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Est-ce le regard du spectateur qui fait l'oeuvre d'art ?

Publié le 24/02/2004

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Qu’est ce qu’une oeuvre d’art sans artiste ? Elle n’est pas tout simplement : car l’œuvre découle de la réflexion, de la passion, du désir de créer d’un homme, c'est-à-dire l’artiste.  L’oeuvre d’art n’est pas faite que pour être : elle n’a pas d’utilité particulière et d’elle peut émaner quelque chose à partir du moment où quelqu’un est là pour la recevoir. Une œuvre d’art nous est donné et par nous, il s’agit du spectateur : nous recevons l’œuvre et comme dit Ionesco, cette « oeuvre d’art doit toujours nous montrer que n’avons pas vu ce que nous avons vu «. L’oeuvre d’art agit comme une mise en abîme : nous voyons à travers elle, d’une autre manière, ce qui était devant nous et que nous n’avons pas vu. Mais si l’œuvre d’art nous permet de mieux voir la réalité qui nous est donnée, le regard a-t-il la même importance dans la réception que nous faisons de l’oeuvre ? Est-ce notre regard qui concrétise l’oeuvre en tant que telle ? Peut-on dire que c’est notre regard de spectateur qui créé la valeur de l’oeuvre d’art ?

•    Le sujet demande en fait ce qu'est le beau et qu'est-ce qui fait qu'une chose est belle, qu'on la trouve belle. •    Il aborde plus profondément la question de la finalité de l'art et soulève de nouveau le problème de l'imitation ou de la création, et la médiation d'autrui. •    Ou bien il existe une caractère objectif, universel de la beauté des choses : dans ce cas, l'art doit imiter. Ou bien la beauté est subjective et se trouve dans le regard du spectateur. Elle est à créer. Bref, quelle est la nature de la jouissance esthétique ?

 

L'oeuvre d'art relève d'une attitude purement subjective du spectateur, et non d'une réalité inscrite dans l'oeuvre. C'est une affaire d'opinion. MAIS, l'oeuvre d'art a une réalité objective, indépendante du spectateur. Elle est l'expression indirecte d'une vérité qui dépasse l'opinion du spectateur et même celle de l'artiste.

  • I) La beauté est DANS l'oeuvre regardée ( ou de l'objectivité du beau).
  • II) Critique de la thèse.
  • III) La beauté est dans le regard du spectateur.

« l'oeuvre d'art est le signe de son indépendance.] Une réalité objectiveSelon certains philosophes (Hegel, Heidegger), l'oeuvre d'art est laréalité suprême.

Loin de n'être qu'une création du spectateur, elle estplutôt le mode d'apparition par lequel la vérité se manifeste à nous.Cette vérité ne dépend pas du spectateur.

Pour Hegel, «l'apparence»de l'art n'est pas illusoire; elle est «un moment essentiel de l'essence»de la vérité (Esthétique). Hegel rompt avec Kant, pour qui la beauté naturelle tient une largepart.

La contemplation de la belle nature accordemystérieusement l'imagination et l'entendement.

Hegel rejette la beauténaturelle, car la beauté artistique étant un produit de l'esprit lui estnécessairement supérieure.

C'est pour nous et non en soi et pour soiqu'un être naturel peut être beau.

L'imitation de la nature n'est doncpas de l'art, tout au plus un exercice d'habileté, par lequel on imite leCréateur.

Il y a plus de plaisir à fabriquer des outils ou des machinesqu'à peindre un coucher de soleil.

La valeur de l'art est tout autre :c'est l'esprit à l'oeuvre, qui s'arrache de la nature en la niant.

Au moyende l'art, l'homme se sépare de la nature et se pose comme distinct.L'art peut donc faire l'objet d'une science, pense Hegel, il suffit d'enmontrer la nécessité rationnelle dans l'histoire de l'humanité.

L'oeuvred'art ne décrit pas une réalité donnée, elle n'est pas faite pour notreplaisir, mais l'art est en son essence une intériorité qui cherche à s'exprimer, à se manifester ; c'est uncontenu qui cherche une forme, un sens qui veut se rendre matériel.

On ne peut le condamner pour sonapparence, car il faut bien à la vérité une manière de se montrer.

L'art étant historiquement la premièreincarnation de l'esprit, il se confond d'abord à la religion : la religion grecque est l'art grec lui-même.

Ce sontHomère et Hésiode qui ont inventé les dieux grecs.

Cet âge d'or de l'art, que Hegel définit comme "classique",sera dépassé par l'art romantique avec l'apparition du christianisme.

La religion chrétienne est essentiellementanthropomorphique : le divin est le Christ, soit une pure individualité charnelle, qui a souffert et qui est morteen croix.

Seul l'art peut ici donner une représentation charnelle de ce divin, dont le passage historique a étéfugitif, et si l'art est mort dans notre société moderne, c'est probablement pour la raison que la spiritualitéchrétienne ne suffit plus tout à fait aux besoins de l'esprit. Le beau est une idée, soit l'unité d'un concept et de la réalité.

Le concept est l'âme tandis que la réalité enest l'enveloppe charnelle.

Le beau est donc la manifestation sensible de cette unité ; il exprime uneréconciliation.

Il est naturel qu'il échappe à l'entendement qui sépare et qui divise, de même qu'à la volontéqui cherche à soumettre l'objet à ses propres intérêts.

Tout ce qui est libre, indépendant, infini, conforme à laseule nécessité de son concept, peut être dit beau.

De plus, un bel objet est vrai, puisqu'il est conforme àson être.

Cela implique qu'aucun organisme vivant ne pourra être beau, parce que soumis au besoin, il n'a pasde véritable liberté.

Seule la beauté artistique peut être accomplie : elle représente l'idéal.

L'idéal est soustraitde la vie quotidienne imparfaite et inauthentique.

Il incarne l'universel dans l'individualité absolument libre etsereine : le symbole en est l'individualité apollinienne, perfection d'harmonie et de forme, sérénité conquise surla douleur.

En un sens, cette beauté idéale est hors du temps et de l'histoire, symbole de l'éternité.

Si cetidéal de beauté est désormais révolu, alors qu'il culminait dans l'art grec, c'est que l'organisation sociale et laproduction économique sont devenues prévalentes, soudant les individus dans des rapports de besoin,d'échange et de travail complexes et étroits.

L'Idéal ne peut plus s'incarner dans l'art, il s'est incarné dansl'État et la politique à la fin du xixe siècle et au cours du xxe siècle.

On peut toutefois remarquer qu'à notreépoque présente, ces deux formations ne semblent plus animées par les aspirations spirituelles les plus hautesdes individus et de la collectivité.

Nous vivons dans l'ère du nihilisme que Nietzsche avait diagnostiquée à lafin du xixe siècle. L'oeuvre d'art a un destin qui lui est propreL'oeuvre d'art, une fois accomplie, échappe à l'artiste lui-même.

Elle continue d'exister, et le regard qui estporté sur elle n'appartient plus ni à l'artiste ni au spectateur.

Selon Schelling, elle «se prête à une infinitéd'interprétations, sans qu'on puisse jamais dire si cette infinité s'est trouvée dans l'artiste lui-même ou si elleréside simplement dans l'oeuvre d'art» (Le Système de l'idéalisme transcendantal). L'oeuvre d'art fait le spectateurS'il existe un critère de l'oeuvre d'art, c'est l'effet qu'elle produit en nous comme malgré nous.

Nous savonsalors que l'oeuvre d'art nous préexiste, et qu'elle nous façonne en quelque sorte.

Les quatuors de Beethoven,les toiles de Van Gogh, l'oeuvre romanesque de Proust furent, au moment de leur création, incomprises par le public.

Pourtant, telle était leur force qu'elles finirent par transformer le regard que l'on portait sur elles ets'imposèrent comme des chefs-d'oeuvre.. »

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