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Quelle différence y a-t-il entre l'individu et la personne ?

Publié le 07/04/2009

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individu

  • Observation. — Les deux termes individu et personne, ou individualité et personnalité, sont encore souvent confondus par certains auteurs (par exemple, G. Gurvitch, Vocation actuelle de la Sociologie, éd. 1950, p. 26 : « Philosophes, juristes... se plaisaient à traiter de l'individu (ou de la personne humaine) d'une part, de l'autre de la « société « (ou de la « collectivité «) comme s'il s'agissait d'entités abstraites «), ce qui entraîne, comme on le verra, de multiples confusions d'idées. Le parler courant manifeste un sens plus sûr de la langue. Un journal, relatant un cambriolage, n'écrit pas « Une personne s'est introduite dans l'appartement de M. X... «, mais : « Un individu... «, et, rendant compte d'une cérémonie, il ne dit pas : « Les individualités officielles... «, mais : « Les personnalités officielles... «

 

  • Position de la question. Les termes individu et personne ne sont pas équivalents, et le langage courant, en général, ne les emploie pas comme tels. Il y a entre eux une différence, non seulement de sens, mais de valeur, que nous allons essayer de préciser.

 

individu

« A.

— Si nous abordons maintenant la notion de personne, nous voyons qu'elle s'applique à un domaine beaucoupplus restreint que la notion d'individu.

A vrai dire, elle ne s'applique que dans le domaine humain, psychologique ousocial.

En parlant d'un individu, on pourra parler de « personne physique » en désignant par là son corps, mais à lacondition que ce corps soit « considéré comme manifestation de sa personne morale...

Le mot de personne, mêmeau sens physique, ne pourrait pas s'appliquer au corps d'un animal » (LALANDE, Vocabulaire, p.

759).

Les groupeshumains peuvent avoir une personnalité collective.

On parle, en droit, à propos des groupes comme des individus, depersonnalité civile et de personnalité juridique. B.

— Si maintenant nous essayons de définir cette notion de personne, nous retrouvons les mêmes caractères queceux de la notion d'individu, mais transposés sur un tout autre plan.

«La personnalité, c'est une individualité qui sepense et qui se réfléchit» (Parodi in LALANDE, ibid., p.

502).

— 1° Comme l'individu, la personne est un être concretet, lorsqu'on attribue la personnalité à des groupes, c'est précisément qu'on les considère comme des réalitésconcrètes.

Mais ce caractère concret est ici celui de la conscience, des réalités spirituelles elles-mêmes.

— 2° Lapersonne implique aussi une certaine unité qui, comme dans le cas de l'individu, n'exclut pas quelque multiplicité.Mais « la personnalité s'oppose à l'individualité comme l'unité intérieure de la conscience et de la réflexion à l'unitéextérieure qui ne vient que de l'organisme ».

Comme l'observe fort justement LALANDE (Vocabulaire, p.

503), il y amême, sous ce rapport, un certain antagonisme entre l'un et l'autre.

« L'organisation du type physiologique, fût-elleparfaite et consciente, ne créerait aucune personnalité; au contraire, quand celle-ci se développe, la vie organiques'en trouve refoulée et même épuisée à certains égards.

» En ce sens, l'unité personnelle n'est pas une donnéecomme l'unité organique; c'est une oeuvre à faire et qui relève de cette activité de synthèse qui est la forme la plushaute de l'activité psychique.

Le sujet, écrit LE SENNE, mérite le nom de personne quand il apparaît « qu'il est lemaître et non l'esclave de ce qui lui est donné ».

— 3° L'identité personnelle appelle les mêmes remarques.

C'estd'abord une identité consciente : « Ce qui fait la personnalité, c'est la conscience nette de soi comme d'un être quidure et qui s'attribue quelque identité » (PArodi, loc.

cit.).

Mais il y a plus : c'est une identité voulue, celle d'un êtrequi entend rester fidèle à lui-même et persévérer dans le rôle qu'il a assumé.

— 4° Enfin la personnalité implique,comme l'individualité, une certaine originalité.

C'est même en ce sens qu'on emploie souvent le terme (et aussil'adjectif personnel) avec une intention laudative quand il s'agit d'une façon de penser, d'une oeuvre littéraire ouartistique.

Il importe d'observer toutefois que cette originalité de la personne s'exprime surtout dans l'interprétationqu'elle donne à certaines valeurs de communauté : « Ce qu'il y a de plus caractéristique dans l'opposition dupersonnel et de l'individuel », écrit LALANDE (ouv.

cité, p.

504), c'est « la conscience que prend le moi, non de sonrapport à lui-même, mais de son rapport à ses semblables ».

Ici « conscience et rapport à soi ne suffisent pas...

Il yfaut de plus la raison, c'est-à-dire la communauté dans la vie de l'esprit ».

En ce sens, la personnalité est « laréalisation, chez des êtres primitivement divers, de dispositions virtuellement universelles » C.

— Nous arrivons ici au point essentiel.

S'il est faux que le social soit immanent à l'individuel, il est parfaitementvrai, en revanche, qu'il est un des éléments constituants de la personnalité, c'est-à-dire de l'individualité modelée,transformée, élevée précisément à un niveau supérieur par la vie en groupe.

On a pu montrer que la formation de lapersonnalité chez l'enfant est fonction à la fois du rapport avec autrui et de l'action du groupe social.

Psychologueset philosophes sont tous d'accord aujourd'hui pour reconnaître que la vie en société, loin de briser la personnalité,comme on le disait autrefois, est le principal agent de l'élévation de l'individu à la dignité de personne, à la fois par ladiscipline qu'elle lui impose et par le fait qu'elle l'initie aux grands idéaux qui constituent la vie spirituelle del'humanité.

— Ce serait toutefois une erreur de soutenir, avec certains sociologues, que la personnalité estpurement et simplement « un produit social ».

D'abord, ainsi que nous l'avons déjà signalé, sous la personnalitéproprement dite, il demeure toujours un certain « fonds d'individualité » irréductible.

D'autre part, la personnalitévraie ne se réduit pas au personnage; elle est une synthèse originale qui est, en partie, notre oeuvre propre et quidépasse aussi bien le social que le biologique ou l'individuel.

C'est d'ailleurs précisément parce qu'elle est cela que lapersonnalité représente une valeur morale que ne possède pas l'individualité.

Un être est une personne quand il s'estélevé à un degré de discernement moral tel qu'il n'est plus ni le jouet de ses impulsions organiques ni le simple refletde son milieu social, de telle sorte qu'il peut être tenu pour responsable de ses actes. Conclusion .

On voit quel danger il y aurait à confondre individu et personne.

Ce serait confondre deux niveaux très différents de la vie psychique et, par suite, de la vie morale. « SOCRATE, proclame ALCIBIADE, dans Le Banquet de PLATON, est tout à fait semblable à ces silènes exposés auxdevantures : les artistes les représentent avec des syrinx et des flûtes, mais lorsqu'on les ouvre, ils se révèlentintérieurement garnis de figurines de dieux.

Ainsi en est-il de l'homme en général : certains penseurs limitent leurétude à son corps et aux phénomènes physiologiques qui en dépendent; d'autres s'attachent plutôt à expliquer enlui l'esprit et le domaine intérieur qui s'y rattache.

N'est-ce pas cette dualité de points de vue qui a frappé lesphilosophes contemporains lorsqu'ils opposent la notion de personne à celle d'individu ? Opposition nouvelle entre. »

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