition ou « rencontre » sportive par exemple) où la lutten'est pas l'occasion d'une destruction réciproque des antagonistes mais une émulation qui rend l'un et l'autre desdeux protagonistes meilleurs et plus forts et qui, les poussant à « se dépasser », permet d'aboutir le cas échéant àun progrès pour l'espèce humaine tout entière (l'établissement d'un nouveau record sportif, par exemple, quirepousse les limites du corps humain) ? L'affrontement prend ainsi une valeur et une signification positives : depreuve d'agressivité déplorable et nocive chez l'être humain, il devient une condition du progrès général del'humanité.

Pour prendre un autre exemple, les luttes révolutionnaires ne sont-elles pas nécessaires à l'instaurationd'un meilleur état de choses pour les hommes, d'une société plus juste et plus heureuse? La question est alors lasuivante : un monde humain sans affrontement est-il pensable ? Si un monde humain sans affrontement semble être un but vers lequel on doit tendre (1 ère partie), force et de constater qu'il y a une séparation nette entre le pensable et le réalisable (2 nd partie) ; mais qu'il soit une donnée de la nature humaine ou un effet de l'histoire, l'affrontement n'est-il pas à ce point constitutif de la réalité humaine,à ce point producteur d'humanité ? (3 ème partie).

I – Un but vers lequel on doit tendre a) Un monde humain sans affrontement semble possible, pensable du moins c'est comme cela que l'on peutcomprendre l'état de nature de l'homme chez Rousseau tel qu'il se développe dans le Second Discours .

L'homme apparaît être cet être débonnaire, ne manifestant aucune agressivité envers autrui.

Il n'a pas besoin de travaillerpour trouver de quoi subsister, la nature lui fournit tout ce dont il a besoin.

Il est un être solitaire.

Dès lors il n'y apas d'affrontement possible avec autrui.

Le monde leur suffit.

C'est alors la rareté et la propriété qui sont les mauxde la corruption de la bonté de l'homme.

Cependant, au-delà même de cet état de nature, l'état civil de l'homme nel'empêche pas non plus de ne pas se livrer à la guerre et aux affrontement.b) Au demeurant, un monde humain sans affrontement pourrait prendre pour modèle la cité de La République de Platon , gouvernée par la justice et l'harmonie suivant l'exemple du cosmos, soit l' Utopie de More ou encore l'abbaye de Thélème dans le Gargantua de Rabelais .

Ces lieux se veulent des lieux de paix et d'harmonie même s'il peut y avoir des gardiens afin justement de se protéger contre le mal extérieur.

Cela pourrait sembler être un argument fortcontre cette thèse mais il n'en est rien.

En effet, il suffit de penser la généralisation de ces cités ou de ces étatspour penser un monde humain sans affrontement.

Ce monde humain serait alors gouverné par la raison.

Il s'agit alorsde produire un homme qui agit volontairement et de façon autonome.

C'est donc un processus éducatif qu'il fautdévelopper et engager afin de réformer l'homme.c) Cependant, la cité platonicienne n'est qu'un idéal, une utopie, ou plus exactement elle est une « res publicanoumenon » comme Kant le note dans la Critique de la raison pure .

C'est-à-dire qu'elle est une « Idée » et dans le vocabulaire kantien cela signifie qu'elle est un idéal qui doit servir de principe régulateur de la raison afin quel'entendement s'en sert comme d'un modèle à atteindre.

Or comme il le note avec réalisme dans la sixièmeproposition de l' Idée d'une histoire universelle d'un point de vue cosmopolitique : « La nature nous contraint à ne faire que nous approcher de cette Idée ».

Il s'agit de tendre vers la paix perpétuelle.

Néanmoins cette cité estfondée sur un espoir et sur l'idée de progrès moral qui selon Kant doit se réaliser, étant le but final de l'homme doncla fin du règne de la nature.

Lorsque l'homme sera pleinement moral donc juste, ayant un caractère de sainteté, ilpourra produire un monde juste sans affrontement qui sera une « cité de Dieu » dans le « règne des fins » comme ledéveloppe la Critique de la Faculté de juger . Transition : Ainsi un monde humain sans affrontement est envisageable ; il est pensable et nous devons tout faire pour leréaliser.

Néanmoins, s'il s'agit bien d'un but n'est-ce pas un idéal, une utopie que l'on ne peut pas atteindre ? Unesimple Idée régulatrice ? Dès lors ce serait pensable mais pas réalisable.

II – Un idéal, une utopie. »

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