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Peut-on dire que le passé n'est jamais mort ?

Publié le 11/03/2004

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    Proposition de plan :   Le passé est ce qui n'est plus.   a) Hegel écrit que le passé est « la présence comme supprimée, comme n'étant pas là ». Ainsi le passé est comme du présent qui a disparu. De la sorte, il faut considérer que le passé est comme un « présent mort », un présent qui n'existe plus et qui a été supprimé par le temps. b) Si le passé est un « présent mort », on ne peut prétendre que « le passé n'est jamais mort », car « personne n'a vécu dans le passé, personne ne vivra dans le futur; le présent est le mode de toute vie », ainsi que l'écrit Schopenhauer. Il n'y a pas de vie en dehors du temps présent. c) Le passé semble ainsi être par définition quelque chose qui est « toujours mort. » C'est le fait que le passé ait été un présent empli de vie et que ce présent soit mort qui définit le passé.   Transition : Cependant, on ne peut nier que le passé a une influence réelle sur nos vies.   Le passé persiste toujours en nous.

Analyse du sujet : -    Le passé, par définition, constitue ce qui n’est plus, ce qui a été, et ce à quoi on ne peut plus rien changer. Par conséquent, il semble irrémédiablement « mort «. -    Mais le passé peut également être quelque chose qui, d’une certaine manière, est toujours présent. -    En effet, le passé agit sur nous et que ce soit par le biais des souvenirs, de l’expérience ou des habitudes, il y a un passé qui semble s’incarner dans le présent. -    Il est ainsi difficile de concevoir un homme « sans passé «, car il serait dépourvu de langage, incapable d’utiliser tout ce que l’éducation apporte à un homme, tout ce qui constitue chez le commun des mortels le « passé « et qu’on utilise tous les jours. -    Reste à savoir si ce « passé « qui agit sur nous par le biais de la mémoire est véritablement le passé. -    En effet, notre mémoire est infidèle, et il se peut qu’elle trahisse les faits réels. Entre ce qui s’est passé réellement et ce que nous avons retenu, il peut exister un énorme fossé. -    Si tel était le cas, ne serait-ce pas cependant un moyen, justement, de rendre sa vie au passé ? -    On pourrait effectivement penser que le passé, c’est cette interprétation de l’histoire par laquelle l’homme donne sens au présent. Problématisation : Affirmer que le passé n’est jamais mort confine à la contradiction, car, comme la mort, le passé n’est-il pas ce qui n’est plus ? Le passé, n’est-ce pas, par définition, du « présent mort « ? Cependant, il faut bien avouer que cela pose problème, car l’on vit toujours avec son passé. Le passé est ce qui nous a fait tel que nous sommes aujourd’hui, et on ne peut considérer quelque chose indépendamment de son passé : la manière dont quelqu’un mène sa vie dépend de son passé, ce qui laisse supposer que le passé persiste toujours chez l’homme.

« le bonheur, lasérénité, l'espérance, la fierté ou la jouissance de l'instant présent ne pourraient exister sans la faculté d'oubli.Freud de son côté a souligné le caractère vital de l'oubli des événements pénibles et désagréables.

C'estspontanément que l'inconscient oppose une résistance aux souvenirs d'impressions ou à la représentation d'idéespénibles.

Pour l'inconscient, l'oubli est un instinct de défense comparable au réflexe de fuite face au danger.

S'il estsouvent difficile d'effacer de sa mémoire des sentiments de remords et de culpabilité, s'il est vrai que l'oubli n'estjamais volontaire, il faut supposer une "économie" dans l'organisation du psychisme humain, où l'oubli de certainsévénements sert l'intégrité de l'ensemble.

Parfois tenu en échec par des instances plus puissantes qui cherchent àréaliser leurs buts, l'oubli s'opère par un déplacement d'objet.

Si l'événement douloureux n'est pas oublié, l'oubli seratransféré sur les circonstances ou des objets qui y sont liés, montrant qu'il réalise par là un véritable "travail".

c) Ainsi, pour les psychanalystes, le passé de chaque individu est toujours présent en lui.

On peut alors dire que « lepassé n'est jamais mort », car il est toujours présent au sein du sujet et agit toujours sur lui.

Transition : Cependant, ce passé qui persiste dans l'individu est-il le passé réel ? Notre mémoire remodèle le passé.

3. a) On peut toutefois remarquer que le passé qui persiste dans l'individu et le passé réel n'est pas forcément lemême.

