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Peut-on vivre sans se soucier de la mort ?

Publié le 27/12/2005

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Pour Epicure, nous n’avons pas à nous soucier de la mort puisque nous ne pourrons jamais dire «Je suis mort «. En d’autres termes, la mort ne sera jamais pour nous un présent puisque la mort est absence de sensation. Le souci de la mort relèverait alors d’une ignorance coupable. Toutefois, la mort n’est-elle pas l’horizon ultime de notre existence comme le pense Heidegger ? Dès lors, se soucier de la mort ne consiste pas nécessairement à la penser comme redoutable nécessairement.Se soucier de la mort ne peut-il pas être une invitation au bien vivre ?

[Il est parfaitement inutile de méditer sur la mort. Si je donne un sens à mes actes, c'est bien parce que je suis en vie. La mort, inaccessible à l'entendement, est un concept dont la raison n'a pas à se préoccuper.]

 

  • Il faut vivre pour penser et penser pour vivre
  • La mort n'est rien pour nous
  • Pour la raison, la mort n'est qu'une fiction
  • "Le philosophe ne pense à aucune chose moins qu'à la mort et sa philosophie est une méditation de la vie, non de la mort" SPINOZA

 

[L'homme est la seule créature qui, parmi toutes les espèces vivant sur terre, a conscience de son existence. Il se sait mortel. Voilà qui pose le plus grave des problèmes: qu'est-ce la vie au regard de la mort ?]

 

  • La vie est courte
  • La mort, comme néant, enrichit la vie.
  • La conscience de la mort comme stimulant
  • Vie et mort sont indissociables

 

« La mort est le sérieux de l'existence. Ce beau raisonnement oublie que l'homme ne vit pas dans le présent, et qu'ilest dans la nature de sa pensée d'évoquer le passé et de supputer l'avenir.L'homme, dit Nietzsche, « n'est pas d'aujourd'hui mais d'avant-hier et d'après-demain » et Heidegger a parlé de cet « être des lointains » qui dans la fausseplénitude de l'Être fait surgir à tous moments le néant des possibles.

L'Être,en tant que nous le saisissons dans notre humaine existence, est temporalitéet souci ; déjà le sentiment du simple possible est source d'angoisse,Kierkegaard le notait à propos du vertige qui est non point le sentiment qu'onpourrait par mégarde tomber dans le vide, mais le sentiment qu'on pourrait s'yjeter si seulement on le voulait.

Mais les possibles ne participent pasuniquement à ce non-être relatif qui est la projection de ma liberté.

Al'horizon de tous mes possibles, nous dit Heidegger, se profile en effet cenéant absolu — ma mort —.

Certes, comme l'avait dit Bossuet, « les mortelsn'ont pas moins de soin d'ensevelir les pensées de la mort que d'enterrer lesmorts eux-mêmes » et Heidegger montre que, en effet, nous nous efforçonsde vider la mort de tout sens en la pensant sur le mode de la banalitéimpersonnelle, sur le mode du on.

« On n meurt encore de faim dans les payssous-développés; « on » ne meurt plus d'épidémie avec la vaccination et lesantibiotiques, mais « on » meurt beaucoup sur les routes avec lamultiplication des automobiles — comme si le on, qui n'est personne, pouvait mourir ! La vérité est que la mort est pour chacun de nous affaire personnelle et ce possible suprême qui est enmême temps la fin de tous mes possibles.

Parce que la temporalité vécue est constamment orientée vers l'avenir,parce que la réalité humaine est existence, autrement dit que nous sommes toujours en avant de nous-mêmes, lamort est sans cesse présente dans le moindre de nos projets, dans la moindre visée de la conscience.

Et il seraitvain de ruser avec ce possible implacable, de chercher des subterfuges ; je suis jeune encore, ma santé est bonne,je ne vais pas mourir...

