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A quoi tient la force des religions ?

Publié le 24/01/2004

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B - LA RELIGION MISE SUR LA FORCE DE L'IRRATIONNEL

1) Le sentiment ne doute pas de lui-même Ce que je sens, j'ai du mal à le mettre en doute. Je suis traversé par le sentiment, il m'accompagne et se fortifie de mon acceptation. L'intime conviction d'être dans le vrai se passe aisément de preuves. Tel est le sentiment religieux, d'autant plus acceptable, croit-on, qu'il est sensé fonder un amour du prochain. Le sentiment religieux prend la forme d'une évidence, d'une certitude sensible, si sûre d'elle qu'elle se moque de se justifier. On sait que cette assurance a donné lieu à un comportement fanatique, destructeur. C'est la raison qui limite la conduite, or, elle est ici absente.

2) L'absence de raison renforce la crainte des hommes et leur passivité La croyance en Dieu justifie l'ignorance : les desseins de Dieu sont impénétrables, qui sommes-nous pour prétendre les comprendre ? Dans l'histoire, les pouvoirs abusifs ont su tirer parti de cette soumission à l'ordre des choses incomprises : le pouvoir aussi est un fait. Cette ignorance fait des hommes craintifs et soumis.

•    Le sujet affirme que les religions ont une force. La question n'est donc pas de se demander si oui ou non les religions ont un pouvoir, mais de s'interroger sur la raison de cette force indéniable qui perdure à travers les siècles. •    Toute religion est l'affirmation d'un absolu qui dépasse infiniment l'homme. Il n'y a pas de société sans un rapport, sinon au divin, du moins au sacré. L'homme est un être qui s'invente des dieux, en tout cas qui semble avoir besoin d'eux. Pourquoi ?

« Ce que je sens, j'ai du mal à le mettre en doute.

Je suis traversé par le sentiment, il m'accompagne et se fortifie demon acceptation.

L'intime conviction d'être dans le vrai se passe aisément de preuves.

Tel est le sentimentreligieux, d'autant plus acceptable, croit-on, qu'il est sensé fonder un amour du prochain. Le sentiment religieux prend la forme d'une évidence, d'une certitude sensible, si sûre d'elle qu'elle se moque de sejustifier. On sait que cette assurance a donné lieu à un comportement fanatique, destructeur.

C'est la raison qui limite laconduite, or, elle est ici absente. 2) L'absence de raison renforce la crainte des hommes et leur passivité La croyance en Dieu justifie l'ignorance : les desseins de Dieu sont impénétrables, qui sommes-nous pour prétendreles comprendre ? Spinoza dira: « Et il ne faut pas oublier ici que les partisans de cette doctrine,qui ont voulu faire étalage de leur talent en assignant des fins aux choses,ont, pour prouver leur doctrine, apporté un nouveau mode d'argumentation :la réduction, non à l'impossible, mais à l'ignorance ; ce qui montre qu'il n'yavait aucun autre moyen d'argumenter en faveur de cette doctrine.

Si, parexemple, une pierre est tombée d'un toit sur la tête de quelqu'un et l'a tué, ilsdémontreront que la pierre est tombée pour tuer l'homme, de la façonsuivante : si, en effet, elle n'est pas tombée à cette fin par la volonté deDieu, comment tant de circonstances ont-elles pu concourir par hasard ?Vous répondrez peut-être que c'est arrivé parce que le vent soufflait et quel'homme passait par là.

Mais ils insisteront : pourquoi le vent soufflait-il à cemoment-là ? Pourquoi l'homme passait-il par là à ce même moment ? Si vousrépondez de nouveau que le vent s'est levé parce que la veille, par un tempsencore calme, la mer avait commencé à s'agiter, et que l'homme avait étéinvité par un ami, ils insisteront de nouveau, car ils ne sont jamais à court dequestion : pourquoi donc la mer était-elle agitée ? Pourquoi l'homme a-t-il étéinvité à ce moment-là ? et ils ne cesseront ainsi de vous interroger sur lescauses des causes, jusqu'à ce que vous vous soyez réfugié dans la volontéde Dieu, cet asile d'ignorance.

» C'est après avoir exposé sa propre conception de Dieu que Spinoza s'attaque à la compréhension traditionnelle de Dieu comme roi ou seigneur , imposant ses volontés aux hommes.« La volonté de Dieu, cet asile d'ignorance » écrit-il dans l'appendice au livre 1 de l' « Ethique », entendant montrerque la conception vulgaire de Dieu, non contente d'être anthropomorphique, dégénère en superstition et maintientles hommes dans une ignorance qui profite au pouvoir religieux.Pour Spinoza, Dieu n'est pas une personne, mais il se définit par la formule « Deus sive natura » : « Dieu ou lanature ».

Dieu est la force qui produit la totalité de la nature et des êtres : « il est la cause libre de toutes choses[…] tout est en Dieu et dépend de lui ».Après avoir justifié son concept de Dieu, Spinoza entreprend de réfuter les préjugés des hommes au sujet de ladivinité.« Tous ceux que j'entreprends de signaler ici [les fausses opinions] dépendent d'ailleurs d'un seul, consistant en ceque les hommes supposent communément que toutes les choses de la nature agissent comme eux en vue d'une fin,et vont jusqu'à tenir pour certain que Dieu lui-même dirige tout vers une certaine fin.

»Tous les préjugés des hommes reposent donc sur une conception anthropomorphique de la nature (« Les hommessupposent communément que toutes les choses de la nature agissent comme eux en vue d'une fin »), qui culminedans l'idée que Dieu agit comme un être humain : il est pourvu d'une volonté et dirige tout selon ses buts et sesfins.

Dès lors tout phénomène naturel sera compris comme s'expliquant par la volonté de Dieu.Il deviendra donc impossible d'expliquer la nature par elle-même : tout phénomène (une maladie par exemple) nesera pas compris par ses causes naturelles, mais saisi comme manifestation, comme signe de la volonté divine (lacolère de Dieu, qui pour punir les hommes leur envoie la maladie en question).Il vaut la peine de suivre la démonstration de Spinoza.

Celui-ci pose en principe un fait indéniable, celui qui veutque : « Tous les hommes naissent sans aucune connaissance des causes des choses, et que tous ont un appétit derechercher ce qui leur est utile, et qu'ils en ont conscience.

» Nous avons conscience de nos désirs, mais non deleurs causes.

Par suite les hommes croient désirer librement, croient que leurs désirs naissent d'eux-mêmes (commeun ivrogne sous l'emprise de l'alcool croit désirer librement sa bouteille).Or une autre caractéristique des êtres humains est qu'ils agissent toujours dans un but, en poursuivant une fin, uneutilité.

Pour les hommes, comprendre la nature, c'est donc rechercher dans quel but telle ou telle chose existe,quelle est son utilité.

Quand nous regardons un objet, notre première impulsion est de nous demander à quoi il sert,comme si son utilité rendait raison de son existence.

Autrement dit, les hommes ne cherchent pas à comprendre lacause des phénomènes, ce qui les produit, mais leur fin supposée.C'est la combinaison de ces deux principes, de ces deux attitudes : l'ignorance des causes et la recherche de l'utile,qui va être à l'origine d'une conception fausse et aliénante de la nature et de la divinité.Or, « Comme en outre ils trouvent en eux-mêmes et hors d'eux un grand nombre de moyens contribuant grandementà l'atteinte de l'utile […] ils en viennent à considérer toutes les choses existant dans la nature comme des moyens à. »

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