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Querelle de plaideurs. (Les Plaideurs, acte I, sc. vii.) de RACINE

Publié le 22/06/2011

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racine

CHICANEAU Voici le fait. Depuis quinze ou vingt ans en çà, Au travers d'un mien pré certain ânon passa, S'y vautra, non sans faire un notable dommage, Dont je formai ma plainte au juge du village. Je fais saisir l'ânon. Un expert est nommé, A deux bottes de foin le dégât estimé. Enfin, au bout d'un an, sentence par laquelle Nous sommes renvoyés hors de cour. J'en appelle. Pendant qu'à l'audience on poursuit un arrêt, (Remarquez bien ceci, madame, s'il vous plaît,) Notre ami Drolichon, qui n'est pas une bête, Obtient pour quelque argent un arrêt sur requête. Et je gagne ma cause. A cela que fait-on? Mon chicaneur s'oppose à l'exécution. Autre incident : tandis qu'au procès on travaille, Ma partie en mon pré laisse aller sa volaille Ordonné qu'il sera fait rapport à la cour Du foin que peut manger une poule en un jour : Le tout joint au procès enfin, et toute chose Demeurant en état, on appointe la cause Le cinquième ou sixième avril cinquante-six. J'écris sur nouveaux frais. Je produis, je fournis De dits, de contredits, enquêtes, compulsoires, Rapports d'experts, transports, trois interlocutoires, Griefs et faits nouveaux, baux et procès-verbaux. J'obtiens lettres royaux, et je m'inscris en faux. Quatorze appointements, trente exploits, six instances, Six-vingts productions, vingt arrêts de défenses, Arrêt enfin. Je perds ma cause avec dépens, Estimés environ cinq ou six mille francs. Est-ce-là faire droit? est-ce là comme on juge? Après quinze ou vingt ans! Il me reste un refuge : La requête civile est ouverte pour moi, Je ne suis pas rendu. Mais vous, comme je voi, Vous plaidez. LA COMTESSE Plût à Dieu! CHICANEAU J'y brûlerai mes livres. LA COMTESSE Je... CHICANEAU Deux bottes de' foin cinq à six mille livres! LA COMTESSE Monsieur, tous mes procès allaient être finis Il ne m'en restait plus que quatre ou cinq petits : L'un contre mon mari, l'autre contre mon père, Et contre mes enfants. Ah! monsieur, la misère! Je ne sais quel biais ils ont imaginé, Ni tout ce qu'ils ont fait ; mais on leur a donné Un arrêt par lequel, moi vêtue et nourrie, On me défend, monsieur, de plaider de ma vie. CHICANEAU De plaider? LA COMTESSE De plaider. CHICANEAU Certes, le trait est noir. J'en suis surpris. LA COMTESSE Monsieur, j'en suis au désespoir. CHICANEAU Comment! Lier les mains aux gens de votre sorte Mais cette pension, madame, est-elle forte? LA COMTESSE Je n'en vivrais, monsieur, que trop honnêtement: Mais vivre sans plaider, est-ce contentement? CHICANEAU Des chicaneurs viendront nous manger jusqu'à l'âme, Et nous ne dirons mot! Mais, s'il vous plaît, madame, Depuis quand plaidez-vous? LA COMTESSE Il ne m'en souvient pas; Depuis trente ans au plus. CHICANEAU Ce n'est pas trop. LA COMTESSE Hélas! CHICANEAU Et quel âge avez-vous? Vous avez bon visage. LA COMTESSE Hé! quelque soixante ans. CHICANEAU Comment! c'est le bel âge Pour plaider. LA COMTESSE Laissez faire : ils ne sont pas au bout. J'y vendrai ma chemise, et je veux rien ou tout.

(Les Plaideurs, acte I, sc. vii.)

QUESTIONS D'EXAMEN

I. — L'ensemble; — le fond. — Une amusante satire des plaideurs, personnifiés par Chicaneau et la comtesse de Pimbesche. Dans quel lieu se trouvent Chicaneau et la Comtesse ? De quoi s'entretiennent-ils en attendant le juge? N'est-il pas conforme à la réalité de la vie que ces deux personnages, fort animés l'un et l'autre, et dont l'esprit est absorbé par une pensée dominante, se confient mutuellement leurs ennuis? Ne se peignent-ils pas eux-mêmes, — à leur insu ? Racine nous présente deux plaideurs : se ressemblent-ils de tout point ? Dites en quoi ils diffèrent ; Que trouvez-vous de particulièrement amusant dans le langage de Chicaneau ? — dans le langage de la Comtesse?

II. — L'analyse de la scène. — Distinguez les différentes parties de la scène : Le procès de Chicaneau; b) Le désespoir de la Comtesse; Indiquez les principales péripéties du procès (marquer l'ordre suivi par Chicaneau dans son exposé); Quel effet produit l'interminable énumération des écritures nécessitées par le procès ? Cette longue et imposante procédure est-elle en rapport avec le dommage causé ? De quoi se plaint la Comtesse? Quels vous paraissent être les caractères du dialogue entre les deux plaideurs ?

