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Est-il raisonnable de se quereller pour des mots ?

Publié le 06/09/2005

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Un discours a le plus souvent certains effets intentionnels ou non, même lointains, soit sur autrui, soit sur celui qui parle. Ainsi lorsque je produis un acte locutoire (et par là-même un acte illocutoire) je produis un troisième acte, qu'Austin nomme « perlocutoire ». � Ces trois actes distincts sont illustrés par l'exemple suivant : � Acte locutoire : production de la parole, « Tu ne peux pas faire cela ». � Acte illocutoire la parole « Tu ne peux pas faire cela » manifeste une protestation contre une action. � Acte perlocutoire : la parole (et la protestation) « Tu ne peux pas faire cela » a pour effet de dissuader l'interlocuteur de réaliser son action. "Nous prendrons donc comme premiers exemples quelques énonciations qui ne peuvent tomber sous aucune catégorie grammaticale reconnue jusqu'ici, hors celle de l'« affirmation » ; des énonciations qui ne sont pas, non plus, des non-sens, et qui ne contiennent aucun de ces avertisseurs verbaux que les philosophes ont enfin réussi à détecter, ou croient avoir détectés : mots bizarres comme « bon » ou « tous » auxiliaires suspects comme « devoir » ou « pouvoir » constructions douteuses telles que la forme hypothétique. Toutes les énonciations que nous allons voir présenteront, comme par hasard, des verbes bien ordinaires, à la première personne du singulier de l'indicatif présent, voix active. Car on peut trouver des énonciations qui satisfont ces conditions et qui, pourtant, A) ne « décrivent », ne « rapportent », ne constatent absolument rien, ne sont pas « vraies ou fausses » ; et sont telles quen B) l'énonciation de la phrase est l'exécution d'une action (ou une partie de cette exécution) qu'on ne saurait, répétons-le, décrire tout bonnement comme étant l'acte de dire quelque chose. (...) Exemples : (E.
Le langage n'est pas une science exacte, il est du domaine de l'opinion. Le langage peut occasionner des malentendus, il est donc dangereux et peut conduire à la violence. TOUTEFOIS, la pensée est indissociable du langage et de la communication: on ne peut donc pas éviter les querelles de mots. Se quereller pour des paroles, c'est faire connaître ses idées et par là même dialoguer.


« [La querelle de mots démasque les faux savoirs, les mots qui ne veulent rien dire et qui rivent les hommes à leurs préjugés et à leur ignorance.] Pas de langage sans penséeL'interrogation sur le langage est inéluctablement interrogation sur la pensée, car penser et parler sedéfinissent l'un par l'autre.

La pensée ne devient claire que lorsqu'elle trouve le mot.

Inversement, le mot n'estjamais forme vide parce qu'il véhicule toujours du sens ou du non-sens. Hegel écrit : « C'est dans les mots que nous pensons ».

Dire que nous pensons en mots, comme on paye enfrancs ou en dollars, c'est définir le mot comme l'unité de la pensée.

Loin d'être deux mondes radicalementextérieurs, « incommensurables » comme le disait Bergson, le langage et la pensée apparaissent ici commeabsolument consubstantiels.Que reproche Hegel à l'ineffable ? Il lui reproche de n'offrir, en fait de pensée, qu'une matière de pensée sansla forme que seule la formulation par le langage pourrait lui conférer.

L'ineffable en effet, c'est la penséeinforme, c'est-à-dire une pensée usurpée, une pensée qui n'en est pas vraiment une.

Pour mériter ce nom,pour être vraiment la pensée, celle-ci doit en passer par l'épreuve de l'explicitation.Il y a ici un malentendu possible contre lequel il faut mettre en garde le lecteur de Hegel : c'est le malentendude l'énonciation.

