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Plaisir et douleur

Publié le 09/06/2004

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Le plaisir et la douleur sont présentés comme les deux pôles de l'affectivité. Ils marquent le premier retentissement dans la conscience de toute excitation et le passage entre une activité purement automatique et une activité pleinement consciente. Il est à remarquer en effet que le terme de sensibilité est employé aussi bien pour désigner la sensibilité affective (c'est le sens courant du terme) que la connaissance sensorielle (c'est le sens philosophique du terme). Par exemple, on étudie le seuil de la sensibilité d'un organe, c'est-à-dire le moment où l'excitation devient consciente.  On distingue communément le plaisir et la douleur physiques, ainsi nominés parce que leur cause est 'une excitation organique, du plaisir et de la douleur moraux dont la cause est un sentiment. Il va de soi que cette distinction n'a aucune valeur psychologique, puisque toute affection doit être consciente pour être qualifiée. Cependant nous retiendrons la contribution de la physiologie à l'étude de ce problème.    ÉTUDE PHYSIOLOGIQUE DU PLAISIR ET DE LA DOULEUR    Le problème que se sont posé les physiologistes est celui-ci : la douleur est-elle une sensation spécifique ?    A) La douleur    1) La douleur ne paraît pas s'attacher aux sensations visuelles, auditives, gustatives, olfactives. Ces sensations qui sont représentatives (c'est-à-dire destinées à nous procurer une connaissance de l'objet) s'exercent à distance du dit objet. La douleur suppose un contact.  2) Il reste la question des rapports de la douleur avec le sens du toucher, le seul qui s'exerce par le contact. La douleur n'est pas uniquement réductible au toucher, comme certains philosophes l'avaient prétendu. Elle n'est pas réductible à l'intensité de la sensation tactile. En effet :  a) Dans certaines parties du corps, les viscères en particulier, le seuil absolu d'excitation est dolorifique. Il n'y a pas un moment où nous sentons nos organes et un moment où nous souffrons. D'autre part, certains organes sont insensibles au contact, ainsi : la cornée de l'oeil, tout à fait insensible au toucher, est immédiatement douloureuse au contact ;  b) Il y a des cas d'analgésie (absence de douleur) dans lesquels le contact est senti et pas la douleur. Exemple : maladie du tabès. Ce phénomène est utilisé en chirurgie dans les cas d'anesthésie locale et d'insensibilisation ;   

« 2) Dans les parties redevenues sensibles à la douleur se révèlent tous les caractères de notre sensibilité viscéraleou protopathique : la soudaineté, la violence, la réactivité brutale et les erreurs grossières de localisation ;3) C'est seulement quand la sensibilité sensorielle au contact est revenue que la douleur a retrouvé les caractèresque nous lui connaissons, préparation diffuse, adoucissement de sa violence, modération des réactions etlocalisation correcte.Ce que nous appelons normalement douleur est donc une douleur éclairée par les enseignements du sensreprésentatif du toucher.La douleur protopathique est un état affectif presque à l'état pur ; néanmoins du fait même que nous la nommons,elle comporte un élément de connaissance.

L'expérience de Head a été contrôlée sur des blessés et des accidentés.Il est permis d'en conclure également que la douleur est bien une expérience première de la conscience, antérieure àla représentation. B) Le plaisir C'est un phénomène beaucoup moins étudié que la douleur.

Il y a pour cela des raisons profondes : nous nousabandonnons au plaisir qui ne pose pas de problème à la conscience vulgaire parce qu'il paraît en accord avec nosdispositions fondamentales, tandis que la douleur est irritante et scandaleuse.

Posons-nous la même question : leplaisir est-il une sensation ?1) Traditionnellement le plaisir physique a été appelé par les philosophes titillatio (chatouillement).

C'est le termeemployé par Descartes ou Spinoza.

Et en effet des psychologues contemporains comme M.

Bourdon ont essayé deramener tout plaisir physique au chatouillement.

Mais à l'inverse de ce qui se passe pour la douleur, les expériencesfaites montrent que la localisation du plaisir est extrêmement rare.

Sa caractéristique essentielle paraît au contraired'être diffuse.

