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La présence de la mort dans la vie est-elle essentielle à notre bonheur ?

Publié le 11/03/2004

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Ma mort ne m'appartient pas ; elle ne donnera à ma vie son sens définitif que dans la conscience d'autrui qui me jugera. « Être mort, c'est être en proie aux vivants «, écrit Sartre dans L'Être et le Néant (1943).. On pourrait penser que ce caractère imprévisible et totalement extérieur de la mort disparaît dans le suicide. Là du moins, le mortel choisit lui-même le moment et la façon de mourir, à tel point que les stoïciens, notamment Sénèque, voyaient dans la possibilité du suicide le signe même de la liberté de l'homme. Pour Sartre pourtant, la mort ne saurait être une figure de ma liberté. Même dans le cas du suicide, ma mort ne m'appartient pas car le projet du néant est un projet inimaginable, très exactement un anti-projet, un néant de projet. C'est par une sorte d'illusion que le candidat au suicide croit vouloir quelque chose, car du suicide lui-même ne résulte que la fin de tous les projets, de tous les possibles. B. La valeur de la vie. Les philosophies dont nous avons parlé jusqu'à présent opposent radicalement pensée de la vie et pensée de la mort.

La mort est la cessation de la vie, dont elle constitue la négation radicale. Mais si le vivant n'est pas concerné directement par la mort, puisque justement il est vivant, il reste que l'homme, lui, pense déjà avec angoisse à sa mort certaine, quoique future, la présence de la mort devient alors comme l'envers de la vie, le point de repère essentiel par rapport auquel la vie prend un sens et le perd : si je suis mortel, alors je dois profiter de ma vie et m'efforcer de réaliser mon bonheur. Mais quoi que je fasse, cela ne changera rien.  La mort semble alors essentielle à notre bonheur.

« implique un certain risque de mort conscient et assumé.

Celui qui voudrait fuir tous les risques de mort et seréfugierait dans une existence étroite, douillette et calfeutrée, oublierait précisément de vivre.

Finalement, la vie n'ade sens et de prix que parce que nous ne disposons que d'un temps fini, donc susceptible d'être organisé.

Chezl'homme, la conscience d'être mortel n'est pas autre chose qu'une invitation à construire pour autrui et pour soi-même l'existence la plus belle et la plus pleine. C.

La mort comme horizon On ne connaît que la mort, attendue ou accidentelle, des autres.

La mort estcelle des proches ou des inconnus.

Elle est un événement naturel, banal, prisdans l'ordinaire des faits divers quotidiens : "La mort se présente comme unévénement bien connu qui se passe à l'intérieur du monde." Cette banalitéquotidienne des événements se caractérise par l'absence d'imprévu, et lamort comme événement ne déroge pas à la règle.

En revanche, ma propremort est un événement prévu, qui fait l'objet d'une absolue certitude, maiscomme réalité absente, non encore donnée, elle estindéterminée et pour cette raison n'est pas à craindre.

L'expérience memontre qu"'on meurt", c'est-à-dire que la mort concerne avant tout le "on" :tout le monde, et personne en particulier.

Et tant que l"'on meurt", ce n'estprécisément jamais moi qui meurs.

"On", c'est tous, donc pas moi enparticulier.

Dans l'expérience quotidienne de la vie, le "fait de mourir" estramené au niveau d'un événement qui concerne bien la réalité humaine, maiselle advient toujours pour moi par procuration.

Dans la réalité humaine etsociale, la mort est un événement qui relève du domaine public.

A ce titre depseudo-réalité, nous en oublions ses éléments constitutifs : en soi, la mortest un inconditionnel et un indépassable qui fonde la possibilité de ma propreexistence et sa prise de conscience.

Elle est un impensable qui fait le fond dela possibilité de penser mon existence propre : "Le "on" justifie et aggrave latentation de se dissimuler à soi-même l'être pour la mort, cet être possédéabsolument en propre." Quand on dit que la mort n'est "pas encore, pour le moment", on s'accroche à la réalité humaine pour se voiler la certitude que l'on mourra un jour.

On fuit la mort,parce que c'est une pensée fatigante et inaccessible, et que nos soucis quotidiens nous paraissent plus importantsque la réflexion sur le fondement de tout être humain d'être un être pour la fin.

La mort est sans cesse différée, etsa préoccupation laissée à l'opinion générale. « Philosopher c'est apprendre à mourir.

» Montaigne, Essais, 1580-1588. Montaigne prône ici la « pré-méditation » de la mort.

Pour combattre la crainte qu'elle suscite en nous, il fautl'apprivoiser, nous faire à son idée, nous habituer à elle : «N'ayons rien si souvent en tête que la mort », dit-il plusloin. « La préméditation de la mort est préméditation de la liberté.

Qui a appris à mourir, il a désappris à servir.

»Montaigne, Essais, 1580-1588.S'accoutumer à l'idée de notre propre mort, c'est nous libérer de la frayeur qu'elle nous inspire.

Ainsi, apprendre àmourir, c'est proprement nous libérer progressivement de la servitude en laquelle nous tient la crainte de la mort. « Un homme libre ne pense à aucune chose moins qu'à la mort; et sa sagesse est une méditation non de la mortmais de la vie.

» Spinoza, Éthique, 1677 (posth.) « On ne cesse de penser à la mort qu'en cessant de penser.

» Marcel Conche, La Mort et la Pensée, 1973. « Que la mort, l'exil et tout ce qui te paraît effrayant soient sous tes yeux chaque jour; mais plus que tout, lamort.

Jamais alors tu ne diras rien de vil, et tu ne désireras rien outre mesure.

» Épictète, Manuel, vers 130 apr. J.-C. « En s'occupant de philosophie comme il convient, on ne fait pas autre chose que de rechercher la mort et l'étatqui la suit.

» Platon, Phédon, Ive s.

av.

J.-C. « Ce qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, mais les opinions tranchées qu'ils ont sur les choses; par. »

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