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Rapports du droit et du devoir

Publié le 15/01/2004

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droit

L'idée que la liberté est un bien inaliénable, et que nul ne peut consentir à y renoncer pour appartenir à l'Etat, est une thèse centrale de la pensée politique de Rousseau. Elle sous-tend tout le « Contrat social «, où il s'agit de déterminer comment les hommes peuvent véritablement s'associer, obéir à un pouvoir commun, à des lois valant pour tous, sans abdiquer leur imprescriptible liberté. Cette fameuse formule s'inscrit dans un contexte polémique. Rousseau vient de montrer, en accord avec Hobbes et les partisans de l'école du droit naturel, que toute société, tout Etat, ne peut reposer que sur des conventions : « Puisqu'aucun homme n'a une autorité naturelle sur son semblable, et puisque la force ne produit aucun droit, restent donc les conventions pour base de toute autorité légitime parmi les hommes. « Rousseau entend maintenant se démarquer de ses prédécesseurs en refusant toute espèces de pacte de soumission qui lierait le peuple à des gouvernants, qui soumettrait la liberté des hommes à celle d'un autre. C'est pourquoi il entend prouver que renoncer à sa liberté conduit à se détruire en tant qu'être humain, et que, par suite, nul ne peut le vouloir. Mais sans doute faut-il comprendre que la liberté pour Rousseau est constitutive de l'humanité : être humain, c'est être libre. On peut aller jusqu'à dire que la liberté pour Rousseau prend la place du cogito chez Descartes. Descartes considérait les animaux comme de simples automates, des machines, et la pensée seule assurait l'homme de sa différence essentielle avec les bêtes. A cela Rousseau rétorque, faisant sienne les thèses sensualistes : « Tout animal a des idées puisqu'il a des sens [...] et l'homme ne diffère à cet égard de la bête que du plus ou moins.

► A. Les droits des uns sont les devoirs des autres

►  B. Défendre son droit est un devoir

►  C. Devoirs du droit et devoirs de vertu.  

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« pourrait en aucun cas engager la liberté de ses enfants, nés libres, car en admettant que l'on puisse disposer de saliberté, on ne peut engager celle des autres.Rousseau commence ici à démontrer les arguments fallacieux qui justifient l'emprise du pouvoir sur les hommes, etles privent de leur bien le plus précieux au nom d'une prétendue sécurité.

Mais il va plus loin en montrant que mêmeun contrat de soumission est, en fait, juridiquement nul, moralement inconcevable.Un contrat suppose un échange de biens entre contractants, or renoncer à sa liberté, c'est renoncer à tout, c'estéchanger un bien un bien infini (ma liberté) contre un avantage qui sera par définition disproportionné.

Si je donnetout, que pourra-t-on me restituer en échange ? Ce contrat est un contrat de dupe.

Je renonce à tous mes droits,je les donne à une autre qui en use à sa guise.

Qu'aurais-je à réclamer contre lui ? Que pourrais-je faire s'il veut menuire ? « C'est une convention vaine et contradictoire de stipuler d'une part une autorité absolue et de l'autre uneobéissance sans borne.

»Renoncer à ma liberté revient à promettre d'obéir inconditionnellement à un autre, donc à me considérer comme unsimple instrument, un simple objet, une chose dont l'autre peut disposer à sa guise.

Or, vouloir être un objet, unesclave, est impossible Je n'abdique pas alors simplement mes droits, mais que je renonce aussi à mes devoirs, queje me détruis comme être moral.

Si celui auquel j'ai promis d'obéir m'ordonne de faire une action que je juge atroce,de deux choses l'une, ou bien j'obéis, mais alors j'abdique tout jugement, me considère comme une machine, et menie comme être moral, je ne suis alors (à mes propres yeux) qu'un instrument animé, ou bien je refuse d'obéir etdans ce cas je fais éclater au grand jour que ce contrat de soumission est intenable, que je n'ai jamais puvéritablement vouloir obéir inconditionnellement.Ne pas être libre signifie ne pas accomplir sa volonté mais celle d'un autre.

Or, Rousseau montre que la liberté définitl'homme comme tel, et que nul e peut vouloir renoncer à sa liberté, cad nul ne peut vouloir véritablement sesoumettre.