III. — Le style; — les expressions. — Montrez que chacun des personnages s'exprime dans un langage approprié à son caractère : Chicaneau parle le langage du palais, avec son vocabulaire spécial et ses archaïsmes (vingt ans en cà, — un mien pré, etc.); la Comtesse, désespérée de ne plus pouvoir plaider, se sert d'expressions indignées; La Comtesse dit qu'il ne lui restait plus que « quatre ou cinq petits procès « : de quels procès veut-elle parler? (souligner l'ironie du mot); Quel sentiment traduit l'exclamation de Chicaneau : De plaider ? Quel est le sens de lier, dans l'expression : « Lier les mains aux gens de votre sorte! « Justifiez le nom de Chicaneau donné au plaideur par Racine; — indiquez quelques mots de la même famille.

IV. — La grammaire. — Trouvez un synonyme de dégâts, —de sentences; Indiquez un dérivé de expert, — de procès, — de rapport; 30 Nature et fonction de chacun des mots suivants : Hé! quelque soixante ans.

Rédaction. — Des contestations surviennent entre deux voisins au sujet d'un mur mitoyen. Un procès s'engage : indiquez-en les principales péripéties, les conséquences.

racine

« Je n'en vivrais, monsieur, que trop honnêtement:Mais vivre sans plaider, est-ce contentement?CHICANEAUDes chicaneurs viendront nous manger jusqu'à l'âme,Et nous ne dirons mot! Mais, s'il vous plaît, madame,Depuis quand plaidez-vous?LA COMTESSEIl ne m'en souvient pas;Depuis trente ans au plus.CHICANEAUCe n'est pas trop.LA COMTESSEHélas!CHICANEAUEt quel âge avez-vous? Vous avez bon visage.LA COMTESSEHé! quelque soixante ans.CHICANEAUComment! c'est le bel âgePour plaider.LA COMTESSELaissez faire : ils ne sont pas au bout.

J'y vendrai ma chemise, et je veux rien ou tout. (Les Plaideurs, acte I, sc.

vii.) QUESTIONS D'EXAMEN I.

— L'ensemble; — le fond.

— Une amusante satire des plaideurs, personnifiés par Chicaneau et la comtesse dePimbesche.

Dans quel lieu se trouvent Chicaneau et la Comtesse ? De quoi s'entretiennent-ils en attendant le juge?N'est-il pas conforme à la réalité de la vie que ces deux personnages, fort animés l'un et l'autre, et dont l'esprit estabsorbé par une pensée dominante, se confient mutuellement leurs ennuis? Ne se peignent-ils pas eux-mêmes, — àleur insu ? Racine nous présente deux plaideurs : se ressemblent-ils de tout point ? Dites en quoi ils diffèrent ; Quetrouvez-vous de particulièrement amusant dans le langage de Chicaneau ? — dans le langage de la Comtesse? II.

— L'analyse de la scène.

— Distinguez les différentes parties de la scène : Le procès de Chicaneau; b) Ledésespoir de la Comtesse; Indiquez les principales péripéties du procès (marquer l'ordre suivi par Chicaneau dans sonexposé); Quel effet produit l'interminable énumération des écritures nécessitées par le procès ? Cette longue etimposante procédure est-elle en rapport avec le dommage causé ? De quoi se plaint la Comtesse? Quels vousparaissent être les caractères du dialogue entre les deux plaideurs ? III.

— Le style; — les expressions.

— Montrez que chacun des personnages s'exprime dans un langage approprié àson caractère : Chicaneau parle le langage du palais, avec son vocabulaire spécial et ses archaïsmes (vingt ans encà, — un mien pré, etc.); la Comtesse, désespérée de ne plus pouvoir plaider, se sert d'expressions indignées; LaComtesse dit qu'il ne lui restait plus que « quatre ou cinq petits procès » : de quels procès veut-elle parler?(souligner l'ironie du mot); Quel sentiment traduit l'exclamation de Chicaneau : De plaider ? Quel est le sens de lier,dans l'expression : « Lier les mains aux gens de votre sorte! » Justifiez le nom de Chicaneau donné au plaideur parRacine; — indiquez quelques mots de la même famille. IV.

— La grammaire.

— Trouvez un synonyme de dégâts, —de sentences; Indiquez un dérivé de expert, — deprocès, — de rapport; 30 Nature et fonction de chacun des mots suivants : Hé! quelque soixante ans. Rédaction.

— Des contestations surviennent entre deux voisins au sujet d'un mur mitoyen.

Un procès s'engage :indiquez-en les principales péripéties, les conséquences.. »

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