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n'est-on moral que par intérêt ?

Publié le 01/12/2005

Extrait du document

Dans le chapitre XIV du Léviathan il écrit que « Une LOI DE NATURE est un précepte ou une règle générale trouvée par la raison selon laquelle chacun a l'interdiction de faire ce qui détruit sa vie, ou qui le prive des moyens de la préserver, et de négliger de faire ce par quoi il pense qu'elle serait le mieux préservée. » -          Les lois naturelles constituent ainsi les conclusions que la raison élabore concernant ce qui mène à la conservation de soi. Elles élaborent les préceptes de la raison qui instruisent les hommes au sujet de ce qu'il faut qu'ils fassent pour éviter les périls et assurer au mieux leur conservation. Il résume ces lois en une seule dans le chapitre XV du Léviathan : « ne fais pas à un autre ce que tu ne voudrais pas qu'on te fît à toi-même. » -          Dans l'état de nature, « l'homme est un loup pour l'homme » ainsi qu'Hobbes l'écrit dans la dédicace du De cive. Dans de telles conditions, l'individu n'a pas intérêt à respecter les lois de nature car il n'est pas sûr que les autres les respecteront également. Ainsi les lois de nature sont alors inefficaces. -          Les lois de nature qui fondent la moralité nous invitent ainsi à chercher l'état civil, dans lequel seul il peut y avoir la paix, condition sine qua non pour que soient efficaces ces lois. C'est la loi civile qui pourra ensuite les imposer, car, ainsi qu'il l'écrit dans le chapitre XXVI du Léviathan : « déclarer ce qu'est l'équité, ce qu'est la justice et la vertu morale, et faire en sorte que [les personnes privées] leur soient soumises, cela requiert les ordonnances de la puissance souveraine, et que les châtiments soient ordonnés pour celles qui les enfreindraient. » -          Du point de vue hobbesien, nous ne sommes donc moraux que par intérêt, pour parvenir à mettre en acte ces lois de nature qui nous guident, et qui n'ont pour objectif que nous-mêmes.

Analyse du sujet :

-          Le sujet ne demande pas s'il arrive qu'on soit moral par intérêt, mais si l'intérêt n'est pas justement l'unique raison d'être de la morale.

-          La formulation du sujet est quelque peu provocatrice, car intuitivement, on a tendance à opposer la morale à l'intérêt, comme on opposerait l'altruisme à l'égoïsme. Il est courant de considérer que ce qui est moral est désintéressé, et que ce qui est intéressé est immoral.

-          Aussi, si l'on n'était moral que par intérêt, ce serait alors comme si la morale n'existait pas.

-          On constate pourtant des actes moraux désintéressés. Pour en rendre compte par l'intérêt, il serait nécessaire d'effectuer un détour par lequel on débusquerait des intérêts cachés : cela semble une complication inutile.

-          A contrario¸ si l'on n'était pas moral par intérêt, il faudrait cependant rendre compte de cette morale : comment expliquer qu'un agent rationnel sacrifie son bonheur à la morale ?

-          Il faudrait alors également rendre compte du fait que tous les hommes n'ont pas la même morale : s'ils n'ont pas la même, n'est-ce pas parce que tous n'y trouvent pas leur compte de la même façon, c'est-à-dire justement parce que c'est l'intérêt individuel qui en décide ?

Problématisation :

La question posée par le sujet est source d'interrogations, car il existe comme une opposition de nature entre la morale et l'intérêt. Répondre par l'affirmative consisterait à nier la valeur de la morale, dont la prégnance est pourtant toujours sensible. Décider qu'il faille en conséquence donner une réponse négative, c'est cependant soulever de nouveaux problèmes, car l'intérêt a l'avantage de rendre compte des comportements humains selon des schémas qui font l'économie de nombreux postulats problématiques. Ne faudrait-il pas alors affiner notre représentation de l'intérêt pour ne pas tomber dans une négation absurde de l'évidence morale ?

