Devoir de Philosophie

Peut-on nous reprocher ce que nous sommes ?

Publié le 07/02/2005

Extrait du document

) ont ces inclinations (...). Mais, lorsque le corps a quelque part à ce qui se passe en moi, je me trompe presque toujours si je juge des autres par moi-même. Je sens de la chaleur ; je vois une telle grandeur, une telle couleur, je goûte une telle saveur à l'approche de certains corps : je me trompe si je juge des autres par moi-même. Je suis sujet à certaines passion, j'ai de l'amitié ou de l'aversion pour telles ou telles choses ; et je juge que les autres me ressemblent : ma conjecture est souvent fausse. Ainsi la connaissance que nous avons des autres hommes est sujette à l'erreur si nous n'en jugeons que par les sentiments que nous avons de nous-mêmes.         II. Le sujet maîtrise-t-il entièrement ce qu'il est ?   D'autre part, d'un point de vue intérieur, la définition de l'étendue de la responsabilité à l'égard de lui-même pose de nombreux problèmes : peut-on reprocher à quelqu'un ce qu'il est si l'on accepte l'hypothèse d'un inconscient dont la maîtrise lui échappe ? Peut-on reprocher à quelqu'un d'être dans l'erreur ?

Lorsque quelqu'un nous reproche ce que nous sommes, cela suppose au moins deux choses. Premièrement, que ce que nous sommes est lisible, i.e qu'il existe quelque chose en nous d'assez stable, d'assez identique dans la continuité pour que cela puisse être montré du doigt. Deuxièmement, qu'autrui est dans la capacité d'atteindre ce que nous sommes pour le remettre en cause, qu'il a le pouvoir de cerner cette identité personnelle qui nous caractérise. On saisit donc que ce sujet nous renvoie à deux notions, celle d'identité, bien évidemment, mais également, celle de l'accès possible à autrui. Ce second point est tout aussi important puisqu'il nous pousse à nourrire une certaine suspicion quant à la possibilité de véritablement pouvoir connaître autrui. D'autre part, il est possible de penser que ces deux points sont en vérité liés: suis-je assez le même pour supporter le jugement d'autrui, sachant que ce jugement s'appuie précisément sur une potentielle identité de ma personne?

« II. Nous l'avons vu, la notion d'identité se fissure quelque peu.

Juger la personnede quelqu'un c'est à coup sûre louper ce qui est toujours en mouvement, cequi est pluriel.

L'autre que je montre du doigt est un pouvoir-être-autre perpétuel.

Nous parlons ainsi de moi , alors que nous ne sommes composé d'une infinité d'éléments, de forces, toujours en déplacement.

Ce moi, c'estune hypostase, une chose imaginée, une unité qui prend fictivement la placed'une complexité.

Pascal, dans les Pensées , va lier étroitement la problématique du moi à celle de l'amour à travers deux questions: qu'est-ce que le moi et m'aime-t-on moi ? Si l'on m'aime à cause de ma beauté, m'aime- t-on vraiment moi? Non, car si la « petite vérole » venait à m'atteindre, altérant ainsi ma beauté, sans pour autant atteindre ma personne, on nem'aimerait plus.

Proposons alors un attrait moins superficiel, et faisons que l'onm'aime pour mon jugement par exemple.

Mais encore une fois, on ne m'aimerapoint pour moi, et cela vaut d'ailleurs pour tout autres qualités puisque « je peux perdre toutes ces qualités sans me perdre moi-même ».

Pascal se demande alors en ce sens où peut être ce moi qui ne réside semble-t-il ni dans l'âme ni dans le corps? C'est ici tout le paradoxe puisque, si l'on m'aimetoujours pour mes qualités, de toutes évidence ces qualités ne font pas lemoi, elles sont périssables.

Et de toute évidence également, on aime jamais unmoi abstraitement, en dehors de toutes ses qualités.

La conclusion est cesens radicale: on aime jamais personne véritablement mais simplement ces qualités qui comme nous le voyons ne sont pas le moi .

On ne m'aime donc jamais. On le comprend, l'autre ne m'atteint jamais.

La où il croit me reprocher ce que je suis, il ne parle que de qualités quine constitue en vérité pas intrinsèquement et essentiellement ma personne.

Me juger reviendrait en ce sens àtenter d'attraper de l'eau dans son poing.

