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Peut-on juger sa propre culture ?

Publié le 18/12/2005

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Il n'y a vraiment de culture que lorsque l'esprit s'élargit à la dimension de l'universel.", Leclercq, Culture et personne. On peut songer aux Lettres persanes de Montesquieu pour examiner cet effort réflexif qu'un philosophe entreprend pour examiner le caractère relatif des institutions de la morale en vigueur dans son propre pays. Montesquieu imagine pour ce faire un dédoublement : Uzbek, son Persan, est un Oriental en voyage dans le royaume de France et c'est à la lumière de son propre conditionnement qu'il interroge ce qui représente pour les Français des évidences. À travers ce regard, faussement étranger, Montesquieu s'autorise par une médiation intéressante à reconsidérer les valeurs culturelles de son propre pays. Il met ainsi en cause certains jugements qui dans l'opinion commune apparaissent comme incontestables, et démontre ainsi leur profonde relativité.  III. Troisième partie: les limites. L'idée du sujet qui consiste à "juger" sa culture n'est pas seulement l'idée exprimée par Montesquieu selon laquelle une culture n'est pas un universel que l'on doit considérer comme la norme, mais plus que cela encore l'idée que l'on puisse se situer à l'égard de sa propre culture comme un observateur impartial. Cette attitude est très difficile à obtenir ne serait-ce que selon une explication linguistique: notre langue conditionne définitivement notre approche du monde.
L'embarras avec un tel sujet est qu'il propose au même individu d'être à la fois dedans et dehors, c'est-à-dire d'être à la fois lui-même et un autre. Juger sa culture, c'est être capable d'acquérir une distance réflexive à l'égard de celle-ci, distance que l'on obtient très difficilement dans la mesure où c'est cette même culture qui nous a appris à réfléchir.

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« SECONDE CORRECTION [La connaissance d'autres pratiques culturelles me permet de me distancier de ma propre culture.

Cela me conduit à admettre une relativité culturelle où aucune culture ne prédomine une autre.] L'ethnocentrisme est la tendance à juger des autres cultures en fonction de la sienne propre, érigée en critèrede référence : un point de vue culturel particulier est abusément érigé en pseudo-critère universel.

« Chacunappelle barbare ce qui n'est pas de son usage ».

(Montaigne, Essais, 30).Or une telle attitude est paradoxalement commune aux peuples archaïques qui se considèrent comme seulshumains, et à l'ethnologie ethnocentrique qui dévalorise les cultures qui ne correspondent pas aux critèresoccidentaux du progrès (développement scientifique et technique).Pourtant un regard objectif jeté sur les différentes cultures montre que cette attitude est fausse : d'autrescritères, par exemple l'aptitude à triompher des milieux hostiles, ou encore le souci de l'équilibre humain etspirituel, produiraient d'autres hiérarchisations.

De même, des cultures qui nous semblent à certains égardsféroces s'avèrent à d'autres égards plus délicates et plus humaines que la nôtre.

L'idée d'un progrès unilatéralmesuré selon un unique critère est donc une idée fausse.

D'ailleurs, certaines perfections sont liées à desétats de civilisation passés et toutes les perfections ne sont pas possibles en même temps.

De plus, pourformer un jugement de valeur sur les différentes cultures, il faudrait disposer d'une rectitude idéale, il faudraitun accomplissement parfait de la civilisation : il faudrait avoir sous les yeux le modèle d'une humanité devenueparfaite pour juger des différents degré d'accomplissement des cultures existantes.Faute d'un tel étalon, il faut bien admettre que toute culture est civilisée, puisqu'elle est une culture humaine: on entend alors par «civilisé» l'homme d'une société et d'une culture, quelle que soit cette culture, c'est-à-dire un homme dont l'humanité s'accomplit dans une matrice culturelle.

Toute culture est un monde derapports symboliques qui a sa cohérence structurelle propre, et qui donne à l'activité humaine forme, sens etcontenu.

C'est alors à l'ethnologue d'appréhender de l'intérieur, de manière systématique, ce que MarcelMauss appelle un «fait social total », qui intègre toutes les modalités d'une culture en une complémentaritéd'ordre dynamique.Il semble dès lors qu'il n'y ait pas à hiérarchiser les différentes cultures : il suffirait de comprendre chacuned'entre elles dans sa cohérence interne.

Du constat de leurs différences, il faudrait s'interdire de passer à toutjugement d'inégalité qui en poserait certaines comme inférieures, d'autres comme supérieures.

Toute cultureserait participation à l'humanité, et l'humanisme respect des différences : « ici apparaît un genre d'égalité quivit de respect, et s'accorde avec toutes les différences possibles», dit Alain.

Même dans les cultures qui noussemblent les plus archaïques, les plus proches de la nature, tout - y compris les fonctions biologiques et lecorps - est marqué au sceau de la culture (Mauss, Techniques du corps).

Les voyages forment la jeunesse dit l'adage populaire ! Découvrir d'autres cultures me permet de medistancier de ma propre culture.

[Il est difficile de juger ma culture.

Celle-ci m'apparaît comme étant naturelle et légitime.

Ce qui fait de l'ethnocentrisme le préjugé le mieux partagé.] Ma culture, ma seconde natureLa culture, ce sont les manifestations artistiques d'un groupe humain, mais aussi sa religion, ses valeurséthiques, ses coutumes, sa langue, etc.

Ma culture constitue comme mon liquide amniotique.

J'évolue dansma culture aussi naturellement que je respire.

C'est pourquoi il est si difficile de m'en défaire, de la critiquer. L'ethnocentrisme est la chose du monde la mieux partagée"«Habitudes de sauvages», «cela n'est pas de chez nous», etc.

Autant de réactions grossières qui traduisentce même frisson, cette même répulsion en présence de manières de vivre, de croire ou de penser qui noussont étrangères.

Ainsi l'Antiquité confondait-elle tout ce qui ne participait pas de la culture grecque (puisgréco-romaine) sous le même nom de barbare ; la civilisation occidentale a ensuite utilisé le terme de sauvagedans le même sens.

Or, derrière ces épithètes se dissimule un même jugement : il est probable que le mot. »

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