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Royaume-Uni

Publié le 11/04/2013

Extrait du document

1 PRÉSENTATION

Royaume-Uni, en anglais United Kingdom, pays insulaire du nord-ouest de l’Europe, composé de la Grande-Bretagne (qui comprend l’Angleterre, l’Écosse et le pays de Galles) et de l’Irlande du Nord. Sa capitale est Londres.

Le Royaume-Uni est bordé au sud par la Manche, à l’est par la mer du Nord et à l’ouest par la mer d’Irlande et l’océan Atlantique. Son territoire comprend également, appartenant à la Grande-Bretagne, l’île de Wight, Anglesey, les archipels des Scilly, des Orcades et des Hébrides. L’Irlande du Nord (Ulster) occupe le nord-est de l’île d’Irlande.

Royaume-Uni, Grande-Bretagne et Angleterre sont souvent utilisés comme synonymes dans le langage courant. Stricto sensu, alors que le terme de Royaume-Uni désigne l’ensemble des territoires du royaume, la Grande-Bretagne est le nom de l’île composée par l’Angleterre, le pays de Galles et l’Écosse. L’Angleterre et le pays de Galles sont réunis depuis 1536 ; les Couronnes d’Angleterre et d’Écosse, depuis l’acte d’Union de 1707 qui a fondé le royaume de Grande-Bretagne (voir Actes d’union). À partir de 1801, après l’union de la Grande-Bretagne et de l’Irlande, le royaume a été appelé officiellement Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande, jusqu’à l’indépendance de la république d’Irlande, en 1922.

L’île de Man et les îles Anglo-Normandes dépendent directement de la Couronne britannique mais ne font pas partie du Royaume-Uni. Elles ont leurs propres institutions, le Royaume-Uni assurant leur représentation diplomatique et leur défense. Anguilla, les Bermudes, les îles Vierges du Royaume-Uni, les îles Caïmans, les îles Malouines, Gibraltar, Montserrat, Sainte-Hélène (et ses dépendances administratives : Ascension et Tristan da Cunha), la Géorgie du Sud, les îles Sandwich du Sud et les îles Turks et Caicos ont leur propre gouvernement, mais ont choisi de rester sous contrôle britannique. Les exceptions sont le Territoire britannique de l’Antarctique et les territoires de l’océan Indien avec l’île Diego Garcia, louée aux États-Unis, et qui abrite une base aéronavale américaine. Hong Kong est revenu à la Chine à l’expiration du bail britannique sur le territoire en 1997.

2 MILIEU NATUREL
2.1 Relief et hydrographie

Le Royaume-Uni couvre 244 110 km². La Grande-Bretagne, huitième île du monde par sa surface, occupe 229 870 km² et couvre 90 % de la superficie totale du Royaume-Uni. Elle est traditionnellement divisée en deux ensembles structuraux, qui s’étendent de part et d’autre d’une ligne Exeter-Newcastle, de l’embouchure du fleuve Exe dans le Devon, et au nord-est de l’estuaire de la rivière Tees. Au nord de cette ligne se trouvent les massifs anciens, vestiges de l’orogenèse calédonienne : l’Écosse, le Lake District, le pays de Galles, le nord, le nord-ouest et le sud-ouest de l’Angleterre. L’Écosse est divisée en trois régions : les Highlands, la zone la plus montagneuse, où se trouve le point culminant du royaume, le Ben Nevis (1 343 m) ; les Basses-Terres centrales et les Highlands du Sud. Le pays de Galles est principalement formé par les monts Cambriens ; le point culminant du pays de Galles et de l’Angleterre (1 085 m) est situé dans le massif de Snowdon. L’Angleterre est compartimentée en trois régions principales de hautes terres et deux régions de basses terres (East Anglia et le Sud-Est) rattachées par de riches plaines agricoles. La zone des hautes terres de la péninsule de Cornouailles comprend les massifs de Dartmoor, d’Exmoor et de Bodmin Moor ; la chaîne des Pennines est située au nord et les monts du Cumberland du Lake District sont situés au nord-ouest.

En Irlande du Nord, les monts Sperrin et les monts Antrim, au nord et au nord-est, sont une extension des Highlands écossais. Avec les monts Mourne, où se situe le point culminant d’Irlande du Nord avec le Slieve Donard (852 m), ils bordent une plaine centrale où se trouve le lough Neagh (396 km²), le plus grand lac d’eau douce du Royaume-Uni.

La longueur maximale du Royaume-Uni est de 1 264 km. Le point le plus septentrional est Out Stack, au large d’Unst, dans les îles Shetland, le point le plus méridional est St Agnes, dans les îles Scilly. La largeur maximale du royaume est de 670 km de Lough Melvin dans le sud-ouest de l’Irlande du Nord jusqu’à Lowestoft, dans le Suffolk. Les dimensions maximales de la Grande-Bretagne sont de 974 km du nord au sud et de 531 km d’est en ouest.

L’ensemble du Royaume-Uni, hormis la région d’Angleterre située au sud des estuaires de la Tamise et de la Severn, a été recouvert par les glaces pendant la période du pliocène ; la glaciation a contribué à façonner des paysages, comme ceux du Lake District. L’activité humaine a aussi joué un rôle important dans cette modification, notamment dans les Norfolk Broads, les terres marécageuses de l’est de l’Angleterre, et les landes du nord de l’Écosse.

2.2 Climat

Le climat du Royaume-Uni est océanique, les contrastes saisonniers y ont peu d’amplitude en raison de l’influence du Gulf Stream. Ce courant réchauffe les vents dominants de sud-ouest, qui adoucissent les températures hivernales et sont à l’origine des dépressions caractéristiques du climat. La température moyenne annuelle est de 6 °C à l’extrême nord de l’Écosse et de 11 °C dans le sud-ouest de l’Angleterre. Les températures hivernales descendent rarement en dessous de - 10 °C et les températures estivales restent en général inférieures à 32 °C. Les précipitations moyennes annuelles sont supérieures à 1 000 mm. La façade occidentale, exposée aux vents océaniques, est beaucoup plus arrosée que l’est. Les précipitations moyennes varient entre plus de 5 000 mm dans l’ouest des Highlands, en Écosse, et au pays de Galles, à moins de 500 mm dans certaines parties de East Anglia.

2.3 Végétation et faune

La flore du Royaume-Uni est très diversifiée. Les feuillus, qui étaient autrefois l’essence dominante, ont souvent été remplacés par des plantations de conifères à croissance rapide, qui couvrent la plus grande partie des 12 % du territoire britannique encore boisé. Le quart du Royaume-Uni environ (principalement en Écosse, dans le sud-ouest de l’Angleterre, au pays de Galles et en Irlande du Nord) est recouvert de landes : cette végétation se compose de bruyères, d’ajoncs, de tourbières et de sorbiers. Commencé il y a plus de deux cents ans, le drainage de la plupart des zones humides de la Grande-Bretagne, comme les zones marécageuses de East Anglia et les Levels du Somerset, a permis leur bonification et leur transformation en prairies et en terres arables. Les besoins croissants de l’agriculture et de l’urbanisation menacent cependant de nombreuses espèces végétales des zones humides ; certaines sont maintenant protégées.

2.4 Ressources et contraintes du milieu naturel

Les trois quarts des terres sont favorables à l’agriculture ; 40 % des terres arables sont concentrées dans l’est et le sud de l’Angleterre, et dans l’est de l’Écosse. La majeure partie des sols sont des prairies ou sont consacrés aux cultures fourragères.

Les forêts couvrent environ 7 % du territoire anglais, 15 % de l’Écosse, 12 % du pays de Galles et 5 % de l’Irlande du Nord. La moyenne générale est tout juste inférieure à 12 % (25 % en moyenne en Europe). Très déboisé au début du xxe siècle, le Royaume-Uni a doublé la superficie de ses forêts, depuis la fondation, en 1919, de la Forestry Commission, responsable de la protection et du développement des ressources forestières.

Le Royaume-Uni dispose de peu de ressources minières. Le zinc, l’étain, le minerai de fer et le cuivre sont extraits en faibles quantités ; les ressources en or et argent sont limitées. Les minéraux non ferreux comprennent le calcaire, l’ardoise, le talc, le kaolin, la terre à foulon, la chaux, le grès, le sel et le gypse. Le pays possède en revanche les principales ressources énergétiques de l’Union européenne, avec d’énormes gisements de houille, exploités depuis trois cents ans, le pétrole et le gaz naturel du secteur britannique de la mer du Nord, au large de l’Écosse et de l’Angleterre.

Les gisements de charbon du centre-nord de l’Angleterre, du pays de Galles et de l’Écosse, et les gisements de minerai de fer de la zone des Pennines ont joué un rôle important dans le développement industriel du pays. Le charbon et le fer ont déterminé la localisation et le développement de nombreuses villes britanniques.

3 POPULATION ET SOCIÉTÉ
3.1 Caractéristiques démographiques

Le Royaume-Uni comptait en 2008 60,9 millions d'habitants. Avec une densité moyenne d’environ 252 habitants au km², le pays possède une des plus fortes densités d’Europe. L’Angleterre, avec 83 % de la population totale, est la plus peuplée (384 habitants au km²). L’Écosse, accueillant un peu moins de 9 % de la population, est la moins peuplée (64 habitants au km²). Le pays de Galles et l’Irlande du Nord accueillent respectivement 5 % et 3 % de la population britannique (142 et 121 habitants au km²).

La population du Royaume-Uni est issue des peuples qui ont envahi les îles au cours des deux millénaires précédant l’an 1000 (les Celtes, les Romains, les Angles, les Saxons, les Scandinaves et les Normands). 89 % de la population vit dans des villes. Sa distribution, surtout en Grande-Bretagne, reflète l’histoire industrielle de l’île : 40 % environ de la population de la Grande-Bretagne se concentre dans les sept conurbations qui se sont développées autour de Londres, Manchester, Liverpool, Sheffield, Birmingham, Newcastle upon Tyne et Leeds, et qui sont devenues des centres industriels, miniers ou commerciaux au cours du premier siècle de la révolution industrielle. La concentration des deux tiers de la population du pays de Galles dans les vallées du sud et des trois quarts de la population écossaise dans les terres basses centrales autour de Glasgow et d’Édimbourg a la même origine. Tous ces centres urbains doivent s’adapter aujourd’hui au déclin des industries qui ont fait leur prospérité. Au cours du xxe siècle, le sud et le sud-ouest de l’Angleterre ont réaffirmé leur rôle historique de foyer de richesses économiques et de croissance démographique du Royaume-Uni.

3.2 Divisions administratives et villes principales

La capitale, siège du gouvernement et plus grande ville du Royaume-Uni, est Londres (population de la zone métropolitaine au recensement de 2006 : 7 512 400 habitants). La capitale de l’Écosse est Édimbourg (2001, 449 000 habitants), celle du pays de Galles est Cardiff (305 200 habitants) et celle de l’Irlande du Nord est Belfast (277 200 habitants). Toutes les autres grandes villes du Royaume-Uni, Glasgow (578 700 habitants) mise à part, sont situées en Angleterre : Birmingham (976 400 habitants), au cœur de la conurbation industrielle des Midlands, Leeds (715 500 habitants), Sheffield (513 100 habitants), Manchester (392 900 habitants) et les ports de Liverpool (439 476 habitants) et Bristol (380 615 habitants).

3.3 Langues et religions

La langue officielle du Royaume-Uni est l’anglais, qui appartient au groupe des langues germaniques et a intégré de nombreux apports des langues latines, notamment du français, lors de la conquête normande. Les langues celtiques, le gallois et le gaélique, sont encore parlées au pays de Galles : le gallois y est la langue officielle, à égalité avec l’anglais dans l’administration et les affaires juridiques. En Écosse, il est surtout parlé dans les îles ; en Irlande du Nord, il subsiste, mais affaibli. Le brittonique, un dialecte très proche du breton parlé sur le continent, n’est plus employé que par quelques centaines de locuteurs. Dans les îles Anglo-Normandes, des dialectes franco-normands sont encore en usage.

La Réforme a été introduite en Angleterre en 1532 par décision du roi Henri VIII, qui cherchait à affirmer la suprématie royale — l’Église anglicane étant un moyen terme entre la Réforme et la Contre-Réforme. Le souverain est le chef de l’Église officielle (established) ; il ne peut choisir d’épouse que dans une famille non catholique ; ne peuvent prétendre à la couronne que les descendants protestants de l’électrice de Hanovre. La réunion des différents royaumes s’est faite en laissant en place l’Église presbytérienne d’Écosse et l’Église du pays de Galles. En Irlande du Nord, la question religieuse a longtemps recouvert les différences socio-politiques et culturelles entre les Irlandais de souche et les descendants des colons anglais et écossais venus s’installer aux xviie et xviiie siècles. L’anglicanisme, majoritaire, est représenté par l’Église anglicane mais aussi par l’Église du pays de Galles, l’Église épiscopale écossaise et l’Église d’Irlande. La décision, en 1993, du synode annuel de l’Église anglicane d’accepter l’ordination des femmes a failli créer un schisme. Elle a été rejetée par l’Église du pays de Galles en 1994, mais approuvée par l’Église d’Écosse. Au début du xxie siècle, 72 % de la population se déclare chrétienne (recensement de 2001), majorité au sein de laquelle on dénombre une majorité d’anglicans. Les autres religions représentées sont essentiellement l’islam (2,7 %) et l’hindouisme (1 %).

3.4 Éducation

Historiquement, l’enseignement britannique a tiré son prestige à l’étranger de la réputation de ses écoles privées ou libres appelées public schools. Fondées au Moyen Âge comme institutions charitables destinées à l’éducation des garçons (parfois pauvres), des écoles comme Eton College, Harrow School et Rugby School sont finalement devenues des institutions payantes fréquentées presque exclusivement par les enfants des classes les plus aisées. Une toute petite minorité des enfants du Royaume-Uni fréquentent ce type d’école.

3.4.1 Angleterre et pays de Galles

La loi sur l’enseignement de 1944 a introduit un système national, placé sous l’égide du ministère de l’Éducation, qui a rendu l’enseignement secondaire obligatoire et gratuit. Écoles primaires et secondaires accueillent les enfants âgés de 11 à 15 ans ; leur orientation se fait sur la base de l’examen « 11-plus «, présenté lors de la dernière année du cycle primaire. Il donne aux enfants la possibilité d’entrer dans une grammar school ou dans une secondary modern school. L’obtention, à la fin du cycle secondaire, du A levels (« niveau A «), l’équivalent du baccalauréat, permet d’entrer à l’université. La scolarité est obligatoire jusqu’à 16 ans depuis 1972.

3.4.2 Écosse

Le système d’enseignement écossais présente quelques différences : les Écossais accordent depuis longtemps une grande importance à l’éducation, et le système d’écoles volontaires s’est développé au cours du xixe siècle. En 1872, la responsabilité de l’enseignement est passée des Églises à des conseils scolaires élus, scolarisant des enfants entre 5 et 13 ans et 1872 la scolarité obligatoire a été prolongée jusqu’à l’âge de 14 ans — avant l’Angleterre et le pays de Galles. En 1918 ont été fondées des LEA (autorités locales éducatives) pour remplacer les conseils scolaires — une partie du budget devant obligatoirement être allouée à l’enseignement secondaire. La loi sur l’enseignement (en Écosse) de 1945 a appliqué les mêmes dispositions que la loi anglaise et galloise de 1944. La scolarité a été prolongée jusqu’à 15 ans en 1947, et jusqu’à 16 ans en 1972. À la suite de la réorganisation du gouvernement local en 1975, les LEA d’Écosse sont devenues des conseils élus par les neuf autorités régionales et les trois autorités insulaires. Actuellement, l’éducation est placée sous la responsabilité du département d’Enseignement écossais.

3.4.3 Irlande du Nord

En Irlande du Nord, l’enseignement a été organisé en un système unique sous la direction d’un conseil, puis d’un ministère de l’Éducation par la loi sur l’enseignement de 1923. Les comtés et les bourgs ont été désignés comme LEA, et l’enseignement s’est inspiré du système anglais. La loi sur l’enseignement de 1947 a imposé des réformes comparables à celles imposées en Angleterre et au pays de Galles. L’enseignement secondaire est encore principalement sous la responsabilité d’organismes confessionnels subventionnés par des fonds publics.

3.4.4 Enseignement primaire

La responsabilité globale de toutes les écoles du Royaume-Uni est confiée à quatre départements gouvernementaux : le ministère de l’Éducation, dirigé par le ministre de l’Éducation, en Angleterre ; le bureau pour le pays de Galles du ministère de l’Éducation ; le bureau pour l’Écosse du ministère de l’Éducation ; le ministère de l’Éducation pour l’Irlande du Nord. Les trois derniers sont dirigés par les ministres de leurs pays respectifs. La majorité du budget de l’enseignement public provient de l’État, le reste des administrations locales. Jusqu’à la fin des années 1980, les LEA avaient la responsabilité de la répartition des finances et des élèves dans la majorité des écoles, de leur trésorerie, de leur entretien et de certains services comme l’achat de livres pour les bibliothèques. La loi sur la réforme de l’enseignement (Education Reform Act) instaurée par le gouvernement conservateur en 1988 a réduit les pouvoirs des LEA, donnant à chaque école le contrôle de son propre budget et autorisant les écoles à se soustraire au contrôle des LEA et à recevoir le statut d’école subventionnée. En Angleterre et au pays de Galles, les LEA sont responsables de l’affectation des fonds aux écoles en fonction du nombre d’élèves. Les conseils d’administration scolaires (comprenant les représentants des parents d’élèves et des enseignants et des représentants nommés par les LEA) sont responsables de l’établissement des budgets, du contrôle des dépenses et de la nomination et du renvoi du personnel, notamment. Le système est comparable en Irlande du Nord. En Écosse, l’administration déléguée a été introduite en 1996. Toutes les écoles secondaires financées par l’État en Angleterre, au pays de Galles et en Écosse peuvent obtenir le statut d’école subventionnée si les parents le décident par vote et si le ministère approuve les propositions de l’école. Les écoles subventionnées sont complètement autonomes et indépendantes des LEA : elles reçoivent les fonds directement du gouvernement. Un examen, fixé par la loi, ou Statutory Testing (appelé communément SATs) permet d’évaluer le niveau des élèves âgés de 7, 11 et 14 ans.

3.4.5 Enseignement complémentaire et supérieur

Après 16 ans, l’enseignement n’est pas obligatoire. Quand ils ont passé les examens du Certificat général d’enseignement secondaire (GCSE, en Angleterre, au pays de Galles et en Irlande du Nord) ou le Certificat d’enseignement écossais, les élèves ont le choix entre rester à l’école ou aller dans des collèges d’enseignement complémentaire. Ils poursuivent leurs études soit pour avoir une qualification professionnelle, soit — en Angleterre, au pays de Galles et en Irlande du Nord — pour passer les examens du niveau supérieur du Certificat général d’enseignement (GCE), communément appelé A levels, qui sont normalement exigés pour entrer à l’université. De nouveaux examens, comme les Qualifications nationales générales professionnelles (GNVQ), ont été introduits pour offrir une alternative à finalité professionnelle au GCE. En Écosse, l’équivalent est le Certificat écossais d’enseignement supérieur. Les universités britanniques sont complètement autonomes, et leur indépendance est garantie. Les ressources de l’enseignement et de la recherche proviennent de conseils établis par le Parlement. Il existe près d’une centaine d’universités, dont la moitié sont d’anciennes écoles polytechniques, en incluant l’université ouverte (open university). Les universités d’Oxford et de Cambridge ont été fondées aux xiie et xiiie siècles. Les universités écossaises de St Andrews, Glasgow, Aberdeen et Édimbourg datent du xive et du xve siècle. Toutes les autres universités de Grande-Bretagne ont été fondées aux xixe et xxe siècles. L’université ouverte, qui a son siège à Milton Keynes, Angleterre, a été fondée en 1969. Elle propose des cours par correspondance, des programmes de radio et de télévision, des cours d’été pour les étudiants résidents et accueille les étudiants sans diplômes. Il y avait lors de l’année universitaire 2001–2002 2,2 millions d’étudiants dans l’enseignement supérieur contre plus de 1,4 million d’étudiants dix ans plus tôt. En général, un jeune sur quatre poursuit des études supérieures en Angleterre, au pays de Galles et en Écosse, et un sur trois en Irlande du Nord.

3.5 Institutions et vie politique

Le Royaume-Uni est une monarchie parlementaire fondée sur une Constitution non écrite qui a évolué au cours des siècles : elle comprend la Statute Law (les lois fondamentales comme la Grande Charte), la Common Law (droit commun ou jurisprudence) et la coutume. Les lois fondamentales peuvent être amendées par une loi votée par le Parlement ou par l’accord général de la jurisprudence ; elles évoluent en fonction des conditions politiques. Les principes de la Constitution et la pratique constitutionnelle sont inhérents aux institutions gouvernementales. On distingue la personne du souverain et la Couronne. Les fonctions de la Couronne sont exercées par le Cabinet, le Conseil privé et le Parlement.

3.5.1 Rôle du monarque

Le souverain britannique est le chef de l’État : de ce fait, il est en théorie le chef du pouvoir exécutif, du corps législatif et de la justice ; il est commandant en chef des armées et « gouverneur suprême « de l’Église anglicane « établie «. Le monarque britannique est chef du Commonwealth of Nations et chef d’État de chacune des nations du Commonwealth, qui sont indépendantes du gouvernement britannique. La monarchie est héréditaire, revenant aux fils par ordre de primogéniture ou aux filles s’il n’y a pas d’héritier mâle. Depuis la loi de succession ou Act of Settlement de 1700, seuls les descendants protestants de la princesse Sophie, électrice de Hanovre et petite-fille de Jacques Ier d’Angleterre peuvent accéder au trône. Élisabeth II est montée sur le trône le 6 février 1952. L’héritier de la couronne est son fils aîné, Charles, prince de Galles.

Dans la pratique, le Royaume-Uni est dirigé par le gouvernement issu des élections à la Chambre des communes, au nom de Sa Majesté. Dans ce cadre, le monarque a des fonctions spécifiques, des prérogatives royales qui, la plupart du temps, sont accomplies par le gouvernement responsable devant le Parlement. Néanmoins, l’incapacité du souverain pourrait entraver la bonne marche de l’État et des institutions, aussi la loi prévoit-elle la nomination d’un régent en cas d’incapacité ou de minorité du roi. En théorie, le roi convoque, proroge et peut dissoudre le Parlement ; l’accord du roi est nécessaire pour avaliser les projets de loi votés par les deux chambres : sans son assentiment, un projet ne devient pas une loi. Le monarque nomme formellement le Premier ministre et le gouvernement, les juges, les officiers généraux de l’armée, les gouverneurs, les diplomates, les archevêques, les évêques et le clergé supérieur de l’Église anglicane. Le monarque octroie des honneurs et des récompenses, et il a le pouvoir, en tant que chef d’État, de déclarer la guerre, de conclure la paix, de reconnaître les États étrangers et de ratifier les traités. En ce qui concerne le travail quotidien du gouvernement, le monarque a le droit d’être consulté sur tous les aspects de la vie du pays et doit faire preuve de la plus grande impartialité. Le souverain préside les réunions du Conseil privé, rencontre régulièrement le Premier ministre, reçoit des comptes rendus des décisions du cabinet, lit les dépêches et signe les documents d’État. Dans la pratique, les fonctions essentielles sont assurées par le gouvernement.

3.5.2 Pouvoir exécutif

Le pouvoir exécutif est exercé par le gouvernement de Sa Majesté, c’est-à-dire le cabinet, qui comprend les ministres, dirigés par un Premier ministre, et dépend du soutien de la majorité des membres de la Chambre des communes. En conséquence, le gouvernement est formé normalement par des membres du parti majoritaire à la Chambre des communes, et le chef de ce parti devient Premier ministre.

Le Premier ministre, qui est nommé par le roi, choisit les ministres de son gouvernement parmi les parlementaires de la Chambre des communes, mais aussi parmi les membres de la Chambre des lords, la Chambre haute du Parlement. Depuis le début du xxe siècle, le Premier ministre est toujours un membre de la Chambre des communes ; par tradition, il est aussi premier lord du Trésor et ministre de la Fonction publique. Le Premier ministre recommande au roi (ou à la reine) les personnes qui doivent faire partie du haut clergé de l’Église anglicane, les juges, les membres du Conseil privé et le gouverneur de la tour de Londres.

Le cabinet est le tenant de l’autorité suprême gouvernementale, il décide et met en place les politiques et l’action des différents ministères ; il comprend généralement 15 à 20 membres choisis par le Premier ministre avec l’accord du souverain : les ministres, les ministres sans portefeuille, qui ont des postes traditionnels (comme le lord président du Conseil, le lord du Sceau privé), et parfois des secrétaires d’État. Les politiques du cabinet sont collectives et s’exercent sous la responsabilité ministérielle. La responsabilité collective signifie que le cabinet agit à l’unanimité. La responsabilité ministérielle signifie que chaque ministre est responsable de l’action de son ministère et doit répondre de ses activités devant le Parlement.

3.5.3 Conseil privé

Avant le développement du cabinet au xviiie siècle, le Conseil privé était le principal détenteur du pouvoir exécutif. Ses fonctions sont désormais assumées par le cabinet. De nos jours, il est surtout chargé de conseiller le monarque sur l’approbation des ordonnances royales délibérées en Conseil privé. Elles sont de deux sortes : celles qui ressortissent à la prérogative royale (la ratification des traités ou l’octroi de chartes royales) et celles qui relèvent de l’autorité législative. Les membres du Conseil sont nommés à vie ; on y trouve tous les ministres du cabinet en poste, tous les ministres des cabinets antérieurs encore en vie, les archevêques de Canterbury et de York, le Speaker (président) de la Chambre des communes et des personnalités de haut rang du Royaume-Uni et d’autres États du Commonwealth.

Le Conseil privé compte plus de 500 membres ; il se forme en comités dont certains ont un rôle majeur, notamment ceux qui ont trait à la législation des dépendances de la Couronne, des îles Anglo-Normandes et de l’île de Man. Le comité juridique est l’un des plus importants : il sert de cour d’appel supérieure pour les territoires sous dépendance britannique.

3.5.4 Pouvoir législatif

C’est à la fin du xve siècle que le Parlement a pris la forme qu’on lui connaît de nos jours. Ses fonctions consistaient à approuver les impôts et à légiférer. Il était composé de deux chambres, celle qui représentait les communautés (la Chambre des communes) et celle qui siégeait en vertu du rang de ses membres (Chambre des lords). Il a fallu plusieurs siècles pour aboutir à la structure parlementaire actuelle du Royaume-Uni.

Constitutionnellement, le pouvoir législatif suprême est, au Royaume-Uni, « la Couronne au Parlement «. Pour qu’un projet de loi se transforme en loi, il doit être approuvé par les trois éléments qui forment le Parlement : le monarque, la Chambre des lords et la Chambre des communes. L’approbation royale est devenue automatique ; la Chambre des lords ne peut plus, aujourd’hui, que retarder l’application de certaines lois.

La Chambre des lords est composée de lords temporels et de lords spirituels. Les premiers sont les pairs héréditaires, les pairs nommés à vie pour apporter leur aide à la chambre dans ses attributions juridiques, les lords d’appel ou law lords et d’autres lords nommés à vie en reconnaissance des services rendus. L’abolition de l’hérédité parlementaire a été annoncée en novembre 1998 par la reine d’Angleterre. Les lords spirituels sont les archevêques de Canterbury et de York, les évêques de Londres, Durham et Winchester et les 21 évêques diocésains les plus âgés de l’Église anglicane. La Chambre des lords comptait, en 1994, 1 198 membres, dont environ un tiers assistait régulièrement aux séances (généralement les pairs nommés à vie).

Le gouvernement peut d’abord présenter ses projets de loi à la Chambre des lords. Cependant, les questions fiscales sont toujours débattues en premier à la Chambre des communes. Après avoir été votés à la Chambre des communes, les projets de loi sont votés par la Chambre des lords, mais ce vote n’est pas nécessaire pour faire adopter une loi. Depuis la loi de 1911, les lords ne sont plus en mesure de bloquer la législation fiscale. Selon la loi de 1949, ils ne peuvent plus s’opposer aux propositions de loi si elles ont été votées au cours de deux sessions successives de la Chambre des communes : les lords peuvent donc repousser l’entrée en vigueur d’une loi pendant un an. Il existe une exception : la prolongation de la durée d’une législature requiert l’approbation des deux chambres. Ces limitations des pouvoirs de la Chambre des lords sont fondées sur l’évolution de la société : la noblesse y a perdu son statut dominant sur l’évolution du parlementarisme ; la Chambre des lords n’est pas élue, elle se cantonne au rôle d’un Sénat qui donne son avis. Malgré des tentatives d’élargissement de la base sociale des membres de la Chambre des lords, il existe un fort mouvement en faveur de son remplacement par une chambre élue au suffrage universel.

Les membres de la Chambre des communes sont élus au suffrage universel, au scrutin uninominal à un tour. La majorité électorale a été portée à dix-huit ans en 1969. Ne peuvent être élus à la Chambre des communes les membres de la Chambre des lords, certains membres du clergé, les fournisseurs du gouvernement, les shérifs et certains fonctionnaires désignés aux affaires électorales. Le nombre des députés dépend du nombre total de sièges à pourvoir, qui est calculé par une procédure définie par la Chambre des communes et fondée sur la population totale du pays. En Grande-Bretagne, les circonscriptions électorales comprennent en moyenne 60 000 habitants. L’Écosse envoie 72 représentants, le pays de Galles 38, l’Irlande du Nord 17. La Chambre des communes compte 651 membres depuis les élections de 1992. Pour s’assurer de la juste délimitation des circonscriptions électorales et de l’égalité du corps électoral, quatre commissions des délimitations (une pour chaque pays) contrôlent le découpage électoral. Les changements interviennent tous les huit à douze ans. Les derniers changements, annoncés en 1995, recommandaient la création de nouvelles circonscriptions par la division de certaines circonscriptions existantes et par la fusion d’autres circonscriptions. Légalement, la durée d’une législature est de cinq ans, sauf si le Parlement est dissous plus tôt ou prolongé par une loi spéciale — en temps de guerre ou en cas de péril national. Le Parlement est dissous par le souverain au terme des cinq ans ou à la demande du Premier ministre. Tous les membres de la Chambre des communes sont alors soumis à réélection.

