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La présence d'autrui nous évite-t-elle la solitude ?

Publié le 07/03/2004

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Peut-on se sentir seul et isolé parmi d'autres qui nous entourent ? Cette sensation de déréliction, d'abandon est à la fois contradictoire et courante: le sentiment de solitude est parfois d'autant plus fort que sont nombreux ceux qui nous entourent sans prêter attention à nous. Si la proximité d'autrui ne suffit pas à nous éviter la solitude, comment définir la présence qui nous en délivrerait? Comment être présent aux autres ? Dans un premier temps, nous verrons dans quelle mesure la présence d'autrui est une compagnie qui précède l'expérience de la solitude. Puis nous nous demanderons en quoi cette présence peut être limitée voire hostile ? En effet, l'existence d'autres consciences que la mienne peut me condamner à l'isolement de la concurrence et du conflit... Nous nous demanderons enfin comment l'alternance de la présence d'autrui et de l'expérience de la solitude jalonne la formation de la personnalité et que l'homme est tout à fois présence et absence à soi et aux autres. Pure intériorité et totale extériorité.

  • I) Autrui, le meilleur rempart contre la solitude.
  • II) La multitude des autres et unicité du moi.
  • III) Présence à soi et absence aux autres.

« III.

L'épreuve de la solitude. Les moments de proximité ou de solitude ne sont cependant pas définitifs et s'articulent dans l'histoire de laconscience et des relations intersubjectives.

La solitude est alors une épreuve qui doit être traversée pour enrichirles relations avec autrui. • Le deuil de la fusion Lorsque je découvre que la présence d'autrui ne m'évite pas automatiquement la solitude, je prends conscience demon autonomie de personne.

Freud a montré que l'épreuve de la séparation d'avec la mère est une des étapes fondamentales de la construction de l'identité personnelle : je découvre queje ne peux plus fusionner totalement avec les êtres que j'aime; mais cettedistance crée la liberté dans les relations : si je me sens seul sous prétextequ'autrui ne m'appartient pas totalement, il importe d'apprendre à le laisserêtre lui-même.• Le don de la présenceL'expérience de la solitude fait également découvrir que la présence d'autruin'est pas un simple fait matériel mais un événement, un don qu'il nousappartient de faire fructifier.

C'est parce que la présence d'autrui ne m'évitepas toujours la solitude que je peux et dois être reconnaissant à autruilorsqu'il me témoigne une véritable amitié. • La contingence Cette qualité de relation ne peut pourtant pas se commander ou faire l'objetd'un contrat : les relations entre les consciences demeurent toujours fragileset marquées par la contingence.

C'est ce qui fait le prix et la difficulté de laconfiance. Conclusion La réflexion sur le rapport entre la présence d'autrui et la solitude nouspermet ainsi de passer de la simple représentation d'une présence dans l'espace qui nous entoure à la pensée d'unerelation vivante entre deux consciences à travers la durée : c'est bien dans le temps que se construit la présencequi seule peut me délivrer de la solitude. Dans Vendredi ou les Limbes du Pacifique , son oeuvre maîtresse, Michel Tournier nous dépeint un homme, seul rescapé d'un naufrage sur une île déserte.

Livré à ses méditations, il souffre de son absolue solitude, contre laquelleil lutte en personnifiant les choses qui l'entourent et en s'adressant à un public fictif; pourtant, quand lui est donnéela compagnie de ce qu'il considère être un sauvage, il demeure difficile pour Robinson de sortir de son isolement.

Detelle sorte que, contre tout lieu commun, la présence d'autrui nous évite-t-elle la solitude? La présence de l'autre,de prochain par rapport à soi dans sa dimension d'altérité ou d'identité, permet-elle à l'homme d'échapper au faitnuisible et désagréable d'un isolement physique ou moral? Comment, tout d'abord, autrui nous est-il présent? Les différentes modalités des relations que nous entretenonsavec nos semblables peuvent en effet être à l'origine de sentiments distincts, allant de la joie à la tristesse, pourreprendre la classification de Spinoza.

Tous cependant, s'ils sont solitude (et il s'agira d'explorer la richesse de ceconcept), paraissent devoir être évités à tout prix.

Nous nous demanderons donc en quoi la solitude a un caractèregênant et si elle peut, en effet, être enrayée au contact d'autres consciences.

Ne peut-elle pas, au contraire, s'entrouver accentuée? On devine très clairement l'enjeu sociologique de ce débat; que deviennent nos rapports avec nos semblables,quelle valeur attribuer au fait de la vie sociale si l'incommunicabilité entre les consciences résiste à la présenced'autrui? Cette question risque de déchirer plus d'un coeur romantique, qui rêvent d'une fusion entre deux êtres.Quelle serait une rencontre authentique de l'autre? Plutôt que de fuir incessamment la solitude, peut-être laproblématique morale de notre question exigerait-elle que nous assumions celle-ci.. »

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