Ainsi l'on sait bien que l'orgueil nous pousse à remodeler notre mémoire du passé.

Un aphorisme de Nietzscheillustre bien cet état de fait : « “C'est moi qui ai fait cela”, dit ma mémoire.

“Il est impossible que je l'aie fait”, ditmon orgueil et il reste impitoyable.

Finalement - c'est la mémoire qui cède.

» ( Par-delà bien et mal , IV, 68) Nietzsche veut signifier par là que, dans certaines circonstances, notre orgueil refuse de reconnaître certains faitset qu'il réussit à transformer notre mémoire de manière à ce que celle-ci « oublie » ces faits.

Mais ce qui estintéressant est alors de prendre en compte le fait que notre mémoire est quelque chose de plastique et que celle-ciremodèle toujours le passé.b) Il peut donc exister une différence profonde entre le passé réel, entre ce qui s'est réellement passé, et ce quenotre mémoire nous rapporte du passé.

Le passé qui subsiste en nous est composé de ce que notre esprit acceptede retenir, il est le produit d'une mémoire sélective qui peut aller jusqu'à contrefaire les faits réels.

Le passé quihabite l'individu, nous devons plutôt le nommer « mémoire » que « passé », car ce que la mémoire retient, ce n'estpas forcément ce qui s'est passé, ce n'est pas nécessairement le passé.

Le passé réel, quant à lui, est donc bel etbien mort, car il n'est plus, et comme seule la mémoire peut nous en parler, nous ne pourrons jamais savoir commentil était véritablement, puisque la mémoire n'est pas fiable.c) Mais cette manière qu'à la mémoire de remodeler le passé est aussi une manière de rendre le passé vivant.

Eneffet, le passé de la mémoire n'est plus figé, il est quelque chose de mouvant, et qui dépend des velléités de lamémoire.

Le passé devient alors un moyen au service du présent et il renoue ainsi réellement avec la vie.« Féconder le passé et enfanter l'avenir : que tel soit mon présent », écrivait Nietzsche dans Ainsi parlait Zarathoustra. Le passé est ainsi quelque chose que l'homme doit rendre fécond.

Certes, il est mort, mais la mémoire humaine lui redonne de la vie. Si l'animal jouit d'un bonheur que l'homme jalouse, c'est parce qu'il n'a pas demémoire supérieure.

Seul l'homme dit « je me souviens » et pour cela il lui estimpossible de vivre heureux et pleinement.

En effet :1) C'est par la mémoire, conscience du passé, que l'homme acquiert laconscience du temps et donc celle de la fugitivité et de l'inconsistance detoutes choses, y compris de son être propre.

Il sait que ce qui a été n'estplus, et que ce qui est est destiné à avoir été, à n'être plus.

Cette présencedu passé l'empêche de goûter l'instant pur, et par conséquent le vraibonheur.2) Le passé apparaît à l'homme comme l'irréversible et l'irrémédiable.

Il marquela limite de sa volonté de puissance.

L'instant présent, ouvert sur l'avenir, estle lieu du possible où peut s'exercer sa volonté de puissance.

Le passé, aucontraire, change et fige la contingence du présent en la nécessité du « celaa été ».

Dès lors la volonté ne peut que se briser sur cette pétrification dupassé qui se donne comme le contre-vouloir de cette volonté.

C'est pourquoi« l'homme s'arc-boute contre le poids de plus en plus lourd du passé quil'écrase ou le dévie, qui alourdit sa démarche comme un invisible fardeau deténèbres ».3) Sans l'oubli l'homme ne peut pleinement vouloir ni agir : il est un êtremalade, il est l'homme du ressentiment.

La « santé » psychique dépend de lafaculté de l'oubli, faculté active et positive dont le rôle est d'empêcherl'envahissement de la conscience par les traces mnésiques (les souvenirs). Car alors l'homme réagit à ces traces et cette réaction entrave l'action.

Par elles l'homme re-sent, et tant qu'ellessont présentes à la conscience, l'homme n'en finit pas de ressentir, « il n'en finit avec rien ».

Englué dans samémoire, l'homme s'en prend à l'objet de ces traces dont il subit l'effet avec un retard infini et veut en tirervengeance: « On n'arrive à se débarrasser de rien, on n'arrive à rien rejeter.

Tout blesse.

Les hommes et les chosess'approchent indiscrètement de trop près, tous les événements laissent des traces; le souvenir est une plaiepurulente.

». »

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