Ce serait « renoncer à sa qualité d'homme », vain & contradictoire : autant dire qu'un homme voudraitdevenir un esclave, un instrument, une chose.

L'importance de la conception de Rousseau n'est donc pas tant demontrer que l'homme est naturellement libre que d'affirmer que cette liberté est inaliénable, et doit perdurer sous leslois, sous le pouvoir.

La liberté ne s ‘échange pas, on n'échange pas tout contre rien.

Sont ainsi disqualifiées toutesles théories qui, sous couvert d'assurer à l'homme sa sécurité, sa simple survie biologique, le privent en réalité del'essentiel.

Cette sécurité est illusoire, cette survie est dégradante, en tant qu'elle transforme l'homme en chose etle prive de toute moralité.

En ce sens, La pensée de Rousseau se veut libératrice : « Les esclaves perdent toutdans leurs fers, jusqu'au désir d'en sortir ; ils aiment leur servitude comme les compagnons d'Ulysse aimaient leurabrutissement.

» Rousseau anticipe sur le premier article de la « Déclaration des droits de l'homme » : « Les hommes naissent etdemeurent libres et égaux en droits.

»Faire ainsi éclater l'illégitimité de toute forme d'esclavage ou de soumission impose de penser une forme d'Etat où laliberté soit préservée.

Mais Rousseau nous contraint aussi à nous interroger sur toutes les formes de servitudevolontaire, celle où les hommes « perdent tout dans les fers, jusqu'au désir d'en sortir ».

(Et les formescontemporaines, comme le totalitarisme, imposent sans doute de repenser la question à nouveaux frais). Les droits fondamentaux des hommes, proclamés dans les Déclarations successives des droits de l'homme, sont cesprérogatives que tout homme est en droit de revendiquer, du fait même de son appartenance à l'espèce humaine.

«Tout individu, dit ainsi la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, a droit à la vie, à la liberté et à lasûreté de sa personne ».

Quand les droits de l'homme sont bafoués, c'est la dignité même de la personne humainequi est outragée. C.

Devoirs du droit et devoirs de vertu. L'époque moderne semble beaucoup plus sensible à la notion de « droit » qu'à celle de « devoir » au point mêmequ'on assimile parfois le droit à ce qu'on est en droit de revendiquer.

Il est vrai que la Révolution française a reconnuà l'homme des droits fondamentaux et inaliénables et que ces droits ont été réaffirmés par l'ONU (« Déclarationuniverselle des droits de l'homme » du 10 décembre 1948), après qu'ils eurent été si gravement violés au cours de laseconde guerre mondiale.

Notons aussi que la « Déclaration des droits » de 1793 inscrivit, en ses articles 33 & 35, ledroit d'opposition du peuple comme « le plus sacré des droits ».

Certes, chacun a des droits naturels et inaliénables,chacun a aussi des droits positifs reconnus par les lois de son pays ; mais chacun a aussi des devoirs, et enverstous.

Comte considère même que l'idée que l'homme a des droits est absurde et immorale et que les justes garantiesindividuelles ne peuvent que résulter de l'accomplissement par chacun de ses devoirs.Si tout droit s'accompagne de devoirs, il ne suffit pas pour autant de les accomplir pour être en accord avec saconscience.

D'abord parce que, parmi les devoirs envers autrui, on ne trouve pas que des devoirs juridiques maisaussi des devoirs de vertu comme ceux de la bienveillance, de pitié, de reconnaissance.

Seuls les devoirs dont lenon-respect rend impossible la coexistence du libre arbitre de chacun avec celui de tout autre, font partie desdevoirs du droit.

Ensuite, parce que le droit contraint : il sanctionne tout manquement au respect d'une règle.

Maisjamais le droit n'oblige.

Autrement dit, il ne demande pas aux individus d'agir moralement.

Il n'est pas nécessaire, eneffet, que les sujets du droit reconnaissent leurs devoirs librement.

Ils peuvent les accomplir pour n'importe quelmotif, notamment par peur du châtiment.

On voit bien que la sphère éthique et la sphère juridique ne se confondentpas.

Jamais le droit ne supplantera le devoir.. »

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