Peut-on vouloir ce que l'on ne désire pas ?
Publié le 25/02/2004
Extrait du document
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[La volonté est libre.
Elle est surtout libre de choisir entre le bien et le mal.
Ma raison peut me conduire à renoncerà certains désirs.
Il est aussi possible que ma conscience ignore ce que je désire réellement.]
La volonté morale n'a pas pour fin le plaisirDans la Critique de la raison pratique, Kant montre que le bonheur individuel, recherché par tout un chacunsuivant ses propres penchants, ne peut être une finalité morale.
La recherche du bonheur peut fournir desmaximes personnelles d'action, mais non des lois à la volonté, même si l'on prend pour finalité le bonheur detous.
La définition générale du bonheur est subjective, donc variable et changeante.
On pourrait au mieux entirer des règles générales, mais jamais des règles universelles (valables toujours et nécessairement), car labase en est l'expérience et ce que l'on en ressent.
La recherche du bonheur ne peut donc aboutir à uneéthique comportant des règles pratiques communes à tout être raisonnable.A la différence de ces éthiques eudémonistes (eudaimonia : bonheur) qui s'en remettent à la subjectivité dechacun pour apprécier le bonheur, la loi morale doit être valable pour toute volonté raisonnable.
La moralerepose sur des lois universelles et nécessaires (valables pour tous et que l'on ale devoir de respecter).
A laquestion que dois-je faire ?, la morale répond : le devoir, et uniquement le devoir.
Le souverain bien n'est pasle bonheur, mais la bonne volonté, c'est-à-dire la bonne intention, désintéressée, l'intention de faire le bienpour le bien, ou encore de faire le bien par devoir.
Elle repose sur un impératif catégorique ("tu dois parce quetu dois") et non hypothétique ("si tu veux obtenir tel résultat, fais ainsi").
Sans condition, il ne repose sur riende sensible.
L'action n'est pas bonne suivant ses résultats, mais bonne en soi quand elle est faite par devoir."Agis uniquement d'après la maxime qui fait que tu peux vouloir en même temps qu'elle devienne une loiuniverselle." Par ailleurs, le devoir commande le respect de la personne, de l'être raisonnable en tant quevaleur absolue : l'humanité, que ce soit la sienne ou celle d'autrui, doit toujours être respectée comme une finabsolue, et jamais traitée simplement comme moyen.
Seule cette volonté morale est autonome dans le sensoù elle répond à la loi de raison qu'elle trouve en elle (et qui exige de nous plier à l'universalité), et non à desexigences sensibles, naturelles et empiriques, qui nous rendent dépendants, hétéronomes : en ce cas, c'estl'expérience qui commande et non la volonté rationnelle.
Je peux éviter bien des malheurs en changeant mes désirsMa volonté, soumise au désir, peut, en bien des cas, être l'unique cause de mon malheur.
Descartes proposedonc, comme règle de sagesse, de préférer, volontairement, changer ses désirs, plutôt que de se dépenser enpure perte à vouloir transformer l'ordre du monde.
Ma raison, en ce cas, me conduit à vouloir autre chose quece que je désirais initialement.
Dans la troisième partie du « Discours de la méthode », Descartes affirme qu'une de ses règles d'action est « de tâcher plutôt à me vaincre que la fortune, et à changer mes désirs plutôt que l'ordredu monde » (« Fortune » désigne ici le cours changeant de la nature).
Pour comprendre cette maxime, qui semble d'un conformisme révoltant,il faut savoir qu'elle fait partie d'une morale « par provision », c'est-à- dire qu'elle ne correspond pas à la morale définitive de Descartes , mais s'intègre à un ensemble de règles provisoires et révisables, dictées parl'urgence de la vie et de l'action, alors même que la raison et larecherche recommandent la prudence.
Le « Discours de la méthode » présente la biographie intellectuelle de l'auteur, et les principaux résultats auxquels il est parvenu par unedémarche aussi singulière que révolutionnaire.
Afin de parvenir à unecertitude absolue et indubitable, Descartes décide de remettre au moins temporairement en cause la totalité de ses opinions.
Pourparvenir « à la connaissance vraie de tout ce qui est utile à la vie », il se voit obligé de rejeter la totalité de ce qu'il avait cru.
Dans les« Méditations », il décrit ainsi son attitude :
« Je suppose que toutes les choses que je vois sont fausses ; je me persuade que rien n'a jamais été de tout ce que ma mémoire remplie de songes mereprésente ; je pense n'avoir aucun sens... »..
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