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Ce qui appartient à l'histoire est-il par là-même inactuel ?

Publié le 28/01/2004

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histoire
(Fernand Braudel, Écrits sur l'histoire). Le passé dans lequel tomberaient pour s'y perdre nos certitudes et nos morts consenties d'aujourd'hui ne jette-t-il pas un doute sur notre capacité à pouvoir organiser un monde autour de valeurs définitives ? La recherche de l'historien procède d'une inquiétude doublement morale et philosophique. Mais pour quelle raison une telle inquiétude se trouve-t-elle relayés aussi par l'histoire, que gagne-t-elle de plus à être intéressée au passé ? B. Idéologie et histoire1. « L'expérience du Front populaire, écrivait Raymond Aron, vers 1938, dans Introduction à la philosophie de l'histoire, révélera progressivement sa véritable portée aux historiens à venir, selon qu'elle mènera à un régime nouveau ou à la réaction [...]. Les contemporains sont partisans et aveugles, comme les acteurs et les victimes. » La polémique est contemporaine.
histoire

« Personne n'étudie un objet historique comme on explique des phénomènes de la nature.

L'argument estaristotélicien.

Alors que la physique est la réalité de ce qui arrive toujours ou le plus souvent, la propriété del'histoire est de ne pas se répéter et de confirmer partout l'unicité de ses événements.

Historiquement, les mêmescauses, disons les mêmes circonstances ou les mêmes occasions, ne donnent jamais les mêmes effets ou peu s'enfaut.

L'histoire se singularise par la contingence ou l'irrégularité foncière de l'ordre prétendu de ses événements, parsuite elle dénonce partout les tentatives systématisantes et réductrices pour intégrer dans une quelconquecohérence des périodes distinctes.

Elle ne peut à la rigueur procéder que par voie analogique jamais explicative, etmoins encore causale.

Le monde de l'historien est aléatoire, traversé de temporalités distinctes et de rythmesdifférents.

Les guerres par exemple ont figure d'accélérateur de l'histoire et par elles-mêmes sont imprévisibles.3.

Il y a une ambiguïté manifeste.

L'histoire, n'ayant rien de nécessaire, ne referme aucun épisode sur sa prétenduenécessité.

N'étant pas nécessaire, cet épisode est coupé de tout prolongement dans le temps.

Il est dépassé.

Maisd'un autre côté, unique, il obtient une singularité inaliénable, il est donc irréductible à toutecompréhension, et reste perpétuellement actuel à l'étude de l'historien.

Aucun discours sur un passé unique n'estdéfinitivement achevé. Il.

LA POLÉMIQUE HISTORIQUE A.

Les deux sens du mot histoire 1.

L'histoire peut être prise au sens de l'ensemble des événements passés.

La polémique à ce niveau existe, et elleconfirmerait l'actualité des considérations historiographiques.

Mais la question touchant à la vérification historiquedes faits,à la comparaison et l'analyse des documents, aux conjectures diverses est un débat interne à l'épistémologie del'historien. Point méthodeAttention, une dissertation de philosophie ne doit jamais épouser les problématiques spécifiques des disciplinesqu'elle analyse au point de les prendre à son compte.

Un développement consacré à l'épistémologie de l'historienconduirait à un hors sujet.

Il revient donc à l'étudiant de prendre au plus vite une distance par rapport à desconsidérations trop techniques qu'une dissertation ne permet pas d'assumer.2.

L'enjeu philosophique de l'histoire n'est autre que celui de la parole et de l'axiologie qu'elle innove dans sonrapport au temps.

« La réalité du social, la réalité foncière de l'homme se découvre nouvelle à nos yeux et, qu'on leveuille ou non, notre vieux métier d'historien ne cesse de bourgeonner et de refleurir dans nos mains...

Oui, que dechangements !Tous les symboles sociaux, ou presque tous - et certains pour lesquels nous serions morts hier sanstrop discuter - se sont vidés de leur contenu.

La question est de savoir s'il nous sera possible, non pas de vivre,mais de vivre et de penser paisiblement sans leurs repères et la lumière de leur phare.

» (Fernand Braudel, Écrits surl'histoire).

Le passé dans lequel tomberaient pour s'y perdre nos certitudes et nos morts consenties d'aujourd'hui nejette-t-il pas un doute sur notre capacité à pouvoir organiser un monde autour de valeurs définitives ? La recherchede l'historien procède d'une inquiétude doublement morale et philosophique.

Mais pour quelle raison une telleinquiétude se trouve-t-elle relayés aussi par l'histoire, que gagne-t-elle de plus à être intéressée au passé ? B.

Idéologie et histoire 1.

« L'expérience du Front populaire, écrivait Raymond Aron, vers 1938, dans Introduction à la philosophie del'histoire, révélera progressivement sa véritable portée aux historiens à venir, selon qu'elle mènera à un régimenouveau ou à la réaction [...].

Les contemporains sont partisans et aveugles, comme les acteurs et les victimes.

»La polémique est contemporaine.

Il faut attendre pour se prononcer sur la signification exacte d'une période.

Mais leproblème est là.

Attendre jusqu'où ? Quel historien, et quand, nous fournira jamais la clé de ce qui réellement fut,bien qu'invisible sur le moment ? Car ce régime nouveau ou la réaction qu'il appelle, et à partir desquels nous serionstentés de juger ce qui a été, ne sont pour eux-mêmes nullement assurés de durer toujours.

L'idéologie, seule, peutse permettre de refermer l'histoire sur une lecture linéaire du passé.

Seul le discours idéologique est en mesure deproposer l'illusion d'une objectivité historique, à savoir le mirage d'acquisitions historiquement définitives.

L'historienne peut être un idéologue (notez en quels termes dans sa préface de Le Passé d'une illusion, l'historien récemmentdisparu François Furet révise à la baisse son catéchisme marxiste des années militantes).

Le sens de l'enquêtehistorique, dira ce même F.

Furet, sera de replacer l'événement dans son polymorphisme de significations et de lerestituer tout entier à ses autres voies possibles, autant qu'à son incertitude de sens, mieux à son indécidabilité ouson « irrésolution ».

L'oeuvre de l'historien est tout à l'inverse de celle de l'idéologue.

Il s'agit de rendre une périodeà son présent, de la restituer à son incertitude du moment, d'élever ce même présent à ses polémiques inévitables.2.

Les contemporains sont volontiers aveugles et partisans, disait Raymond Aron.

Au présent, les paroles des diverscamps se croient chacunes et dénoncent les autres.

La multiplicité et la diversité sont la règle.

Une fois passées,ces voix se sont éteintes, avec le temps elles se sont essoufflées, mais leur discordance n'a pas pour autantdisparu, la fracture et l'incompréhension demeurent, non plus, il est vrai, portées en des discours rivaux puisqueceux qui les tenaient ne sont plus, il semble seulement que la diversité des propos et des points de vue, avec lerecul, ait gagné en essentialité.

Le vrai motif des polémiques actuelles renvoie aux contradictions véritables etinsolubles dont elles ne sont que les expressions.

Il n'y a pas eu un passé puis un présent, comme si entretemps lapaix s'était faite, et les hommes s'étaient réconciliés.

Il y a eu un passé de polémique qui a pris fin avec ces corpscharnels et mortels, mais qui se continue au-delà d'eux, dans ce que les mots gardent d'ambivalence et d'ambiguïtéet, par extension, dans ce qu'ils ont de si facilement incompatibles entre eux.

Il reste toujours le scandale d'uneparole divisée, de part et d'autre fondée à faire taire et à se taire.

Reconduite au passé, alors même qu'il ne s'agit. »

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