Le problème de Hegel n'est pas de savoir s'il faut se taire ou parler, ni de savoir si les véritéssont ou non bonnes à dire : l'enjeu de l'exigeante conception de Hegel est de savoir à partir de quoi, à partirde quel critère on peut réellement considérer qu'on a affaire à de la pensée, à partir de quel critère la penséemérite le nom de pensée.

Ce critère, c'est la « forme objective » (le mot) qui rend ma pensée publiable,identifiable même par moi seul (tant encore une fois il ne s'agit pas ici de rapport à autrui).

Pourquoi faire unbrouillon avant une dissertation ? Justement pour expliciter le flux d'abord confus de l'inspiration qui noustraverse à partir d'un sujet, pour incarner cette manière, cette pensée virtuelle en une réalité palpable &travaillable, réalité que les mots que nous écrivons lui donnent.Il s'agit là, pour la pensée, d'une véritable épreuve, de l'épreuve de ce que Hegel appelait le « négatif » : pourdevenir ce qu'elle est, la pensée doit en passer par ce qui n'est pas elle : le langage.

Dans cette épreuve parlaquelle elle devient ce qu'elle est, la pensée fait donc face à d'apparents périls qui peuvent nous faireprendre le langage pour un inconvénient.

Au premier rang de ces périls, celui qui apparemment menace ce quenous pourrions appeler la subjectivité, notre singularité : ne risquons-nous pas, en incarnant notre intérioritédans une forme objective, d'en perdre irrémédiablement ce qui en elle nous appartient le plus ? Le mot peut,ainsi, être perçu comme commun et galvaudable : nous savons bien que chacun peut transformer nos parolescomme il l'entend, que les « je t'aime » que nous prononçons ont été cent fois, mille fois, prononcés etentendus, que nos pensées dans nos paroles deviennent anonymes comme une rumeur sourde.

Puisque « toutest dit depuis huit mille ans qu'il y a des hommes et qui pensent » (La Bruyère), le refus des mots ne serait-ilpas le dernier refuge de l'intériorité ? Ce sont ces appréhensions que la pensée hégélienne entend conjureravec la dernière énergie.Le présupposé qui est ici en jeu a quelque chose à voir avec la question de la propriété de la parole.Ce dialogue constant de la pensée avec le langage, cette lutte entre l'ineffable et les mots, bref ce passage,pour la pensée, du non-être à l'être prend donc évidemment, comme on l'a vu, un sens particulièrement aiguen littérature et spécialement en poésie.

Si le passage par la parole marque la vraie naissance de la pensée,c'est qu'il faut concevoir le langage comme quelque chose de plus haut qu'un simple instrument.

Ce qui seconçoit bien ne s'énonce clairement, pour paraphraser Boileau, que dans la mesure où l'énonciation claire estelle aussi à son tour la condition de la bonne conception. Nous ne sommes pas asservis à l'arbitraire des motsPhilosopher, c'est poser comme principe que, loin d'être asservis au pur arbitraire des mots, nous sommesseuls habilités à leur refuser ou à leur donner un sens.

Lorsque je te parle, je sais ce que je dis, je peuxm'expliquer, je ne choisis pas mes mots au hasard, je construis des phrases qui expriment au mieux mapensée.

Pour me faire comprendre, pour te comprendre, je ne dois, pas éviter de te «quereller»; il en va de lavérité de notre amitié. Les mots ne sont pas innocentsPour cette raison, Bachelard estime qu'il faut psychanalyser la connaissance parce que «la vieille imagerevient à l'esprit quand le vieux mot revient aux lèvres».

Il n'est jamais insignifiant d'utiliser un mot plutôtqu'un autre et, que ce soit délibéré ou non, lorsque le mot est dit, la chose est évoquée.

Il faut se disputerpour certains mots.

Il ne faut pas permettre que les fours crématoires ne soient qu'un «détail».

Il ne faut pasadmettre que «liberté» soit synonyme de «licence».

Il ne faut pas tolérer que «philosopher» soit l'équivalentde «parler pour ne rien dire».. »

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