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Nietzsche: En contemplant une chute d'eau...

Publié le 21/04/2005

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nietzsche
En contemplant une chute d'eau, nous croyons voir dans les innombrables ondulations, serpentements, brisements des vagues, liberté de la volonté et caprice ; mais tout est nécessité, chaque mouvement peut se calculer mathématiquement. Il en est de même pour les actions humaines ; on devrait pouvoir calculer d'avance chaque action, si l'on était omniscient, et de même chaque progrès de la connaissance, chaque erreur, chaque méchanceté. L'homme agissant lui-même est, il est vrai, dans l'illusion du libre arbitre ; si à un instant la roue du monde s'arrêtait et qu'il y eût là une intelligence calculatrice omnisciente pour mettre à profit cette pause, elle pourrait continuer à calculer l'avenir de chaque être jusqu'aux temps les plus éloignés et marquer chaque trace où cette roue passera désormais. L'illusion sur soi-même de l'homme agissant, la conviction de son libre arbitre, appartient également à ce mécanisme, qui est objet de calcul. Nietzsche

 Ce texte a pour thème la liberté, notion dont il fait la critique.  Le problème en est le suivant :  La liberté humaine constitue-t-elle un ordre à part, indépendant de celui de la nature, ou bien n'est-elle pas plutôt une simple illusion, l'action humaine étant en réalité immergée comme tout phénomène dans le "mécanisme" de la nature ?    Nietzsche répond à ce problème en posant la thèse suivante :  La liberté humaine quelque soit le domaine où elle se déploie (action, mais aussi "connaissance" ou moralité), est une simple illusion, un sentiment psychologique de "libre arbitre", mais c'est en même temps une illusion qui est elle-même engendrée par la nécessité ou le mécanisme de fonctionnement de la nature à laquelle il appartient.    L'enjeu du texte est limpide : quelle portée finale recouvre la négation par Nietzsche de la liberté humaine.    L'argument du texte était assez délicat à saisir : il est double. D'une part, l'auteur s'appuie sur une comparaison poétique de l'action humaine avec les faits naturels ; d'autre part il fait appel à un argument de type théologique (une "intelligence omnisciente"), pour soutenir que de ce point de vue les deux ordres de faits - humains et naturels - sont au fond identiques.    On peut noter que ce genre d'indécision dans la démarche argumentative est bien typique de Nietzsche, moins préoccupé de la valeur logique et formelle de son propos que de l' affirmation de sa valeur philosophique ou métaphysique.

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« "vagues" : les actions humaines ont une diversité et une mutabilité qui militent en faveur de la croyance enla liberté de l'homme, seul capable d'expliquer ses revirements, accélérations, et ralentissements.Or ces caractères descriptifs n'ont nullement besoin d'être expliqués par un fondement libre : les vagues ontexactement les mêmes traits descriptifs et nul ne songerait à dire ou à penser que ces vagues sont libres.De même que les vagues sont des mouvements d'ensemble ou globaux résultant d'un très grand nombre depetites causes, de même les actions humaines sont le résultat global de l'action d'une quasi infinité de petitsmotifs qui ont poussé l'homme à agir. Pour calculer ces multiples causalités, une intelligence exceptionnelle, en un mot "omnisciente" serait certesnécessaire.

Néanmoins elle aboutirait sûrement à l'explication mécanique des actions humaines qu'uneintelligence humaine commune parvient à l'explication de phénomènes simples par des lois mathématiquessimples. B - Dans la deuxième partie du texte,Nietzsche présente une version plus élaborée de son affirmation : il introduit la dimension de la temporalité("l'avenir"), non pour la faire fonctionner mais au contraire pour la nier : affirmer la possibilité pour un dieu,pour un être doué de l'"omniscience", de connaître par calcul mathématique certain, l'enchaînement de tousles faits qui constituent un être (un homme par exemple) - et nier l'effectivité du temps comme dimensionindépassable où se concrétise et s'invente la liberté humaine - ces deux propositions ont un sens identique. C - Dans la troisième partie, on pouvait remarquer la reprise de la formule "l'homme agissant".

La lecture dela dernière phrase procure le sentiment que l'illusion elle-même ne serait pas un accident malencontreux quitrompe l'homme sur ce qu'il devrait savoir (qu'il n'est pas libre), mais qu'elle est en quelque sorte nécessitéeet même bien fondée- en un mot : qu'elle a un rôle à jouer en faveur de l'action humaine.Ce sentiment provient du terme de "conviction" employé par Nietzsche : l'homme agit d'autant plus etd'autant mieux, il est d'autant plus affirmatif, de lui-même et des valeurs qu'il porte, qu'il ignore ou oublie lamasse inquiétante des déterminismes qui pourraient bloquer ou faire échouer ses initiatives. IV - FAUSSES PISTES Nietzsche nie la liberté, mais non l'action humaine en tant que telle : il s'agit simplement d'expliquer l'action àlaquelle Nietzsche ne dénie nullement de pouvoir créateur ou innovateur, par un fondement qui ne soit pas lelibre arbitre ou la liberté de la conscience individuelle. V - POINT DE VUE DU CORRECTEUR Pour conclure, remarquons que ce texte n'est pas exempt de provocation.

Comme souvent dans un tel cas,il s'agit moins de détruire que de sauver.

La réflexion de Nietzsche prend alors toute son actualité : à l'heureoù l'être humain est disséqué et "mathématisé" sous toutes ses coutures, il n'est pas absurde de s'opposer àla destruction de l'agir humain - y compris politique - qui s'appuis sur la contestation de la liberté, enaffirmant haut et fort l'irréductible originalité de l'action humaine, tant par rapport au monde animal que parrapport au mécanisme biologique.La création artistique, de ce point de vue, reste la preuve indestructible de l'authenticité humaine. NIETZSCHE (Friedrich-Wilhelm). Né à Rocken en 1844, mort à Weimar en 1900. Il fit ses études à l'école de Pforta, puis, renonçant à la carrière ecclésiastique, il les termina aux Universités deBonn et de Leipzig.

La lecture de Schopenhauer et la rencontre avec Wagner sont les événements capitaux decette période.

En 1868, Nietzsche est nommé professeur de philologie grecque à l'Université de Bâle ; il conserva ceposte jusqu'en 1878, date à laquelle il fut mis en congé définitif pour raisons de santé.

Commence alors la série desvoyages de Nietzsche en Italie : Gênes, l'Engadine, Rapollo, Nice, la Sicile, Rome, Venise, lisant Empédocle, jouantChopin et Rossini.

Il découvrit Stendhal et Bizet.

Il passe les mois d'été à Sils-Maria, dans une petite chambre, faceà la montagne.

C'est à Turin, en janvier 1889, qu'il fut terrassé dans la rue par une crise de démence, probablementd'origine syphilitique, et qui se termina par la paralysie générale.

Ramené à Bâle, Nietzsche dut être interné quelquetemps dans une maison de santé ; puis, sa soeur l'accueillit auprès d'elle, à Weimar, où il mourut le 25 août 1900.

Laphilosophie de Nietzsche se caractérise par un amour passionné de la vie.

Ses premiers écrits concernent l'Art ;reprenant la terminologie de Schopenhauer, volonté et représentation, 'Nietzsche distingue l'art dionysien (musique): c'est l'exaltation tragique de la vie, l'état où l'homme a tendance à se confondre dans le monde ; et l'art apollinien(arts plastiques) : le principe apollinien est le principe contemplatif.

Le rêve apollinien s'oppose à l'ivresse. »

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