Devoir de Philosophie

Une oeuvre d'art est-elle nécessairement inutile?

Publié le 03/01/2005

Extrait du document

L'oeuvre d'art répond à la satisfaction d'un besoin. C'est un moyen pour atteindre une fin. En somme, elle correspond à un emploi efficace. Une belle statue ? Elle est avantageuse pour nous, elle permet à nos sens de s'épanouir. Elle est bienfaisante. Elle berce nos sens et nous permet d'atteindre un certain bien-être. L'oeuvre d'art est donc efficace. Telle semble apparaître la conception antique de l'art. Dès lors, l'art vise une pure satisfaction pratique.

L'oeuvre d'art est le résultat sensible d'une création humaine libre et qui manifeste son originalité et sa grandeur par un style, c'est-à-dire une manière d'être unique. Surtout, l'oeuvre d'art est une production gratuite, c'est-à-dire qu'elle n'a pas de fonction d'usage. L'oeuvre d'art, en tant qu'elle est un travail sur une matière est donc proche de l'objet technique de l'artisan ; cependant elle s'en distingue radicalement par son caractère d'inutilité matérielle: elle ne satisfait, et ne cherche à satisfaire aucun besoin. L'oeuvre d'art est-elle alors superflue? C'est oublier que nous sommes des hommes et non des animaux : l'instinct est en nous dominé par la raison qui elle aussi doit être satisfaite, et la sensibilité est la conciliation de notre nature purement sensible avec ce qui en nous est purement rationnel. Ainsi, l'artiste ne crée pas pour lui seul : implicitement il destine son oeuvre à un public, à l'ensemble des autres hommes. C'est donc que l'oeuvre peut nous apporter quelque chose, mais qui n'est pas de l'ordre de la satisfaction matérielle. Ce que l'oeuvre d'art nous offre, c'est une satisfaction intellectuelle, mais qui a lieu par le biais des sens. c'est un besoin de l'esprit que l'oeuvre d'art satisferait alors.

« • Désintéressement et beauté : Kant a, sur ces thèmes, énoncé, au XVIIIe siècle, dans la Critique du jugement, des idées définitives : le beau, dit-il, est l'objet d'un jugement de goûtdésintéressé.

Dès lors, on ne saurait définir l'oeuvre d'art par l'utile ou parl'intérêt pratique : « Le goût est la faculté de juger un objet ou un mode dereprésentation par la satisfaction ou le déplaisir de façon toute désintéressée.On appelle Beau l'objet de cette satisfaction.

» (Critique du jugement). · « Est beau l'objet d'une satisfaction désintéressée ». La satisfaction est désintéressée, ce qui signifie que nous ne pouvonsl'éprouver que si nous sommes dans un certain état d'esprit par rapport àl'objet.

Kant ne veut pas dire que la beauté ne nous intéresse pas, que nous sommes indifférents mais que le plaisir esthétique naît lorsque nous n'avonspas le souci de l'utilité (celui qui va en mer dans le seul but de pêcher, quiporte sur elle un regard de technicien, n'éprouvera pas de plaisir esthétique),de l'agréable ( celui qui porte un regard lubrique sur un Nu, éprouve unesatisfaction charnelle qui est d'un autre ordre que la satisfaction esthétique),du bien ( celui qui apprécie une œuvre engagée en raison de son caractèremoral, éprouve une satisfaction morale qui n'est pas esthétique).

Le beaun'est ni l'agréable ni le Bien.

Certes une satisfaction peut être morale etesthétique, les deux ne s'excluent pas mais en tant qu'esthétique, elle n'estpas morale.

A l'encontre de Platon , Boileau, Hegel , Kant affirme que le beau n'est pas le vrai.

Mais il n'est pas non plus le pur sensible puisque le beau ne se réduit pas à l'agréable bien que satisfaction esthétique et sensuelle ne s'excluent pas.

Et de cela Hume ne peutrendre compte.

De même qu'une œuvre d'art immorale peut être belle, de même, peut l'être une œuvre désagréable,qui nous déchire et bouleverse.

Et inversement, une musique agréable (par les sonorités, le passé qu'elle évoque)n'est pas belle pour autant bien que nous ayons tendance à confondre beauté et agrément.

Par conséquent, leplaisir esthétique est le seul plaisir libre.

Il n'est pas l'effet de la satisfaction de quelque chose, du besoin du corpsou d'une impératif de la raison.

Libre parce que désintéressé. Ainsi, le Beau et l'oeuvre d'art nous entraînent loin de toute satisfaction empirique ou utilitaire.

Kant a le mérite dedistinguer ce qui plaît aux sens dans la sensation, ce qui peut être utile à nos sens, l'agréable et, d'autre part, lejugement de goût désintéressé, le Beau.

Comment l'oeuvre d'art serait-elle utile ? Elle ne nous charme pasconcrètement.

Elle nous entraîne loin du monde et nous délivre de la tyrannie de nos désirs sensibles.Toutefois, l'utile est-il univoque ? Ne peut-il être compris en un sens plus élevé ? Désigne-t-il seulement ce quiconstitue un moyen pour atteindre une fin ? Ne peut-il exister une utilité plus riche et plus vraie que la médiocreutilité pragmatique ? • Désintéressement et bonheur : l'utile se ramène-t-il à ce qui est simplement avantageux ? Il signifie, en un deuxième sens, ce qui est apte à contribuer au bonheur de l'homme.

L'utile, ce peut être la qualité m'apportant lajoie, la promesse du bonheur.

Après tout, au-delà de l'utile immédiat, il est une utilité existentielle, profonde, totale.En ce sens, l'oeuvre d'art est utile : non plus comme moyen relatif à une technique, mais comme activitéaccompagnée de joie, comme ce qui apporte une contribution à l'existence et à la plénitude humaine.Ici, paradoxalement, c'est le désintéressement qui crée le bonheur.

La beauté de l'oeuvre d'art, rupture par rapportau simple désir utile, engendre la victoire spirituelle et la promesse de joie.

Laissant la place à une contemplationdésintéressée, l'oeuvre d'art fait naître un autre utile, une espérance de joie et d'éternité.

L'art, fruit d'une activitésans but pratique, est utile en un deuxième sens : il apporte une valeur spécifique.

Il est à la fois beau et bien etutile, en une signification non restreinte et non limitée.

Il contribue au bonheur et à la spiritualité de l'homme. • Conclusion : sans être fonctionnelle, sans être assimilable à un produit de la technique, l'oeuvre d'art est, au sens profond de ce terme, utile, mais d'une utilité détachée de la pratique, bénéfique à l'esprit.

L'oeuvre d'art estd'abord libération, désintéressement, rupture des intérêts pratiques.

Activité désintéressée, luxe de l'esprit, elle créeun monde où l'esprit est chez lui et, en cela, se révèle « utile », en un sens riche et profond.

L'art crée la demeurede l'Esprit.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles