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PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA PHYSIQUE EPICURIENNE

Publié le 19/03/2011

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physique

   Permanence de l'être. — Rien ne se crée.    S'il était vrai, en effet, qu'une chose quelconque pût être créée, c'est-à-dire sortir du néant, nous ne verrions pas la nature agir comme elle le fait : n'importe quelle espèce d'êtres pourrait naître indifféremment n'importe dans quel milieu ; on verrait de la mer sortir des hommes, de la terre des poissons ou des oiseaux ; ni pour l'éclosion des fleurs, ni pour la maturité des fruits il n'y aurait de saison déterminée ; aucune durée ne serait exigée pour la croissance des corps : des enfants se transformeraient soudain en hommes. Le travail enfin serait inutile ; le laboureur, qui ouvre péniblement la terre pour y déposer la semence, sait bien que rien ne naît de rien.    Rien ne se perd. Si l'anéantissement de quoi que ce soit était possible, on verrait les corps disparaître soudain et s'évanouir sans laisser de traces ; il est certain que l'eau qui tombe disparaît dans la terre ; mais elle n'est point perdue, puisque à quelque distance elle reparaît dans les sources. Ne croyons donc point que ce qui disparaît à nos sens, cesse absolument d'exister. Si toutes les transformations des choses et des êtres étaient des destructions, l'univers évoluant sans cesse, il y a longtemps que tout serait détruit.    La permanence de l'être, telle est la vérité sur laquelle Épicure insiste au début de sa philosophie. Cet être véritable, permanent, qui n'a pu être créé, et qui ne sera jamais détruit, n'est rien d'abstrait; il est ce qui tombe sous les sens, le corps, la matière.   

physique

« que si l'on admet que la substance de chaque corps est faite de particules trop fines pour être aperçues de nossens, que ces parcelles sont dans un mouvement perpétuel, de telle manière que ce qu'elles abandonnent paraisses'anéantir, ce qu'elles viennent grossir paraisse surgira l'existence.

Ainsi créations, destructions n'auront lieu qu'enapparence; en réalité, il n'y aura que déplacement de particules imperceptibles.

L'hypothèse des atomes est le seulmoyen de comprendre comment il peut se faire à la fois qu'aucun être fini, ni homme, ni animal, ni plante, ni pierre,ni monde, ne soit perpétuel et que cependant l'univers dans son ensemble ne perde pas une parcelle delà réalité quile constitue.

Héraclite a raison : tout périt : cela est vrai des corps composés.

Mais Parménide aussi a raison : toutse conserve, cela est vrai des corps primitifs. On comprend aisément pourquoi il est nécessaire que les corps élémentaires ne deviennent sensibles qu'en masse,mais que chacun d'eux, pris isolément échappe par sa petitesse à nos sens, h la vue aussi bien qu'au toucher.

C'estque rien de ce qui est senti n'est immuable, et que si Épicure commettait l'imprudence de soumette à nos sens lasubstance élémentaire, on aurait bientôt fait de lui montrer des altérations dans cet être prétendu permanent.

Pourle sauver de la destruction, il faut donc qu'il le relègue hors de ce qui constitue proprement le monde sensible, danscette région obscure que n'éclaire point directement la sensation, et qui n'est explorée que par l'induction. Pourquoi faut-il maintenant que les corps élémentaires soient indivisibles, soient des atomes ? Épicure ne peut pasadmettre que la matière soit divisible h l'infini; si, en effet, il n'y avait pas d'éléments indécomposables, rien ne seraitpermanent, et la proposition première serait contredite.

Supposons que la division de la matière aille à l'infini, uncorps serait composé d'autres corps, qui, à leur tour, seraient composés ; ces derniers ne seraient qu'un agrégatdivisible de corps plus petits, qui à leur tour ne seraient qu'un assemblage et ainsi de suite ; de sorte qu'il n'y auraitpas d'éléments ; chaque chose ne serait que composition, assemblage; en définitive, il n'y aurait rien.

Il faut doncadmettre que la division de la matière s'arrête quelque part, et qu'il y a des corpuscules étendus, qui, ne pouvantsubir aucun partage, aucune diminution, passent intacts à travers toutes les transformations possibles. Ainsi les atomes, tout en étant plus petits que tout ce que nous pouvons percevoir, que les grains de poussière, parexemple, que nous voyons voltiger dans un rayon de soleil, pénétrant dans une chambre obscure, ne sont pascependant de dimensions nulles et ne se réduisent pas à des points : le point est une notion géométrique, et,comme toutes les notions géométriques, une notion fausse.

