Devoir de Philosophie

Agir moralement, est-ce nécessairement lutter contre ses désirs ?

Publié le 04/02/2004

Extrait du document

   La morale est un ensemble de normes qui sont censées diriger les actes de l'homme en société en vertu d'un ordre établi. Elle découle de la raison et pour l'appliquer l'homme doit le plus souvent aller contre ses passions, il doit faire appel à sa volonté pour l'appliquer. Cet ensemble de codes peut apparaître comme des contraintes, c'est un devoir éthique que l'homme doit accomplir pour atteindre une cohésion sociale. Être moral, c'est être vertueux, juste. Ainsi, agir moralement peut apparaître comme une contrainte face à nos pulsions, à nos désirs. Lorsque je désire quelque chose, je ressens le plus souvent une envie égoïste que je dois satisfaire par-dessus tout, ce désir dépasse la dimension morale qui me lie à la société, avant de m'occuper de la collectivité, je me préoccupe de mon individualité. Le désir, domaine des passions, prend le dessus sur la morale, domaine de la raison.

         Cependant, certains désirs ne peuvent-ils être associés à une certaine sagesse? Si le désir c'est l'inspiration de l'amour, alors ne peut-il nous porter vers l'amour de l'Humanité? Aimer l'Humanité n'est ce pas désirer pour elle le bonheur et ce bonheur ne peut-il s'acquérir en agissant pour le bien être de l'homme, c'est à dire en agissant moralement? De plus, le désir peut, au même titre que la morale, permettre d'atteindre la sérénité. En effet, si nous redéfinissons le désir comme celui de satisfaire uniquement ses besoins naturels, et que comme les stoïciens nous conservons la seule préoccupation de notre esprit, le désir n'a-t-il pas pour fin l'ataraxie?

Dans ce cas, désir et morale ne vont-ils pas de pair ? Le but dans ce cas n'est-il pas la paix de l'esprit, et ainsi l'ordre établi?

         Il faudra donc, pour régler ce problème, distinguer le désir comme satisfaction égoïste de l'individu au mépris d'autrui, et donc qui va à l'encontre de l'altruisme, domaine de la morale et d'un autre côté le désir comme contempteur de l'esprit et objet d'ataraxie qui vise la paix chaque individu comme la morale qui vise la paix de la société.

 

« [Introduction] De l'homme qui cède à tous ses désirs, la philosophie et la littérature ont fréquemment dressé un portrait peuencourageant : il "se vautre" dans le plaisir, ne pense qu'à ses satisfactions personnelles immédiates, ne vit quepour lui.

Dans une telle optique, le moins qu'on puisse lui reprocher, semble-t-il, est de ne guère se soucier de ceque peut moralement signifier sa conduite.

Doit-on en déduire qu'il existe une contradiction insoluble entre les désirset l'action morale ? Ne pourrait-on, au contraire, concevoir une morale qui tienne compte des désirs de l'individu etleur accorde une satisfaction au moins partielle ? Mais, dans ce cas, ne risque-t-on pas de retomber sur un écueilmajeur : l'opposition entre l'égoïsme du désir et la souci de l'autre qu'implique l'action morale ? [I.

Comment admettre la portée morale du désir ?] Dès l'Antiquité, la condamnation du désir apparaît chez Platon.

C'est que le désir rappelle la part charnelle del'homme, et que Platon privilégie au contraire chez ce dernier la part spirituelle.

Toutefois, il ne semble pasobligatoire que la philosophie condamne ainsi, par principe, tout désir.

En elle-même, n'exprime-t-elle pas une sortede désir nostalgique de la sagesse enfuie ? Son étymologie indique une telle tendance : philein désigne en fait larecherche – plus que le banal « amour » – d'une sophia disparue, et cette dernière semble en effet proposer unobjet bien « désirable », puisqu'elle est synonyme d'équilibre, de vie convenable et harmonieuse, aussi bien sur leplan individuel que sur le plan collectif.

Il n'en reste pas moins que ce désir animant la philosophie elle-même est denature incontestablement spirituelle, et qu'il vise une sophia qui concerne elle aussi l'esprit – ne serait-ce que dansla mesure où elle inclut une attitude morale.Si la philosophie épicurienne réhabilite, au moins partiellement, le désir, etmontre qu'il est tout à fait compatible avec une vie morale et sage, c'estparce que l'épicurisme est d'abord un système qui se veut intégralementmatérialiste.

Il ne nie pas la dimension spirituelle de l'homme, mais il considèrequ'elle ne saurait être dotée d'éternité : il existe bien, en chaque être humain,une « âme », mais elle est aussi mortelle que le corps.

En l'absence de buttranscendant, la morale peut alors prendre modèle sur la nature, et celle-cinous montre que déjà les animaux sont animés par la recherche de ce qui estbon pour leur existence, c'est-à-dire du plaisir.

Si l'homme agit de même, celasignifie qu'il doit être attentif à ses désirs et en chercher la satisfaction.Toutefois, il ne s'agit aucunement de céder à tous les désirs, de setransformer en ce que le poète Horace, dans une version tardive et enquelque sorte inversée de l'épicurisme, nommera un « pourceau d'Épicure ».

Ilconvient au contraire de soigneusement remarquer que certains désirsmènent à des plaisirs qui ne sont qu'apparents et fugitifs, puisqu'ils setransforment rapidement en souffrances.La morale épicurienne peut ainsi conseiller à l'homme qui veut être sage etheureux de procéder à une classification des désirs, dont on ne satisfera queceux qualifiables de « naturels et nécessaires » : ce sont les plusélémentaires, donc les plus faciles à combler, et ils sont essentiels à la survieéquilibrée de l'organisme – manger, boire, dormir, le tout de manière frugale.Au-delà commence le risque, puisque, des désirs « naturels mais nonnécessaires » (soit : les mêmes dans une version « luxueuse » – boire de bons vins, faire de bons repas, etc.), ondoit se méfier pour ne pas s'y habituer, car leur perte signifierait une souffrance ; ils sont « à consommer avecmodération ».

Quant à tous les autres, ceux qui ne sont « ni naturels ni nécessaires » (la fortune, le statut social, lagloire...), il faut radicalement les fuir.

En d'autres termes, la vie morale semble possible en satisfaisant certainsdésirs ; sans doute le plus grand nombre d'entre eux est-il refusé, mais une conciliation entre désirs et morale estau moins partiellement affirmée. [II.

La morale contre les désirs] La critique adressée par Kant à la morale épicurienne est radicale : il lui reproche d'être purement subjective, et nonuniversalisable – ce qui signifie pour lui non authentiquement morale.Il est vrai qu'il appartient à chacun de ressentir, dans son corps, le moment où un plaisir s'inverse en douleur ; onpeut juger qu'un tel critère physique, sinon même physiologique, paraît assez indigne, ou insuffisant, pour décider dece qui peut ou non être moralement acceptable.

De plus, le bonheur épicurien est réservé à une minorité : lesadeptes de l'école, totalement indifférents à la vie sociale, vivent en marge, sans se préoccuper de ce que peuvent. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles