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Peut-on parler de nature humaine ?

Publié le 10/01/2004

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Parler de nature humaine, c'est parler d'une essence universelle de l'homme, c'est dire qu'il existe un certains nombre de caractéristiques communes à tous les hommes sans restriction. C'est donc dire qu'il existe une définition de l'homme qui s'appliquerait à tous et à chacun d'entre eux sans reste.  Or, lorsqu'on observe les hommes, ce qu'on voit, ce n'est pas l'identité, ce qu'ils ont de commun, mais des différences, une diversité qui semble ruiner l'idée même d'une nature humaine.  Le problème est donc le suivant : d'un côté on parle de nature humaine, d'essence de l'homme et il semble que cette idée d'une définition de ce qu'est l'homme soit légitime parce que rien qui existe ne semble pouvoir ne pas avoir de nature, mais de l'autre, il semble que cette idée soit vaine parce que les différences observables entre les individus sont telles qu'ils semblent n'avoir rien en commun.    Mais il y a plus : il a pu arriver, en raison de ces différences ou sous prétexte de ces différences, de refuser le statut d'homme à des êtres qui manifestement pourtant ressemblaient à des hommes, comme par exemple les Noirs dont on a prétendu qu'ils n'avaient pas d'âme, ce qui autorisait à les utiliser comme esclaves ou comme les Juifs que les nazis comparaient à des rats ou à des microbes, ce qui préparait à l'idée qu'il était nécessaire de les supprimer et qu'en le faisant, on ne tuerait pas des hommes. Au nom d'une certaine idée de l'homme et en raison de différences observables entre eux, on a pu donc refuser le statut d'hommes à des êtres qui pourtant étaient des membres de l'espèce humaine.      Mais, du reste, ne faisons-nous pas la même chose lorsque nous disons de certains êtres qu'ils sont non pas des hommes, mais des bêtes en raison par exemple de leur violence ou de la monstruosité de leurs actes? Dire d'eux qu'ils sont des animaux et non des humains, c'est bien leur refuser le statut d'homme encore qu'ils appartiennent bien à l'espèce humaine, sans quoi ce refus n'aurait aucun sens.    Tout cela nous invite donc à nous demander s'il existe une nature humaine, une essence de l'homme telle que tous les hommes correspondent à cette définition, puisque si d'un côté on trouve injuste d'avoir traité des hommes comme des sous-hommes ou des faux hommes, on n'hésite pas de l'autre à considérer comme des animaux certains hommes, donc à les traiter comme des sous-hommes à notre tour.      Savoir s'il existe une nature humaine et la définir n'a pas qu'un intérêt intellectuel, mais aussi moral. En effet, si certains hommes ne sont pas des hommes, il ne sera pas nécessaire de les traiter comme tels, c'est-à-dire avec le respect du à l'homme en tant qu'homme ou en tant que personne.

« --------------------------------------------------------- Qu'est-ce qui distingue donc un homme d'un animal? Si l'homme est aussi un animal, en quoi se distingue-t-ilnéanmoins des autres animaux?C'est à cette question que peut répondre un extrait de La politique, d'Aristote.

Livre I, Chap.

2. " Il est manifeste, (...), que l'homme est par nature un animal politique, et que celui qui est hors cité, naturellementbien sûr et non par le hasard des circonstances, est soit un être dégradé soit un être surhumain, et il est commecelui qui est injurié en ces termes par Homère : "sans lignage, sans loi, sans foyer".Car un tel homme est du même coup naturellement passionné de guerre, étant comme un pion isolé au jeu detrictrac.

C'est pourquoi il est évident que l'homme est un animal politique plus que n'importe quelle abeille et quen'importe quel animal grégaire.Car, comme nous le disons, la nature ne fait rien en vain ; or seul parmi les animaux l'homme a un langage.

Certes lavoix est le signe du douloureux et de l'agréable, aussi la rencontre-t-on chez les animaux ; leur nature, en effet, estparvenue jusqu'au point d'éprouver la sensation du douloureux et de l'agréable et de se les signifier mutuellement.Mais le langage existe en vue de manifester l'avantageux et le nuisible, et par suite aussi le juste et l'injuste.

Il n'y aen effet qu'une chose qui soit propre aux hommes par rapport aux autres animaux : le fait que seuls ils aient laperception du bien, du mal, du juste, de l'injuste et des autres notions de ce genre." Commentaire : Aristote distingue l'homme des animaux de trois manières : par la vie sociale, par le langage et par la conception dujuste et de l'injuste. 1 ) L'homme est un animal politique.C'est sa nature et sa différence avec les autres animaux.

