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Les mouvements de population

Publié le 02/08/2006

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7-9 mai 1945 -   Au lendemain de la deuxième guerre mondiale, en mai 1945, pas moins de 50 750 000 personnes, soit un dixième de la population européenne, se trouvent sur les routes, dans des camps de transit-ou dans de nouveaux camps de prisonniers : trois millions de soldats allemands sont aux mains des Alliés-loin de leur patrie ou, tout au moins, de leurs foyers. On compte par millions ceux qui furent les prisonniers de guerre du IIIe Reich, ses déportés et ses travailleurs étrangers enrôlés de force. Rien que ces derniers se chiffrent alors à 8 700 000 (dont 3 millions de travailleurs russes, 2 millions de Français, 1 400 000 Polonais, 500 000 Belges, 400 000 Néerlandais, 365 000 Tchécoslovaques et 350 000 Italiens). Aux survivants et expatriés libérés, il faut ajouter les expulsés, les réfugiés qui cherchent à revenir, les fuyards. On évalue à 19 220 000 le nombre des " personnes déplacées " dans leur propre pays, soit pour fuir les combats ou la disette, soit de force.

   Durant cette période troublée, qui devait durer plusieurs années, aux importantes modifications de frontières, les organismes de secours, de protection et de rapatriement ont davantage procédé à des évaluations incomplètes et pas toujours fiables qu'à des recensements exhaustifs, d'autant que, déjà entre les débuts de la débâcle allemande en 1944 et la victoire des Alliés, déportations et exodes avaient fait un nombre de morts difficile à estimer mais se chiffrant aussi en termes de millions.

   Pour illustrer l'ampleur des mouvements de populations à l'époque, il suffit d'indiquer qu'un événement, dont les pays libérés percevaient à peine l'importance, à savoir l'annexion de la Prusse orientale par la Pologne, fait dire à Winston Churchill, en décembre 1944, devant la Chambre des communes : " Sans doute cette acquisition aura-t-elle pour conséquences une redistribution de plusieurs millions de personnes de l'est vers l'ouest et le nord et l'expulsion de tous les Allemands. " A la conférence de Potsdam, qui réunit, du 17 juillet au 2 août 1945, Churchill, Staline et Truman et où se décide un nouvel aménagement de l'Europe, les Grands prévoient que 6 650 000 Allemands devraient quitter les territoires qu'ils ont occupés et une partie de ceux où ils se trouvaient avant la guerre. Selon leurs estimations, 3 500 000 Allemands et assimilés (Volksdeutsche) quitteraient la Pologne; 2 500 000, la Tchécoslovaquie, 150 000 l'Autriche. En réalité, ce seront 2 millions qui quitteront la Pologne, 2 400 000 la Tchécoslovaquie, 178 000 la Hongrie.

   Mais avant même la mise en vigueur du plan de Potsdam, 5 millions d'Allemands s'étaient enfuis de Pologne et de ses nouveaux territoires; 300 000 de Tchécoslovaquie; 500 000 de la Prusse orientale occupée par les Soviétiques et plusieurs centaines de milliers des Balkans.

   Moins précises sont les informations que l'on peut recueillir sur les populations déportées dans l'est de l'Europe par les Soviétiques et sur les exodes massifs dans les territoires conquis par l'armée rouge.

   On estime cependant à 410 000 le nombre de Finlandais qui ont quitté en 1944 la Carélie annexée par l'URSS; à 60 000 les Estoniens, à 100 000 les Lettons et à 80 000 les Lituaniens déportés en Sibérie lors de l'annexion de leur pays la même année par les Soviétiques; à 60 000 les Estoniens, 90 000 les Lettons et 50 000 les Lituaniens qui se sont réfugiés à l'Ouest. On évalue à 2 300 000 le nombre de Russes qui s'installent à la fin de la guerre dans les pays baltes, le nord de la Prusse orientale, le Ruthénie ex-tchécoslovaque, les provinces orientales de la Pologne et la Bessarabie, tandis que 1 500 000 Polonais quittent la partie de leur pays annexée par les Soviétiques et environ 3 millions de Polonais s'installent dans les anciennes provinces de l'est de l'Allemagne, ainsi qu'en Prusse orientale.

   En 1945, les Tatars de Crimée, au nombre de 250 000, sont déportés en Asie centrale. Pour ce qui est de l'émigration des Allemands de l'Est vers la RFA, on dispose de recensements officiels : celui du 1er juillet 1952 dénombre près de 10 millions de réfugiés de l'Est. On en comptera en 1 953 348 000 de plus et encore 221 100 en 1954. L'Europe de l'après-guerre a connu des bouleversements moins spectaculaires.

   C'est ainsi que 200 000 Italiens étaient expulsés de Dalmatie par les Yougoslaves et que, entre août 1950 et novembre 1951, la Bulgarie a expulsé 150 000 Turcs.

ISABELLE VICHNIAC Avril 1985

 

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