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Pourquoi le temps est-il dit destructeur ?

Publié le 27/02/2005

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temps
Toute la pensée hellénique est dirigée vers cette éternité opposée à la temporalité destructrice.La question se pose, toutefois, de savoir si le temps objectif, conçu comme milieu indéfini analogue à l'espace, est lui aussi marqué par le négatif et la destruction. Songeons au temps kantien, cette forme a priori de la sensibilité. On remarquera que le temps, d'abord analysé par Kant (Esthétique transcendantale) comme forme pure de la sensibilité indépendante de tout avant et de tout après, de toute irréversibilité, se retrouve, dans l'Analytique transcendantale, lié à l'idée de succession irréversible. De même, la science moderne voit dans le temps irréversible la réalité que nulle théorie physique ne saurait répudier. La physique contemporaine a réintroduit l'irréversibilité temporelle dans ses équations (Cf Prigogine, Du temps et De l'éternité).Aussi est-ce avec Héraclite que nous achèverons cette première partie : « On ne peut pas descendre deux fois dans le même fleuve. Ni toucher deux fois une substance périssable dans le même état, car elle se disperse et se réunit de nouveau par la promptitude et la rapidité de sa métamorphose : la matière, sans commencer ni finir, en même temps naît et meurt, survient et disparaît. » (Héraclite, Fragments)  On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve. HÉRACLITE Héraclite défend une conception du monde selon laquelle le monde est en éternel devenir, en éternel changement et; pour nous le faire comprendre, prend l'image du fleuve toujours changeant.
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« Transition Toutefois, si le temps semble par essence destructeur, ne peut-il incarner aussi ce en quoi et par quoi l'homme seréalise ? Le temps ne permet-il pas l'action et la création ? Ne construisons-nous pas notre destinée dans le temps ? B.

Le temps du projet et de la création humaine (antithèse) Tout d'abord, dire que le temps est essentiellement destructeur, c'est oublier qu'il y a une pluralité de temps quin'ont pas le même rythme ni la même forme.

Il y a des temps, des temporalités.

En particulier, il existe un tempsvoulu irréductible au temps vécu.

Si j'organise ma temporalité en fonction de mes projets et travaux, alors le temps,devenu le lieu d'une croissance spirituelle et d'une action, cesse d'être essentiellement destructeur et se fait lamatrice d'une liberté voulant la vie et la transformation des choses.

Alors le temps est soumis à un art délicat de ladistribution : c'est le temps de l'attention, du travail, de l'organisation, du façonnement de l'avenir où se projettentles possibles.

Voici le temps devenu une durée maîtrisée, façonnée, intelligibilisée.

Voici le temps dominé par laconscience, et cessant, du même coup, d'être intrinsèquement destructeur.

Dès lors, le temps est au service del'action et il se convertit en liberté, en vie, en création féconde.Ainsi, Sartre s'attache à cet avenir, lié aux possibles, à la liberté, au projet.

D'une manière générale, l'avenir estl'organe de ma liberté et de ma puissance, il est un manque à remplir par mon acte.

Donc le temps est en connexionavec les possibles qui pullulent devant moi.

Avenir et futur, ces visées de ce qui n'est pas encore, sont desouvertures sur les possibles qui se dessinent ou s'esquissent donc dans le temps, ce lieu des possibilités infinies.

«...

Tâchez de saisir votre conscience et sondez-la, vous verrez qu'elle est creuse, vous n'y trouverez que del'avenir.

Je ne parle même pas de vos projets, de vos attentes ; mais le geste même que vous attrapez au passagen'a de sens que si vous en projetez l'achèvement hors de lui, hors de vous, dans le pas-encore.

» (Sartre,Situations I, NRF-Gallimard, 1964) Transition Ainsi, à côté du temps qui tue et déchire, il y a le temps qui accomplit et permet le progrès.

Ce temps voulu devientici le lieu de la croissance spirituelle.

Toutefois, cette opposition entre le temps négatif et le temps constructeur nepeut-elle être replacée dans une dialectique, dans un tout unifié ? Est-il bien raisonnable de ne pas réintégrer lescontraires ou contradictoires dans notre vie ? C.

L'esprit s'édifie dans un temps destructeur et constructeur Dans un temps simultanément destructeur et constructeur, ce qui s'édifie, c'est l'esprit, à travers une temporalitédialectique.

Car le temps n'est pas une notion abstraite et vide : il est lui-même esprit, enrichissement, vie, victoire.Dans la perspective de Hegel, le temps cesse d'être essentiellement destructeur pour créer l'esprit à.

travers l'actionde la négativité.

Voici une conception grandiose : alors que l'animal ignore le temps, l'homme a besoin du temps pouraccéder à l'esprit.

Le temps est cet être négatif par lequel l'homme déploie progressivement son action dans lemonde et réalise ainsi la vie divine et l'esprit, à travers une temporalité dialectique, positive et négative.

Le tempsest-il essentiellement destructeur ? Il crée dans la destruction et devient dès lors acte spirituel authentique.

Ainsil'esprit est le mouvement même du temps négatif et il se fait et s'engendre dans la négativité même du temps.Envisagé sous cette nouvelle dimension, temps et esprit se rejoignent : la destruction devient l'organe de lacréation spirituelle.

« Le temps de Hegel est le temps historique, le temps dans lequel se déroule l'histoire humaine,ou, mieux encore, le temps qui se réalise, non pas en tant que mouvement des astres, par exemple, mais en tantqu'histoire universelle...

Il n'y a pas de temps naturel, cosmique ; il n'y a de temps que dans la mesure où il y ahistoire, c'est-à-dire existence humaine, c'est-à-dire existence parlante.

» (A.

Kojève, Introduction à la lecture deHegel, NRF-Gallimard, 1947)En d'autres termes, ne faut-il pas que l'homme affronte la contradiction au sein même du temps et l'assume, qu'ilmette cette contradiction (négatif/positif) au coeur même de la pensée ? Il faut reprendre l'idée maîtresse dudevenir (Héraclite) en comprenant bien que le temps crée l'esprit.

Tout est temporalité, destruction créatrice,devenir mortel.

Le temps est sens et perte de sens, déchaînement fou des contradictoires et tourbillon. Conclusion Le salut de l'homme ne peut se faire que dans le temps : loin d'être seulement déchéance de l'être, le temps est cetorgane de la liberté et de l'esprit où, dans la croissance spirituelle, chacun peut devenir ce qu'il doit être.

Dans lechristianisme comme dans la philosophie hégélienne, le temps est l'enrichissement de l'esprit capable de regarder lamort en face et de faire de cette mort la forme même de son salut.

Le temps et la mort s'impliquent mutuellementdans le devenir spirituel de l'homme et de l'humanité.

Nous ne pouvons pas les neutraliser.

C'est sous l'horizon de lamort et du temps que se manifeste l'absolue grandeur de l'homme.

Dans l'absolu déchirement, l'homme les contempleet séjourne auprès d'eux.

Le temps, destructeur et créateur, porteur de mort et de vie, doit donc être le lieu duséjour spirituel de l'homme.. »

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