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La passion, «une promesse de satiété et d'oubli» ?

Publié le 22/02/2012

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1. La question : le sujet reprend une formule de Stendhal pour qui la beauté est une promesse de bonheur; ici, c'est la passion qui contient le principe de sa propre ruine. 2. Le problème : le présupposé de l'énoncé : l'amour-passion, fatal, ne saurait trouver d'autre issue que dans sa propre dissolution. Il se vide de sa substance, devient une pure et simple représentation. Donc, les amants ne possèdent nulle consistance : ils se fondent sur du néant tout en visant un idéal frappé, à l'origine, d'inanité. Donc : la passion et la destruction s'avèrent indissociables. On se demandera si cette articulation tragique est liée à la condition humaine en soi. Pour ce faire, nous nous référerons à un roman d'amour-passion : Belle du Seigneur d'Albert Cohen.

« la passion se trouve intégrée dans la nécessité du paraître, liée au social ; le romancier démonte cette illusion de lapassion qui prétend renouer avec un sens supérieur mais qui évolue sur le plan de l'image, de la projectionnarcissique de sa propre image de soi, de son idéal sur l'autre.Ariane ne voit pas Solal tel qu'il est mais tel qu'elle se l'imagine.

Parallèle possible avec Proust, qui analyse, danstoute La Recherche, les fictions engendrées par une jalousie dévorante.

La passion se réduit, alors, à n'être qu'unerelation de puissance liée au culte des images : c'est l'image dominante qui doit vaincre.

TransitionCohen dénonce la théâtralisation constante de l'existence et l'incapacité de l'amour-passion à se situer sur le plande l'être lorsqu'il se fonde sur des rapports de séduction liés à la force, au rapport de pouvoir.

Cependant, la passions'impose aussi comme une recherche nostalgique du sens. II.

La passion comme nostalgie de l'idéal spirituel Amour courtois lié à une exigence absolue de pureté : en opposition à l'ordre social et à ce qui, dans l'homme, peutle réduire à sa matérialité.1.

Recherche de l'absolu dans une société médiocre Solal est désespéré car, pour lui, l'homme ne peut trouver deperfection que dans les apparences visibles, dans la forme, dans l'esthétique.

La passion naît d'une illusion des senset se donne comme alibi la sublimation des instincts.

En fait, il sait que son amour est condamné parce que la valeurn'existe plus.

L'action du roman se situe à un moment où la situation internationale se tend — Solal perd son postede fonctionnaire international ; les juifs subissent le racisme.

Ariane ignore ces réalités car la passion méconnaît leréel — elle s'aveugle sur ses liens avec un réel qu'elle méprise.

La faillite de la passion s'intègre dans la décadencede toute une civilisation en quête de sens. 2.

Désir de se dépasser soi-mêmeBesoin de se dépasser propre au couple passionné : les amants veulent atteindre une perfection totale, nier leurpropre nature.

Ils cherchent, en vain, à domestiquer leur matérialité.

Les amants s'efforcent de se présenter commedes êtres supérieurs, dans un cadre idyllique.

Mais ils s'épuisent dans cette recherche de l'abstraction.

Ils nepossèdent pas, en eux-mêmes, suffisamment de consistance, de fond, pour alimenter leur passion — qu'ils ont toutà fait détachée des réalités concrètes pour vivre dans un lieu idyllique sans se soucier des contingences matérielles(qui vont cependant devenir pressantes car la ruine menace). 3.

Trace laïcisée d'une transcendanceCohen définit le judaïsme comme une volonté d'humaniser l'homme, de l'inciter à réaliser sa nature profonde.

Ensomme, il mettrait en elle cette idée, fort belle, que l'homme demeure encore incomplet : il doit se faire et Solaltente de se réaliser dans sa relation amoureuse.En fait, les amants nient la société et croient possible de trouver en eux-mêmes l'énergie qui fera durer leur amouréternellement.

Leur échec semble prouver que la valeur ne peut se trouver dans l'ordre de l'humain seul : la quêteexistentielle exige la référence à un principe spirituel qui se perd dans une société livrée à une perpétuelle mise enscène.

En effet, Solal souffre de devoir jouer la comédie de l'idéal à Ariane.

Pour lui, la passion ne peut pas durer sil'homme trahit ses faiblesses à la femme, en admiration devant la force. TransitionDans Belle du Seigneur, Cohen souligne l'idée que les amants ne peuvent échapper à la comédie sociale.

Solal doitse travestir pour continuer à correspondre à l'image que sa bien-aimée veut avoir de lui.

L'être humain imaginepouvoir atteindre l'idéal dans la passion mais il demeure la proie de ses représentations.La tragédie humaine : la passion aliène l'homme, qui ignore sa vérité profonde.

Ainsi, l'amour purement humain estcondamné.

La société impose des représentations fausses — Ariane croit aimer un Solal idéal, un « Seigneur », maislui sait qu'elle aime en lui l'incarnation de la force, de la jeunesse, de la beauté. III.

La condition humaine au coeur de sa contradiction Essayons de reformuler la contradiction.

Solal est un héros qui cherche à donner un sens à sa vie (deuxième partie)mais demeure condamné à jouer la comédie (première partie).

Pour-quoi échoue-t-il ? Solal recherche un absolu depureté précisément dans ce qui semble la nier = l'amour - passion.

Son but semble contraire à sa démarche car dansBelle du Seigneur, dif-ficulté des amants à admettre leur vérité, leur nature d'homme — ce qui les mène à la mort.

1.

La femme est charnelleLa condition humaine se caractérise par l'absence de liberté, le déterminisme naturel (Ariane subira le sort communcar elle « fonctionne » comme toutes les autres femmes) et en même temps la liberté.

La passion apparaît comme lechoix lucide et délicieux de la confrontation à son propre néant et à ses illusions sur soi : l'être humain subit ledéterminisme naturel (l'attirance sexuelle) mais il le pare sous un vernis, une illusion culturels.. »

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