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La parole n'est-elle que l'usage d'une langue ?

Publié le 06/04/2009

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  • Analyse du sujet

 

-          Plusieurs formes de silence existent, mais le plus incompréhensible de tous semble être celui qui naît d’une incapacité à pouvoir communiquer. Le bruit, les mots nous sont si familiers qu’on se représente difficilement ce qu’il resterait de nous, en tant qu’êtres en société, s’il n’y avait ni mots, ni son et ni capacité d’audition. Ce mur du silence serait par nature infécond, c’est-à-dire intrinsèque incapable de donner forme, sens et vie à notre pensée.

-          Pourtant, il y a bien une différence de nature, et non pas simplement de degré (c’est-à-dire de qualité et non pas de quantité) entre le silence et l’absence de bruit. Car ce n’est pas la même chose que d’exiger le silence et de ne rien entendre. Ici, le silence n’est pas l’absence de bruit mais l’absence de communication. Le silence est donc en quelque sorte ce refus d’entrer dans la sphère de la communication, et donc on voit difficilement, en ce sens, comme un tel silence pourrait être créateur de lien, de communication, de projet, etc. Il ne peut pas être autre chose, dans cette perspective que le refus de tout processus de création (de sens, de communication, d’interaction, etc.). En ce sens, non seulement le silence ne dit rien, mais, bien plus encore, il se définit par ce refus de dire quoi que ce soit.

-          L’entrée dans le langage peut en cela être rapprochée d’une véritable naissance (et donc de création en quelque sorte). Le silence est donc, à l’inverse, le non engendrement de soi, le refus de se créer soi-même dans et par les mots. La parole est donc d’emblée comprise comme un engagement de l’homme au monde par opposition au silence qui symbolise le refus de l’homme à entrer dans le monde et a fortiori dans le groupe.

-          En ce sens, il apparaît que la parole est bien l’usage d’une langue, c’est-à-dire l’entrée de l’homme dans la sphère de la communication. Mais c’est justement ce présupposé purement fonctionnaliste qu’il faut ici remettre à la question. Car, en effet, si l’on réduit la parole à n’être que l’usage d’une langue, c’est-à-dire l’effectuation réelle d’une potentialité de l’esprit humain (à savoir le langage comme virtualité actualisée dans une langue, elle-même actualisée par l’acte de parole), alors la parole n’est que la servante d’une langue particulière.

-          Ce qu’il faut donc interroger ici c’est l’essence même de la parole, n’y a t-il pas quelque chose de plus dans le fait de parler que l’application effectives des structures d’une langue donnée ?

 

  • Problématique         

 

            La parole n’est-elle que la mise en fonction d’une langue déterminée ou peut-elle se définir par une essence qui lui est propre ? Ou pour le dire autrement, à quelle condition peut-on définir la parole comme un acte à proprement parler qui, loin de se réduire à la fonction de matérialisation d’une capacité langagière, engage à la fois l’homme comme être raisonnable et comme être libre (deux caractéristiques d’ailleurs coextensives l’une à l’autre) ?

 

 

I.                   La parole conçue comme usage d’une langue et par là condition de possibilité de toute communication

 

II.                Mais à travers la parole comme usage d’une langue, c’est plus fondamentalement la parole comme figurative de la pensée en acte qui se découvre

III.             La parole ne pas réductible à l’usage de type instrumental d’une langue : en tant qu’acte, la parole est engagement de l’homme comme être fondamentalement libre

 

 

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« mesure où c'est la pratique de celle-ci qui l'installe dans un monde qu'il conçoit ; dès lors il en parlecomme d'un monde à connaître, à sentir, à interpréter, etc. · Dans cette perspective, communiquer c'est partager ce qui est commun : Littéralement, l'évidence qui s'attache à la communication semble présupposer qu'il existe un « terrain commun » àtous les individus, et que parler revient à échanger des données diverses qui en elles-mêmes n'ontrien de spécifique à celui qui les « transmet » : comme un réseau informatique transmet les donnéesélectroniques et des informations codées en nombres, parler n'est rien d'autre qu'user des mêmescodes que l'autre.

Certes parler suppose de partager une langue, système de codes, mais ce n'estjamais « transposer » des données d'un point à un autre, parce que ces données sont toujours aucontraire le fruit d'une expérience, une manière d'être au monde, et le fruit d'une histoire. · Dès lors se découvre la fonction du langage : on ne peut nier que parler soit parfois assimilable à une fonction, c'est-à-dire intervienne en vue d'une finalité, dans un but déterminé, selon l'expérienceet les circonstances dans lesquelles se déroule l'acte de parole.

Sans doute même n'y a-t-il pas desens hors de tels actes : les mots ne signifient tout seuls, dans le silence infini de l'univers.

Mais ilfaut distinguer l'utilité de telle ou telle parole (séduire, obtenir quelque chose, décrire, etc.) et l'idéeque « dire » dans son ensemble soit réductible à un outil.

L'outil en effet est ce qui est entièrementordonné à une fonction, pour laquelle il est réalisé et hors de laquelle il n'est rien.

L'outil suppose aussiune séparation, comme la scie est séparée de la main qui l'utilise : si le langage est distinct de quil'utilise, peut-on pourtant affirmer que nous existons sans langage ? L'absence de parole effective(mutisme, autisme) ne signifie pas absence d'humanité, mais ne signifie pas non plus qu'il n'y ait dansces attitudes aucun langage. II.

Mais à travers la parole comme usage d'une langue, c'est plus fondamentalement la parole comme figurative de la pensée en acte qui se découvre · Pour autant, nombre d'exemples quotidiens nous montre que le langage, dans sa fonction communicative, défaille : on peut ainsi penser au quiproquo.

Si le langage avait par nature la fonctionde communication, alors on voit difficilement comment il pourrait être possible de ne pas secomprendre.

La fonction essentielle du langage n'est donc sûrement pas à chercher de ce côté. · On pourrait, avec Hegel, dire que la pensée ne peut pas se passer du langage, que sans lui elle n'aurait aucun mode d'existence structurée, mais même que l'organisation des mots et celle des idéessont intimement et positivement liées, bref que l'ineffable n'est peut-être rien d'autre que du non-pensable, tout simplement. · La fonction essentielle du langage serait donc à chercher du côté de la direction de la pensée, et donc serait interne à la faculté de penser et non pas seulement extérieur.

Si donc le langage possèdeeffective et indéniablement une fonction de communication, il n'en reste pas moins ce qui est là, paressence, pour bien penser.

Mais encore faut-il définir précisément ce que signifie « bien penser » :en effet, il s'agit avant tout de ce qui, par ses structures mêmes, apporte à la pensée sa proprestructuration.

L'ineffable est en ce sens ce qui ne peut, faute de mot, être bien penser, c'est-à-dire,bien formulé. · Force est d'admettre qu'on ne peut, sans risquer d'être réducteur, trancher clairement sur la question de la fonction du langage en prenant partie pour tel choix que nous laisse l'alternative.

Ils'agira alors de faire une distinction entre essence et usage, entre nature et utilité.

Il est commodeet utile de faire du langage un outil de communication, parce qu'il reste néanmoins notre moyen d'êtreau monde, mais il faut tout à la fois lui reconnaître une fonction intrinsèquement liée à l'exercice depenser comme sa condition de possibilité même. · La description stoïcienne (Epictète, Manuel , « Pensées » 1 à 16) de la souffrance nous permet de comprendre comment l'idée de liberté de penser met en jeu l'idée d'une coupure entre l'extérieur etl'intérieur, entre le propre et l'étranger.

Avec eux, on s'aperçoit que si les événements et les chosesne dépendent pas de nous, le jugement que je porte sur elle dépend entièrement de nous.

Parconséquent, nous sommes les maîtres absolus de notre pensée et de nos jugements.

La liberté depenser peut donc se définir comme un dialogue de soi avec soi, dialogue qui peut tout à fait, puisquenous en sommes le guide et le maître, porter sur tout et n'importe quoi (entendu comme tout ce qu'onveut, même). · L'opposition entre l'intérieur et l'extérieur, entre le propre et l'étranger, on manque une dimension importante : la constitution de la personnalité de chacun.

Celle-ci implique l'apprentissage du langage,des codes sociaux, etc.

Avant de pouvoir se poser la question de notre libre pensée, l'éducation aprovoqué une intériorisation de la culture du milieu (personnel, professionnel, etc.) dans lequel on vit.Affirmer que sa liberté de penser consiste donc à penser tout et n'importe quoi, c'est du même coupaffirmer que cette pensée n'est pas libérée (à travers une réflexion sur elle-même) des préjugés. · La « Première Méditation » de Descartes, ainsi que le début du Discours de la méthode ou des Principes, montrent comment toute affirmation de sa pensée en première personne commence par unemise en doute radicale de tout (ce « tout et n'importe quoi » justement) ce qui été reçu passivementdes autres.

Parce que nous avons été enfants avant d'avoir été des adultes dotés d'une raisonindépendante, toute tentative de juger par soi-même se confronte à du « déjà jugé », à du « déjàpensé ».

On comprend alors qu'on ne peut, en droit, faire consister la liberté de penser en pouvoir depenser tout et n'importe quoi car cela reviendrait à opérer sur des préjugés, des opinions qui noussont bien plus inculqués (plutôt que nous en soyons les auteurs).

Or on ne peut pas faire consister laliberté de penser dans une passivité de la pensée.. »

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