Il l'est par nature, c'est-à-dire que cette différence,l'homme la doit à la nature en tant qu'elle a produit cette nature de l'homme.Que signifie cette formule? Que l'homme vit en société, qu'il est sociable, que par nature il est disposé à vivre avecses semblables? Sans doute, mais cette lecture est insuffisante pour plusieurs raisons :- On pourrait en dire autant de certains animaux, comme les abeilles ou les fourmis, qui elles aussi vivent en sociétéet selon une organisation sociale complexe et efficace.

Or, la socialité est présentée par Aristote comme unedifférence spécifique.

Ce qui indique que la sociabilité n'est pas du même ordre chez l'homme que chez les animaux,qu'entre celle des hommes et celle des animaux il y a une différence de nature et non de degré.- On pourrait aussi dire exactement le contraire et cela passerait aussi pour exact, à savoir que l'homme est unanimal agressif, qui ne supporte pas tous ses semblables et qui n'hésite pas quelquefois à s'en prendre eux.

Ce quiindique que la sociabilité ne désigne pas ici une disposition bienveillante à l'égard de tout le monde.- Du reste, Aristote ne parle pas de sociabilité, mais de politique : cela veut dire que l'homme par nature est l'êtrequi vit en Cité, c'est-à-dire non seulement avec les autres, mais surtout en fonction de règles sociales et politiquesqui définissent l'ordre social et politique, le statut, les fonctions et la valeur de tous les individus par des lois qui sedoivent d'être justes.Alors, comment faut-il comprendre cette formule? Ce qu'il y ajoute permet de le comprendre : l'homme n'est pas tant un être doué de sociabilité qu'un être qui nedevient un homme que s'il vit avec les autres dans une Cité.

L'homme ne devient un homme que par cetteappartenance à une cité : on ne naît pas homme en tant que tel, on le devient en vivant dans un foyer, sousl'autorité des lois et avec la conscience d'appartenir à une lignée précise.

L'homme n'est pas seulement sociable, ilne devient homme qu'en société.

Qu'est-ce qui autorise cette lecture? Qu'Aristote parle d'hommes qui ne vivent pasen cité comme d'êtres qui ne sont pas des hommes, mais ou des êtres violents, dont la nature est la violence oudes êtres surhumains, des dieux.

Ces êtres, qui sont des membres de l'espèce humaine, ne sont pas devenus deshommes, ne sont pas des hommes accomplis parce qu'ils ne vivent pas en cité.

Dit autrement : ils sont des hommes,mais faute de vivre en société, ils ne sont pas des hommes accomplis, achevés parce qu'ils n'ont pas réalisé leprogramme de leur nature humaine.

Il distingue toutefois ceux qui ne vivent pas en cité malgré eux, comme lesnaufragés ou les exilés de ceux qui ne vivent pas en cité par nature, c'est-à-dire en accord avec eux-mêmes.

Soitpar exemple les êtres qui vivent dans la plus totale des marginalités.Cette définition de l'homme est par ailleurs confirmée en quelque sorte par les enfants sauvages, notamment Victorde L'Aveyron.

Certes, c'est bien malgré lui qu'il était sauvage, c'est-à-dire en forêt, mais à un âge où de toutefaçon il n'aurait pas pu choisir quoi que ce soit.

Il n'est pas devenu un homme accompli, par exemple n'a jamaisvraiment appris à parler, ni à lire ou écrire faute d'avoir passé son enfance en compagnie des hommes, en cité.

Il estun homme par son appartenance à l'espèce humaine, mais n'est pas un homme accompli parce qu'il ne présente pasles traits que l'on retrouve ordinairement chez les hommes, du moins ceux de son époque, sans que ce manquepuisse être mis sur le compte d'une arriération mentale, comme d'abord on l'avait pensé.

Il n'est pas un homme idiot,il n'est pas devenu un homme.Mais, cette définition de l'homme indique du coup qu'il est possible que des êtres qui d'un côté appartiennent àl'espèce humaine ne soit pas considéré comme des hommes à part entière faute d'avoir accompli leur nature au seinde la vie sociale et politique, et cela même si ces êtres ont connu une vie sociale animale. 2 ) L'homme est un animal doué de parole.Aristote après avoir montré que l'homme est un animal politique invoque une autre différence entre l'homme et lesanimaux, différence qui est lié à la première et dont le rapport est introduit par le principe souvent présent chez. »

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