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Qu'est ce qui distingue un objet d'art d'un objet quelconque ?

Publié le 04/01/2005

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On reconnaîtra un objet d'art à ce qu'il ne sert pas à satisfaire les besoins humains. L'objet artistique, culturel se démarque des autres objets dans la mesure où il a une signification qui dépasse le milieu parfois étroit qui l'a vu naître.     2) Des critères discriminants.     L'oeuvre d'art authentique, c'est celle qui est reconnue comme telle, et qui mérite à son créateur d'être reconnu comme artiste. Reconnus, l'un et l'autre, par l'opinion générale, elle-même orientée par le jugement de ceux qu'Aristote appelait les experts, que la sociologie contemporaine désigne, dans le champ culturel, comme instance légitime de légitimation (P. Bourdieu). Il faudra du temps pour que ce jugement soit contesté en dehors même du champ culturel, et autrement que dans les disputes académiques auxquelles se complaisent les instances légitimantes. On se demandera pourquoi une oeuvre est reconnue comme oeuvre d'art, et parfois même donnée en exemple. Sans doute parce qu'elle a subi victorieusement l'épreuve de la critique : elle satisfait aux normes qui prévalent, et qui constituent les critères de la beauté, car l'idée de beauté est encore une idée normative. Ces règles, ce sont les experts académiciens, chefs d'école, princes qui les instaurent du haut de leur fauteuil ou de leur trône.

« « l'œuvre d'art est un moyen à l'aide duquel l'homme extériorise ce qu'il est », c'est-à-dire prend conscience de ce qu'il est.

Ainsi, quelle que soit la part d'apparence et d'emprunt au sensible qui se manifeste dans l'œuvre: « ces formes ou ces sons sensibles, l'art les crée non pour eux-mêmes et tels qu'ils existent dans la réalité immédiate,mais pour la satisfaction d'intérêts spirituels supérieurs ». Si l'on voit alors clairement pourquoi: « l'art occupe le milieu entre le sensible pur et la pensée pure », reste à lever deux objections.

Celle qui fait de l'activité artistique une simple imitation de la nature, ou celle qui ne voit dans l'artqu'un simple jeu d'apparence et d'illusion.Hegel n'a pas de phrases trop dures pour ceux qui font de l'art une simple imitation de la nature.

« Il y a des portraits dont on a dit spirituellement qu'ils sont ressemblants jusqu'à la nausée. » Si l'œuvre n'était qu'une simple copie de la nature, elle n'aurait aucune valeur.

En effet, créer se réduirait à une simple routine, à une habileté,puisque le contenu de l'œuvre et sa matière seraient fournis par le modèle.

L'homme n'y produirait rien de lui-même.

En ce cas, l'homme pourrait « être fier d'avoir inventé le marteau, le clou, car ce sont des inventions originales et non imitées ». De même, voir dans l'œuvre un simple jeu, un simple travail d'illusionniste est méconnaître l'activité artistique.

Endéclarant: « L'art creuse un abîme entre l'apparence et l'illusion de ce monde mauvais et périssable d'une part, et le contenuvrai des événements de l'autre, pour revêtir ces événements et phénomènes d'une réalité plus haute, celle del'esprit. » Hegel retrouve en partie une leçon d' Aristote ; l'art débarrasse les événements réels de leur contingence, de leurs impuretés, d'un fatras de détails, pour en dévoiler l'essence et la vérité.

Ce qu'il y a d'apparence dans l'art n'est pasde l'ordre de l'illusion et du mensonge, mais au contraire, de l'essentiel.

L'art épure le réel (immédiat) pour endévoiler l'essence.La mise en évidence du caractère hautement spirituel de l'art ne reste pas chez Hegel un simple constat théorique.

Outre les analyses d'œuvres présentes dans l' « Esthétique », des études d'œuvres littéraires ponctuent tout le second tome de la « Phénoménologie de l'esprit »: l' « Antigone » de Sophocle , le « Neveu de Rameau » de Diderot , « Michel Kohlhaas » de Kleist ou « Les Brigands » de Schiller servent à étudier les moments à la fois historiques et logiques qui ont présidé à leur création.