On ne me saisit jamais véritablement.

Il s'agit de compléter ce portrait d'un moi insaisissable par l'analyse existentialiste.

Si je prends ce verre positionner à côté du clavier sur lequel jetape, on peut dire qu'il est .

Mais son mode d'être est particulier puisqu'il est en soi .

C'est-à-dire? Il est clos sur lui- même, sur son identité.

Un concepteur de verre a décidait un jour de la forme d'un verre dans un atelier d'étude, ill'a conçu puis ce dernier a été produit.

Et ce verre face à moi est une réplique de ce modèle, sa vie est conçue demanière déterminée, il existe conformément à une essence pré-établie.

A contrario , l'homme qui est aussi aligné en partie sur ce mode d'être, a une particularité que le verre ne partage pas avec lui: il ex-iste. Mon corps, les déterminismes sociaux, psychologiques, biologiques, me chosifient, me déterminent comme chose:c'est ce que l'existentialisme nomme la facticité.

Mais d'autre part, mon être est aussi pour soi, et c'est cela en propre qui caractérise l'existence.

Par ma conscience, je peux prendre de la distance avec ce que je suis toutd'abord.

Je ne suis pas entièrement pris dans le flux de l'être en soi : me rendant compte de certaines déterminations qui pèsent sur ma personne, je peux m'en extraire.

Mais surtout, pour l'existentialisme, l'existence précède l'essence.Cela signifie que mon existence ne déroule pas un plan pré-conçu qu'un hypothétique Dieu aurait conçu dans sonlaboratoire d'étude.

Je suis en sommes condamné à être libre, toujours en procès c'est à dire en état d'avancement,effectuant des projets nouveaux.

En ce sens, celui qui me juge me chosifie, me « bloque » sur un mode d'être ensoi.

Le jeune garçon de café joue au garçon de café avec ces gestes maladroits et ces postures caricaturales, parce qu'au fond, tout les clients attendent de lui qu'il soit un garçon de café, tout les clients le chosifie dans cetteposture.

Juger quelqu'un pour ce qu'il est, c'est de tout évidence le chosifier, le fixer dans une certaine posture quirâte ce qu'il a de plus essentiel, à savoir sa propre liberté.

Ceci est augmenté du fait que l'homme nourrinaturellement un désir d' en soi , il cherche cette chosification rassurante, ne pouvant assumer tout le temps une liberté radicale angoissante qui le fait sans cesse responsable de ces choix. Sortir de l'impasse par le style III. Il reste cependant une solution possible à ce difficile problème de l'identité qui jusqu'à présent se dérobe à toutesaisie et donc à tout jugement possible.

Il s'agit de revenir à Pascal et à la dissolution du moi qu'il opère commenous l'avons vu.

Nous étions resté sur cette question angoissante: où est donc ce moi ? Lorsque nous parlons de quelqu'un, lorsque nous prétendons l'aimer, le détester (...), ces diverses activité semblent ne jamais atteindre unnoyau dure qui serait susceptible d'être véritablement la personne en son essence singulière.

Nous nous heurtonstoujours à ce faisceau de qualités, cet essaim de propriétés qui cependant ne nous permet aucunement dedécouvrir ce que les philosophes nomment l' ipséité, c'est-à-dire le moi proprement dit qui fait la singularité de chacun.

Cependant, si l'on transpose cette pensée dans la pratique, on se trouve bien vite dérangé par cesconclusions.

Prenons l'exemple du tribunal de Nuremberg: un avocat a-t-il affirmé durant le procès d'une personnecomme Himmler, que les attaques contre son « client » et les atrocités qu'il avait perpétré directement ouindirectement n'était rattaché qu'à des qualités de ce dernier et ne concernaient pas sa véritable personne? Voit-once dernier dire ouvertement: « Ce que vous dites, ce que vous me reprochez ne concerne pas véritablement ma personne, mon moi; vous ne pouvez raisonnablement pas me tenir responsable de mes propriétés en faisant fi dece que je suis véritablement moi-même! ». On peut tenter de résoudre ce problème en ayant recourt à la notion de style.

Le moi n'est certes qu'une fiction, nous l'avons vu, et il ne semble pas possible de le cerner derrière ses multiples qualités.

Mais peut-être s'agit-il de. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles