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Quelle est la nature du plaisir procuré par l'oeuvre d'art ?

Publié le 26/01/2004

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Ainsi, la commodité d'une maison, la fertilité d'un champ, la puissance d'un cheval ou le bon tonnage, la sécurité et la rapidité d'un vaisseau, constituent les beautés principales de ces différents objets. Ici, l'objet que l'on nomme beau ne plaît que par sa tendance à produire un certain effet. Cet effet est le plaisir, ou le profit, de quelque autre personne. Or, le plaisir d'un étranger pour lequel nous n'avons pas d'amitié nous plaît seulement par sympathie. C'est, par conséquent, à ce principe qu'est due la beauté que nous trouvons à tout ce qui est utile. Il apparaîtra aisément, après réflexion, combien ce principe joue pour une part considérable dans la beauté. À chaque fois qu'un objet tend à donner du plaisir à son possesseur, ou, en d'autres termes, quand il est la cause véritable du plaisir, il est sûr de plaire au spectateur, par une sympathie délicate avec le possesseur. On juge belles la plupart des oeuvres d'art en proportion de leur adaptation à l'usage de l'homme, et même beaucoup des productions de la nature tirent leur beauté de cette source. Dans la plupart des cas, élégant et beau ne sont pas des qualités absolues mais relatives, et ne nous plaisent par rien d'autre que leur tendance à produire une fin qui est agréable. II.

Le plaisir est promoteur du jugement de goût. Et comprendre le plaisir, cette sensation de proximité du sujet à l’œuvre qu’il contemple, c’est tenter de démêler les nœuds qui causent ce type de procuration particulière. L’œuvre d’art répond à des codes, tout comme sa réception ; ainsi, peut-on voir dans le plaisir esthétique la réponse positive à un schéma affectif engrangé par de multiples facteurs ?      

« Introduction Le plaisir est promoteur du jugement de goût.

Et comprendre le plaisir, cette sensation de proximité du sujet à l'œuvre qu'il contemple, c'est tenter dedémêler les nœuds qui causent ce type de procuration particulière.

L'œuvre d'art répond à des codes, tout comme sa réception ; ainsi, peut-on voir dans leplaisir esthétique la réponse positive à un schéma affectif engrangé par de multiples facteurs ? I.

L'œuvre d'art inspire le sacré.

a.

On ne peut ramener tout le sacré à l'être en tant que tel.

L'expression de l'intelligible dans le sensible ne peut suffire à faire de l'œuvre d'art quelque chose de sacré.

Heidegger pense que l'œuvre d'art est dévoilement de la vérité de la chose.

L'œuvre installe un monde, ce n'est pas elle qui est installée. L'œuvre rayonne, elle a une aura.

Ce qui enlève le sacré de l'œuvre d'art, c'est « l'ici et le maintenant » de la véritableprésence de l'œuvre d'art.

Il se fait souvent un silence quasi religieux face à une œuvre d'art digne de ce nom.

Al'exemple du romantisme qui a voulu rénover le sentiment religieux, la peinture de Caspar David Friedrich, Le retable de Tetschen , peinture de paysage représentant un C hrist sur une montagne éclairée par le soleil.

Une œuvre d'art ne mérite pas un discours mais une prière car la contemplation d'une peinture élève notre âme vers Dieu.

La contemplationesthétique est une expérience intime d'union avec l'esprit du C réateur.

Cette pensée qu'on pourrait appliquée au Retable exprime ce désir d'union de la nature, de l'art et de la religion en vue d'une certaine totalité.

O n admire donc dans l'œuvred'art cette capacité de l'artiste à exprimer la sacralité, à exprimer le divin, et la puissance spirituelle qui se dégage desœuvres d'art par le simple emploi de techniques pourtant purement matérielles.

II.

Plaisir désintéressé ou pathologique ? a.

Le beau n'est ni le beau, ni l'agréable, ni l'utile (Kant, Critique de la faculté de juger , § 5) : L'agréable, pour Kant, est pathologique.

Cela signifie que le sujet qui éprouve l'agréable est soumis à une satisfaction conditionnée par desexcitations qui ne relèvent que de lui (caractère subjectif ; inclination).

Le bon, quant à lui, caractérise « une puresatisfaction pratique », satisfaction conditionnée en ce sens que le sujet voit un lien existant entre lui et l'objet.

C ela nepeut tenir lieu d'un jugement de goût pour l'auteur, puisque « le jugement de goût est seulement contemplatif ; c'est un jugement qui, indifférent à l'existence de l'objet, ne fait que lier sa nature avec le sentiment de plaisir et de peine ».

Lejugement de goût ne se base pas sur des concepts, il n'est pas un jugement issu d'une connaissance théorique oupratique.

Ainsi, « Chacun appelle agréable ce qui lui fait plaisir, beau ce qui lui plait simplement ; bon ce qu'il estime,approuve, c'est-à-dire ce à quoi il attribue une valeur objective ».

L'agréable se retrouve même chez les animaux (unecaresse ou un os pour un chien).

Mais la beauté est propre à l'homme, et la satisfaction « du goût pour le beau est seuleune satisfaction désintéressée et libre ; en effet, aucun intérêt, ni des sens, ni de la raison, ne contraint l'assentiment ».