Bien qu’en théorie tout membre du Parlement puisse présenter une proposition de loi, les ministres du cabinet sont à l’origine des propositions de loi approuvées par le Parlement, chacun d’entre eux étant responsable des propositions ayant trait à son ministère. Les lois votées par le Parlement sont rédigées en termes généraux. Elles sont complétées par les dispositions détaillées des ordonnances royales, délibérées en Conseil privé, préparées par le ministre responsable et promulguées par proclamation de la Couronne. La défaite sur un point important ou une motion de censure entraîne la démission du cabinet et des élections législatives. Le Premier ministre peut procéder à un remaniement ministériel soit en renvoyant les ministres, soit en leur attribuant d’autres fonctions. Cette possibilité lui permet de conserver son pouvoir. Les ministres peuvent démissionner de leur poste sans quitter le Parlement.

3.5.5 Pouvoir judiciaire

L’Angleterre, le pays de Galles, l’Écosse et l’Irlande du Nord ont chacune leur propre système judiciaire. Tous ont des services pénitentiaires, de poursuites judiciaires et de police différents. Les systèmes des cours civiles et le droit civil écossais diffèrent des systèmes anglais et gallois. Le système irlandais est comparable sur bien des points aux systèmes anglais et gallois. La Common Law tient cependant une place importante dans les différents systèmes. De plus, la législation européenne, depuis l’intégration du Royaume-Uni à l’Union européenne (UE), a la préséance dans certains cas, économiques et sociaux principalement, sur la législation nationale. Dans tous les cas, le système judiciaire est indépendant du gouvernement.

3.5.6 Partis politiques

Le système de partis, qui date de la fin du xviie siècle, est un élément essentiel du fonctionnement du régime politique britannique. Le Royaume-Uni connaît dans la pratique un système bipartite depuis plus d’un siècle, le Parti conservateur et le Parti travailliste dominant en alternance la scène politique.

Le Parti libéral, qui a régulièrement gouverné pendant des décennies, a perdu une partie de sa base électorale ; il a fusionné en 1988 avec le Parti social-démocrate (formé par des dissidents du Parti travailliste) pour former le Parti libéral-démocrate. Les autres principaux partis politiques sont le Parti nationaliste écossais, le Plaid Cymru (nationalistes gallois) et les partis d’Irlande du Nord : le Parti unioniste d’Ulster (UUP), le Parti unioniste démocratique, le Parti travailliste et social-démocrate et le Sinn Féin.

3.5.7 Défense nationale

Le Royaume-Uni appartient à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN). La base du recrutement militaire est le volontariat. En 2004, l’armée régulière comptait 116 760 hommes et femmes. La marine rassemblait 40 630 hommes et la Royal Air Force 48 500 membres.

4 ÉCONOMIE
4.1 Généralités

Le Royaume-Uni est l’un des premiers pays commerciaux et industriels du monde. Son produit intérieur brut (PIB) s’élevait à 2 377 milliards de dollars en 2006.

Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, le pays a dû faire face à des problèmes économiques persistants, tels que la pression sur la monnaie, un déficit de la balance générale des paiements, l’inflation et les difficultés de son système industriel. Pendant la crise économique mondiale de 1974, ces problèmes sont devenus critiques : le chômage a frappé plus d’un million de personnes, la productivité a chuté, les salaires ont baissé et la monnaie a atteint son niveau le plus bas. En juillet 1975, le gouvernement a pris des mesures anti-inflationnistes draconiennes, soutenues à la fois par les entreprises et les syndicats, qui ont contenu avec succès la hausse des salaires et de l’inflation. Les améliorations de la balance des paiements les plus significatives ont eu lieu à la fin des années 1970, grâce aux revenus générés par le pétrole de la mer du Nord. À partir de 1979 et l’arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher, les politiques économiques gouvernementales ont encouragé le secteur privé tout en contrôlant les dépenses publiques. Les secteurs les plus importants, comme les transports, les communications, l’acier, le pétrole, le charbon, le gaz et l’électricité, nationalisés par les travaillistes dans les années 1940, ont été privatisés par les gouvernements conservateurs au cours des années 1980 et 1990. Le maintien de l’inflation à un niveau bas est resté la priorité du gouvernement, mais au prix d’un chômage élevé. Au milieu des années 1980, les chômeurs étaient plus de trois millions, et 2,6 millions une décennie plus tard. Le taux de chômage a continué à baisser au cours des années suivantes, passant de 11,2 % en 1985 à 4,5 % en 1998, soit un million de personnes.

Le retour au pouvoir des travaillistes en 1997 marque une rupture avec la politique libérale qui a prévalu depuis près de vingt ans. Le nouveau Premier ministre, Tony Blair, engage le pays sur la « troisième voie «, entre ultra libéralisme et étatisme. Il se lance dans une politique keynésienne de hausse des investissements publics (il augmente notamment les dépenses pour les transports, l’éducation et la santé) sans augmentation des impôts. Un salaire minimum est instauré en avril 1999, et un important programme baptisé welfare to work (« de l’assistance au travail «) vise à endiguer le chômage qui ne s’élève plus qu’à 5 % en 2003. Mais, dans le même temps, les écarts de revenus continuent de se creuser au sein de la population, qui compte plus de 13 millions de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté au milieu des années 2000.

Depuis 1973, le Royaume-Uni est membre de la Communauté européenne (désormais Union européenne), mais le Royaume-Uni a choisi en 1997 de ne pas adhérer à la monnaie unique — l’euro — mis en circulation en janvier 2002.

4.2 Population active

La population active britannique s’élevait en 2006 à environ 30,8 millions de personnes. La structure de l’emploi a connu de profonds changements au cours des cinquante dernières années. Les trois quarts de la population travaillent maintenant dans le secteur des services (contre environ un tiers en 1955). L’industrie, qui a longtemps été le secteur le plus important (42 % en 1955) n’emploie plus aujourd’hui que 22 % de la population active. Les femmes représentent 45,4 % de la population active. Les tendances les plus récentes indiquent une augmentation du travail à temps partiel et une précarisation des emplois (ils sont souvent à durée déterminée).

Le chômage, qui a atteint 3 millions de personnes pendant la crise de la fin des années 1980, touchait encore plus de 2,6 millions de personnes à la fin de 1994, c’est-à-dire 9,2 % de la population active, avant d’être ramené à 4,6 % en 2004.

Le Royaume-Uni a été l’un des berceaux du mouvement syndical, dont l’influence a nettement diminué depuis 1980. Les changements dans la structure de l’emploi (diminution du secteur industriel et augmentation du travail à temps partiel) ont eu une influence négative sur le nombre de syndiqués. En 2003, les 67 syndicats formant le Trade Unions Congress (TUC) comptaient au total 6,5 millions de membres. Les lois instaurées par le gouvernement conservateur dans les années 1980 (scrutin secret pour le vote d’une grève et interdiction du monopole d’embauche) ont réduit leur pouvoir.

4.3 Agriculture, forêts, pêche

Environ 24 % de la superficie totale des terres du Royaume-Uni sont cultivées. Le poids du secteur, en termes d’emplois et de PIB, est inférieur aux autres pays industriels : il reflète l’industrialisation précoce du pays. L’agriculture employait 1,4 % de la population active en 2006 et représentait 0,90 % du PIB. Elle présente cependant un haut niveau de productivité.

La Grande-Bretagne, notamment l’Écosse et le pays de Galles, disposent de grandes étendues de prairies. Les terres arables sont concentrées dans l’est et la partie centrale du sud de l’Angleterre et en Écosse. Les principales productions sont le blé (14,7 millions de tonnes en 2006), l’orge (5,2 millions de tonnes), la betterave à sucre (7,1 millions de tonnes), les pommes de terre (5,7 millions de tonnes), sans oublier une importante production horticole et maraîchère.

Les forêts couvrent environ 2,8 millions d’hectares au Royaume-Uni, soit 7 % de la superficie de l’Angleterre, 15 % de celle de l’Écosse, 12 % de celle du pays de Galles et 5 % de celle de l’Irlande du Nord. La production du bois de coupe s’élevait à 8,4 millions de m3 en 2006. Les propriétaires privés, qui possèdent plus de 55 % des forêts, ont été encouragés à reboiser 8 000 ha par an.

La pêche couvre environ 55 % de la consommation de poisson dans le Royaume-Uni. La pêche hauturière est en déclin depuis les années 1970, en partie en raison des restrictions imposées par l’Union européenne. Elle demeure très importante pour l’économie de l’Écosse et celle de certaines zones du sud-ouest de l’Angleterre. En 2005, on pêchait 842 271 tonnes de poissons par an. Les principaux poissons d’eau douce commercialisés étaient le saumon, la truite et l’anguille. Actuellement, les deux premiers proviennent surtout d’élevages. Les ports de pêche importants sont Hull, Grimsby et Plymouth, en Angleterre ; Aberdeen, Lerwick et Ullapool en Écosse, et Kilkeel en Irlande du Nord. La flotte de pêche britannique comprenait environ 10 000 unités au début des années 2000.

Comme pour l’agriculture, la politique de la pêche du Royaume-Uni est désormais déterminée par la politique de pêche commune (PPC). La surexploitation des mers européennes a entraîné l’imposition de quotas de plus en plus stricts pour permettre aux différentes espèces de se reconstituer. Possédant l’une des flottes de pêche les plus importantes de l’Union européenne, le gouvernement a pris des mesures financières pour encourager une réduction de la pêche.

4.4 Mines et industries
4.4.1 Extraction minière

Le Royaume-Uni possède surtout du charbon et du fer. La localisation et l’importance historique des gisements miniers ont eu un impact dans la distribution géographique de la population britannique et dans le développement de certaines villes. L’extraction minière est ancienne : les mines de sel, à Cheshire en particulier, étaient déjà exploitées pendant la préhistoire.

Les veines aurifères et argentifères du pays de Galles, comme le pétrole et le gaz naturel, sont propriété de la Couronne : les producteurs ne peuvent obtenir que des concessions d’exploitation. On extrait du calcaire et de la dolomie, du sable et du gravier, du grès, de l’argile et des schistes, du sel et du kaolin.

4.4.2 Énergie

Le Royaume-Uni possède les plus importantes ressources énergétiques de l’Union européenne.

L’exploitation du charbon, comme dans les autres pays européens, n’a cessé de décliner : en 1913, on en produisait 292 millions de tonnes. À la fin de 1992, lorsque la British Coal Corporation a mis 28 mines en vente, la production était inférieure à 84 millions de tonnes et il n’y avait plus que 50 puits (dont moins de la moitié étaient encore en activité). Lors de la privatisation en 1995 de la British Coal, la production se situait à environ 60 millions de tonnes — 27,8 millions de tonnes en 2003. Les emplois dans le secteur minier étaient passés d’environ 200 000 en 1985 à environ 11 000 dix ans plus tard, avec des conséquences sociales dramatiques pour les communautés minières des régions comme le Yorkshire, le Nottinghamshire, le Derbyshire et le sud du pays de Galles. Néanmoins, 25 % de l’énergie consommée au Royaume-Uni provient encore du charbon.

Du pétrole a été découvert en 1969 en mer du Nord, au large de l’Écosse. En 1980, 15 champs produisaient 1,6 million de barils par jour, couvrant pratiquement la totalité des besoins du Royaume-Uni, le pétrole devenant ainsi une source importante de devises. L’extraction du gaz naturel de la mer du Nord s’est développée graduellement à partir de 1967. De nouveaux gisements offshore ont été découverts depuis 1980, ainsi qu’à Wytch Farm dans le Dorset. Au début des années 2000, le Royaume-Uni était le dixième producteur mondial de pétrole et le quatrième producteur de gaz naturel. La production de pétrole brut s’élevait à 765 millions de barils par an et la production de gaz à 103 milliards de m3. La fusion en août 1998 de British Petroleum et Amoco (États-Unis) a donné naissance au 3e groupe pétrolier mondial, derrière les groupes Royal Dutch / Shell / Texaco et Exxon/Mobil.

Le Royaume-Uni a été le premier pays à utiliser l’énergie nucléaire pour la production d’électricité. La première centrale nucléaire a commencé à fonctionner à Hall, dans le Cumberland, en 1956. Au début des années 2000, les centrales nucléaires fournissaient 23 % de l’électricité produite au Royaume-Uni, tandis que les centrales thermiques utilisant des combustibles fossiles (principalement du charbon, mais aussi du pétrole) produisaient près de 74 % de l’énergie restante. Les énergies renouvelables produisaient environ 1 % de l’énergie. La production annuelle d’électricité était de 370 milliards de kWh au début des années 2000. Le secteur de l’électricité a été privatisé en 1989 et British Gas en 1986.

4.4.3 Production industrielle

Malgré la crise chronique qui affecte les pays de l’Union européenne depuis 1970 et en dépit d’une politique de désindustrialisation et de délocalisation massive, le Royaume-Uni demeure un grand pays industriel. En 2006, l’industrie représentait 24,1 % du PIB. L’emploi a cependant chuté dans ce secteur en raison de la fermeture d’entreprises, de l’émergence de nouvelles technologies et des gains de productivité. En 1986, environ 5,2 millions de personnes travaillaient dans l’industrie. En 1993, elles n’étaient plus que 4,4 millions. Les industries de pointe comme l’industrie pharmaceutique, l’électronique, l’industrie aérospatiale et le matériel pour l’extraction pétrolière offshore se sont développées.

Les principales régions industrielles traditionnelles d’Angleterre sont le district urbain de Londres et les comtés métropolitains du district urbain de Manchester, les West Midlands (Birmingham), le South Yorkshire et Tyne and Wear.

4.5 Secteur tertiaire
4.5.1 Monnaie et banques

La livre sterling est l’unité monétaire du Royaume-Uni, divisée en 100 pence. Depuis 1968, le pays a adopté le système décimal pour sa monnaie. La Banque d’Angleterre, créée en 1694, nationalisée en 1946, est devenue la banque émettrice pour l’Angleterre et le pays de Galles, et a obtenu l’indépendance en matière de détermination des taux d’intérêts en mai 1997. Plusieurs banques en Écosse et en Irlande du Nord peuvent émettre de la monnaie en quantités limitées. Le Royaume-Uni a 13 banques commerciales principales, disposant de 10 000 succursales sur le territoire national et à l’étranger. La plupart d’entre elles sont des filiales des quatre grandes banques, Lloyd’s, Barclays, National Westminster et Midlands. La poste, les caisses d’épargne, les coopératives et les sociétés de construction offrent aussi des services bancaires.

Il existe aussi des banques d’escompte et d’autres institutions financières comme le Stock Exchange de Londres et un marché de l’assurance Lloyd’s ; ils sont liés au rôle que joue le Royaume-Uni comme l’un des principaux centres financiers du monde. La City de Londres dispose cependant de la plus grande concentration de banques étrangères du monde, et draine 20 % du total du crédit bancaire international. Elle est le principal marché international d’actions ordinaires du monde, l’un des plus grands marchés de dérivés financiers et le principal marché de matières premières. En juillet 1998, l’accord signé entre le London Stock Exchange et la Deutsche Börse a permis la création du premier marché boursier européen.

4.5.2 Transports

Au début des années 1990, les compagnies britanniques possédaient 668 navires jaugeant 13,6 millions de tonnes, 50 % de moins qu’en 1980. Les ports les plus importants sont Londres, Southampton, Liverpool, Felixstowe et Douvres. Les ports nationalisés à la fin des années 1940 ont été privatisés au début des années 1980. Ceux qui relèvent encore du secteur public sont gérés comme des entreprises privées par des fidéicommis, avec la possibilité, selon la loi de 1991, d’être totalement privatisés. Portsmouth et les ports pétroliers des Shetland et des Orcades sont gérés par les autorités locales.

Le Royaume-Uni compte environ 3 200 km de canaux et de rivières navigables, soit deux fois moins qu’au xixe siècle. Citons le Manchester Ship Canal et le Caledonian Canal, ce dernier reliant l’Atlantique à la mer du Nord.

La privatisation des chemins de fer britanniques s’est faite en 1996. Mais elle a rencontré une forte opposition et, surtout, à la suite de nombreux accidents ferroviaires, le gouvernement a décidé de faire marche arrière fin 2003 en redonnant à l’État la responsabilité de la gestion de la maintenance du réseau ferré britannique. En 2005, 16 208 km de voies ferrées étaient ouverts au trafic au Royaume-Uni.

Au début du xixe siècle, l’idée d’un tunnel sous la Manche séduisait les esprits. Le projet a été abandonné puis repris en 1957, puis de nouveau gelé par le Royaume-Uni en 1973 en raison de son coût. En 1987, les travaux ont repris et ont été terminés en 1993, avec un an de retard. Long de 52 km, il relie Folkestone à Calais en France, et a coûté plus de 16 milliards de dollars. Il est situé à 130 m de profondeur et a été inauguré officiellement le 6 mai 1994, par la reine Élisabeth II et le président François Mitterrand. L’Eurostar, train à grande vitesse, relie Londres à Paris depuis 1994.

Privatisée en 1987, British Airways est l’une des principales compagnies aériennes au monde. En septembre 1998, British Airways et American Airlines (la première compagnie américaine) se sont regroupées, avec d’autres compagnies, pour fonder la plus grande alliance aérienne du monde, Oneworld. En 1976, en collaboration avec Air France, British Airways a inauguré un service de passagers en Concorde, qui a pris fin en 2003. Britania Airways est la principale compagnie aérienne de vols charters au monde. Les principaux aéroports sont Heathrow et Gatwick, les aéroports de Londres. Heathrow, avec 63 millions de passagers en 2002, était de loin au début du xxie siècle le premier aéroport mondial pour le trafic international.

En 1970, le Royaume-Uni a rejoint Airbus Industries, un consortium européen de construction aéronautique, en tant que membre associé et est devenu un membre à part entière en 1979. Airbus fabrique des avions de passagers à grande capacité ou wide bodies long et moyen-courriers ; chaque membre du consortium fabrique des parties déterminées. Les autres membres du consortium sont la France, l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas et l’Espagne. En août 1998, British Airways a, pour la première fois de son histoire, abandonné Boeing au profit d’Airbus en commandant 59 appareils.

4.6 Commerce extérieur

Au début des années 2000, le Royaume-Uni est le sixième pays exportateur du monde. Ses importations concernent les produits alimentaires, ceux du bois et du papier, les machines, les produits chimiques, le matériel de transport, d’autres produits finis et le matériel informatique. Le Royaume-Uni exporte surtout des machines, du matériel de transport, des produits finis de base, du pétrole, des produits chimiques, des instruments de précision, du matériel aéronautique et électronique et des biens d’équipement. En 2004, les exportations s’élevaient à 348,4 milliards de dollars et les importations à 461,1 milliards de dollars. Les partenaires commerciaux du Royaume-Uni ont radicalement changé depuis son adhésion à la CEE en 1973. Les échanges avec les pays de l’ancien Empire britannique, qui occupaient la première place, ne représentent plus qu’une petite partie des exportations et des importations. L’Union européenne représente maintenant plus de la moitié des importations et des exportations. L’Allemagne, les États-Unis, la France et les pays du Benelux sont les principaux partenaires commerciaux du Royaume-Uni.

5 HISTOIRE

L’histoire du Royaume-Uni de Grande-Bretagne — puis de Grande-Bretagne et d’Irlande (1801), et enfin de Grande Bretagne et d’Irlande du Nord (1922) — commence au xviiie siècle lorsque l’Angleterre (unie depuis l’Acte de 1536 au pays de Galles) se rapproche de l’Écosse par l’Acte d’union de 1707. Déjà, un premier rapprochement s’était opéré au siècle précédent — lors de l’accession au trône d’Angleterre, sous le nom de Jacques Ier, du souverain écossais Jacques VI Stuart —, mais les royaumes étaient néanmoins restés séparés.

Par l’Acte d’union de 1707, les deux Parlements anglais et écossais s’unissent, et Londres devient la capitale de toute l’île. La Grande-Bretagne possède désormais un seul Parlement, un seul système fiscal, un seul système de poids et de mesures. Toutes les barrières douanières à l’intérieur de l’île sont abolies. L’Angleterre et l’Écosse conservent cependant des systèmes judiciaires et des Églises officielles différentes.

Pour l’histoire du Royaume-Uni avant 1707, voir Angleterre, Écosse et pays de Galles.

5.1 La construction du Royaume-Uni

L’Acte d’union de 1707 unifie les deux pays et centralise les pouvoirs dans les mains de la reine Anne Stuart. Mais dès 1715, les jacobites — partisans des souverains catholiques écossais, les Stuart — se soulèvent.

5.1.1 L’entreprise coloniale
5.1.1.1 La rivalité franco-britannique

Les entreprises coloniales et les affaires continentales sont au centre des préoccupations des souverains britanniques. Toutes les interventions de la Couronne sur le continent ont un prolongement colonial, ce qui permet aux Britanniques, grâce à leur puissance maritime, de prendre le contrôle d’un immense empire. Grâce aux victoires du duc de Marlborough, la guerre de Succession en Espagne (1701-1714) se solde par un traité avantageux : certes, le roi Louis XIV de France peut installer son petit-fils sur le trône d’Espagne, mais l’union des deux royaumes est interdite. De surcroît, par le traité d’Utrecht de 1713, la France doit céder au Royaume-Uni ses territoires nord-américains de la baie d’Hudson, d’Acadie (Nouvelle-Écosse) et de Terre-Neuve. L’Espagne doit céder Gibraltar et Minorque, et octroyer aux commerçants britanniques un droit illimité de commerce avec les colonies espagnoles d’Amérique du Sud jusqu’en 1750, qui inclut l’asiento, le monopole de l’importation des esclaves africains en Amérique latine. Une ville comme Liverpool bâtit bientôt sa fortune sur ce trafic du « bois d’ébène «.

5.1.1.2 Les guerres européennes

Entre 1739 et 1763, le Royaume-Uni est presque continuellement en guerre. Au conflit avec l’Espagne vient s’ajouter, en 1740, la guerre de Succession d’Autriche, qui réunit la Prusse, la France et l’Espagne contre l’Autriche. Le Royaume-Uni se rapproche de cette dernière, et les armées et la flotte britanniques combattent les Français en Amérique du Nord et en Inde, où les compagnies commerciales britanniques et françaises s’affrontent pour étendre leur influence. La guerre de Succession d’Autriche prend fin au traité d’Aix-la-Chapelle de 1748.

En 1756, le conflit reprend avec la guerre de Sept Ans (1756-1763) qui oppose le Royaume-Uni (allié à la Prusse) à la France (alliée à l’Autriche et à la Russie). Pour le royaume britannique, le conflit commence par une série de défaites en Amérique du Nord, en Inde, en Méditerranée et sur le continent, où les Français prennent Hanovre. Le roi George II fait alors appel à William Pitt, pour conduire la guerre, tandis que le duc de Newcastle dirige le pays. La supériorité navale britannique permet au Royaume-Uni de vaincre la flotte française au large du Portugal. Aux Indes, les Britanniques battent Dupleix, laissé sans renforts. Au Canada, les troupes britanniques et les colons défont Montcalm à la bataille des plaines d’Abraham, devant Québec. En 1763, un nouveau traité de Paris consacre cette victoire : la France perd définitivement ses colonies d’Amérique du Nord et ses comptoirs des Indes.

5.1.2 La révolution industrielle
5.1.2.1 Croissance démographique

Pendant tout le xviiie siècle, les îles Britanniques connaissent une forte croissance démographique. En 1801, l’année du premier recensement officiel, la population du royaume atteint 10,4 millions d’habitants. Les raisons de cet accroissement sont à rechercher dans la baisse du taux de mortalité, liée à un taux de natalité resté très fort et, plus tardivement, dans les progrès de l’hygiène et de la médecine : la découverte du vaccin contre la variole par le docteur Edward Jenner en 1796 ne trouve en effet une application massive que bien plus tard.

5.1.2.2 Industrialisation du pays

L’industrialisation, qui marque cette période, a été précédée et accompagnée par une révolution agricole. Au début du xviiie siècle, le mouvement des enclosures qui, en faisant disparaître les terres communes utilisées par les paysans, jette sur le pavé des villes des centaines de milliers de paysans, offre une main-d’œuvre bon marché aux manufactures. Cette révolution se poursuit avec la diversification des méthodes d’agriculture et l’introduction de nouvelles plantes, comme la pomme de terre. Dans le Norfolk, Jethro Tull invente le semoir mécanique ; des fermes modèles sont créées. L’accélération du rythme de l’évolution économique est déjà perceptible dans les années 1780, quand James Watt, un ingénieur écossais, perfectionne la machine à vapeur. De nouvelles inventions permettent de mécaniser la filature et le tissage du coton. Entre 1760 et 1830, la production des textiles de coton est multipliée par douze. Parmi les nouveaux procédés, le puddlage de Henry Cort permet d’obtenir du fer de meilleure qualité, débarrassé des scories de fonte : à la fin du siècle, le fer est devenu un produit courant. En 1799, on construit le premier pont entièrement métallique sur la Severn. De même, la production de houille est multipliée par quatre. En 1830, la révolution industrielle a fait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande (nouvelle appellation depuis 1801) « l’atelier du monde «.

5.1.2.3 Urbanisation

La révolution industrielle s’accompagne d’une mutation urbaine sans précédent. Les villes du nord-ouest de l’Angleterre, des Basses-Terres écossaises et du sud du pays de Galles gagnent des dizaines de milliers d’habitants, venus pour travailler dans les mines de charbon et de fer. Londres connaît également ce phénomène. La métropole de la Grande-Bretagne, dont la population est estimée à 600 000 habitants en 1701, compte 950 000 habitants en 1801. Cet essor urbain fait du Royaume-Uni le premier pays au monde à voir sa population urbaine dépasser sa population rurale.

5.2 Les premiers Hanovre

En 1714, la reine Anne meurt sans héritier. Conformément à la loi de succession de 1701, elle a pour successeur son plus proche parent protestant, l’électeur de Hanovre, qui devient roi en 1714, sous le nom de George Ier. Une nouvelle ère de l’histoire britannique commence.

5.2.1 Des princes allemands
5.2.1.1 George Ier (1714-1727)

Sous le règne de George Ier, le Royaume-Uni vit deux décennies de calme et de stabilité. La rivalité ouverte entre les factions « whigs « (précurseurs des conservateurs) et « tories « (précurseurs des libéraux) se traduit par la victoire des premiers qui disposent des ministères.

Les premiers souverains de la maison de Hanovre sont allemands ; George Ier, qui ne parle pas anglais, réside le plus souvent à Hanovre. Cet éloignement géographique du souverain permet la mise en place d’un régime parlementaire bipartite, décrit et vanté par les philosophes des Lumières, tels Montesquieu et Voltaire. En 1721, Robert Walpole est nommé Premier lord du Trésor. Il met progressivement en place un gouvernement d’autant plus indépendant que le souverain s’en désintéresse. Sous son gouvernement (1721-1742), Walpole réussit à maintenir des relations cordiales entre la France et le Royaume-Uni.

5.2.1.2 George II (1727-1760)

Souverain plus attaché à sa terre d’origine qu’au royaume britannique, George II délaisse les intérêts de la couronne pendant la guerre de Succession d’Autriche (1740-1748) et la guerre de Sept Ans (1756-1763). En poste depuis 1721, Robert Walpole dirige alors de fait le pays jusqu’en 1742. William Pitt devient ensuite le premier homme du gouvernement.

En 1745-1746, profitant de l’intervention britannique sur le continent, le prince Charles Édouard Stuart (jacobite) débarque en Écosse, où des milliers de highlanders se joignent à lui. En septembre, il prend Édimbourg et proclame son père, Jacques Édouard Stuart, roi sous le nom Jacques III. Marchant vers le sud avec son armée, il arrive jusqu’à Derby, à 161 km de Londres, mais il hésite à livrer bataille, en raison de la faiblesse numérique de ses partisans anglais. En décembre 1745, il se retire en Écosse où ses partisans sont massacrés à la bataille de Culloden.

5.2.2 Le règne anglophile de George III (1760-1820)

En 1760, le petit-fils de George II monte sur le trône sous le nom de George III. Né en Angleterre, il essaie de jouer un rôle direct dans le gouvernement du pays. Il nomme donc des hommes en lesquels il a confiance, comme son ancien tuteur, lord Bute, qui devient Premier ministre en 1762, puis William Pitt (1766-1768) et lord North (1770).

L’autoritarisme du gouvernement se heurte aux campagnes de libelles de l’opposition. Le journaliste John Wilkes est à plusieurs reprises poursuivi, condamné et emprisonné en 1764. Ses partisans, les défenseurs de la Déclaration des droits (Bill of Rights), demandent l’élargissement du texte constitutionnel, réclament la liberté de la presse, la cessation de la fraude électorale et de l’achat des votes, couramment pratiqués, et l’élargissement de la franchise (droit de vote).

5.2.2.1 La guerre de l’Indépendance américaine

Habitués depuis longtemps à disposer d’une importante autonomie et, après 1763, libérés du danger français, les colons américains supportent très mal la volonté du gouvernement britannique de leur faire payer une partie du prix de la guerre sous forme d’impôts et de taxes sur le commerce. George III et lord North décident de réprimer leur sédition par la force (voir guerre de l’Indépendance américaine).

Après la défaite du général Burgoyne à la bataille de Saratoga en 1777, la guerre civile devient une guerre internationale. Les Français (1778), puis les Espagnols (1779) et les Hollandais (1780) rejoignent le front antibritannique. La reddition du général Charles Cornwallis, à Yorktown devant les troupes de Washington en 1781, contraint lord North à démissionner l’année suivante. Un nouveau traité de Paris est signé en 1783 : l’indépendance des treize colonies qui forment la république des États-Unis d’Amérique est reconnue.

5.2.2.2 Le gouvernement de William Pitt le Second

La conséquence de la guerre est une réforme profonde des institutions. La loi de réforme économique (Economical Reform Act) de 1782 réduit les pouvoirs du roi. Le Parlement irlandais, contrôlé par les protestants anglo-irlandais, obtient une autonomie élargie. En 1783, William Pitt (dit le Jeune ou le Second) devient, à l’âge de vingt-quatre ans, le plus jeune Premier ministre du royaume. Il soutient notamment l’India Act (1784) qui donne au gouvernement l’autorité sur l’Inde britannique, au détriment de la Compagnie des Indes orientales. Chef de gouvernement de 1783 à 1801, puis de 1804 à 1806, Pitt le Second opère un renversement décisif de l’équilibre des pouvoirs : désormais, le roi ne gouvernera plus.

5.2.2.3 Coalitions contre la France

L’indépendance américaine et les réformes ont amené la constitution d’un fort parti réformateur anglais ; les sociétés de pensée franc-maçonnes fleurissent, comme les clubs jacobins, qui rassemblent l’élite des penseurs anglais. Des réformateurs comme Charles James Fox et Thomas Paine défendent la Révolution française ; d’autres, comme Edmund Burke, s’en détournent dès qu’ils réalisent qu’elle ne cherche pas uniquement à établir une monarchie constitutionnelle.

La première coalition formée contre la France par Pitt le Second, avec la Prusse, l’Autriche et la Russie, s’effondre en 1796 ; en 1797, le Royaume-Uni doit faire face aux tentatives d’invasion française en Irlande et au réveil du mouvement nationaliste. La guerre entraîne une forte augmentation de la production agricole et de certaines industries, mais elle provoque dans le même temps une inflation croissante : les salaires ne suivent pas le rythme des prix. En 1797, la Banque d’Angleterre est forcée d’abandonner l’étalon or, et le Parlement, pour financer la guerre, vote le premier impôt sur le revenu. Le Parlement entérine l’Acte d’union avec l’Irlande en 1801, et la formation du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande. Le Parlement de Dublin est supprimé et les députés irlandais siègent à Londres.

L’arrivée au pouvoir de Napoléon Ier en France inquiète plus encore le royaume. Malgré la défaite des marins français à la bataille d’Aboukir (1798), à terre, le sort des armes n’est pas favorable aux Britanniques. La deuxième coalition s’effondre en 1801 ; à Amiens, en 1802, le Royaume-Uni signe la paix avec la France. La guerre reprend l’année suivante, mais la troisième coalition s’effondre également entre 1805 et 1807. Les projets napoléoniens d’invasion de la Grande-Bretagne sont réduits à néant par le génie militaire d’Horatio Nelson, qui détruit la flotte française à Trafalgar en 1805, privant ce pays de marine pour vingt ans. Napoléon cherche alors à ruiner le Royaume-Uni par une politique de blocus, connue sous le nom de Blocus continental. Son non-respect par la Russie, pour laquelle les relations commerciales avec les Britanniques sont vitales, entraîne Napoléon dans une désastreuse campagne contre la Russie. En 1812, une quatrième coalition, réunissant le Royaume-Uni, la Russie, l’Autriche et la Prusse est cette fois victorieuse. En 1815, l’épisode des Cent-Jours voit la victoire du duc de Wellington à la bataille de Waterloo, qui ferme le cycle révolutionnaire et napoléonien.

5.2.3 Les règnes de George IV et Guillaume IV (1820-1837)

George IV, prince à la jeunesse turbulente, monte sur le trône en 1820. À sa mort en 1830, son frère Guillaume IV lui succède.

5.2.3.1 La crise de l’après-guerre napoléonienne

La fin de la guerre et de mauvaises récoltes provoquent une crise monétaire, industrielle et frumentaire, en 1816. Le prix de la victoire du Royaume-Uni dans les guerres napoléoniennes est une grave crise économique. La guerre a masqué les oppositions et la misère des artisans, des ouvriers et des petits paysans. Le gouvernement instaure des mesures protectionnistes (lois sur le blé, 1815), supprime l’impôt sur le revenu (1817) et rétablit l’étalon-or (1819). Ces mesures, combinées à l’élargissement du système de la manufacture et des usines, accroissent les manifestations populaires de résistance, qui dégénèrent parfois en affrontements sanglants, comme lors du massacre de Peterloo à Manchester, en 1819. Le gouvernement limite alors, par les Six Actes (1819), la liberté de la presse et le droit de réunion. Dans le même temps, Robert Peel, le ministre de l’Intérieur, réforme la loi criminelle et instaure une force de police moderne à Londres, les bobbies (appelés ainsi en référence au prénom de Peel).

Malgré un renouveau religieux au début du xixe siècle, les gouvernements tories refusent toujours de remettre en question les fondements religieux du régime politique. En 1828, le Parlement accepte d’abolir les mesures discriminatoires à l’encontre des protestant dissenters (non-conformistes) ; un an plus tard, le gouvernement du duc de Wellington (1828-1830) est contesté en Irlande par un mouvement massif : l’Association catholique demande l’émancipation des catholiques, tacitement promise par William Pitt le Second à l’époque de l’Acte d’union. Craignant une révolte générale, Wellington accorde aux catholiques le droit de siéger au Parlement et d’accéder à la fonction publique (1828, 1829), mais cette réforme divise le parti tory. En novembre 1830, l’élection qui suit la mort de George IV et le couronnement de son frère, Guillaume IV, amène au pouvoir un ministère whig, dirigé par Charles Grey.

5.2.3.2 Les réformes des années 1830

La grande nouveauté politique des années 1831 et 1832 réside dans le bill de réforme. On procède à une redistribution des sièges en faveur des villes industrielles, et on accorde le droit de vote à de nouvelles catégories sociales jusque-là privées de la capacité électorale. En Angleterre, au pays de Galles et en Irlande, l’électorat double. En Écosse, il est multiplié par 15. Une première loi sur le travail des femmes et des enfants réduit leur temps de travail (1833) ; une nouvelle loi sur les pauvres (très restrictive) est adoptée, créant des asiles, les workhouses, où l’on enferme les plus démunis qui y sont soumis à l’arbitraire le plus complet. L’esclavage dans les colonies est aboli la même année, sous l’impulsion des sociétés antiesclavagistes. La loi sur les municipalités (1835) met en place des conseils municipaux.

5.3 L’ère victorienne (1837-1910)
5.3.1 Le règne de Victoria (1837-1901)
5.3.1.1 Les débuts du règne

En 1837, Victoria, âgée de dix-huit ans, succède à son oncle, Guillaume VI. On assiste alors au déclin de l’esprit de réforme whig sous le ministère de lord Melbourne (1835-1841). Le règne de Victoria débute par une crise économique et par l’apparition d’un vaste mouvement de contestation populaire : le chartisme. Les chartistes exigent l’adoption immédiate d’une Charte du peuple, destinée à faire du Royaume-Uni une démocratie égalitaire ; ils réclament l’égalité électorale, le suffrage universel pour tous les hommes de plus de vingt et un ans et l’éligibilité de tous. Des millions de travailleurs signent les pétitions en faveur de la Charte en 1839, 1842 et 1848 ; les manifestations parfois violentes entraînent des émeutes, réprimées par l’armée. Le Parlement rejette la Charte du peuple à plusieurs reprises, mais se montre plus réceptif aux propositions de la Ligue pour l’abolition des lois sur le blé. Son principal leader, Richard Cobden, espère l’abolition des droits de douane sur les produits alimentaires, afin d’améliorer les conditions de vie des ouvriers et des travailleurs. C’est le ministère conservateur de Robert Peel (1841-1846) qui, sous le choc de la grande famine d’Irlande, réduit les droits de douane au sein du Royaume-Uni. Durant l’hiver de 1845-1846, Peel propose l’abolition complète des lois sur le blé. Cette mesure est adoptée, avec l’aide du parti whig, même si les deux tiers des conservateurs, liés aux grands propriétaires terriens, la condamnent. Les conservateurs se divisent alors entre peelites et protectionnistes, et les whigs reviennent au pouvoir avec John Russell (1846). L’abolition des lois sur le blé ne soulage en rien les souffrances de l’Irlande. Durant l’hiver de 1846, on assiste à la réapparition de la maladie de la pomme de terre, et les récoltes de blé dans le Royaume-Uni et en Europe sont médiocres. Affaiblis par la famine et l’éviction des fermiers par les propriétaires, environ un million d’Irlandais meurent entre 1847 et 1851.

Pendant les années Peel et Russell, la tendance au libre-échange se confirme, appuyée par l’abolition, en 1849, des lois de navigation ; tout un système de réglementation administrative est progressivement mis en place. Le travail des femmes et des enfants au fond des mines est définitivement interdit (1842) et, en 1847, le temps de travail est limité à dix heures par jour dans les usines. Des réglementations sont également imposées sur les systèmes sanitaires des villes (1842) et les transports ferroviaires (1844). Des commissions se créent pour contrôler les prisons, les asiles d’aliénés et les œuvres de charité privées.

5.3.1.2 La prospérité industrielle victorienne

L’exposition universelle de Londres en 1851, la première du genre, symbolise la suprématie industrielle britannique. Le réseau ferroviaire couvre 10 600 km en 1850. Le câble télégraphique permet des communications instantanées. Le procédé Bessemer (1856) réduit encore le coût de l’acier, et la construction des bateaux à vapeur prend un essor considérable durant les années 1860. La valeur des exportations britanniques est multipliée par trois ; les investissements de capitaux à l’étranger quadruplent. On enregistre également une amélioration du niveau de vie de la classe ouvrière ainsi que le développement du syndicalisme, avec la création du Trade Unions Congress (confédération intersyndicale) en 1868.

Après les révolutions survenues sur le continent européen en 1848, le Royaume-Uni, gouvernée par la coalition peelite-libérale (1852-1855) de lord Aberdeen, est entraînée dans une guerre avec la Russie. Allié à la France de Napoléon III, le Royaume-Uni participe à la guerre de Crimée en 1854, qui provoque la chute du ministère Aberdeen. Il est remplacé par lord Palmerston, un libéral. En 1857 et 1858, la révolte des cipayes est réprimée dans la péninsule indienne, et toutes les responsabilités de la Compagnie des Indes sont transférées à la Couronne. À l’inverse, on accorde l’autonomie interne aux colonies de peuplement : le Canada, fédéré dans le cadre de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1867, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et la colonie du Cap (Afrique du Sud). La colonisation se fait sur de nouvelles bases : l’exploitation primaire des colonies cède le pas à une colonisation paternaliste, où le Royaume-Uni apporte la modernité, la science et l’éducation aux peuples colonisés.

5.3.1.3 La rivalité Gladstone-Disraeli

De 1865 à 1881, la rivalité entre William Gladstone et Benjamin Disraeli domine la vie politique britannique. S’ils appartiennent initialement tous deux au parti tory, Gladstone se rapproche progressivement des libéraux. En tant que ministre des Finances du gouvernement Palmerston, il acquiert une grande popularité en abolissant l’impôt sur le papier (autorisant ainsi une réduction sensible du prix des journaux) et en préconisant l’extension du droit de vote. Disraeli est d’abord, à la fin des années 1840, le chef de file conservateur des protectionnistes à la Chambre des communes. En 1867, il accorde le droit de vote aux locataires de logement et non plus aux seuls propriétaires. Le nombre des électeurs ouvriers double : l’ensemble du corps électoral passe de 600 000 à 1 600 000 votants.

Disraeli succède à lord Derby au poste de Premier ministre en 1868, puis s’efface devant Gladstone après la victoire des libéraux aux élections de décembre. On doit à Gladstone (1868-1874) de nombreuses réformes : la séparation de l’Église d’Irlande et de l’État, la création d’un système national d’enseignement primaire, l’admission des dissenters religieux aux universités d’Oxford et de Cambridge, l’accès à la fonction publique au mérite, le scrutin secret et une réforme de la justice et de l’armée. Durant le ministère de Disraeli suivant (1874-1880), les conservateurs votent la législation proposant la « démocratie tory «, la légalisation du syndicalisme, la suppression des taudis et un début de législation sur la santé publique.

Durant son deuxième ministère (1880-1885), Gladstone lutte contre la corruption électorale (1883) et, avec la réforme de 1884, octroie le droit de vote à presque tous les hommes propriétaires ou locataires d’un logement (à l’exclusion des domestiques et des fils de famille vivant chez leurs parents). Gladstone tente également d’imposer la paix et une réforme agraire en Irlande, que défend au Parlement le Parti autonomiste irlandais de Charles Stewart Parnell. Quand Gladstone se rallie à la cause du Home Rule que propose Parnell — à savoir la création d’un ministère et d’un corps législatif irlandais autonomes —, il brise le Parti libéral et signe son suicide politique, la majorité protestante refusant tout compromis. Lors de son dernier ministère, Gladstone fait une ultime tentative visant à instaurer le Home Rule en Irlande (1892-1894), mais son projet est bloqué par la Chambre des lords.

5.3.1.4 Les dernières années de l’Empire victorien

L’essor enregistré au milieu de la période victorienne est suivi par une crise du système. Les États-Unis et l’Allemagne rattrapent le Royaume-Uni en termes de production d’acier et d’autres biens manufacturés. Le Royaume-Uni reste cependant le premier constructeur de navires, le premier transporteur maritime et le premier banquier du monde. L’envers de cette réussite est la subsistance de vastes poches de pauvreté dans les quartiers ouvriers de Londres et des grandes villes. Malgré une forte émigration vers les colonies britanniques et vers les États-Unis (plus de 200 000 départs chaque année durant les années 1880), la population, en Angleterre et au pays de Galles, est multipliée par deux entre 1851 et 1911 (elle passe à plus de 36 millions d’habitants) ; celle de l’Écosse augmente de plus de 60 % (approchant les 5 millions). En Irlande, où l’émigration est la plus forte, la chute de la population se stabilise autour de 2 millions d’habitants vers 1861.

Pendant les années 1880 et 1890, l’intérêt pour l’Empire est relancé par les politiques impérialistes des États-Unis, de l’Allemagne et de la France. Elles redonnent à la politique coloniale britannique une nouvelle vigueur ; on assiste alors à la naissance d’une rivalité avec la Russie, au Moyen-Orient et le long de la frontière indienne, et à une « lutte pour l’Afrique « entre le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne. Solidement installés à Hong Kong et Singapour, les Britanniques continuent leur expansion en Chine et dans le Pacifique Sud. Le percement du canal de Suez (1869) est indirectement à l’origine du protectorat britannique sur l’Égypte, occupée en 1882. La reine Victoria devient impératrice des Indes en 1876 ; les cinquantième (1887) et soixantième (1897) anniversaires du couronnement de Victoria célèbrent l’unité impériale. La poursuite de la colonisation est d’autant plus âpre qu’elle oppose les puissances coloniales entre elles, et qu’on s’en prend à des États historiquement et culturellement développés. Sous les ministères conservateurs de lord Salisbury (1885, 1886-1892 et 1895-1902), la politique agressive du secrétaire aux Colonies, Joseph Chamberlain, conduit au déclenchement de la guerre des Boers en 1899. Le Royaume-Uni ne remporte la victoire qu’en 1902, plus d’un an après la mort de Victoria, et l’Union sud-africaine ne voit le jour qu’en 1906.

5.3.2 La période édouardienne (1901-1910)

En 1901, Édouard VII monte sur le trône. Après sa victoire sur les Boers, le Royaume-Uni signe un traité avec le Japon (1902) et met fin à plusieurs décennies de rivalité avec la France en parvenant à l’Entente cordiale (1904). Après la réconciliation anglo-russe, les trois puissances forment la Triple-Entente (1907), destinée à faire face à la Triple-Alliance réunissant l’Allemagne, l’Autriche et l’Italie.

Marquant la fin du gouvernement aristocratique, lord Salisbury est le dernier des Premiers ministres choisis parmi les lords. Cependant, au début du règne d’Édouard VII, la majeure partie des Britanniques se préoccupe plus des questions intérieures. La loi sur l’éducation (1902) d’Arthur Balfour donne naissance à un système national d’enseignement secondaire, mais cette mesure réveille les anciennes passions religieuses. Pendant le ministère de Balfour (1902-1905), le Parti conservateur se divise à nouveau entre les protectionnistes, qui souhaitent restaurer les barrières douanières, et les partisans du libre-échange. Les élections générales de 1906 donnent aux libéraux une majorité écrasante. L’influence des syndicats se traduit par la naissance d’un petit Parti travailliste, composé de 29 membres. Le gouvernement libéral, d’abord présidé par Henry Campbell-Bannerman (1905-1908) puis par Herbert Henry Asquith (1908-1916), accorde le statut de dominion, c’est-à-dire une pleine souveraineté interne, à la jeune Union sud-africaine (1910) et une souveraineté partielle aux provinces des Indes britanniques (1909).

Inspiré par David Lloyd George, le gouvernement jette également les bases d’un début de sécurité sociale : création des assurances vieillesse (1908), des bureaux de placement (1909), de l’assurance chômage (1911), d’un programme de contribution d’assurance maladie pour la plupart des travailleurs (1911) et des comités pour fixer le salaire minimal des mineurs (1909, 1912). La volonté de Lloyd George, qui cherche à financer ce programme ambitieux par la mise à contribution des classes fortunées (1909), est repoussée par la Chambre des lords. Le gouvernement réplique par la loi sur le Parlement de 1911, qui entame le pouvoir des lords en réduisant la durée de leur veto et en leur interdisant de s’opposer à toute mesure fiscale.

Malgré la croissance économique, l’augmentation des salaires suit difficilement celle des prix, et le début des années 1910 est marqué par d’importantes grèves de mineurs, de dockers et de transporteurs. Le mouvement des suffragettes organise également de grandes manifestations en faveur du droit de vote des femmes. Quand le gouvernement libéral décide enfin de décréter le Home Rule en Irlande, les Irlandais protestants d’Ulster (province du Nord) s’y opposent fermement ; il est accordé en 1914, mais l’Ulster s’insurge. Entre-temps, la crise des Balkans a débouché sur la Première Guerre mondiale.

5.4 La monarchie parlementaire sous George V de Windsor (1910-1936)
5.4.1 La dynastie des Windsor

En 1910, George V succède à son père Édouard VII. Sept ans plus tard, il renonce à tous les titres allemands appartenant à la branche des Saxe-Cobourg-et-Gotha et proclame la maison de Windsor.

En mai 1915, le libéral Asquith forme une coalition regroupant des libéraux, des conservateurs et des membres du Parti travailliste. Lloyd George devient ministre de l’Armement. Cependant, les échecs de la guerre obligent Asquith à quitter le pouvoir. Il est remplacé par Lloyd George, qui dirige une coalition dominée par les conservateurs en décembre 1916. En Irlande, les troubles ne cessent pas : le Royaume-Uni ne peut y instaurer la conscription, et l’insurrection de 1916 — les Pâques sanglantes, qui font plusieurs centaines de morts et ravagent Dublin — annonce les troubles encore plus graves de l’immédiat après-guerre.

5.4.2 La tourmente de la Première Guerre mondiale
5.4.2.1 L’intervention britannique

En 1914, la menace allemande contre la France et la violation de la neutralité belge obligent le Royaume-Uni à déclarer la guerre à l’Allemagne. Un corps expéditionnaire britannique, commandé par le maréchal French, est immédiatement envoyé en France. Les Allemands repoussés sur la Marne par les troupes françaises et britanniques, la bataille sur le front de l’ouest s’enlise rapidement et se transforme en une sanglante guerre de tranchées, à laquelle les Alliés ne sont nullement préparés. Les efforts pour contenir les empires centraux (Allemagne, Autriche-Hongrie et Empire ottoman) dans les Balkans et en Asie Mineure, notamment la campagne des Dardanelles (1915-1916), échouent également. À l’occasion de la bataille du Jutland (1916), les Britanniques empêchent la flotte allemande de prendre le contrôle de la mer du Nord, mais les sous-marins allemands font peser sur le Royaume-Uni la menace d’une famine. Au début de l’année 1917, les convois de navires marchands sont protégés par des destroyers, qui permettent d’éviter ce désastre.

L’entrée en guerre des États-Unis, en avril 1917, rééquilibre les forces et rend possible le succès des offensives de l’été 1918 et la reddition de l’Allemagne en novembre.

5.4.2.2 Le gouvernement de Lloyd George

Les élections qui ont lieu immédiatement après l’armistice de Rethondes donnent à la coalition de Lloyd George, en place depuis 1916, une majorité écrasante. Le Parti travailliste, désormais formellement proche du socialisme, représente la principale opposition, tandis que les libéraux, divisés, sont écartés du pouvoir. La réforme de 1918 accorde le droit de vote à tous les hommes de plus de vingt et un ans, ainsi qu’à toutes les femmes âgées de plus de trente ans. En 1918, le budget annuel du Royaume-Uni équivaut à 13 fois celui de 1913 ; les impôts ont quintuplé et la dette nationale totale a été multipliée par 14.

5.4.3 L’entre-deux guerres
5.4.3.1 La recherche de la paix

Lloyd George représente le Royaume-Uni, qui fait partie des trois grands (avec la France et les États-Unis), à la conférence de la Paix de Paris en 1919. Les traités qui en découlent consolident l’Empire britannique : les colonies allemandes en Afrique et les territoires turcs-ottomans du Moyen-Orient sont placés sous mandat britannique. À l’intérieur du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande, un accord, négocié par Lloyd George en 1921, met un terme à la guerre civile qui sévit en Irlande. Les 26 comtés du Sud forment l’État libre d’Irlande (voir république d’Irlande) ; les 6 comtés d’Irlande du Nord restent au sein du Royaume-Uni et continuent d’être représentés au Parlement britannique, tout en disposant de leur propre Parlement. C’est en 1922 que le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande devient le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.

Le souvenir de la Première Guerre mondiale a fait naître chez les Britanniques le désir d’éviter un autre conflit ; le pays joue un rôle de premier ordre au sein de la Société des Nations (SDN) et lors des conférences pour le désarmement à Washington (1921-1922) et à Londres (1930), notamment. La politique étrangère du gouvernement britannique est guidée par le souci de ne pas voir l’Allemagne trop affaiblie. En conséquence, le Royaume-Uni ne soutient pas la politique française d’occupation de la Ruhr et approuve les décisions qui visent à alléger le fardeau financier de la République de Weimar. Les dirigeants britanniques, inconscients du danger nazi, adoptent après 1933 une politique d’apaisement à l’égard de l’Allemagne, alors qu’Adolf Hitler vient d’arriver au pouvoir. De même, le Royaume-Uni s’accommode-t-il parfaitement du régime mussolinien en Italie. Lorsque Adolf Hitler décide le retrait de l’Allemagne de la SDN (1934) et le réarmement (1935) puis la remilitarisation de la Rhénanie (1936) en dépit du traité de Versailles, les réactions sont tout aussi faibles, tant la peur de la guerre et l’esprit du pacifisme sont entrés dans les esprits.

5.4.3.2 La formation du Commonwealth

Au sortir de la Première Guerre mondiale, les dominions autonomes du Royaume-Uni (Canada, Australie, Nouvelle-Zélande et Afrique du Sud) entrent dans la jeune Société des Nations, créée pour tenter de régler par la négociation les conflits internationaux. L’Empire reste une réalité, même si le statut de Westminster (1931) proclame l’égalité de certaines nations au sein du Commonwealth, telles que le Canada et l’Australie.

5.4.3.3 Instabilité politique et réformes sociales

En 1922, l’opposition des membres du Parti conservateur du Parlement fait chuter Lloyd George, remplacé par le conservateur Bonar Law. Le Royaume-Uni connaît une relative instabilité politique, reflet du désarroi des classes dirigeantes face aux problèmes économiques et sociaux. Les conservateurs sont victorieux en 1922 mais, un an plus tard, le successeur de Bonar Law, le conservateur Stanley Baldwin, n’obtient pas de majorité nette pour le soutenir. À la suite de ces élections, Ramsay MacDonald, leader du Parti travailliste, devient le premier travailliste accédant au poste de Premier ministre. Son ministère dure moins d’un an (1924) ; en 1925, le Parti conservateur de Baldwin revient au pouvoir. Les efforts de Lloyd George et d’Asquith ne parviennent pas à rendre au Parti libéral sa base électorale : il reste un parti politique mineur dans le pays. Le ministère de Baldwin (1924-1929) est confronté à une mobilisation syndicale sans précédent, lors de la grève générale de 1926. La grève est organisée par les Trade Unions pour soutenir les mineurs, qui s’opposent à la baisse des salaires et à l’augmentation du temps de travail ; cette grève très dure est neutralisée par la troupe. À l’époque, cependant, elle est interprétée comme un défi lancé directement à l’État, et elle entraîne des changements dans la législation syndicale ; les travailleurs doivent s’engager dans un syndicat, et leur cotisation de membre n’est plus prélevée automatiquement sur leur salaire. Toutefois, le gouvernement Baldwin a engagé plusieurs réformes d’ordre social, dont la loi sur les pensions pour les veuves, les orphelins et les personnes âgées (1925). Un réseau national de distribution d’électricité est installé (1926). En 1928, on accorde à toutes les femmes le même droit de vote qu’aux hommes.

5.4.3.4 La crise économique mondiale et l’arrivée des travaillistes au pouvoir (1929-1935)

Entre 1929 et 1932, les effets de la crise économique mondiale frappent le Royaume-Uni, multipliant par deux un taux de chômage déjà élevé. En trois ans, on constate une chute de 25 % des niveaux d’activité industrielle et des prix ; certaines industries, comme la construction navale, cessent quasiment toute production. Le deuxième gouvernement travailliste formé par MacDonald (1929-1931) se révèle incapable de faire face à la crise. En 1931, un gouvernement national, d’abord dirigé par MacDonald puis par Baldwin (1935-1937), regroupant principalement des conservateurs, est constitué. Le Parti travailliste dénonce MacDonald comme traître, mais le gouvernement national obtient une écrasante majorité aux élections générales de 1931. L’étalon-or est supprimé, les barrières douanières sont restaurées et la construction des logements reçoit des subventions. Entre 1933 et 1937, l’économie se relève avec l’industrie de l’automobile, le bâtiment et l’électricité. Le taux de chômage reste cependant élevé, en particulier au pays de Galles, en Écosse et dans le nord de l’Angleterre. La vie britannique est peu affectée par les idéologies communiste et fasciste, même si un mouvement fasciste, fondé par Oswald Mosley, prend une certaine importance. Malgré tout, le roi George V maintient le prestige de la monarchie. Lorsque son fils, Édouard VIII, insiste pour épouser une citoyenne américaine divorcée deux fois, son abdication (1936) s’avère la seule solution acceptable. Le règne de George VI, frère d’Édouard, restaure l’image traditionnelle de la royauté.

5.5 La monarchie parlementaire sous George VI de Windsor (1936-1952)
5.5.1 La politique d’« apaisement « du conservateur Neville Chamberlain (1937-1940)

En 1936, le Royaume-Uni décide (comme la France) de mettre en place un programme de réarmement. En 1938, l’Anschluss, le rattachement de l’Autriche à l’Allemagne, déclenche une vague de protestations dans l’opinion publique, sans qu’il y ait pour autant de riposte politique. Dans leurs efforts pour maintenir la paix à tout prix (voir apaisement), le Premier ministre Neville Chamberlain et le président du Conseil français, Édouard Daladier, entérinent avec les accords de Munich l’annexion par Hitler des Sudètes de Tchécoslovaquie. Mais loin de sauver la paix, ces accords ne parviennent qu’à convaincre un peu plus Hitler de la faiblesse des démocraties. Le Royaume-Uni ne se décide à apporter son soutien militaire à la Pologne et à la Roumanie qu’après l’annexion de Prague par l’Allemagne (mars 1939). Dès lors néanmoins, il joue un rôle clé dans la lutte contre les pays totalitaires.

5.5.2 Winston Churchill face à la Seconde Guerre mondiale (1940-1945)

La Seconde Guerre mondiale commence par une série de graves revers. Le Royaume-Uni ne doit son salut qu’à l’efficacité de son fossé antichar, la Manche, et à la qualité de son aviation, au cours de la bataille d’Angleterre. À partir du mois de juillet 1940, elle résiste seule à l’Allemagne nazie. L’organisateur de la victoire est Winston Churchill, le remplaçant de Neville Chamberlain à la tête du cabinet de guerre (1940-1945). Dès l’automne 1940, les États-Unis aident économiquement et militairement le Royaume-Uni avec la loi prêt-bail, qui permet d’acheter du matériel de guerre alors que les caisses du Trésor sont vides.

L’alliance avec l’URSS en juin 1941, puis avec les États-Unis après Pearl Harbor en décembre 1941, permet au Royaume-Uni de mener la guerre à un pays de 58 millions d’habitants, alors que lui-même n’en compte que 48 millions. En 1942, la victoire de Montgomery à El-Alamein marque, à l’Ouest, le tournant de la guerre, comme Stalingrad le fait à l’Est ; à partir de ce moment, les Alliés prennent le dessus sur l’Allemagne, qui capitule le 8 mai 1945.

5.5.3 L’immédiat après-guerre : les travaillistes de Clement Attlee (1945-1951)

À la surprise générale, les élections de 1945 donnent une écrasante majorité au Parti travailliste au Parlement. Au cours des années qui suivent, les travaillistes, dirigés par Clement Attlee, cherchent à promouvoir l’égalité sociale et à reconstruire un pays ruiné : pour la première fois depuis le xviiie siècle, le Royaume-Uni est une nation débitrice.

Le National Insurance Act de 1946 (assurances nationales) et le National Health Service (service national de santé) sont adoptés en 1948. Mesures très populaires s’inspirant des rapports d’après-guerre du libéral William Beveridge, elles établissent ce qu’on appelle l’État-providence (Welfare State). Les nationalisations de la Banque d’Angleterre, de l’industrie du charbon, du gaz et de l’électricité, des chemins de fer et de la plupart des lignes aériennes, du transport routier et des industries sidérurgiques sont effectuées sans opposition. En 1948, les travaillistes éliminent les dernières traces du vote plural (c’est-à-dire le vote dans plus d’une circonscription électorale) et réduisent la durée du veto de la Chambre des lords à une année.

Parallèlement, le Royaume-Uni, avec l’aide du plan Marshall mis en place par les États-Unis (1948-1952), se relève et s’unit à d’autres puissances européennes et aux États-Unis dans l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) en 1949, afin de faire face à la menace soviétique. En 1948, le Royaume-Uni quitte la Palestine sous mandat, permettant la fondation d’Israël. Le gouvernement travailliste, conscient que les fonds publics sont au plus bas et qu’il est incapable de contenir les nombreuses demandes d’autodétermination, accorde l’indépendance à l’Inde et au Pakistan, en 1947, et à la Birmanie et à Ceylan en 1948.

5.6 Le Royaume-Uni d’aujourd’hui : le règne d’Élisabeth II de Windsor (depuis 1952)
5.6.1 Les conservateurs au pouvoir (1951-1964)
5.6.1.1 Winston Churchill (1951-1955)

Une fois son programme social mis en place, le gouvernement travailliste perd les élections de 1951. Winston Churchill revient au pouvoir. À l’exception de la dénationalisation de l’industrie du fer et de l’acier, les conservateurs ne font aucune tentative pour inverser la législation ou le programme d’État-providence mis en place par les travaillistes. Avec la réduction des impôts sur le revenu et le démantèlement de la législation de guerre et d’après-guerre, l’immobilier prend son essor, et le commerce international entre dans une période florissante. En juin 1952, le couronnement d’Élisabeth II semble ouvrir une période de prospérité et de paix.

5.6.1.2 Anthony Eden (1955-1957)

Le successeur et gendre de Churchill, le ministre des Affaires étrangères Anthony Eden, conduit son parti à une deuxième victoire aux élections de 1955. Toutefois, son mandat en tant que Premier ministre prend brusquement fin avec la crise qui suit la nationalisation du canal de Suez par le gouvernement nationaliste de Nasser en 1956. Les troupes franco-britanniques occupent le canal de Suez et l’Égypte, tandis que l’armée israélienne s’empare du Sinaï. Sous la pression de l’URSS, qui menace d’intervenir directement, et les pressions diplomatiques des États-Unis, refusant de cautionner une aventure coloniale, Français et Britanniques quittent l’Égypte. Cet épisode sanctionne la perte de l’influence britannique au Moyen-Orient.

5.6.1.3 Harold Macmillan et Alec Douglas-Home (1957-1964)

Anthony Eden démissionne et son successeur, Harold Macmillan (1957-1963), comprend la leçon : il réussit à se faire élire trois fois de suite et peut mettre en œuvre la politique de décolonisation qui s’avère nécessaire. Contrairement à celle de la France, la décolonisation britannique se déroule, à quelques exceptions près, sans conflits importants. Le Soudan a déjà obtenu son indépendance en 1956. Au cours des sept années suivantes, le Ghana, le Nigeria, la Somalie, la Tanzanie, la Sierra Leone, l’Ouganda et le Kenya suivent l’exemple. La plupart de ces États restent membres du Commonwealth des Nations, à l’exception de l’Union d’Afrique du Sud, dominée par la minorité blanche, qui quitte le Commonwealth en 1961 et s’autoproclame république. L’indépendance est également accordée à la Malaisie, à Chypre et à la Jamaïque. En 1961, Macmillan dépose la demande britannique d’adhésion auprès de la Communauté économique européenne (CEE). De nombreux Britanniques ne se sentent pas prêts et, de surcroît, la candidature est contrée par le veto du président français Charles de Gaulle.

En 1963, Macmillan est remplacé par un Premier ministre conservateur, Alec Douglas-Home, qui est battu de justesse aux élections de 1964 par le travailliste Harold Wilson.

5.6.2 L’alternance politique (1964-1979)
5.6.2.1 Le travailliste Harold Wilson (1964-1970)

Le gouvernement travailliste de Harold Wilson cherche à la fois à étendre les chances d’accès à l’enseignement supérieur et à mettre fin à un système d’enseignement secondaire qui sépare le monde académique des autres étudiants. Pendant les dernières années de la décennie 1960, les lois sur le divorce se simplifient, l’avortement est légalisé, les discriminations pesant sur les pratiques homosexuelles se relâchent, la peine de mort est abolie, les femmes obtiennent l’égalité des salaires à travail égal, et l’âge du droit de vote passe de vingt et un à dix-huit ans.

5.6.2.2 Le conservateur Edward Heath (1970-1974)

En 1970, les conservateurs reviennent au pouvoir avec Edward Heath. Au cours des années 1970, le Royaume-Uni connaît un vaste mouvement de contestation sociale qui s’exprime dans la mode, la musique et les spectacles populaires. Ce phénomène fait de Londres une capitale mondiale de la musique, du théâtre et de la mode. Le Royaume-Uni rejoint la Communauté économique européenne (CEE ; voir Union européenne) en 1973 et, deux ans plus tard, le premier référendum national de l’histoire britannique approuve largement cette initiative. Les tentatives de Heath, en 1972 et en 1973, pour geler salaires et prix rencontrent l’opposition des mineurs. Heath perd de peu les élections générales de février 1974.

5.6.2.3 Les travaillistes Harold Wilson et James Callaghan (1974-1979)

Harold Wilson peut former un gouvernement travailliste qui, sous sa direction et, après 1976, celle de James Callaghan, gouverne de 1974 à 1979. Pendant les années 1970, le gouvernement doit également faire face aux difficultés en Irlande et en Écosse. Le mouvement pour les droits civils de la minorité catholique d’Irlande du Nord, en butte à une réaction très violente des protestants du pays, oblige le gouvernement britannique à envoyer des troupes pour maintenir l’ordre ; en 1972, il interdit le Parlement autonome d’Irlande du Nord. Les violences des organisations paramilitaires protestantes ont pour effet de jeter la population catholique dans le giron de l’Armée républicaine irlandaise (IRA) qui, en 1967, n’était plus qu’une organisation d’anciens combattants. Bénéficiant d’un sang neuf, l’IRA peut mener une guérilla urbaine et des campagnes d’attentats terroristes, qui ensanglantent l’Irlande et la Grande-Bretagne ; en 1979, lord Mountbatten est assassiné (et, en 1984, Margaret Thatcher échappe de peu à un attentat revendiqué par l’IRA). L’objectif de l’organisation — la réunification de l’Irlande du Nord avec le Sud — renforce les extrémistes protestants ; la majorité reste attachée à l’appartenance au Royaume-Uni. Les mesures britanniques restreignent progressivement, sans y mettre un terme définitif, la vague d’attentats à la bombe et d’assassinats en Irlande du Nord et en Angleterre. En Écosse, on assiste à un réveil inattendu du nationalisme écossais. Le Parti national écossais fait d’excellents scores aux élections de 1974, et le gouvernement Callaghan (1976-1979) tente d’établir un Parlement semi-autonome à Édimbourg. Mais une majorité d’Écossais repousse ce plan au référendum de 1979.

Le gouvernement travailliste en place de 1974 à 1979 met fin au gel des salaires et des prix, mais le pays connaît un taux d’inflation de 25 % en 1975. Vers la fin des années 1970, la politique britannique se polarise entre le Parti travailliste, souhaitant un accroissement du rôle de l’État afin de créer une plus grande égalité sociale, et les conservateurs. Un hiver d’agitation sociale provoque, en mars 1979, la chute de James Callaghan.

5.6.3 L’ère conservatrice (1979-1997)
5.6.3.1 La décennie Margaret Thatcher (1979-1990)

Les élections d’avril 1979 portent au pouvoir Margaret Thatcher, première femme à accéder au poste de Premier ministre dans l’histoire britannique et européenne. Elle conserve ses fonctions durant onze ans.

Les premières années de gouvernement de Margaret Thatcher sont difficiles. Influencée par les monétaristes ultra-libéraux de l’école de Chicago, elle rompt avec les traditions de l’État-providence (Welfare State). Elle cherche à résorber l’inflation par une politique de taux d’intérêt élevés et de restrictions des dépenses publiques. Elle accepte que la restructuration de l’appareil industriel se fasse au prix d’un chômage énorme, limite au minimum les aides sociales et s’attaque à la toute-puissance des syndicats. En 1981 et 1982, cette politique rencontre quelques succès, mais aux dépens du monde du travail : les taux de chômage atteignent leurs niveaux les plus élevés depuis les années 1930. Le gouvernement, ébranlé par la montée du chômage, sait exploiter le conflit des Malouines. La « Dame de fer « envoie un corps expéditionnaire qui reprend les îles en juin, assurant une confortable victoire aux conservateurs (42 %) aux élections de juin 1983. En juin 1987, un phénomène similaire a lieu : ces victoires ne sont pas seulement la conséquence de la guerre des Malouines, mais également celle de la division de l’opposition. En 1980, un groupe de travaillistes, dirigé par Roy Jenkins et David Owen, démissionne du parti, et forme le Parti social-démocrate en 1981. Le nouveau parti, rejoint par les libéraux, recueille 25 et 23 % des suffrages en 1983 et 1987, les travaillistes n’en recueillant que 28 et 31 %.

Servie par la « rente « du pétrole de la mer du Nord, Margaret Thatcher poursuit son programme : les privatisations d’entreprises assurent des rentrées monétaires substantielles à l’État, qui abaisse l’impôt sur le revenu, désormais limité à deux taux : 25 % et 40 %. Le Royaume-Uni devient attractif pour les investisseurs, les lois antisyndicales de 1984 affaiblissent les Trade Unions désormais sur la défensive, la clause d’embauche des syndicats ayant été supprimée. Cette politique agressive a plusieurs inconvénients : d’une part, la persistance d’un chômage structurel massif (de 7 à 14 % de la population active suivant les années) ; d’autre part, la concentration de la richesse dans le sud de l’Angleterre au détriment du nord (sans compter l’aggravation des inégalités sociales).

C’est une réforme fiscale qui fait chuter le gouvernement Thatcher : la tentative d’instaurer un impôt local, la poll tax, touchant toutes les personnes indépendamment de leurs revenus réels et donc par essence inégalitaire, déclenche la crise. En butte aux attaques d’une majorité au sein de son propre parti, inquiète de l’aggravation de l’inflation et de l’impopularité de la poll tax, Margaret Thatcher doit démissionner en novembre 1990.

5.6.3.2 Le gouvernement John Major (1990-1997)

Le nouveau Premier ministre, John Major, poursuit une politique similaire. Les troupes britanniques participent à la guerre du Golfe en 1991. Mais l’année suivante, la reprise de la crise amène John Major à faire sortir la livre du Système monétaire européen (SME), une politique exactement inverse de celle de Margaret Thatcher ; malgré la récession économique, le Parti conservateur remporte à une courte majorité les élections générales d’avril 1992. Le leader du Parti travailliste, Neil Kinnock, démissionne après les élections, remplacé par John Smith. À la suite des élections, le gouvernement Major fait face à une crise financière croissante, aggravée par l’affaiblissement de la livre sur le marché des changes, par un taux élevé de l’inflation et du chômage, et par une récession s’étendant à tout le pays. John Major devient le plus impopulaire de tous les Premiers ministres britanniques. En 1993, après les révélations sur les contacts établis à la demande du gouvernement Major avec le Sinn Féin, l’aile politique de l’IRA, le gouvernement évite de peu un scandale. John Major et le Premier ministre irlandais Albert Reynolds publient un communiqué demandant à l’IRA de cesser ses activités terroristes pendant trois mois, durée après laquelle le Sinn Féin pourra se joindre aux discussions sur l’avenir de l’Irlande du Nord.

En mars 1994, l’IRA reconnaît sa responsabilité dans deux attaques au mortier sur l’aéroport d’Heathrow, à Londres. Certains observateurs concluent que l’IRA a tenté d’obtenir une meilleure position dans ses négociations avec le gouvernement britannique. Le 31 août 1994, l’IRA annonce un cessez-le-feu sans conditions, promettant de suspendre ses opérations militaires pendant les négociations de paix. En octobre, les groupes paramilitaires loyalistes (protestants) annoncent à leur tour une trêve. Le cessez-le-feu de l’IRA et des loyalistes dure jusqu’au milieu de l’année 1995. En réponse à l’arrêt des campagnes d’attentats, les patrouilles militaires britanniques en Irlande du Nord sont réduites ; en mars 1995, les patrouilles de jour régulières sont définitivement arrêtées dans toute la province. Toutefois, la transformation des négociations en une table ronde sur l’avenir de l’Irlande du Nord, réunissant tous les belligérants, est entravée par les unionistes d’Irlande du Nord, hostiles à tout changement, et par le refus de l’IRA de remettre ses armes lourdes. Des discussions directes entre le gouvernement britannique et le Sinn Féin ont été entamées en décembre 1994, mais la reprise des attentats par l’IRA en 1996 enraye le processus de paix.

En mai 1994, le successeur de John Smith à la tête du Parti travailliste, Tony Blair, achève la transformation du parti en une organisation de centre gauche. En avril 1995, les travaillistes abandonnent leur programme de nationalisations et prennent leurs distances à l’égard des syndicats.

5.6.4 Le premier mandat du travailliste Tony Blair (1997-2001)

Cette réforme du Parti travailliste, qui a adopté le nom de New Labour, permet à Tony Blair de remporter une large victoire lors des élections de mai 1997, mettant ainsi fin à dix-huit années de conservatisme. Avec 44,5 % des suffrages, les travaillistes acquièrent la majorité absolue au sein de la Chambre des communes, soit 419 sièges ; les conservateurs remportent 165 sièges, les libéraux-démocrates 46, et les autres partis 29. Se démarquant de ses prédécesseurs, Tony Blair adopte une ligne plus favorable à la construction européenne : il annonce le transfert du contrôle des taux d’intérêt à un comité de politique monétaire indépendant (à l’instar des mesures prises dans les autres pays européens en vue de l’Union économique et monétaire) et ratifie le protocole social annexé au traité de Maastricht. Parallèlement, le Royaume-Uni se désengage des derniers vestiges de son empire, rétrocédant notamment Hong Kong à la Chine, le 1er juillet 1997.

5.6.4.1 La réforme de l’État et de la monarchie

Très populaire, symbolisant la « jeune et nouvelle Angleterre «, Tony Blair s’engage dans la réforme du Welfare State, autrement dit l’État-providence. S’inspirant de la politique menée par Bill Clinton aux États-Unis, il lance un plan important visant à privilégier l’emploi par rapport à l’aide sociale, en organisant une refonte des pensions et du mode de gestion des aides et en remettant en cause l’allocation chômage sans contrepartie. Il s’agit de mettre en place le welfare to work (« retour au travail «) des chômeurs. Dans le même temps, Blair engage également une réforme de l’éducation, avec pour objectifs principaux d’améliorer la qualité du système scolaire et de lutter contre le chômage des jeunes. Une réforme de la sécurité sociale et de la justice ainsi que la modernisation du système fiscal sont également à l’étude.

Au lendemain de la mort de la princesse Diana (31 août 1997), Tony Blair prend, par ailleurs, une part active aux côtés du prince Charles dans la tentative de modernisation de la monarchie britannique. Revenant sur la politique centralisatrice des conservateurs, Blair annonce l’élection d’un maire pour Londres, et organise deux référendums victorieux sur l’autonomie de l’Écosse et du pays de Galles.

5.6.4.2 La question de l’Irlande du Nord

S’engageant personnellement sur le dossier de l’Ulster, Tony Blair réussit à obtenir, avec son homologue irlandais Bertie Ahern, un accord de paix historique le 10 avril 1998, également signé par les républicains et les unionistes. Un an après cependant, l’accord de Stormont semble dans l’impasse : les groupuscules terroristes, opposés au processus de paix, ont multiplié les attentats, et les divergences entre le Premier ministre d’Irlande du Nord, David Trimble (protestant modéré élu en juillet 1998), et le Sinn Féin ont bloqué les négociations. Celles-ci reprennent à la mi-avril 1999, mais continuent de buter sur la question du désarmement des milices, préalable jugé nécessaire par David Trimble avant la formation d’un exécutif.

5.6.4.3 La politique extérieure

En matière internationale, le Royaume-Uni renoue, en septembre 1998, ses relations diplomatiques avec l’Iran (désolidarisé de la fatwa prononcée contre Salman Rushdie). Il lance, avec les États-Unis, l’opération « Renard du désert « contre l’Irak qui a mis des obstacles au contrôle du désarmement par l’Unscom. En mars 1999, le pays s’engage en outre, aux côtés de treize des dix-neuf membres de l’OTAN, dans l’opération militaire « Force alliée « contre la Yougoslavie. Tony Blair prend dans le conflit du Kosovo une position particulièrement ferme. Le Royaume-Uni contribue, avec 13 000 hommes, au plus fort contingent armé de la KFOR et se voit attribué un des cinq secteurs mis en place au Kosovo.

L’affaire Pinochet, quant à elle, détériore gravement les relations avec le Chili. La police britannique arrête le général Pinochet le 16 octobre 1998, à la suite d’un mandat d’Interpol présenté par le juge espagnol Baltasar Garzón. Ce dernier réclame l’extradition vers l’Espagne de l’ancien chef de la junte militaire, afin de le juger pour des délits de « génocides «, « tortures « et « disparitions « commis pendant la dictature. Malgré les protestations des autorités chiliennes, le Royaume-Uni décide de poursuivre la procédure. Un premier jugement des 5 juges-lords, déniant l’immunité au général Pinochet (par trois voix contre deux, le 25 novembre 1998), est cassé par la Chambre des lords (11 décembre) en raison de l’appartenance de l’un des juges-lords à Amnesty International. Finalement, à l’issue d’une nouvelle procédure d’examen, 6 des 7 juges-lords lui refusent l’immunité pour la période 1988-1990 (24 mars 1999), ne retenant cependant que 3 des 32 chefs d’inculpation. Le ministre britannique de l’Intérieur Jack Straw autorise, le 15 avril, la poursuite de la procédure d’extradition.

Les élections européennes de juin 1999 sont marquées par un taux d’abstention record (77 %) et par la défaite du Parti travailliste au pouvoir, qui ne recueille que 28 % des suffrages (soit une représentation de 29 sièges au Parlement européen), tandis que les conservateurs obtiennent 37,5 % des voix (36 sièges) et les libéraux-démocrates 13 % (10 sièges).

Les élections locales de mai 2000 sont également un échec pour le gouvernement qui voit le candidat travailliste devancé par le dissident Ken Livingstone, dit « Ken le Rouge «, à l’élection de la mairie de Londres. Sur l’initiative des travaillistes, cette élection s’est tenue pour la première fois au suffrage universel.

5.6.4.4 La question de l’immigration

Devant l’arrivée massive de clandestins demandeurs d’asile, le durcissement du système d’accueil britannique est décidé par le gouvernement de Tony Blair : celui-ci est en effet considéré comme offrant les meilleures conditions aux réfugiés. Les immigrés clandestins sont en majorité kurdes, afghans ou iraniens mais viennent également d’Irak, du Kosovo, de Tchétchénie, de Somalie, du Rwanda ou d’Angola. Prêts à tout pour gagner la Grande-Bretagne, ils sont victimes de l’exigence financière des réseaux de passeurs qui les font voyager dans des conditions inhumaines. Ainsi, en juin 2000, les douaniers de Douvres trouvent 58 ressortissants chinois morts d’asphyxie dans un camion venant de Belgique.

En février 2001, la France et le Royaume-Uni conviennent notamment de renforcer leur coopération policière sur les liaisons trans-Manche. Tony Blair s’associe à Giuliano Amato, le président du Conseil italien, pour lutter contre le trafic de réfugiés passant par la Bosnie. Quant au ministre de l’Intérieur, Jack Straw, il multiplie les initiatives pour changer le système européen de demande d’asile. Il veut établir des listes de pays, classés selon leur respect des droits de l’homme, afin que ne soient pas acceptés les réfugiés ressortissants de pays jugés sûrs.

5.6.4.5 La crise du secteur agricole

La vie politique et économique des années 2000 et 2001 est surtout marquée par les difficultés du secteur agricole. La maladie de Creutzfeld-Jakob, dont le premier cas est recensé en 1985, fait en quinze ans près de 80 victimes humaines. Une commission d’enquête publique ordonnée par Tony Blair dénonce en 2000 l’irresponsabilité de hauts fonctionnaires dans cette affaire. L’embargo français sur la viande britannique prend l’allure d’une « guerre du bœuf « après que la France, présidente de l’Union européenne jusqu’au 31 décembre 2000, décide de maintenir l’embargo alors que la Commission préconise sa levée.

En février 2001, les ovins britanniques sont touchés par une épizootie de fièvre aphteuse. La Commission européenne interdit toutes les importations d’animaux vivants, de viande et de produits laitiers venant de Grande-Bretagne. Pour enrayer l’épidémie, plus d’un million d’animaux sont abattus en Grande-Bretagne.

5.6.5 Le deuxième mandat de Tony Blair (2001-2005)

Des élections législatives anticipées se tiennent en juin 2001. Comme en 1997, le Parti travailliste remporte une victoire écrasante. Pour la première fois dans l’histoire du pays, il obtient ainsi la majorité absolue deux fois de suite. Néanmoins, forte de 37 %, l’abstention atteint son taux le plus élevé depuis 1918. Les travaillistes remportent 413 sièges (- 5), les conservateurs 166 (+ 1) et les libéraux-démocrates 52 (+ 6). Au lendemain des résultats, le chef de file du Parti conservateur, William Hague, présente sa démission.

Le Premier ministre, Tony Blair, est reconduit dans ses fonctions, à la tête d’un gouvernement qu’il remanie profondément — l’ancien ministre de l’Intérieur Jack Straw remplace notamment Robin Cook comme secrétaire au Foreign Office. L’amélioration des services publics et l’entrée du Royaume-Uni dans la zone euro apparaissent comme les principaux enjeux de ce nouveau mandat. Le gouvernement poursuit ainsi son augmentation massive des budgets de la santé (+ 10 % par an dès 1999), de l’éducation, des transports et de la justice. Il remporte également une véritable victoire contre le chômage, ramené de 10 % dans les années 1990 sous le gouvernement conservateur à moins de 5 % en 2005.

Tony Blair continue par ailleurs de mener une politique extérieure particulièrement active dans le sillage de la riposte lancée par les États-Unis aux attentats qui les ont touchés le 11 septembre 2001. Le Royaume-Uni assure notamment le commandement de la Force internationale d’assistance à la sécurité en Afghanistan (ISAF), mandatée par le Conseil de sécurité de l’ONU, déployée à partir du mois de janvier 2002, et participe à l’offensive contre l’Irak engagée par les États-Unis en mars 2003. En juin 2004, l’élection du Parlement européen, où le Royaume-Uni dispose de 78 sièges, est marquée par le score du Parti de l’indépendance (United Kingdom Independance Party, UKIP) qui arrive en troisième position (16,12 % des suffrages, 12 sièges, contre 3 en 1999) en prônant le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne. Le Parti travailliste (22,61 % des suffrages, 19 sièges) est devancé par le Parti conservateur (26,73 %, 27 sièges).

5.6.6 Le troisième mandat de Tony Blair (2005-2007)

À l’issue des élections législatives de mai 2005, le Parti travailliste obtient une nouvelle victoire. D’une ampleur un peu moindre que les précédentes (35,2 % des voix et 356 sièges contre 197 pour les conservateurs), elle conduit Tony Blair à être le premier travailliste à exercer trois mandats consécutifs de Premier ministre du Royaume-Uni. Gordon Brown (Finances), Jack Straw (Affaires étrangères) et Charles Clarke (Intérieur) sont reconduits dans leurs fonctions. Au plan intérieur, l’amélioration des services publics reste la priorité du gouvernement. Le 7 juillet, le lendemain du jour où Londres a été choisie pour organiser les jeux Olympiques de 2012, et alors que le sommet du G8 s’ouvre en Écosse, la capitale britannique est le théâtre de quatre attentats terroristes qui frappent le métro et un autobus, revendiqués par un groupe islamiste. Rapidement, la popularité de Tony Blair est affectée par l’opération menée en Irak, qui lui valent de nombreuses critiques. En juin 2007, il se résout à quitter la présidence du Parti travailliste et ses fonctions de Premier ministre ; il cède la place à Gordon Brown.

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« l'influence de Scribe.Les oeuvres d'Ibsen avaient commencé, après Brand, à se répandre hors de Norvège, d'abord en Danemark, puis enSuède, en Finlande et en Allemagne.

Ses pièces antérieures eurent des éditions nouvelles chez Hegel, àCopenhague.

Les traductions commencèrent.

Tout cela l'occupa.

Et il devenait un personnage.

Il fut invité à uncongrès linguistique à Stockholm, puis délégué à l'inauguration du canal de Suez, et s'embarqua à Marseille aprèsavoir passé quelques jours à Paris, qu'il traversa de nouveau au retour : il ne connaissait pas la France et n'y estpas revenu.Et comme les éditions nouvelles et les traductions lui faisaient revoir toute son oeuvre passée, il réalisa enfin unvieux projet, et publia en un petit volume un choix de ses poèmes (187o).

C'est un recueil assez mince, maisextrêmement varié, où la grande envolée lyrique est rare et plutôt courte, mais où l'on trouve de l'humour, dusentiment, de l'ironie fort caustique, et de la gravité.

Peu d'images.

Il avait montré dans La Comédie de l'Amour qu'ilpouvait les multiplier jusqu'à l'abus, mais ses meilleurs poèmes sont le développement d'une seule image.

On peutciter parmi ses plus beaux : « Terje Vigen », long poème narratif d'une émotion discrète, « Sur les hauts plateaux »,poème sarcastique sur lequel les interprètes se cassent la tête, et « le Mineur », poème philosophique où, toutjeune, il a tracé le programme de sa vie.Enfin en 1873, après une interruption de quatre ans, il a publié un nouveau volume de théâtre, intitulé Empereur etGaliléen, et qui comprenait deux pièces, de cinq actes chacune : L'Apostasie de César et l'Empereur Julien.

On serappelle qu'il avait conçu l'idée de traiter l'histoire de Julien l'Apostat à Genzano, en 1864, au moment même où lepersonnage de Brand était en germe dans son esprit, et que, rentré à Rome, il avait cru un instant qu'il pourraitmettre en œuvre les deux sujets à la fois.

Mais il est clair que Julien exigeait une étude historique préalable.

Il lacommença aussitôt, puis fut absorbé entièrement par Brand, la reprit en 1866, jusqu'au moment où Peer Gynts'imposa de même, mais il y revenait toujours, et le plan mûrissait.

Sa source tout à fait principale était AmmienMarcellin, auquel il ajoutait divers historiens allemands, qui, dit-il, ne lui ont pas été très utiles.

C'est presqueuniquement avec Ammien qu'il a construit sa première partie.

Pour la seconde, i y a adjoint trois chapitres del'ouvrage d'Albert de Broglie : l'Eglise et l'Empire romain au ive siècle, auquel il a fait des emprunts importants.

Et il aécrit un drame philosophique sur la fin d'un monde.L'idée en est essentiellement celle-ci : un monde qui disparaît, cela veut dire qu'une certaine conception de la vie,un certain idéal, sont devenus périmés et s'effacent devant une conception nouvelle.

Si ce nouveau a réellementforce de vie, toute lutte est vaine, et Julien, en se faisant le restaurateur de l'hellénisme, ne pourra que donner auchristianisme l'occasion de manifester la force que vraiment il possède, et que ses sectes multiples cachaient.

Maisla conception nouvelle ne sera pas définitive et parfaite, pas plus que ne l'a été l'ancienne.

On peut imaginer qu'un «troisième empire » viendra, qui conciliera la conception ancienne et la nouvelle.C'est là une doctrine qui désavoue nettement le christianisme, en même temps qu'elle est fort déférente à sonégard.

Brand l'exprimait déjà.

Elle ne s'applique d'ailleurs pas spécialement au christianisme, mais bien à toutecroyance qui devient dominante, et c'était chez Ibsen une idée fondamentale que toute vérité humaine n'a qu'untemps.

On ne saurait douter qu'il a exprimé là sa propre pensée.

Mais il l'a exprimée, naturellement, sous le couvertd'un personnage.Et c'est pourquoi il a fait jouer auprès de Julien un rôle très important au thaumaturge Maximos, dont AmmienMarcellin ne parle pas, et que l'on connaît mal, mais que Julien tenait en très haute estime.

C'est lui qui, dans ledrame, annonce le troisième empire », et il considère son ami comme une victime expiatoire destinée à promouvoirmalgré lui le christianisme, stade nécessaire vers l'ère mystérieuse qu'il pressent.Il n'intervient pas auprès de Julien par conseils directs, niais seulement par suggestions, estimant que la volonté doitêtre laissée libre.

Mais qu'est-ce à dire ? « Vouloir, c'est devoir vouloir ».

Ainsi sont posées dans ce double dramebien des questions métaphysiques et autres, — posées, sans que l'auteur, la plupart du temps, essaye lemoindrement de les résoudre.

Il aime se placer et placer le lecteur en face du mystère.

Il se contente de choisiradmirablement la place d'où on le contemple le mieux.Empereur a Galiléen est une oeuvre dramatique en même temps que philosophique, et, ainsi que dans tous sesdrames historiques, Ibsen s'est efforcé non pas tant de respecter la matérialité des faits que de reproduire la «couleur » du temps.

A cet égard, parmi les très nombreuses oeuvres, romans et pièces, où l'on a essayé dereconstituer l'époque de Julien l'Apostat, je ne crois pas qu'il ait été dépassé.

Ensuite, et surtout, il a voulu fairerevivre les figures historiques dans la vérité de leur caractère.

Mais là, il y a une part assez forte d'interprétationarbitraire, et Julien, malgré la documentation assez abondante qui existe sur lui, n'est pas précisément de ceux surqui les historiens sont d'accord.

Ibsen l'a fait sincère, mais extrêmement vaniteux.Cette vanité se montre dès la première scène où il paraît, au commencement de l'Apostasie de César.

Elle devientcomique et vraiment caricaturale dans la seconde partie, l'Empereur Julien.

Ces deux parties sont d'ailleursextrêmement différentes encore à d'autres égards.

Tandis que la première, par exemple, n'a qu'un seul décor pourchaque acte, le décor change, au contraire, constamment dans la seconde, et cette différence évidente n'estqu'une manifestation d'un contraste plus profond : la première partie est d'une structure simple, elle a une belle ligneet l'ensemble se fixe dans la mémoire.

La seconde, au contraire, bourrée d'anecdotes diverses sur la persécution etla campagne de Perse, est plutôt confuse, et l'ordre dans lequel les scènes se suivent n'apparaît pas nécessaire.Cela n'empêche pas que quelques-unes des plus belles scènes se trouvent dans cette seconde partie.Depuis près de dix ans qu'Ibsen avait quitté la Norvège, il publiait pour la troisième fois une oeuvre de formedramatique destinée à la lecture et non à la scène.

L' Union des Jeunes était la seule pièce qu'il eût donnée authéâtre.

Pourtant, ses qualités scéniques étaient si grandes que l'on finit par jouer aussi Brand et Peer Gynt, quirestèrent au répertoire.

Empereur et Galiléen, par contre, n'a jamais été joué intégralement.

Mais les deux partiessont nettement distinctes, chacune forme un tout, et si la confusion de la seconde partie, d'ailleurs trop longue, etqu'il faudrait couper, la rend difficile à représenter, la première, au contraire, convient merveilleusement à la scène.Elle a été enfin jouée à Oslo en 1903.De nouveau, il faut attendre quatre ans avant qu'Ibsen public une nouvelle pièce.

Sans doute, après le grand effort. »

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