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Romain ROLLAND, Jean-Christophe (Albin Michel).

Publié le 02/10/2010

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Faites à votre choix un résumé ou une analyse de cette page, dégagez-en un thème qui vous paraît intéressant et commentez-le. Sous la grâce nonchalante et le dilettantisme apparent de ces petites pièces pour piano, de ces chansons, de cette musique française de chambre, sur laquelle l'art allemand ne daignait pas lever les yeux, et dont Christophe lui-même avait négligé la poétique virtuosité, il commençait à entrevoir la fièvre de renouvellement, l'inquiétude — inconnue de l'autre côté du Rhin — avec laquelle les musiciens français cherchaient dans les terrains incultes de leur art les germes qui pouvaient féconder l'avenir. Tandis que les musiciens allemands s'immobilisaient dans les campements de leurs pères et prétendaient arrêter l'évolution du monde à la barrière de leurs victoires passées, le monde continuait de marcher ; et les Français en tête se lançaient à la découverte ; ils exploraient les lointains de l'art, les soleils éteints et les soleils qui s'allument, et la Grèce disparue et l'Extrême-Orient rouvrant à la lumière, après des siècles de sommeil, ses larges yeux fendus, pleins de rêves immenses. Dans la musique d'Occident, canalisée par le génie d'ordre et de raison classique, ils levaient les écluses des anciens modes ; ils faisaient dériver dans leurs bassins de Versailles toutes les eaux de l'univers : mélodies et rythmes populaires, gammes exotiques et antiques, genres d'intervalles nouveaux ou renouvelés. Comme, avant eux, leurs peintres impressionnistes avaient ouvert à l'oeil un monde nouveau — Christophes Colombs de la lumière —leurs musiciens s'acharnaient à la conquête de l'univers des sons; ils pénétraient plus avant dans les retraites mystérieuses de l'ouïe; ils découvraient des terres inconnues dans cette mer intérieure. Plus que probablement, d'ailleurs, ils ne feraient rien de leurs conquêtes. Suivant leur habitude, ils étaient les fourriers du monde. Christophe admirait l'initiative de 'cette musique qui renaissait d'hier, et qui déjà marchait à l'avant-garde. Quelle vaillance il y avait dans cette élégante et menue petite personne ! Il devenait indulgent pour les sottises que naguère il avait relevées en elle. Seuls, ceux qui ne font rien ne se trompent jamais. Mais l'erreur qui s'efforce vers la vérité vivante est plus féconde que la vérité morte. Romain ROLLAND, Jean-Christophe (Albin Michel).

RÉSUMÉ Christophe commence à comprendre que l'intérêt de la musique française de chambre réside dans son effort de recherche. Les musiciens allemands continuent d'exploiter les mêmes veines, alors que les Français explorent de nouveaux domaines, remontant aux sources, voyageant à travers les continents, ou étudiant les sons eux-mêmes. Mais sans doute n'en tireront-ils rien. Christophe admire la musique française pour cette audace, même quand elle s'entache d'erreurs, car elle est créatrice. ANALYSE Christophe entrevoit l'intérêt de la musique française : elle s'applique à une constante recherche. Il oppose la continuité de cet effort à la fixité de la musique allemande. Il s'étend alors sur le contenu de cette découverte : elle englobe les musiques étrangères à la civilisation occidentale, la musique occidentale ancienne — populaire et classique —, l'univers des sons. Il apporte une restriction : sans doute les musiciens français ne feront-ils rien de ces découvertes. Il exprime enfin son admiration : la recherche, même suivie d'erreurs, est créatrice et vivante.

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