Philosopher, c'est réfléchir ?
Publié le 19/02/2004
Extrait du document
Position de la question.
A première vue, la formule proposée semble banale : n'a-t-on pas
toujours représenté le philosophe comme un homme qui réfléchit, comme un
méditatif ? Mais, en creusant le sens du mot « réfléchir », peut-être
découvrirons-nous à cette pensée une portée plus profonde.Réflexion et vie sensitive.
MAINE DE BIRAN lui-même nous indique déjà un sens moins banal
lorsque, dans le même Journal d'où cette pensée est extraite, il
distingue (23 juillet 1816) par opposition à la « réflexion » un « état
où l'homme se confond avec ses intuitions ou ses sensations et ne voit
de lui que son corps propre où il rapporte toute son existence ». Nous
reconnaissons là cet état à demi conscient où l'homme « se laisse vivre
» et demeure esclave de l'être organique qui est en lui. Dans cet état,
« les sensations, les mouvements, les images vagues et décousues »
remplissent tout l'esprit, et l'âme est déterminée par l'état du corps :
« Toujours remuée au gré des impressions du dehors, elle est affaissée
ou élevée, triste ou joyeuse, calme ou agitée selon la température de
l'air, selon une bonne ou mauvaise digestion... » - A ces impressions de
la vie organique, s'ajoutent les influences de la vie sociale : « Les
passions sociales, écrit ailleurs BIRAN, se joignent toujours dans
l'homme aux passions naturelles et les compliquent. Dans l'état le plus
ordinaire des hommes en société, toute passion naturelle ou appétit
organique, partant de l'organisme, monte pour ainsi dire de la vie
animale à celle de l'homme ». Mais BIRAN voit fort bien que, tant qu'il
se borne à subir cette influence du groupe social, l'homme n'est guère
plus actif que lorsqu'il est l'esclave de son corps.
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