Devoir de Philosophie

La poésie des années 1940 - 1944 en France: Résistance et poésie

Publié le 06/09/2012

Extrait du document

Que la poésie des années 1940-44 n'ait pas été «pure poésie«, voilà qui est certain. Trop d'éloquence - c'était inévitable- y vint appuyer la volonté de démonstration ; trop de conformisme dialectique, une évidente révolte. Quand Aragon écrit La Rose et le réséda, ou Nymphée, et Paul Eluard Liberté, il est bien certain que le bon vieux didactisme, que l'on croyait à jamais condamné, rentre sur leurs talons dans les laboratoires et les temples de la poésie française. Mais qui nierait l'action de ces « tracts « si particuliers sur la conscience populaire, et que leur effica...

« 342 cité ait été d'autant plus grande qu'ils étaient apportés par · les brises prestigieuses de la poésie ? En vérité, la poésie n'a rien gagné sur-le-champ à se faire militante.

Mais les poètes, en revanche, se sont consi· dérablement « accrus », comme Victor Hugo dans l'exil - et c'est le terme même qu'il emploie - dans leur par· ticipation sans réserve à la lutte pour la libération.

Pour beaucoup d'entre eux, le lecteur à qui le poète le moins soucieux d'être entendu songe en écrivant, était demeuré un lecteur idéal, mythique, sans visage ; c'était maintenant à des hommes de chair et de Bang, coudoyés chaque jour et dont ils se découvraient les semblables, qu'il s'agissait d'adresser la parole.

Les poètes ne pensaient plus à la postérité, avec tout ce que cette préoccupation sous-entend de pose et d'exterritorialité : ils pensaient à leurs contem• porains, ils mettaient au présent toute:~ choses vivantes, que l'inspiration a tendance à ne considérer qu'après leur cuisson dans le four du passé.

lls apprenaient à connaître les hommes tels qu'ils sont et à se connaître eux-mêmes, tels que le miroir de Narcisse.

ne les avait jamais reflétés.

lls découvraient que l'être a des racines communes avec toUll les êtres et que, selon l'expression de René Laporte, tous les êtres « ont besoin de la même nourriture ».

Enrichis, d'expériences et d'épreuves, les poètes qui avaient exprimé la souffrance, la colère, la patience, l'espé• rance ou le désespoir de leurs compagnons de famine, d'esclavage ou de combat, ne pouvaient pas redevenir les purs orfèvres qu'ils avaient été.

C'est dans sa cellule de Fresnes que Gabriel Audisio découvrit le meilleur public qu'il eût jamais trouvé : des gens sans littérature, détenus comme lui et qui lui avouèrent leur faim de poésie; mais c'est en voulant leur réciter des vers qu'il s'aperçut de l'impossibilité de retrouver en sa mémoire d'autres poèmes que réguliers 1 • Ce n'est là qu'un exemple des nécessités qu'il apparut aux poètes indispensable d'affronter quand ils s'estimèrent lihres de retoun1er à leurs petits papiers.

1.

Cf.

Gabriel Audisio : Feuilles de Fresnes (Ed.

de Minuit).

On lira également a,·ec profit, du même auteur : Misères de notre poésie (Ed.

Seghers).. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles