Les Mots et les choses
Publié le 12/04/2013
Extrait du document
« D'une certaine façon, on en revient au point de vue du xviie siècle, avec cette différence : non pas mettre l'homme à la place de Dieu, mais une pensée anonyme, du savoir sans sujet, du théorique sans identité. « (Michel Foucault, La Quinzaine littéraire, 15 avril 1966.) Michel Foucault (1926-1984) a d'abord appliqué sa méthode archéologique à la folie dans Folie et Déraison, histoire de la folie à l'âge classique (1961).
«
EXTRAITS
Le langage actuel n'est plus en totale
adéquation avec les choses qu'il nomme
Sous sa forme première, quand il fut donné
aux hommes
par Dieu lui-même, le langage
était un signe des choses absolument certain
et transparent, parce qu'il leur ressemblait .
Les noms étaient déposés sur ce qu'ils
désignaient , comme la force est écrite dans
le corps du lion, la royauté dans le regard
del' aigle, comme l'influence des planètes
est marquée sur
le front des hommes : par
la forme de la similitude.
Cette transparence
fut détruite à Babel pour la punition des
hommes.
Les langues ne furent séparées les
unes des autres et ne devinrent incompa
tibles que dans la mesure où
fut effacée
d'abord cette ressemblance aux choses qui
avait été la première raison d'être du
langage.
Toutes les langues que nous
connaissons, nous ne les parlons mainte
nant que sur fond de cette similitude perdue,
et dans l'espace qu
'elle a laissé vide.
Il n'y
a qu'une langue qui en garde la mémoire,
parce qu
'elle dérive tout droit de ce premier
vocabulaire maintenant oublié ; parce que
Dieu n'a pas voulu que le châtiment de
Babel échappe au souvenir des hommes ;
parce que cette langue a dû servir à racon
ter la vieille Alliance de Dieu avec son
peuple ; parce que enfin
c'est dans cette
langue que Dieu
s'est adressé à ceux qui
l'écoutaient.
L'hébreu porte donc, comme
des débris , les marques de la nomination
première.
A l'âge classique, le langage tend
à accomplir le mouvement qui va
de la figure
du nom au nom lui-même
On peut dire que c'est le Nom qui organise
tout
le discours classique; parler ou écrire,
ce n
'es t pas dire les choses ou s'exprimer,
ce n
'es t pas jouer avec le langage , c'est
s'acheminer vers l'a cte souverain de
nomination , aller, à travers le langage, jusque
vers le lieu où les choses et les mots
se nouent en leur essence commune, et
qui
permet de leur donner un nom.
(.
..
)
[Le discours classique] chemine dans le
suspens sans cesse maintenu du
Nom.C'est
pourquoi, dans sa possibilité même, il y est
lié à la rhétorique ,
c'es t-à-dire à tout cet
espace qui entoure le nom , le fait osciller
autour de ce qu'il représente, laisse appa
raître les éléments ou le voisinage ou les
analogies de ce qu'il nomme.
La fin de l'homme dans le champ
du savoir est imminente
Pendant tout le X/Xe siècle, la fin de la
philosophie et la promesse
d'une culture
prochaine ne faisaient sans doute
qu'une
seule et même chose avec la pensée de la
finitude et l'apparition de
l'homme dans
le savoir; de nos jours, le fait que la philo
sophie soit toujours et encore en train de
finir et le fait
qu'en
elle peut-être , mais
plus encore en de
hors d'elle et contre
elle, dans la littéra
ture comme dans la
réflexion formelle,
la
question du lan
gage se pose , prou
vent sans doute que
l'homme est en train
de disparaître.
Gallimard , 1990
« .•• quand il fut donné
aux hommes par Dieu
lui-même, le langage
était un signe des
choses absolument
certain et transparent,
parce qu'
il leur
ressemblait.
» ' 'Pt.
NOTES DE L'ÉDITEUR parce qu ' il nous dit: "A telle époque, les
gens pensaient ceci ou cela
et puis à partir
de telle date, on a pensé que ...
" Moi, je
veux bien, mais est-ce qu'on peut en être
aussi sûr ? C
'es t justement pour ça que nous
tentons de faire des films : pour que des
Foucault futurs ne puissent affirmer de
telles choses avec autant de présomption.
»
Jean-Luc Godard, Cahiers du cinéma,
pensées.
» Gilles Deleuze, Le Nouvel
Observateur , 1er juin 1966.
« Foucault ne nous dit pas ce qui serait le
plus intéressant :
à savoir comment chaque
pensée est construite à partir de ces
conditions,
ni comment les hommes passent
d'une pensée à une autre.
Il lui faudrait pour
cela faire intervenir
la praxis, donc
l 'histoire, et c
'es t précisément ce qu' il
refuse.
»Jean-Paul Sartre, entretien avec
Bernard Pingault,
L' Arc, n ° 30, 1966.
« Si je n'aime pas tellement Foucault, c'est
n° 194, 1967.
«Nous croyons que Les Mots et les choses
est un grand livre, sur de nouvelles
1 Gamma 2 dessin de Franci s Picabia I Pro Liuéri s 3 dess in d e Jean lpoustéguy , Fata Morgana, 1986
« La rigueur, l'originalité, l'inspiration
de Michel Foucault sont telles
qu'immanquablement de la lecture
de son dernier livre naissent un regard
radicalement nouveau sur le passé de la
culture occidentale et une conception plus
lucide de la confusion de son présent.
»
F.
Châtelet,« L'Homme , ce Narcisse
incertain », La Quinzaine littéraire,
1er avril 1966.
FOUC AU LT02.
»
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