L'homme est libre pour la beauté . L'intérêt ne peut permettre au jugement d'être libre sur la beauté d'un objet.

b.

Don Q uichotte entretient un rapport pathologique aux livres, et notamment avec les romans de chevalerie.

En effet, ces romans de chevalerie le conduisent à vouloir être chevalier à son tour, et à partir avec Sancho en quête d'aventures.

La pathologie de Don Quichotte c'est qu'il interprète leséléments du réel (objets, événements) à l'aide d'une « grille romanesque », en ajoutant par conséquent à la vie réelle des éléments inventés, fantasmés, queDon Quichotte aurait voulu voir réellement exister.

C'est comme si les œuvres fictionnelles ne lui suffisaient plus pour s'évader du monde réel qui necoïncide pas avec ses désirs.

C'est comme si elles ne lui suffisaient plus pour oublier le temps d'une œuvre que le principe de réalité contreditnécessairement le principe de plaisir.

C 'est comme si sans arrêt il avait besoin d'œuvres d'art, de fictions, pour sans arrêt compenser, défouler ses désirs,satisfaire ses phantasmes.

La nouvelle de Cervantès tourne ainsi en dérision le danger mis au jour par Platon, danger qui consiste à se complaire dans les contextes fictionnels dans lesquels on peut s'adonner à des émotions illicites, et même à fantasmer, à changer la réalité pour être en mesure de s'adonnerde manière optimale à ces émotions.

Dans la nouvelle, les interprétations du réel que Don Quichotte fait à l'aide d'une grille romanesque qui est le pur fruitde son phantasme, sont nécessairement fautives et l'entraînent à commettre des actions déplacées.

P laton dirait que ces œuvres flatteuses par rapport ànos désirs refoulés nous empêchent d'être bien adaptés à notre réalité.

La plus célèbre de ces mauvaises interprétations du réel que fait le « fictio-pathe »(fiction pathologique) est le fameux combat contre les moulins à vent.

Cette scène comique prend appui sur une mauvaise identification d'objets réels : ilprend des moulins pour des géants avec lesquels il pourra se battre.

Don Quichotte veut être héroïque comme le héros des romans qu'il lit.

M ais il faut desoccasions pour être un héros.

Il la fantasme : il transforme des moulins en géants qu'il faut combattre.

III.

Un plaisir contrasté : l'exemple du tragique a.

Freud retrouve la problématique aristotélicienne : si les fantasmes ne peuvent que faire éprouver de la honte au rêveur éveillé, d'où vient cependant que nous éprouvions un grand plaisir en assistant au spectacle tragique ? C'est d'abord pour Freud un problème d' ars poetica et il s'en explique dans un article de 1908, « La Création littéraire et le rêve éveillé ».

L'artiste est celui qui atténue le caractère égotique du rêve diurne au moyen de changements et de voiles ; il nous séduit ainsi par plaisirpurement formel, c'est-à-dire par plaisir esthétique, forme enrobante de la représentation du fantasme.

C 'est là ce queFreud appelle « prime de séduction » ou « plaisir préliminaire », plaisir d'une étrange espèce fait pour permettre lalibération d'une jouissance supérieure : « La véritable jouissance de l'œuvre provient de ce que notre âme se trouve parelle soulagée de certaines tensions.

» Peut-être est-il possible, à la lumière de cette analyse freudienne, de réduirel'ambiguïté de la notion de « catharsis » : la contemplation esthétique relève à la fois de la purification et de la purgation ;la catharsis est purification au niveau du plaisir préliminaire puisque le spectacle tragique opère la métamorphose internede certaines émotions à la faveur de l'art du créateur lui-même, et, du même coup, le spectacle est spectacle avant qued'être tragique ; mais la catharsis est aussi purgation au niveau de la véritable jouissance dès lors que la communications'établit avec le sens fondamental de la tragédie et que le spectateur peut ainsi, comme en contrebande, frayer unpassage au « retour du refoulé », et, du même coup, le spectacle est tragique avant que d'être spectacle.

La création et lacontemplation esthétiques s'inscrivent dans la même ligne que le rêve ou le mot d'esprit ; elles sont continuation etsubstitut du jeu enfantin d'autrefois, elles fournissent une prime de séduction qui permet la libération d'un taux biensupérieur de plaisir, émanant des sources psychiques les plus profondes.

Toutefois, note Freud, seul l'artiste, qui s'estdétourné de la réalité pour un monde de fantasmes où ses désirs insatisfaits reçoivent une imaginaire satisfaction, sait seservir de ses dons pour revenir à la réalité en créant des œuvres capables de provoquer chez autrui des émotionscorrespondantes.

Conclusion Le plaisir, comme mesure du jugement, n'est pas toujours réellement saisi par celui qui le ressent.

Partant d'un sentiment profond du sacré, oureconnaissant l'empreinte conceptuelle qui confère à l'œuvre toute se teneur artistique, on ne peut pour autant comprendre vraiment ce qui motive notreplaisir.

Dès lors, on entend bien la conception freudienne du plaisir esthétique qui émerge relativement à des éléments infra-conscients, et ce devant desœuvres prêtes à favoriser la régulation émotive.. »

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