Et Hegel se fait fort de démontrer l'intérêt philosophique majeur de tels écrits.Cependant, la richesse et la présentation sensible qu'offre l'art en constituent aussi les limites.

On a vu que « l'art occupe le milieu entre le sensible pur et la pensée pure », c'est-à-dire que: « le contenu d'une œuvre d'art est tel que, tout en étant d'ordre spirituel, il ne peut être représenté que sous une forme naturelle ». Si l'art, en effet, recèle un contenu spirituel, offrant des affinités avec la religion et la philosophie, on a vu qu'ilconsistait à offrir ce contenu sous une forme sensible, objective, au moyen de formes, de couleurs, etc.

L'œuvreprésente une « indivision du sensible et de l'intelligible ». On ne peut, pour parler grossièrement, séparer fond et forme, et l'œuvre n'est pas l'illustration sensible d une idéedéjà là.

Ce qu'a à nous dire Racine n'est pas dissociable de son écriture; il n'y a pas un message préexistant puis un « moyen » de le faire passer.

Les œuvres qui se contentent d'illustrer une thèse sont généralement décevantes et plates.Or cette façon de présenter de façon plus immédiate, plus sensible qu'un ouvrage conceptuel (un traité demétaphysique par exemple) un contenu spirituel, marque à la fois l'intérêt majeur de l'art et ses limites.

En effetd'une part (on y reviendra), il y a des contenus tels que leur expression sensible est inadéquate, d'autre part :«Ce mode de production peut être comparé à celui d'un homme expérimenté qui, tout en connaissant la vie et sescontingences, ne réussit pas à formuler son expérience en règles, mais a toujours devant ses yeux les cas isolésqu'il avait connus (…) tout en étant capable de se livrer à des réflexions générales, (il) ne sait expliciter sonexpérience concrète que dans des récits portant sur des cas isolés. » A l'art fait défaut la généralité ou l'universalité du concept, de la science.

L'art est nécessairement, parce qu'il doitemprunter une forme sensible (telle statue, tel tableau avec tel sujet, telle composition), réduit à la particularité.C'est donc la contradiction entre le contenu de l'art (qui est spirituel) et sa forme (nécessairement sensible) qui enmarquerait les limites.

Hegel l'exprime avec la plus grande clarté. « Toute notre culture est devenue telle qu'elle est dominée tout entière par la règle générale, par la loi.

C'estdevenu pour notre intelligence une habitude, presque une seconde nature, de définir le particulier d'après desprincipes généraux; devoir, droit, principe, maxime, etc.

Ce que nous exigeons d'une oeuvre d'art, c'est qu'elleparticipe à la vie, et nous exigeons de l'art en général qu'il ne soit pas dominé par des abstractions telles que la loi,le droit, la maxime, que la généralité qui s'y exprime ne soit pas étrangère au coeur, au sentiment, que l'image existedans l'imagination sous forme concrète.

» Il y a une contradiction entre notre culture et l'art.

Si l'art est « une chose du passé », ce n'est pas que l'art n'existe plus, ne soit plus intéressant.

Mais le contenu de notre culture (essentiellement abstraite et générale), de notrereligion (le contenu du christianisme, ou de tout monothéisme est inapte à l'expression sensible, d'où le secondcommandement), est impropre au mode d'exposition artistique.

Ce qui signifie que l'art, s'il est un mode d'expressionde la vérité, du spirituel, un moyen pour l'homme de prendre conscience de lui-même et de ses intérêts, l'art donc,n'est pas le mode d'expression le plus haut de la vérité.L'intérêt du discours hégélien est de souligner contre un certain nombre de conceptions courantes (encoreaujourd'hui) la haute valeur spirituelle de l'art.

Celui-ci est un moyen pour l'homme de donner une forme objective,sensible à ses conceptions, ses interrogations sur lui-même.

Il participe directement de la vérité.Cette leçon est à retenir devant l'irruption de ce qu'on nomme culture de masse aussi bien que devant le « marché. »

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