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A quelle conditions une démarche est-elle scientifique ?

Publié le 10/01/2004

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scientifique

La référence à «la science« est devenue, pour la société moderne, si fréquente qu'elle peut générer un nouvel argument d'autorité: dans un débat, prétendre que l'on s'appuie sur des données «scientifiques« peut suffire pour que l'adversaire se tienne coi, sans chercher à en savoir davantage. Or la démarche scientifique suppose un certain nombre de règles, et il est fréquent que l'on attribue à des discours peu scrupuleux une scientificité dont ils sont en fait dépourvus. C'est pourquoi il importe, intellectuellement et même déontologiquement, de préciser à quelles conditions une démarche est en effet scientifique.

 Quelles sont les caractéristiques de la démarche scientifique ? Quels en sont les critères ? A quoi reconnaît-on une science ? Il s'agira de définir la méthode de toute démarche scientifique, son objet, son but. On pourra la distinguer des autres modes d'approche du réel, des autres types de rationalité. On posera egalement la question de la relativité de la connaissance scientifique.

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« [III.

Activité de l'esprit] Un esprit soumis à la perception ne peut qu'opérer des déductions consistant à généraliser à partir, non dephénomènes significatifs, mais de faits éventuellement anecdotiques ou marginaux, qui ne peuvent révéler la loi quiles détermine.

Ce n'est donc qu'à partir du moment, comme le rappelle Kant, où l'esprit pose, relativement aux phénomènes de la nature, des questions précises et « locales », qu'ilcommence à adopter une attitude scientifique.En restant soumis à la perception, on suppose(c'est ce qu'admettait Aristote)que la nature peut se dévoiler de son propre mouvement à la raison, qui n'aplus alors qu'à classer et organiser les informations qu'elle en reçoit.

Il enrésulte de fausses théories, comme pouvaient l'être l'astronomie antique, oula conception des « lieux propres » — vers chacun desquels un corps estspontanément porté à revenir — d'Aristote.Pour que la démarche scientifique s'affirme, on doit au contraire supposer qu'iln'y a pas coïncidence ou concordance entre l'apparence et le fonctionnementsous-jacent et, de plus, qu'un phénomène naturel ne révèle sonfonctionnement (la loi à laquelle il obéit) qu'à la condition qu'on l'interroged'une certaine façon.

Il n'y a plus, dès lors, de complicité entre la nature et laraison, et il s'agit de mettre en oeuvre une expérimentation qui amène la nature à répondre aux questions que l'esprit scientifique lui pose.Dès lors, la démarche scientifique est synonyme de démarche expérimentale:comme l'a montré Claude Bernard, elle formule une hypothèse après uneobservation questionnante, et vérifie son « explication anticipée » par unmontage expérimental qui reproduit le phénomène à expliquer en en maîtrisantles causes.

Là encore se marque une différence notable relativement auxpseudo-sciences, qui sont incapables d'expérimenter, et ne diffusent leurs«connaissances» qu'en faisant état d'observations généralement invérifiables, puisque révélant des phénomènes par nature exceptionnels. [IV.

Rapport mouvant à la vérité] Toute démarche scientifique espère découvrir, élaborer des vérités.

Mais sa relation à la vérité est assezparticulière, et la distingue également d'autres attitudes.Pour une démarche scientifique, aucune vérité, même la mieux établie ou la mieux vérifiée, ne peut en effet êtreadmise comme définitive.

Le scientifique développe son travail dans un domaine qui a déjà une histoire, et celle-cil'avertit de l'évolution des concepts, des lois et des théories.

Cela signifie, d'une part, que le réel n'a pas encorelivré tous ses secrets, et ne les livrera sans doute jamais — c'est-à-dire qu'il convient de ne pas confondre véritéscientifiquement établie et réalité.

Mais, d'autre part, cela indique que la vérité à découvrir risque de ne pas êtreéternelle, et sera à plus ou moins Loing terme remplacée par une autre formulation, plus complète ou plus précise.Plus elle progresse, plus la science enseigne à relativiser ses vérités: les lois de Newton nous apparaissentdésormais comme valides à une certaine échelle, au-delà de laquelle il convient de prendre appui sur la théorie de larelativité.La démarche scientifique est, ainsi,àla fois ambitieuse et modeste.

L'ambition anime le désir de faire progresser laconnaissance.

La modestie réside dans la conscience que toute nouvelle avancée du savoir, même si elle sembleimportante, est condamnée à n'être que temporaire. [Conclusion] Une démarche scientifique, en raison de ses conditions historiques de possibilité, ne peut être totalitaire oudogmatique.

Elle doit en effet se connaître comme inscrite dans le développement en cours d'une science, et elle nepeut prétendre remplacer tous les discours.

Car la science est, par définition, limitée à l'examen des faits.

Dès quedes questions dépassent ses compétences(comme c'est le cas avec les problèmes relevant de la métaphysique), lesdémarches scientifiques laissent le champ libre à d'autres attitudes de l'esprit.

Mais il reste possible à la science decritiquer celles-ci lorsqu'elles prennent l'aspect de pseudo-sciences et usurpent une respectabilité à laquelle ellesn'ont pas droit.. »

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