 

« morales en imposant la crainte du châtiment prouve bien que c'est le seul intérêt qui nous amèneà la morale. L'évidence du fait moral et du sens du devoir. 2. - On ne peut toutefois s'empêcher de penser qu'Hobbes a manqué quelque chose, à savoir le sentiment moral.

En effet, il semble nier l'expérience immédiate que nous avons de la moralité :comment sa théorie peut-elle rendre compte du trouble de la conscience que l'on éprouve en facede l'immoralité ? Pourquoi serions-nous choqué par une injustice qui ne nous concerne pas si nousétions dépourvus de conscience morale ? Comment, encore, Hobbes pourrait-il expliquer par sathéorie le sacrifice pour autrui ? Il faut donc postuler qu'en dehors de notre intérêt personnel, ilexiste une morale que nous ne pouvons jamais totalement faire taire. - C'est ce que fait Kant, qui considère que la morale est une loi de la raison et non de l'intérêt, une loi qu'il appelle la loi morale.

Il écrit dans la Critique de la raison pratique que : « La loi morale est donnée comme un fait de la Raison dont nous sommes conscients a priori et qui est apodictiquement certain, en supposant même qu'onne puisse alléguer dans l'expérience aucun exemple où elleait été exclusivement suivie.

» - On peut la postuler si l'on postule que l'homme est libre.

Or, considérer que l'homme est libre, c'est imaginerqu'il est capable de s'affranchir des déterminationssensibles, par exemple en renonçant à l'intérêt personnel etau plaisir immédiat. - Si l'homme est capable ainsi de mettre en action sa liberté, c'est parce qu'il est sensible à quelque chose deplus noble que l'intérêt.

Agir par intérêt, ce n'est en effetpas agir en homme libre, car c'est être poussé par uneimpulsion animale.

Selon Kant, cette chose qui seraitsupérieure à l'intérêt, ce serait le sens du devoir qui nousenjoint à un respect inconditionnel envers la loi morale.

Laloi morale se formulant en ces termes : « Agis uniquement d'après la maxime qui fait que tu peux vouloir en même temps qu'elle devienne une loi universelle .

» ( Fondements de la métaphysique des moeurs , deuxième section) - C'est pourquoi selon Kant, il faut obéir à la morale, quelles qu'en soient les conséquences sur notre bonheur.

Aussi ne pouvons-nous considérer d'après lui que nous ne sommes moraux que parintérêt.

Nous sommes moraux parce que nous éprouvons du respect pour la loi morale, or la loimorale répond aux critères d'universalité et d'impartialité, et non aux exigences de l'intérêt. L'illusion de la morale comme instrument de l'affirmation vitale d'un certain type d'être vivant. 3. - La conception kantienne de la morale est cependant portée à poser un postulat lourd de conséquences, à savoir que la morale est universelle.

Or, si l'on peut considérer que quasimenttous les êtres humains sont habités d'une certaine conscience morale, on constate que tous neconsidèrent pas de la même façon ce qui est moral ou non.

Pour certains, des rituels commel'excision constituent un acte hautement moral, pour d'autres, il s'agit de la plus insigne barbarie.Nous voyons donc que la morale n'a rien d'universelle, et qu'en cela Kant semble s'être trompé. - Pour éviter cette erreur, nous pouvons considérer la morale avec Nietzsche.

Ce dernier, dans la Volonté de puissance , écrit : « J'appelle « morale » un système de jugements de valeur qui est en relation avec les conditions d'existence d'un être.

» Volonté de puissance , Tome 1, Livre 2, §136 - De la sorte, on peut considérer que tous les individus étant différents, leurs conditions d'existence le sont aussi, et de la sorte les morales varient d'un individu à un autre. - Cela pourrait nous ramener à Hobbes, mais l'analyse nietzschéenne est en fait plus fine. Comme Kant, Nietzsche considère que le sentiment moral constitue une réalité innée, mais il s'agitd'une réalité qui sert des buts dont l'individu n'est pas conscient.

Hobbes ne considérait quel'intérêt rationnel de l'individu qui calcule son profit, alors que Nietzsche considère l'action moralecomme purement désintéressée au niveau conscient.. »

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