Un point n'a pas de réalité; nous n'avons jamais perçude points : tout ce que nous percevons a quelque dimension.

Sans doute aucun corps de l'ordre de grandeur desatomes n'est jamais tombé directement sous nos sens ; c'est néanmoins sur le modèle des corps qui tombent sousnos sens que nous devons nous figurer les atomes, c'est-à-dire avec des dimensions qui, tout en étant insensibles,puissent être imaginées. Si l'on eût fait à Epicure cette objection qui vient à l'esprit de tous ceux qui étudient sa doctrine, à savoir qu'il y acontradiction à soutenir d'un côté que les corps simples sont indivisibles, et de l'autre qu'ils sont étendus, c'est-à-dire qu'ils ont des parties diversement situées les unes par rapport aux autres, il est probable qu'il ne se fut guèreému, et qu'il eût répondu simplement que c'est s'embarrasser d'une difficulté vaine, d'une difficulté de logicien.N'est-ce pas, en effet, oublier que la nature des choses n'a pas à se plier à nos idées, à nos exigencesintellectuelles, et que c'est au contraire à notre esprit de se conformer à la réalité? Il a été démontré que cettethéorie sur les atomes est indispensable à l'explication du ait le plus constant de notre expérience, la permanencede la matière : d'où la raison tirerait-elle de quoi la condamner, elle qui tout entière dérive des sens? Dire que lesatomes sont divisibles parce qu'ils ont quelque étendue, c'est procéder à priori, c'est raisonner en géomètre.

Sansdoute, à propos de toute étendue, si petite qu'elle soit, nous pouvons en imaginer une division possible; mais dequel droit en conclure que cette division possible abstraitement soit possible naturellement, et devienne jamais unedivision réelle, lorsque toute notre expérience nous montre qu'il y a des corps et que la matière qui les constituereste permanente? Se fier à la raison au point de ne pas tenir compte des données des sens, c'est, au fond, tomberdans une erreur semblable à celle des théologiens : car c'est s'obstiner à croire que l'esprit humain est le centre del'univers, que les choses s'ordonnent suivant ses exigences, et que la nature gravite autour de lui.

Admettrel'existence des atomes est du reste le seul moyen d'éliminer de l'univers toute pensée directrice, toute interventionprovidentielle et de recouvrer par suite la tranquillité d'esprit.

Le repos de l'âme est un bien trop précieux pour qu'onhésite à l'acheter, serait-ce au prix de quelque inconséquence. L'univers est infini : l'espace s'étend à l'infini, le nombre des atomes est infini.

— Presque tous les philosophesanciens admettaient que l'univers est borné ; ils le concevaient pour la plupart comme une sphère régulière, Infinitéleur paraissait synonyme d'imperfection ; fini, sphérique, le monde leur semblait plus beau qu'illimité et dépourvu deforme géométrique.

Épicure est, avec son maître Démocrite, le seul penseur de l'antiquité qui ait proclamé l'infinitéde l'univers. Assurément aucune expérience ne peut décider la question de savoir si l'univers, le tout des choses, est fini ou infini: force nous est ici encore de faire des conjectures, autrement dit, de nous en remettre à la raison.

Mais cesconjectures sur ce qui ne comporte pas l'évidence sensible ne doivent pas être faites d'après une mauvaiseméthode, c'est-à-dire d'après nos idées de beauté, en définitive d'après nos préférences personnelles ; elles doiventse conformer aux faits de l'expérience.

Or toutes les fois que nous percevons un objet fini, cet objet se trouveencadré par d'autres corps qui le limitent ; ceux-ci à leur tour ne sont finis que parce qu'au delà de l'étendue qu'ilsoccupent s'étend un autre espace occupé par de nouveaux corps, et ainsi de suite.

Jamais il ne nous est arrivé derencontrer l'extrémité de l'espace.

Pourquoi dès lors supposer que cette extrémité existe quelque part dans l'univers,à une distance plus ou moins grande de nous? Aucun fait n'autorise une semblable induction.

Toutes nosexpériences au contraire nous habituent à étendre après une étendue une autre étendue qui l'enveloppe, et après. »

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