Devoir de Philosophie

Renoncer à ses désirs

Publié le 23/01/2011

Extrait du document

Renoncer à ses désirs I- Pour quelles raisons il semble qu'il est raisonnable de renoncer à ses désirs. Si être raisonnable c'est se conduire selon la raison par le choix autonome d'une loi qu'on se prescrit, d'une loi pour tous, alors ne doit-on pas exclure ses désirs parce qu'on ne les a pas choisi et qu'ils sont particuliers? Ne vaut-il pas mieux obéir à la nature, à l'ordre, se dominer, souffrir, supporter et se taire selon la sagesse des stoïciens. Selon eux le bonheur est dans la vertu, seule la vertu compte: il faut donc être indifférent à tout ce qui relève de la sensibilité, des désirs, des mirages de l'imagination et nier la douleur. Le stoa était le portique sous lequel enseignaient les stoïciens. Comprendre que celui qui vit en harmonie avec la raison (= la nature ordonnée et divine) échappe aux troubles de la passion (un désir qui a envahi toute la conscience). Si le désir est insatiable cela a-t-il un sens de chercher à combler ce qui ne peut être satisfait? N'est-ce pas mener une vie de \"tonneaux percés\" (Platon)? Si le désir porte sur l'avenir, sur ce qu'on n'a pas encore, il se détourne du réel présent: rien ne lui résiste, l'imagination s'exerce pleinement et étend la mesure du possible (Rousseau). Cela a-t-il un sens de courir après des déceptions? Transition: mais cet abandon des désirs ne réduit-il pas une vie humaine à l'inertie? n'est-ce pas perdre toute raison de vivre? II- Pour quelles raisons l'homme ne peut vivre sans désir? Le désir peut-il être réduit à un simple manque éprouvé? N'y a-t-il pas dans le désir une force, une énergie? L'essence de l'homme n'est-elle pas l'existence, la liberté de choisir et de poser des fins qui trouvent dans le désir la force et l'enthousiasme pour les accomplir? Qu'est-ce qu'une vie proprement humaine? Qui pose les fins, qui choisit la fin, qui donne la force de vouloir? comment la perte du désir amène-t-elle la perte de la raison, comme raison de vivre et raison d'agir? La perte du sens n'accompagne-t-elle pas l'absence de désir? La raison suit-elle le sort du désir? \"Ses désirs\": ne peut-on choisir de suivre les désirs dans lesquels nous nous reconnaissons? nous les ferions nôtre par ce choix. En s'orientant vers des valeurs rendues désirables par le désir, la vérité, la beauté, la justice, l'homme n'accède-t-il pas en même temps au sens de sa vie et à l'autonomie en obéissant à la loi qu'il s'est prescrite? Transition: y aurait-il de bons désirs et de mauvais désirs? N'y a-t-il pas plutôt des désirs bruts et des désirs couronnés par la connaissance? III- Tout désir n'est pas nécessairement déraisonnable. => Peut-on aller contre sa propre essence? Où prendrait-on l'énergie pour un tel mouvement? => La force du désir peut-elle être simplement suivie sans qu'elle ne dégénère en violence? => Développer son essence n'est-ce pas pénétrer le désir de connaissances véritables, utiliser sa force au service d'une vie pleinement humaine, libérée de l'erreur, des fantômes de l'imagination. => En lui même le désir n'est pas déraisonnable, il oriente vers la connaissance qui permet la maîtrise de soi. Dire que le désir est déraisonnable, n'a pas de sens, c'est le confondre avec l'erreur, avec ce qu'il n'est pas. Pour une conclusion. N'est-on pas allé trop vite en affirmant qu'il était raisonnable de renoncer au désir? La précipitation a été source d'erreur. Que nous a appris l'analyse du désir? En distinguant le désir et ce qu'il n'est pas, n'avons-nous pas déterminé que le désir est aspiration à la liberté, condition de possibilité de la liberté? Est-ce une condition nécessaire? Est-ce une condition suffisante? Quelle conséquence pratique de ce bilan du devoir? La liberté est-elle une donnée ou une puissance à actualiser par un effort de connaissance?

Tout au long de sa vie, l’homme désire et espère toujours satisfaire ce désir. Ainsi, Le pourquoi indique que l'on désire nécessairement ce qui est impossible. « Désirer » est tendre vers un objet que l'on se représente comme source possible de satisfaction ou de plaisir c’est-à-dire que l'objet (ou un sujet, une situation, un état) de désir soit hors d'atteinte donc de nos limites. D’autre part, « impossible » est relatif, ce que nous considérons, nous, comme impossible à obtenir (pas dans l'absolu). Désirer l’impossible serait donc dans la nature de l’homme : le plaisir de désirer en particulier l’inaccessible mais si on parvient malgré tout à l’obtenir, l’impossible deviendrait possible et il n’y aurait alors plus d’intérêt. N’est-ce pas paradoxal que l’homme destine ses désirs à l’impossible, ce qui ne pourra le satisfaire ou bien est-ce une alternative pour avancer, progresser et repousser ses limites ? Dans un premier temps, nous étudierons l’improbable objet du désir qu’est l’impossible puis à quoi bon désirer l'impossible s’il entraîne des conséquences malheureuses.       Nous pouvons observer un lien entre désir et impossibilité puisqu’au final il s’agit d’insatisfaction et d’irréalisation. L’impossible serait la source du désir. Tout d’abord, le désir est souvent opposé au besoin notamment les besoins primaires nécessaires à la survie de l’individu. En effet, désirer serait secondaire et superficiel. Le désir est aussi  le moteur de la volonté qui permet de mettre en pratique les moyens de réaliser le désir (moyens appropriés ou non d'ailleurs). Sans désir pas de volonté, et sans capacité de volonté, pas de désir. Lorsque l’on obtient l'objet de son désir par exemple un objet de consommation, le désir commence à disparaître et n'est jamais vraiment atteint ce qui revient à l’impossible. Par ailleurs, tout désir cherche l'impossible puisqu'il y a toujours insatisfaction présente. Le désir est un puissant moteur de l’homme. Ainsi, selon Spinoza, « le Désir est l’essence même de l’homme », c’est sa force d’exister. Mais quel est le moteur du désir ?  En regardant le Banquet chez Platon, on se rend compte que c’est le manque qui fonde et structure le désir. C’est parce qu’il y a de l’impossible et donc de manque qu’il y a du désir. Ce moteur est une force vitale aidant à faire avancer et progresser l’homme et on peut donc se demander si cela peut repousser certaines limites et dans le même temps rendre possible l’impossible.     En ce qui concerne l’objet lui-même, l’objet du désir est un objet impossible, un faux objet derrière lequel se cache l’opinion des autres, la gloire, les honneurs. L’impossible se présente comme un obstacle. Or, l’homme cherche le défi.  En affrontant l’impossible, il connaît les limites de ses propres capacités. Notre insatiabilité nous pousse à désirer l'inaccessible. En effet, l’homme est fasciné par l’impossible qui constitue en quelque sorte un jeu repoussant ses limites. Nous voudrions passer notre désir sur un autre objet pour qu’il continue sans cesse et ainsi de suite, c’est un cercle infini de déceptions et de recherches de perfection. Un désir brûlera continuellement avant d'avoir atteint son objectif. En outre, l’impossible est motivant : se fixer un but nous permet d'avancer aussi impossible celui-ci soit-il car la vie n'a pas de sens si on ne se dirige pas vers une direction. Prenons l’exemple du désir amoureux dans Dom Juan, ce qui l’anime est la conquête amoureuse : il voit une belle jeune fille, il la désire. Il fait donc tout pour la faire tomber amoureuse de lui en contournant les difficultés et une fois le mariage consommé, il se lasse et va à la recherche d’autres femmes en recherchant d’autres challenges. De plus, enlever l’impossible c’est enlever l’espoir. Or, comme le dit le proverbe : « l’espoir fait vivre ». Par ailleurs, nous avons toujours voulu réaliser nos rêves : l’impossible fait également parti des rêves. En somme, nous voulons toujours ce que nous ne possédons pas et cela depuis toujours comme avec Eve et la pomme. Ce qui montre que l’homme est faible face à la tentation. Cependant, comment peut-on juger une chose impossible ? Il n’y aurait pas d’impossible jusqu’à preuve du contraire. En effet, ’impossible est relatif. Ce qui semble impossible pour une personne peut être possible pour une autre. L’impossible, c’est le rêve, le fantasme et l’imaginaire. Or, sans désirer l’impossible, comment évoluer ? C’est donc également une question de temps : ce qui a paru impossible aux populations d’il y a plusieurs siècles semble tout à fait ordinaire pour nous autres aujourd’hui : l’avancée des découvertes, les technologies. En effet, autrefois, l’homme souhaitait voler. Ce désir semblait inconcevable mais grâce à son imagination (dont les limites s’étendent en désirant l’impossible)  et à son ambition, sa créativité ; il a su lever les obstacles et créer le principe d’aviation et même chose pour marcher sur la lune en 1969 qui semblait insensé il y a 3 siècles. Cependant, nous pouvons juger une chose impossible dans la mesure où la réalité est différente de l’imagination : nous pouvons désirer quelque chose qui ne peut pas être réel comme être éternel, être toute sa vie en vacances ou encore un monde parfait (utopique).Les lois et la morale dans une société peuvent aussi nous imposer ce qui est possible et impossible. L’impossible ne serait-il donc pas une illusion, une invention de l’homme ? René Char disait : « L'impossible, nous ne l'atteignons pas, mais il nous sert de lanterne ».Si on se contenterait du « possible » et du « raisonnable », on ne serait pas donc pas allé bien loin.    Après avoir étudié comment l’impossible pouvait être l’objet d’un désir, nous allons voir à quoi bon désirer l’impossible s’il entraîne des conséquences malheureuses.                En effet, à force de voir renaître le désir et à ne pouvoir le satisfaire définitivement, le    sujet souffre de manque et de frustration.    Si le désir est un manque, alors il est nécessairement lié à la souffrance aussi longtemps         qu’il n’est pas satisfait. Il y a l’attente : nous n’arrêtons pas de nous projeter dans le futur et oublions de profiter de l’instant présent, ce qui provoquera inévitablement des frustrations.    « Ce n'étais pas ce à quoi je m'attendais\" est une réaction habituelle à la déception causée par l'illusion du désir. Dès lors, nous retombons très vite dans la désillusion. Cette souffrance naît d'un conflit entre la volonté, nos désirs et la réalité. Dans Le Monde comme volonté et comme représentation, pour Schopenhauer, le désir est un obstacle au bonheur : il y a une incompatibilité entre le désir et la réalité. Ainsi, la vie d'un être de désir est comme un pendule, elle oscille entre souffrance du désir insatisfait et ennui du désir satisfait.. De plus, on peut également en souffrir en voulant trop. En effet,  Dans le Mythe d’Icare,  le désir de l'Homme d'aller toujours plus loin, au risque de devoir se retrouver face à face avec sa condition de simple être humain. Brûlé les ailes pour avoir volé trop près du soleil.  Mais c’est peut-être le prix à payer…    Quand on désire l'impossible, on est conscient car on existe en tant que ce désir. On désire, on existe, on est conscient de notre désir mais est-on pour autant être conscient de l’impossible ?    La limite entre le possible et l'impossible n'est pas connue au départ, et ce qu’on ne pouvait pas voir au départ comment il serait possible, le deviendra ensuite.    En effet, nous souffrons probablement parce que la conscience de cette impossibilité nous vient de la raison. Malheureusement pour nous, notre désir ne comprend pas ces limites. . Ex : lorsqu’on est amoureux d’une personne inaccessible, on souffre. Pour nous, cette impossibilité n'existe tout simplement pas. Le sujet est donc inconscient de l'impossible satisfaction. C'est tout le drame de l'humanité depuis la nuit des temps.    Sa souffrance provient de ce décalage entre l'absence de limite du désir qui est pourtant limité, local et contingent et la perception de ces limites par la raison qui toutefois n'en connaît pas les siennes.       Hegel : l'homme de l'animal, c'est que, chez l'homme, la pensée s'interpose entre le désir et sa satisfaction : elle peut empêcher un désir de devenir conscient ou, au contraire, contribuer à sa satisfaction, par le biais de la représentation qu'elle en élabore.    Je désire l’impossible car c’est humain. Le désir n’est pas concret et réel, désirer l’impossible c’est donc vouloir ne pas avoir. Le rêve, la croyance, mais encore l’art ou la passion, peuvent nous faire oublier les limites et les dépasser, rendre donc possible ce qui ne l’était pas jusqu’alors.

Est-il absurde de désirer l’impossible ? Les notions au programme : Désir, volonté, raison, bonheur. La problématique : Est-il rationnel de désirer l'impossible (conforme aux exigences de la raison et à nos intérêts) ? Est-ce raisonnable au regard de la dualité de l'Homme : être de raison et être de désir ? Les difficultés / pièges à éviter : Bien définir le désir en le distinguant du besoin et de la volonté raisonnable. Bien définir l'impossible : l'interdit, mais aussi le contradictoire, l'illimité (désirs ni naturels, ni nécessaires, d'Epicure), ou le simplement non encore réalisable de fait. Les références pertinentes : Platon - Le désir comme manque Hegel - Sur la passion et les vertus Descartes - \"Il vaut mieux changer ses désir que l'ordre du monde\" Epicure Les stoïciens Le plan : I. Oui, (il est absurde de désirer l'impossible) au sens de mauvais calcul, d’illogique, d’irrationnel, le but apparent du désir étant le plaisir et de parvenir à la satisfaction. A. L’impossible, c’est ce qui n’est pas accessible dans le réel. Ex : immortalité, don d’ubiquité. Dès lors désirer l’impossible c’est la garantie de ne pas obtenir l’objet du désir. Donc souffrance garantie. B. On ne peut s’investir dans un projet que l’on sait irréalisable : dépense stérile d’énergie et limite de l’imaginaire. On ne peut désirer l’impossible si on le sait impossible. C. Ce serait donc un comportement irrationnel. Or si l’homme est un être de désir, il est aussi un être de raison. Donc, il faudrait s’en tenir au possible ! II. Mais ne serait-il pas déraisonnable de s’en tenir au possible ? Non, il n’est pas absurde ( au sens de déraisonnable) de désirer l’impossible. A. C’est que soutiennent Descartes, les sagesses antiques (épicuriens et stoiciens) mais qu’on peut considérer comme une approche bien médiocre du désir. Réduire le désir à une volonté raisonnable ou aux besoins, ce n’est plus vraiment un désir ; B. Le désir « moteur » : ne désirer que le possible, c’est se contenter de ce qui est : Désir, pouvoir de transformer, de tendre vers une perfection. Chez l’homme l’utopie est nécessaire III. Si tout désir est désir de l’impossible, il est vraiment absurde de renoncer au désir de l’impossible ! A. Le sujet présuppose que l’on puisse désirer autre chose que l’impossible. Or l’objet du désir peut être considéré comme étant l’impossible : Obtenir une reconnaissance (Hegel), retrouver la plénitude perdue, la quête d’absolu, accéder au bonheur, le désir de tous les désirs : le bonheur inaccessible (Freud, Platon) B. Le sujet présuppose que l’on peut bien cerner la différence entre possible et impossible. Le désir repousse les limites du possible. C. C’est donc peut être absurde de désirer l’impossible, mais c’est le lot de l’homme déchiré entre désir et raison et le désir peut être au service de la raison. Exemple désir de vérité à l’origine des sciences de la philosophie etc. Conclusion : ce qui serait donc absurde ce serait ne pas désirer l’impossible.

Peut-on désirer sans souffrir ?       Le «coup de foudre» révèle à ceux qui en sont les victimes, les souffrances et les tribulations de la passion amoureuse: avant la rencontre, aucun des deux êtres ne soupçonnait l'existence de l'autre, tandis qu'après, l'absence de l'un sera ressentie par l'autre comme un manque qui le fera souffrir. Ce manque, alimenté par la séparation et la distance, est à l'origine du désir amoureux: un être nous manque, parce qu'il est loin de nous, et notre désir, tout comme notre passion, naît de ce manque. Nous imaginons que notre souffrance prendra fin à une prochaine rencontre, sans soupçonner que peut-être, la réalité ne correspondra pas forcément à ce que nous avons imaginé, et que nous connaîtrons alors une nouvelle déception, et une nouvelle souffrance.       Le désir apparaît comme la tension d'un être vers un objet qui lui manque, et dont l'obtention est considérée comme le moyen de faire cesser la souffrance. Or, dans le même temps, le désir est l'occasion d'une souffrance d'un autre type, qui naît du caractère incomplet de la satisfaction qu'il propose. Est-on condamné à souffrir en désirant? Peut-on désirer sans souffrir?       Si le désir naît d'un manque, il engendre une souffrance telle qu'aucune satisfaction ne peut l'apaiser: il espère se combler dans un plaisir qui se révèle finalement éphémère et totalement illusoire. Or, le désir est en même temps tension et élan d'un sujet qui, par lui, affirmer sa puissance d'exister, et qui manifeste son origine, non plus dans le manque, mais dans l'excès. Dans ces conditions, le désir n'entretiendrait-il pas une illusion sur lui-même, ou sur son objet ?       Le désir semble, dans son essence, se révéler à nous au cour d'une expérience aussi douloureuse qu'irrécusable: il est l'épreuve d'un manque de quelque chose que nous devons trouver hors de nous, et dont l'obtention comblera ce manque. En effet, le désir est fondamentalement tension vers un objet dont nous pensons .qu'il la fera cesser, et tension douloureuse: nous éprouvons à son occasion la misère de notre condition d'êtres finis, qui ne peuvent trouver en eux des ressources de complétude, et doivent retirer, dans des objets extérieurs, des moyens de satisfaction. Nous souffrons de n'avoir pas, et nous espérons la fin de la souffrance, la fin de la tension, la satiété. Dans ces conditions, la souffrance semble bien être la condition du désir, qui n'existe que parce que nous sommes privés de ce qui nous manque.       En effet, contrairement aux animaux, ou au monde inanimé, nous pensons, et notre pensée est sans cesse l'occasion de nous projeter vers des possibles au-delà de la réalité présente. Nous sommes capables d'envisager le futur (qui n'est pas encore), l'idéal (qui n'existe qu'en idée), l'irréel (qui ne correspond pas à la réalité), le possible (qui n'est pas, mais qui pourrait être) ... Nous ne manquons pas de nous comparer à d'autres, de nous mesurer, et de nous dévaloriser de cette comparaison, qui ne se fait jamais à notre avantage: si nous ne nous rendons pas toujours compte que nous avons plus que ceux qui ont moins, nous souffrons toujours d'avoir moins que ceux qui ont plus. Le collectionneur mesure ces affres à chaque instant, lui qui souffre de n'avoir pas la pièce qui manque à sa collection, sans être capable de se réjouir de celles qu'il est parvenu à amasser. Comme le collectionneur, nous nous échappons en permanence, puisque telle est notre condition, vers ce qui est absent à la conscience, et qui la manifeste comme intentionnalité. Dans l'épreuve du désir, cette projection est douloureuse et inquiète, car nous savons que nous ne connaîtrons la paix qu'au moment où notre désir sera satisfait, ou au moment où nous ne désirerons plus ... Dans un passage du Monde comme volonté et comme représentation, Schopenhauer illustre ce lien entre désir et suffisance en affirmant que le désir naît d'une souffrance, et qu'il conduit à une suffisance plus grande encore. La satisfaction du désir peut bien faire cesser la souffrance, en permettant au sujet de rencontrer enfin l'objet convoité et d'éprouver du plaisir, mais pour autant, il souffre tant qu'il ne l'a pas rencontré. Toute une tradition issue de Platon énonce le caractère douloureux de ce désir, toujours inquiet, telle Diotime dans le Banquet: « Ne vois-tu pas dans quel terrible état sont les bêtes quand elles désirent engendrer? ( [...] Elles sont toutes malades el torturées », tant qu'il n'a pas rencontré l'objet qu'il convoite. Or, loin d'apaiser l'inquiétude et la souffrance qui le génèrent, le désir ne fait que les creuser encore davantage, en entretenant dans l'homme l'illusion de la satisfaction et de la satiété. En effet, si l'obtention de l'objet procure satisfaction, celle-ci n'est que provisoire et temporaire, dans la mesure où un autre objet sollicitera bientôt toute l'énergie du désir. Si on ne désire que ce dont on manque, ce que l'on possède n'est plus désiré, et il faut chercher autre chose. D'autre part, le désir apparaît comme une construction imaginaire et fantasmatique au cour de l'être, qui ne peut manquer de décevoir celui qui le réalise (réaliser =  rendre réel -res- en latin). De sorte que le désir nous conduit au cour d'un cycle duquel nous ne pouvons sortir: nous souffrons de ce qui nous manque et cherchons à l'obtenir, mais l'obtention nous fait souffrir davantage, en nous faisant réaliser qu'il nous manquera toujours quelque chose. Le désir nous donne l'impression que nous sommes condamnés à la souffrance et à l'insatisfaction permanente.       Or, le désir ne nous fait souffrir que pour autant que nous y voyons l'expression du manque et de l'absence, c'est-à-dire, tant que nous l'envisageons selon son étymologie classique (il est « nostalgie d'un astre disparu », ou chez Platon, nostalgie d'un monde divin et complet). Mais, il se révèle en même temps à nous comme une puissance, un élan, une tension d'un être vers la réalité ou vers la valeur. En effet, sans une force positive qui nous pousse vers une chose, et nous la fait désirer, nous n'attribuerions aucune valeur à rien: c'est le désir qui, en nous orientant à vouloir ceci plutôt que cela, transforme un monde neutre et objectif en un monde de choses désirables: comme Spinoza l'affirme, « quand nous nous efforçons à une chose, quand nous la voulons ou aspirons à elle, ou la désirons, ce n'est pas parce que nous jugeons qu'elle est bonne,' mais au contraire, si nous jugeons qu'une chose est bonne, c'est précisément parce que nous nous y efforçons, nous la voulons ou aspirons à elle, ou la désirons» (Ethique III scolie de la prop. 9). L'appétit est, pour Spinoza, l'-effort qui se rapporte aussi bien au corps ( il est alors « appétit») qu'à l'esprit (il est alors « volonté»), et qui conduit l'être à exprimer cette puissance; il est en nous pour autant que nous sommes un mode de la puissance éternelle et infinie de Dieu. Le désir est donc un effort conscient pour « persévérer dans son être)} (ou « conatus» pour Spinoza), il n'est pas souffrance, mais au contraire puissance et joie.                                                                                                          Dans ces conditions, il faut comprendre que le désir ne procèderait pas nécessairement d'un manque, mais qu'il pourrait au contraire provenir d'un excès, d'un trop plein de puissance, et que, contrairement à ce que peut enseigner son étymologie, il ne serait pas la nostalgie d'un astre, mais l'absence de l'astre. En effet, si l'on envisage que le désir est créateur de son objet, il lui préexiste nécessairement, en ce qu'il est ce par quoi il y a quelque chose, et ce par quoi ce quelque chose peut valoir pour nous. Contrairement à l'idée que le désir nous fasse tendre vers un objet imaginaire doté de qualités mystérieusement attirantes, il convient de développer la conception d'un désir générateur et producteur du monde, qui qualifie le monde en même temps qu'il le produit. Alors il est possible de comprendre que l'intensification du désir entraîne l'intensification de la joie : le désir nous conduit à nous rapprocher de nous-mêmes en nous confrontant à notre propre essence. Ce serait alors l'absence de désir qui nous ferait souffrir, en nous éloignant de nous-mêmes, et en nous faisant faire alors l'expérience d'une séparation. Comme l'énonce Rousseau, dans un passage de la Nouvelle Héloïse « Malheur à qui n 'a plus rien à désirer! Il perd pour ainsi dire tout ce qu'il possède ». C'est en ne désirant plus que l'on souffre, alors que le désir lui-même est jouissance autosuffisante (

ommes-nous responsables de nos désirs? 1 – Définition des termes du sujet:     Une personne est responsable (du latin respondere, répondre) lorsqu'elle a la capacité de répondre de ses actes et d'en être garant, mais aussi d'en assumer les conséquences.  La notion de responsabilité est directement liée à celle de conscience, notamment morale, puisque c'est grâce à celle-ci que nous sommes aptes à prendre une décision, et par conséquent à en assumer les événements qui en découlent. On peut  également noter que l'on n'est pas toujours seulement responsable des ses actes, mais aussi parfois de ceux des autres. Dans le milieu professionnel, un responsable est une personne qui doit veiller à la bonne marche de tel ou tel service mais c'est aussi elle qui subit en premier les conséquences d'un dysfonctionnement.     Le désir est la recherche de la réduction d'une tension provoquée par un manque, celle si se fait donc en comblant ce vide. Le désir peut à la fois être considéré comme source de plaisir lorsqu'on parvient à accomplir l'un d'entre eux, mais aussi de perpétuelle insatisfaction: nous n'avons jamais vraiment ce que nous voudrions avoir. On peut répartir les désirs dans plusieurs catégories selon le classement du philosophe grec Epicure: désirs naturels (nécessaires comme la recherche du bonheur où les besoins quotidiens: manger, dormir…, et simplement naturels comme la recherche de l'agréable et la variation des plaisirs) et désirs non naturels (artificiels: gloire, richesse, beauté…. ou irréalisables: toute puissance, immortalité…). Certains de ces désirs (chair, pouvoir, argent, honneurs…) correspondent à certains de 7 péchés capitaux. Le désir est selon Spinoza \"l'essence de l'Homme\", c'est lui qui donne de la valeur à ses objets et non l'inverse. Il est à l'origine de joies profondes (désirs fondamentaux réalisés) mais aussi de grandes frustrations (apparition sans cesse de nouveaux désirs à accomplir). 2 – Enjeux philosophiques du sujet:     Cette question nous est posée afin de déterminer si l'Homme est vraiment à l'origine de chacun de ses désirs, c'est-à-dire si nous pouvons les contrôler mais aussi les assumer. L'enjeu philosophique est crucial, notamment d'un point de vue moral et éthique: peut-on blâmer quelqu'un pour ses désirs, si ceux-ci s'écartent un peu trop du chemin à suivre?  Parvient-on toujours à assumer ses désirs où existe-il comme le suggérait Freud un refoulement lorsque ceux-ci ne sont pas conformes à l'idéal du moi? Si l'homme n'est pas responsable des ses désirs, ne serait-ce pas la une preuve d'un fond d'animalité qui persiste?     Ici, le sujet nous propose d'étudier le passage de l'intention (le désir) à l'action, et déterminer à quel moment nait la responsabilité. Il s'agit donc de déterminer notre degré de responsabilité dans nos désirs. Arrive-t-on vraiment à les contrôler? Nous échappent-ils totalement? 3 – Problématique:     Dans quelle mesure peut-on nous parvenir à contrôler nos désirs? 4 – Introduction:     \"Le désir est l'essence de l'Homme\" disait le philosophe Néerlandais Baruch Spinoza (1632-1677). Ce concept philosophique majeur fit l'objet de nombreuses interrogations, dès l'antiquité avec notamment le Grec Epicure, qui proposa un système de classement des désirs, toujours d'actualité. Un désir est selon le dictionnaire philosophique Lalande une \" tendance spontanée et consciente vers une fin connue ou imaginée\". On peut donc le caractériser par une tension provoquée par un manque que l'on cherche à réduire en comblant ce dernier. Ici, le concept de désir est mis en corrélation avec celui de responsabilité qui fait directement appel à la notion de conscience morale. La responsabilité désigne non seulement la capacité à répondre des ses actes, mais aussi celle d'en assumer les conséquences. Le sujet nous demande donc de nous intéresser aux liens entre ces deux concepts: pouvons nous contrôler nos désirs?  Tous les assumer? Tous les rejeter? C'est pourquoi nous étudierons le passage de l'intention – le désir – à sa réalisation, qui fait alors appel à la notion de responsabilité. Nous nous interrogerons donc de la manière suivante: Dans quelle mesure peut-on parvenir à contrôler nos désirs?  Pour répondre à cette question, nous verrons dans un premier temps que, comme le défendait Freud, nous ne pouvons pas toujours être tenus pour responsables de nos désirs; c'est ici qu'intervient la théorie de l'inconscient qu'il prônait. Ensuite, nous montrerons aussi que nos désirs nous appartiennent: c'est nous qui en sommes à l'origine, c'est pourquoi nous en sommes également responsables. Enfin, nous étudierons l'importance de la maitrise de soi et de ses désirs, pour parvenir à en être responsables en distinguant le désir et le passage à l'acte. 5 – Plan détaillé: Nous choisirons ici un plan dialectique, qui se prête mieux à une telle question.     1) Nous ne pouvons pas être tenus responsables de nos désirs. En effet, le seul fait de vouloir maitriser nos désirs constitué déjà un désir que nous ne maitrisons pas! De plus, notre raison (ou \"sur moi\" Freudien) fait le tri en désirs acceptables – qui deviennent alors des volontés et non plus de simples désirs – et inacceptables ( Le désir se maintient en-deca de toute raison, il n'est donc pas maitrisable. Cf. deuxième topique Freudienne: c'est le \"ca\" et non pas le \"moi\" qui engendre les désirs + libido + rêves + pulsions. Mais sommes-nous vraiment des esclaves de nos désirs? Pourquoi condamner un pédophile s'il n'est pas responsable de ses désirs sexuels?     2) Cependant, les désirs nous appartient: c'est bien moi qui désire, et pas un autre. On peut aussi prendre en compte les théories Stoïciennes et Epicuriennes qui affirment que nous distinguons désirs acceptables (bien-être, bonheur…) et inacceptables (Chair, pulsions…). Enfin, la liberté repose sur les choix, et donc aussi la maitrise des désirs: c'est ce en quoi consiste le processus de libération de Spinoza: nous avons tendance à vouloir maitriser notre existence.     3) Il est donc important de trouver un juste milieu entre ces deux thèses, et de tenter de contrôler nos désirs afin d'acquérir une vraie liberté, malgré la difficulté d'un tel processus. Il faut pour cela parvenir à distinguer le désir de sa concrétisation afin de pouvoir devenir responsables de ceux-ci. Cela passe par une grande connaissance de soi: Socrate, \"connais-toi toi-même\". Il faut apprendre à devenir responsable des ses désirs. 6 – Conclusion:     A la lumière de ces quelques éléments, nous pouvons affirmer qu'il n'existe pas de réponse tranchée à cette question. En effet, nous tendons à vouloir être responsables de nos désirs pour être libres et pouvoir maitriser notre existence. Cependant, cela s'avère difficile puisque les désirent restent en-deca de notre raison, enfouis au plus profond de nous-mêmes. L'intermédiaire est donc d'acquérir une connaissance de nous-mêmes afin d'apprendre à devenir responsables de nos désirs. Nous sommes donc partiellement responsables de nos désirs, puisque malgré notre aspiration à les maitriser, une part d'incontrôlable subsiste. Il faut ainsi parvenir à concilier nature et liberté. Pour aller plus loin, nous pourrions analyser l'existentialisme de Sartre qui affirme la liberté de l'Homme, en complète opposition avec les idées Freudiennes.

Quand l’enfant écrit sa lettre au Père Noël, il lui fait la demande de réaliser ses désirs, en l’occurrence lui offrir la possession de jouets désirés. Il se projette dans la situation désirée et se dit intérieurement : “qu’est-ce que je serais heureux si j’avais…”. En attendant que celle-ci se réalise, il ressent un manque, il est malheureux car il souffre de ce manque. En effet, la notion désirer provient du latin “desiderare”, c’est-à-dire “regretter l’absence de”. On souhaite quelque chose qui n’est pas, on est alors assujetti à une torture, aux tumultes de notre âme entêtée. La question vient alors de savoir si l’on peut désirer sans nécessairement souffrir. Est-ce possible ? Si oui, dans quelles conditions ? Nous nous attacherons à distinguer l’origine du désir, de son fondement ainsi que de sa fin, car il ne faudra pas se réduire à expliquer le désir mais à dégager une compréhension précise sous ses différentes formes. Nous verrons en premier lieu que désirer, c’est chercher à combler un manque et que cette situation nous amène à souffrir. Mais nous verrons ensuite que la nature du désir réside dans une tension qui fait plaisir, le plaisir s’opposant à la souffrance. Enfin, nous verrons que derrière la notion de désir se trouve celle de la volonté, qui nous pousse à agir pour donner un sens à son existence et ainsi s’arracher à une souffrance qualifiée de fataliste. *** Dans ce premier temps de la réflexion, voyons en quoi désirer conduit nécessairement à la souffrance. “Le désir est manque” nous affirme Socrate dans Le Banquet écrit par Platon. Qu’implique cette définition ? Si nous désirons ce qui nous manque, il est tout simplement impossible de détenir ce que l’on désire car une fois l’objet “désiré” en notre possession, il n’est plus manque donc de fait, il n’est plus non plus désir. Conséquemment, nous pouvons déduire que nous avons toujours ce que nous désirions. Si l’on considère le bonheur comme la réalisation de ses désirs, il est aisé de conclure que nous ne sommes jamais heureux de par l’essence insatiable de désirer. Platon illustre d’ailleurs ce propos en évoquant le désir comme le tonneau des Danaïdes percé qui ne peut donc jamais être rempli. Schopenhauer ira même jusqu’à écrire dans Le monde comme volonté et comme représentation que “la vie oscille comme un pendule de la souffrance à l’ennui”, ce qui signifie que soit l’on est malheureux de l’absence de l’objet désiré ne pouvant se réaliser, soit quand on l’a, il ne nous intéresse plus. On peut se repencher à cet égard à l’enfant qui une fois d’être vu offrir ce qu’il désirait, est bien moins heureux qu’il ne s’imaginait pouvoir l’être, il avait mis tellement d’espoir à cette situation tant désirée, qu’il se l’était idéalisée mais maintenant qu’elle est réalité, place à la déception, à la désillusion qui le fait une fois encore souffrir. Dans cette première sous-partie, nous avons défini le désir comme manque. Pour autant, il nous faut le distinguer du simple besoin. La réalisation du besoin se pose comme vitale tandis que celle du désir ne l’est pas. C’est pourquoi nous pouvons estimer que désirer n’est que rechercher des choses inutiles, superflues. Or dans cette situation, l’homme va de désirs en désirs sans trop savoir pourquoi, il est dans ce que Pascal appelle dans ses Pensées, le “divertissement”. Si l’homme croit qu’il est heureux en se divertissant (l’opinion commune nous dit souvent que le bonheur se résume à “profiter” de la vie), il se trouve en réalité dans un bonheur illusoire, il s’aliène dans la recherche effrénée de la consommation et souffre donc sans en avoir vraiment conscience d’un assujettissement. Le désir est alors “marque de misère”. De plus, il faut voir que se divertir, c’est se laisser vivre (ce qui n’est pas vivre), ce qui signifie être soumis à ses déterminismes. En effet, le psychanalyste Freud analyse le sujet comme étant divisé selon trois pôles : le moi qui est ma partie consciente, le surmoi qui rassemble toutes les normes et valeurs assimilées inconsciemment lors de ma socialisation et enfin le ça qui représente mes pulsions charnelles inconscientes. En établissant cette théorie formulée dans son concept d’inconscient, Freud pose une troisième humiliation à l’homme (après celle de Galilée qui montre que la Terre n’est pas au centre de l’univers puis celle de Darwin qui montre que l’homme n’est qu’un genre parmi l’espèce animal) qui est d’ordre psychologique résumée par cette citation : “le moi n’est pas maître dans sa propre maison”. L’homme en tant qu’être désirant souffre alors de ne pas entièrement se connaître et par-delà, ne pas être lui-même. Quelle est alors la moralité la plus évidente à ces constations ? Du fait que l’on ne peut désirer sans souffrir, il faut rechercher l’absence de désirs pour arriver à l’absence de souffrance, ce qui serait le bonheur si l’on le prend dans sa conception “négative” en tant qu’ataraxie. C’est notamment la position de Descartes quand il écrit “Mieux vaut changer l’ordre de mes désirs plutôt que l’ordre du monde”. * Mais ne pas désirer, n’est-ce pas encore un désir que celui de ne pas désirer ? De surcroît, il nous faut nous rappeler que ce qui différencie l’homme de l’animal, qui n’a que des besoins, c’est bel-et-bien sa faculté de désirer, alors chercher à supprimer ses désirs ne serait-ce pas une forme de négation de lui-même et serait par-delà irrecevable ? * Nous allons voir dans ce deuxième temps de la réflexion qu’il ne faut pas réduire le désir au manque et le redéfinir comme une tension qui fait plaisir et donc on peut désirer sans souffrir voire même désirer jusqu’à jouir. Prenons un exemple tout simple : le désir que lie deux amoureux. Quand leurs pulsions, leurs désirs sexuels vont se manifester, ils feront l’amour et force est de constater qu’à cet instant précis, ils ne se manquent pas, au contraire-même, et ils se désirent justement plus que tout. Cet exemple confère une nouvelle dimension au fait de désirer : désirer, c’est aimer. De telle sorte que si l’on sait désirer ce qui nous entoure, le désir ne conduit pas à la souffrance. C’est celui sait désirer, aimer la vie qui loin de souffrir, sait l’apprécier et en savourer tout ce qu’elle contient de meilleur. Ce désir en tant qu’amour procure une véritable joie en l’individu. Quel est donc le profond fondement du désir ? C’est que le désir est plaisir en lui-même. C’est d’ailleurs ce que nous apprend Proust dans À l’ombre des jeunes filles en fleurs, même s’il sait qu’il ne pourra pas aller avec ces jeunes filles, les désirer lui procure encore un plaisir. Pour lui, le plaisir ne réside donc pas tant dans l’objet désiré mais bien dans le désir lui-même grâce à l’imagination et l’idéalisation qui s’en dégagent. Pour mieux illustrer ce propos, nous pouvons prendre l’exemple d’un militant politique pour qui bien que la fin de faire parvenir ses convictions au pouvoir soit importante, le moment où il ressent le plus son effervescence militante, c’est bien dans le combat politique, dans la bataille des idées etc. Nous pouvons, après cette deuxième partie, comprendre que la souffrance n’est pas du côté de l’être-désirant mais du côté de l’être “adésirant”. Voilà ici l’idée de Rousseau écrivant dans La nouvelle Héloïse : “Malheur à qui n’a plus rien à désirer” car au fond se placer du côté de l’absence de souffrance, c’est se placer du côté de l’absence de vie, c’est-à-dire la mort et c’est bien là en fait la véritable souffrance. * Nous avions émis l’idée au début de cette partie, que pour ne pas souffrir, il faut savoir désirer ce que l’on a. Pour autant, doit-on se contenter de ne désirer que cela ? * Il nous faut maintenant s’interroger sur l’objectif essentiel que vise le désir de telle manière à peindre ses caractéristiques et répondre à quelles conditions le désir est-il désirable. Si Platon et Schopenhauer définissaient le désir seulement comme manque, c’est qu’ils en ont une vision réductrice en tant qu’espérance. À toute espérance, s’en joint une crainte qu’elle ne se réalise pas et ce qui nous fait souffrir, c’est de ne pas pouvoir agir sur les causes qui vont aboutir à la fin désirée. En revanche, vouloir, qui est une autre forme plus aboutie du désir, c’est bien agir sur les causes. En effet, espérer s’oppose à vouloir, celui-ci signifiant savoir, pouvoir et jouir. “Quand tu auras désappris à espérer, je t’apprendrai à vouloir” écrit Sénèque dans sa Lettre à Lucilius, voilà la condition majeure pour désirer sans souffrir, c’est de lier désir à volonté. Pour ne pas souffrir de ses désirs, il faut désirer la connaissance. En effet, si Platon récuse le désir car il viserait à se laisser aller à des actes ignobles comme par exemple commettre un meurtre, il juge néanmoins des plus estimable le désir naturel de connaissance. En outre, selon Spinoza, dans son Éthique, c’est par la connaissance de ses affects que l’on peut se libérer véritablement. C’est pourquoi nous pouvons à présent dire que pour désirer sans souffrir, il faut vouloir connaître ses affects, c’est-à-dire que nous devons nous efforcer à chercher nos déterminismes si l’on ne veut plus en pâtir. Pour Spinoza, le désir permet à l’homme de s’arracher à lui-même, autrement dit pour ek-sistere: exister. Le désir en tant que volonté est en effet une formidable puissance créatrice, appelée le “conatus”. Si l’origine du désir n’est que pulsion sexuelle selon Freud, il va suivre un processus dit de “sublimation” et se transformera ainsi au service de la création d’œuvres artistiques par exemple. Le désir est alors projet, il pousse l’homme à se projeter : pro-jeter qui signifie se propulser en avant : il s’améliore en persévérant dans son être. *** En définitive, nous pouvons répondre qu’il est effectivement possible de désirer sans souffrir et nous irons plus loin en affirmant qu’il est nécessaire de désirer d’une part pour ne pas souffrir (rester passif) du quotidien qui nous entoure (c’est ici le désir comme amour) et d’autre part pour ne pas souffrir de nos déterminismes (c’est ici le désir comme volonté de connaissance). C’est en désirant le changement que l’on peut l’obtenir, évidemment celui-ci présente le risque de ne pas se réaliser mais la vie est une suite de risques que nous devons affronter pour les surmonter et c’est seulement de cette manière que les hommes pourront entrer dans l’Histoire et il ne faut jamais oublier comme disait Lamartine que “les utopies ne sont bien souvent que des vérités prématurées” !

Liens utiles