En vérité, dit Heidegger, « dès qu'un homme est né, il est assez vieux pour mourir n, et laréalité humaine, telle qu'une réflexion philosophique lucide nous la révèle, est celle d'un être-pour-la-mort.

Laperspective heideggérienne est, comme on voit, radicalement opposée à celle de Spinoza.

Pour l'auteur de l'Éthiquela mort est crainte d'ignorant qui n'a pas appris à penser l'Être en sa plénitude.

Pour Heidegger c'est l'oubli de lamort qui est ignorance et frivolité.

La philosophie, découverte de la réalité humaine comme temporalité, ne sauraitêtre autre chose que méditation sur la mort...

Et nous pensons ici aux vers mélancoliques de la comtesse de Noailles: « On ne possède bien que ce qu'on peut attendreJe suis morte déjà puisque je dois mourir ». L'analyse heideggérienne, pourtant, peut ne pas sembler décisive.

Pour Sartre, par exemple, bien qu'il se place aupoint de vue « existentiel », au point de vue de la réalité humaine, la pensée de la mort est parfaitement vaine.

Ilest vrai que toute conscience est projet, néantisation du présent au profit d'un futur.

Mais ma mort ne peut pasêtre un possible pour moi.

Elle est en dehors et au-delà de la conscience.

Elle m'échappe exactement au même titreque ma naissance.

Ne transcendant pas ma mort je ne puis décider de son sens.

Ma mort ne m'appartient pas, elleappartient aux autres.

Elle ne donnera à ma vie son sens définitif que dans la conscience d'autrui qui me jugera : «Être mort, c'est être en proie aux vivants ».

Nous ne sommes pas, dit à peu près Sartre, comme un condamné quivoit chaque jour exécuter ses compagnons de geôle, mais plutôt comme un condamné à mort qui se préparantcourageusement à faire bonne figure sur l'échafaud...

serait, entre temps, brutalement enlevé par une épidémie degrippe espagnole.

Dans le cas du suicide même ma mort ne m'appartient pas car le projet du néant est inimaginable; c'est à vrai dire un néant de projet et celui qui court au suicide est victime d'une sorte d'illusion.

Il veut la fin deses misères, il veut une existence meilleure, mais il ne peut réellement vouloir le néant absolu.

« Tous les hommes,disait Pascal, cherchent le bonheur, même ceux qui vont se pendre.» La mort c'est l'événement extérieur, c'est parrapport à mon être existentiel, l'extériorité radicale, la transcendance absolue.Il reste que nous savons, d'un savoir abstrait mais sûr, que nous allons mourir.

Et peut-être la pensée philosophiquela plus profonde est-elle à la fois méditation de la vie et méditation de la mort.

La vie seule donne à la pensée de lamort son caractère tragique, la mort seule nous fait penser la vie comme précieuse et fragile.

Toute vie pleinementvécue implique des risques, celui qui voudrait fuir tous les risques de mort et se réfugierait dans une existenceétroite, douillette et calfeutrée, oublierait précisément de vivre.

Jung n'a-t-il pas noté que ce sont précisémentceux dont l'existence fut la mieux remplie, la plus heureuse, qui acceptent la mort, le moment venu, avec le plus desérénité ? Vouloir ignorer la mort serait prétendre échapper à la condition humaine en ce qu'elle a peut-êtred'essentiel (l'homme étant le seul animal qui sait qu'il mourra).

Mais chez un être sain la conscience d'être morteln'est pas autre chose qu'une invitation à construire pour autrui et pour soi-même l'existence la plus belle est la pluspleine.

Telle est, dans la Bible, la sagesse — encore toute terrestre — de l'Ecclésiaste (IX, 10): "Va ! mange avec joie ton pain et bois ton vin d'un coeur contentJouis de la vie avec une femme que tu aimesPendant tous les jours de ton existenceCar c'est ta part dans la vie et dans le travail que tu fais sous le soleilTout ce que ta main peut faireFais-le avec force. »

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