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Peut-on se libérer de nos illusions?

Publié le 06/03/2005

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  II-Se libérer de ses illusions : une tâche improbable ?               L'illusion est pareille à l'oubli en cela qu'elle a lieu sans que la conscience s'en aperçoive, de même que nous ne savons pas qu'on est en train d'oublier, nous ignorons être la proie d'une illusion. Toutefois il faut affiner cette image que nous donnons de l'illusion, il faut en effet reconnaître qu'être victime d'une illusion n'entraîne pas qu'on ne sache pas qu'il s'agit justement d'une illusion. C'est ce paradoxe qui est au coeur de la « dialectique transcendantale », dans la Critique de la raison pure.             En effet, Kant écrit que le meilleur des astronomes a beau savoir que la lune n'est pas plus grosse au lever, il ne pourra s'empêcher de la voir telle. De la même façon la raison peut prendre conscience de ses propres limites : elle ne peut connaître que les objets du monde sensible et non les choses en soi, et pourtant malgré cela elle ne peut s'empêcher d'essayer de connaître ce qui est hors de sa portée : l'âme, le Monde et Dieu.             Finalement c'est non pas tant la fausseté induite par un cas d'illusion qui apparaît invincible mais bien la dimension affective de l'illusion. On peut pertinemment savoir qu'il est impossible de connaître Dieu ou de se faire aimer d'une personne que nous aimons, pourtant, cela ne nous empêche pas de nous enfoncer dans l'illusion, d'en rester prisonnier.   III-C'est dans l'épreuve de la déception que l'on peut se libérer de l'illusion.               Si ce qui provoque l'illusion est d'ordre affectif, ce qui nous en libère est peut être du même genre.

Qu’est-ce qui, plus que l’illusion, est synonyme d’aveuglement, d’enchaînement de la conscience à elle-même ? L’illusion se présente comme un cas d’aliénation particulier : qui n’apparaît pas à la conscience de celui qui en est affecté. Or « se libérer de « implique la volonté d’un sujet, mais comment esquisser le projet d’une libération si l’on a pas conscience d’être entravé ? De deux choses l’une : soit l’illusion est effectivement ce qui dans sa présence même ne se signale pas et dès lors on ne pourrait de soi-même s’en libérer ; soit, elle n’est pas aveuglement total de la conscience mais se laisse percevoir confusément, sur un mode affectif, au sens où quoique aveuglé, l’amoureux saurait que son amour le rend aveugle.

« Kant n'a pas été convaincu par ces preuves de l'existence de Dieu.

Certes, dira-t-il dans les antinomies de la «Raison pure », chapitre de la Critique de la raison pure , il n'est pas rationnel de considérer que la nature estDieu.

Mais dire que Dieu existe est-il pour autant possible ? Ne dit-on pas que Dieu existe pour se représenterla nature et son commencement, et non parce que l'on a effectivement rencontré un Dieu existant et vivant ?De même, il n'est pas faux de considérer que la nature n'a pas pu surgir par hasard, tant il y a de perfection enelle.

Devons-nous pour autant conclure que l'idée de Dieu, qui nous permet de penser la nature, n'est autreque Dieu lui-même ? Voyons-nous Dieu parce que nous voyons la perfection qui réside dans la nature ? Enfin, iln'est pas faux de dire que, si Dieu existe, celui-ci doit avoir toutes les qualités, dont l'existence.

Mais, quandj'ai l'idée d'une existence, est-ce là l'existence elle-même ? Et, quand j'ai affaire à l'existence, est-ce à uneidée que j'ai affaire ? Un idéal régulateur Kant s'est parfaitement rendu compte d'une erreur majeure que nous faisons quand nous parlons de Dieu.

Nousconfondons sans cesse le discours que nous pouvons tenir sur Dieu avec Dieu lui-même.

Ainsi, ce n'est pasparce que nous avons l'idée que la nature n'est pas Dieu–parce qu'il existe une perfection à l'origine de lanature ou parce que l'idée de Dieu implique nécessairement que Dieu existe– que Dieu existe effectivement.Est-ce à dire que Dieu n'a aucun rôle à jouer en philosophie ? Nullement.

Nous ferions moins d'erreurs si nousenvisagions Dieu comme un idéal régulateur, écrira Kant, et ce pour deux raisons.

Imaginons en effet que Dieusoit simplement celui dont on a l'« idée » à propos du spectacle de la nature ou d'une méditation personnelle;Dieu redeviendrait une réalité «extraordinaire» que nos expériences ou nos méditations nous permettraientd'aborder comme tel.

Tout serait alors « régulé », autrement dit à sa place : l'homme avec ses expériences etses méditations, Dieu avec son visage extraordinaire. Finalement c'est non pas tant la fausseté induite par un cas d'illusion qui apparaît invincible mais bien ladimension affective de l'illusion.

On peut pertinemment savoir qu'il est impossible de connaître Dieu ou de se faireaimer d'une personne que nous aimons, pourtant, cela ne nous empêche pas de nous enfoncer dans l'illusion, d'enrester prisonnier.

III- C'est dans l'épreuve de la déception que l'on peut se libérer de l'illusion.

Si ce qui provoque l'illusion est d'ordre affectif, ce qui nous en libère est peut être du même genre.

Ce neserait pas du côté de la science ou de la raison personnelle qu'il faudrait chercher la clef d'un renoncement auxillusions mais du côté de la vie affective.

C'est dans la confrontation au réel que la conscience est susceptible de se défaire de l'illusion quil'enchaîne.

L'illusion amoureuse, la cristallisation qui nous fait aimer l'image que l'on s'est faite d'un être réel, peut sedissiper, non pas grâce à un effort de raisonnement mais à mesure de l'épreuve du réel.

L'amour, réduit ici à sadimension d'illusion, est vaincu non par la raison mais par la lassitude, par le quotidien, le vécu.

C'est donc lorsque nous sommes déçus par nos illusions que nous sommes les plus à même d'y renoncer.

Lelangage le plus commun le pressent d'ailleurs, dire que quelqu'un se fait des illusions est synonyme de dire qu'il courtau devant d'une déception certaine.

Conclusion : Se libérer exige une activité faite en première personne, si la science libère l'humanité de certaines illusionselle est libération historique, subie, et non libération de soi par soi.

Nous avons vu que l'effort intellectuel étaitinapte à vaincre l'illusion, il peut, tout au plus la révéler, ce qui n'est donc pas synonyme de résoudre, et pour causel'illusion n'est pas l'erreur.

C'est dans la déception que nous voyons se dissiper nos illusions, si bien queparadoxalement nous sommes conduit à dire que se libérer de l'illusion n'est peut-être pas différent du fait de lavivre.

En effet, c'est en tant qu'elle se consume au contact du réel et de sa durée que l'illusion est absorbée dans ladéception.. »

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