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Y a-t-il un progrès dans l'art ?

Publié le 08/02/2004

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Ainsi comprises, les oeuvres d'art ne sont plus d'inégales réalisations d'une même intention mais chacune est le témoignage d'une subjectivité singulière. L'oeuvre concentre sa valeur artistique dans ce qui, en elle, échappe aux finalités conscientes de son auteur. L'art nous propose donc une collection d'objets singuliers qui ne trouvent leur justification artistique qu'en eux-mêmes, plus exactement dans leur capacité à éveiller en nous un certain sentiment esthétique. Chaque oeuvre est unique. Il est donc impossible de parler de progrès en art dès lors qu'on admet qu'une oeuvre d'art ne répond ni à une fonction ni à un quelconque projet, qu'elle enveloppe une pluralité de sens et que sa valeur artistique réside précisément dans cette indétermination qui libère notre imagination.

B. Le progrès comme acheminement vers le singulier

Pourtant n'est-il pas possible d'envisager la possibilité d'un progrès dans l'itinéraire créateur d'un artiste ? Les oeuvres de jeunesse sont en effet encore bien souvent sous l'emprise de modèles préexistants. À mesure que s'approfondit le travail créateur, l'oeuvre exprime de manière de plus en plus originale les orientations fécondes dont elle est porteuse. Un artiste peut donc progresser vers une expression plus nette de sa singularité.

L'art progresse en utilisant de nouvelles techniques. Par exemple, c'est avec la Renaissance italienne que la peinture figurative maîtrise les techniques qui permettent de rendre compte de la profondeur (perspective). Toutefois, on peut penser que l'art ne progresse pas mais qu'il évolue et qu'il vise toujours un même et unique but: l'incarnation de la beauté.

« 3.

Le progrès des arts vers leur autonomie A.

Art et religionL'art a longtemps été étroitement lié à la religion.

Sa fonction était alors illustratrice : il s'agissait seulement detranscrire, représenter, visualiser des vérités consignées dans des textes sacrés ou transmises par tradition orale.L'artiste, dans ce contexte, ne se représente pas comme un créateur mais comme un simple artisan.

Le sculpteurégyptien de l'époque pharaonique par exemple s'efforce de respecter dans la composition de ses statues desproportions fixées par la tradition.

L'observation scrupuleuse de ces canons garantissait au commanditaire dedisposer avec cette statue d'un double l'assurant d'une vie après la mort.

La statuaire égyptienne ne vise donc pasl'originalité ; au contraire, sa fonction funéraire, presque liturgique, suppose qu'elle soit parfaitement conforme à desnormes sacrées et immuables.

Subordonné à la religion, l'art se réduit à n'être qu'une technique illustratrice, voiredécoratrice.

On attend de lui qu'il donne une forme sensible à des vérités qui s'adressent au coeur ou à l'esprit. B.

L'émancipation naturalisteLa problématique grecque de l'imitation de la nature représente une émancipation majeure de l'art vis-à-vis de latutelle religieuse.

Il ne s'agit plus de mettre en images des récits, des légendes, des mythes mais de restituer lanature, celle-là même que nous percevons et à laquelle nous appartenons.

En s'assignant sa propre fin, l'art déclareson indépendance.

En fixant cette fin dans l'imitation des formes naturelles, il se donne comme domaine propre lesformes sensibles, le visible, le perceptible.

Son travail ne consiste plus à traduire de la pensée en images mais àconvertir des images en images : plus exactement, à élaborer des images à partir du perçu.

Nous avons relevénéanmoins que cette problématique naturaliste revenait encore à assimiler l'art à une tâche technique dont lacomposante créatrice était donc encore nettement méconnue.

Il faut attendre la crise de l'art classique et de lanorme figurative pour que l'art acquière sa pleine autonomie. C.

L'art pour l'artL'art devient enfin conscient de lui-même et de la singularité de sa tâche quand il renonce à son statut detechnique.

Une activité finalisée se justifie toujours par la fin qu'elle vise.

L'art cesse donc de pouvoir se justifier dèslors qu'il perd son statut artisanal et qu'il est pratiqué pour lui-même.

En tant que processus créateur, il assume soncaractère aveugle : l'artiste devenu majeur ne sait ni où il va ni ce qu'il fait ; son oeuvre ne trouve plus sajustification ailleurs que dans les faveurs d'un large public.

Il témoigne en cela que sa création est en prise avec laculture de son peuple, peut-être même avec une sensibilité universelle.

L'art a donc conquis son autonomie, àl'époque moderne, grâce à la constitution d'un public de l'art.Mais n'est-ce pas là pour lui une nouvelle dépendance ? Le travail de l'artiste le pousse en effet à dépasser uneculture artistique dont il est forcément imprégné.

L'exploration par l'art de voies nouvelles, en rupture avec lesorientations esthétiques dominantes de l'époque, écarte la création de la reconnaissance sociale.

Les oeuvres del'art émancipé ne répondent pas forcément aux attentes du public.

Le sens et la valeur de l'oeuvre « avant-gardiste» ne sont alors plus très clairs aux yeux de l'homme du commun.

Le public de l'art tend à se restreindre au cercle despécialistes ou d'érudits.

L'art n'acquiert-il pleinement son autonomie qu'en s'affranchissant du grand public ? Oubien doit-il au contraire rester soucieux d'une légitimation par un public aussi large que possible pour préserver sonexistence autonome ? L'avant-garde n'a sans doute d'avenir qu'à la condition de pouvoir être rejointe par la société: les grandes oeuvres ne parviennent-elles pas précisément à créer leur public et à renouveler ainsi les orientationsesthétiques socialement dominantes ? L'art pour l'art - La lutte contre la fin en l'art est toujours une luttecontre les tendances moralisatrices dans l'art, contre la subordination del'art à la morale.

L'art pour l'art veut dire : « Que le diable emporte lamorale ! » - Mais cette inimitié même dénonce encore la puissanceprépondérante du préjugé.

Lorsque l'on a exclu de l'art le but demoraliser et d'améliorer les hommes, il ne s'ensuit pas encore que l'artdoive être absolument sans fin, sans but et dépourvu de sens, en unmot, l'art pour l'art - un serpent qui se mord la queue.

"Être plutôt sansbut, que d'avoir un but moral!" : ainsi parle la passion pure.

Unpsychologue demande au contraire: que fait toute espèce d'art ? Neloue-t-elle point ? Ne glorifie-t-elle point ? N'isole-t-elle point ? Avectout cela l'art fortifie ou affaiblit certaines évaluations...

N'est-ce làqu'un accessoire, un hasard? Quelque chose à quoi l'instinct de l'artistene participerait pas du tout ? Ou bien la faculté de pouvoir de l'artisten'est-elle pas la condition première de l'art ?L'instinct le plus profond de l'artiste va-t-il à l'art, ou bien n'est-ce pasplutôt au sens de l'art, à la vie, à un désir de vie ? - L'art est le grandstimulant de la vie: comment pourrait-on l'appeler sans fin, sans but,comment pourrait-on l'appeler l'art pour l'art ? NIETZSCHE Situation. Nietzsche s'est toujours intéressé aux questions de l'art: aussi bien dans son interrogation sur la « Naissancede la tragédie » (1872) que sur l'oeuvre musicale de Wagner qui l'a tant fasciné et dont il a tant de mal, dans. »

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