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Peut-on dire: A quelque chose malheur est bon ?

Publié le 24/02/2004

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Nous pouvons ici suivre ce que Pascal, dans ses Pensées, nous dit de la condition humaine :   « Nous ne nous tenons jamais au temps présent. Nous anticipons l'avenir comme trop lent à venir, comme pour hâter son cours ; ou nous rappelons le passé, pour l'arrêter comme trop prompt (...) C'est que le présent d'ordinaire nous blesse. Nous le cachons à notre vue, parce qu'il nous afflige ; et s'il nous est agréable, nous regrettons de le voir échapper. (...) Le présent n'est jamais notre fin : le passé et le présent sont nos moyens ; le seul avenir est notre fin. Ainsi, nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre ; et, nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais. » Le fait d'être soumis au temps est en fait ce qui fait notre malheur. Le bonheur comme un état de félicité pur et continue, état auquel nous aspirons d'accéder sous une forme ou sous une autre, est ce qui nous est nécessaire pour pouvoir fuir un malheur qui nous réduit à néant. Le malheur n'est donc bon à rien, d'autant plus que nous y sommes condamnés, et que nous le fuyons désespérément dans tous les divertissements possibles.               II/ Le malheur nous permet de réaliser que le bonheur n'est pas un concept universalisable.             Toutefois, ne dit-on pas que c'est dans les situations de détresse, lorsqu'il est éprouvé, que l'homme révèle sa vraie nature et sa puissance ?

« C'est ainsi que Kant explique, dans les Fondements de la métaphysique des mœurs , que le bonheur ne peut pas être conceptualisé.

« L'homme est incapable de déterminer avec une entière certitude quelque principe qui lerendrait véritablement heureux.

: pour cela, il lui faudrait l'omniscience.

(…) Ilsuit de là que les impératifs de la prudence, à parler exactement, ne peuventcommander en rien, c'est à dire représenter des actions d'une manièreobjective comme pratiquement nécessaires, qu'il faut plutôt les tenir commedes conseils que comme des commandements de la raison.

Le problème quiconsiste à déterminer d'une façon sure et générale quelle action peutfavoriser le bonheur d'un être raisonnable est un problème tout à fait insoluble(…) parce que le bonheur est un idéal non de la raison, mais de l'imagination,fondé uniquement sur des principes empiriques.

» Puisque le bonheur est unidéal de l'imagination, le malheur n'est-il pas aussi fondé sur une illusion ?Nous nous croyons malheureux lorsque nous sommes privés de ce à quoi nousaspirons, mais puisqu'on ne peut jamais rien savoir certainement du bonheur,alors il en est de même pour le malheur : nous n'en savons rien.

Le malheur setrouve alors être « bon » pour deux raisons : d'une part, il permet derelativiser les représentations que nous nous faisons du bonheur, et d'autrepart, il nous permet de relativiser sa propre nature, qui, elle aussi, est illusion.

III/ Le malheur peut s'avérer moteur . Cependant, peut-on affirmer pour autant que le malheur ne constitue qu'une illusion ? La souffrance qu'ilprovoque , par exemple, ressemble à tout sauf à une illusion.

De même, si nous admettons que le malheur est bon àquelque chose, il faut bien lui conférer une réalité pour que ses effets aient un sens.

Ou encore , si nous faisons dubonheur un objet de la pensée et que la pensée nous libère de nos illusions, alors il faut bien conférer à cette idéeune réalité.

Disons plutôt que la pensée représente d'abord un avantage.

En pensant, nous sortons à proprementparler de notre finitude, et nous pouvons de cette façon purement théorique atteindre au moins le bonheur commeidée.

D'un autre côté, nous nous efforçons aussi de façon purement empirique à réaliser notre bonheur.

Ainsi, quandbien même nous réaliserions que le bonheur nous est inaccessible et que nous considérerons cela comme unmalheur, nous ne pouvons jamais nous en tenir à ce malheur.

C'est ce que rappelle Hegel dans sa Philosophie de la religion .

« En pensant, je m'élève à l'absolu en dépassant tout ce qui est fini, je suis donc une conscience infinie et en même temps je suis une conscience de soi finie, et cela d'après toute ma détermination empirique….Les deuxtermes se cherchent et se fuient : je suis le sentiment, l'intuition, la représentation de cette unité et de ce conflitet la connexion de ces termes en conflit…je suis ce combat, je ne suis pas un des termes engagés dans le conflit, mais je suis les deux combattants et le combat lui-même.

» Si nous devons bien avouer que notre conscience, ennous révélant notre finitude, nous dispose au malheur, alors nous devons admettre également que cette dispositionest la condition requise pour que nous puissions construire notre vie dans le but d'être heureux.

Certes, peut-être leserons-nous jamais, mais ce « combat » dont parle Hegel est ce qui nous pousse à vivre, et plus encore ce qui nouspermet de prendre notre vie en main et de réaliser dans le temps ce que nous serons pour l'éternité.

Notreconscience malheureuse se révèle alors ce qui nous permet d'être des hommes.

Conclusion : -Le malheur n'est bon à rien : c'est pour cela que naturellement nous le fuyons sans cesse.-Les périodes difficiles nous permettent de nous éprouver et aident à relativiser notre idée du bonheur.-Notre conscience malheureuse est la condition de notre existence d'hommes. Dire qu'à toute chose malheur est bon, c'est comprendre que le malheur qui nous habite n'a de sens que si nouscherchons à le dépasser.. »

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