Le chatouillement s'exaspère s'il se localise ;2) On remarque en outre que le plaisir n'est jamais réductible à une excitation extérieure, indépendante de toutfacteur interne.

Les plaisirs de la table par exemple n'existent que pour l'homme sain et en appétit.

Le plaisir estinséparable d'un besoin ;3) On ne stimule pas le plaisir mais le besoin.

Le plaisir est essentiellement subjectif et variable, ce que traduit lesens commun « des goûts et des couleurs, il ne faut pas discuter ».

Ceci nous explique que le plaisir soit moinsconnu.

La douleur, elle, est localisée et moins étroitement dépendante des différences individuelles4) Toutes ces observations ont amené à définir le plaisir comme la satisfaction d'une tendance.

Son caractèrephysiologique essentiel est d'être dynamogénique, c'est-à-dire de produire une accélération du rythme vital et unrenforcement du tonus musculaire, lesquels se traduisent par les signes extérieurs du plaisir : le sourire, la colorationdu visage, l'éclat du regard, etc.

;5) Le plaisir semble accompagner indifféremment toutes nos sensations représentatives (vue, odorat, ouïe,toucher).

Mais il est surérogatoire, c'est-à-dire donné par surcroît.

Il accompagne l'acte mais n'en est pas uneconséquence nécessaire. C) Rapport entre le plaisir et la douleur physiques Traditionnellement ces deux phénomènes sont considérés comme inverses l'un de l'autre.

Ils seraient lescaractéristiques de l'être vivant marquant ce qu'il a tendance à rechercher ou à fuir.

Ce seraient donc les deuxfaces d'un instinct de conservation.

Mais ici il faut remarquer avec M.

Pradines que les deux phénomènes ne sontpas exactement sur le même plan.1) Les expériences montrent que dans un organisme quelconque, seules les réactions positives sont orientées : ellesnous portent vers un objet.

Dans le plaisir il y a toujours anticipation de l'objet.

Nous cherchons ce que nousaimons.

Au contraire, les réactions négatives comme la douleur ont toujours un caractère d'imprévision, desoudaineté, qui l'apparentent au réflexe ;2) La douleur ne correspond à aucune tendance.

Parler de l'envers d'une tendance est proprement verbal ;3) Il n'y a aucun plaisir qui soit le contraire de la douleur.

Les deux phénomènes sont incomparables du point de vueaffectif.

La suspension de la douleur n'est que soulagement et non pas encore plaisir.

De même la privation d'unplaisir n'est pas encore douleur mais déception ;4) Faire du plaisir et de la douleur les deux faces d'une tendance, l'instinct de conservation, serait leur donner unefinalité qu'ils n'ont pas (finalité ici est pris au sens d'importance biologique).

Ni le plaisir ni la douleur ne sont lesgarants de notre conservation individuelle comme le voudraient les partisans de la théorie évolutionniste (Spencer,par exemple).

En effet :a) Il n'est pas vrai que suivant le principe de la survivance du plus apte, aient survécu les êtres qui ont associé ladouleur aux choses à éviter et le plaisir aux choses bonnes pour l'espèce.

Beaucoup d'actes nuisibles se traduisentpar des plaisirs.

Par exemple : l'alcoolisme, la gourmandise ;b) D'autres, graves pour l'individu, ne se traduisent par aucune douleur : les maladies viscérales profondes(tuberculose, certaines formes de cancer) ne font pas souffrir.

Citons aussi l'euphorie des mourants après l'agonie ;c) Par contre, des lésions bénignes provoquent de vives douleurs parce qu'elles sont périphériques.

Par exemple :une brûlure légère ou l'intrusion d'un moucheron dans l'oeil. Conclusion de l'étude physiologique Donc ni la douleur ni le plaisir ne correspondent à un instinct unique et ils ne sont pas la cause de notre adaptationou de l'adaptation de notre espèce à la vie.

Bien au contraire, ils en seraient plutôt l'effet.

Le plaisir estdynamogénique, c'est-à-dire stimulant, tandis que la douleur est dépressive, c'est-à-dire détermine unralentissement dans les fonctions vitales.

A ce titre ce sont les deux modes fondamentaux du sentir.. »

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